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COMMÉRAGES, COMMENT GÉRER LES RUMEURS EN ENTREPRISE ?

Les commérages en entreprise sont monnaie courante. Bruits de couloir, bribes de conversations entendues à la cantine… Pourquoi l’entreprise est-elle un terreau si fertile aux rumeurs ? Eric Sotto, enseignant-chercheur en management et communication, spécialiste de la question, nous éclaire sur ce sujet.

POURQUOI L’ÊTRE HUMAIN ADORE LES COMMÉRAGES ?

Il existe plusieurs raisons pour lesquelles les êtres humains peuvent être attirés par les commérages.

Le besoin de se sentir connecté

Les commérages peuvent créer un sentiment de communauté ou d'appartenance. Les gens peuvent se sentir inclus dans un groupe lorsqu'ils discutent des événements de la vie de quelqu'un d'autre.

La recherche de stimulation

Les commérages peuvent être stimulants et intéressants pour certains. Les gens peuvent aimer entendre des histoires et des anecdotes sur la vie des autres.

Le besoin de se sentir supérieur

Les commérages peuvent parfois être utilisés pour dénigrer ou critiquer quelqu'un d'autre, ce qui peut donner aux gens un sentiment de supériorité.

La satisfaction de la curiosité

Les gens peuvent être curieux de savoir ce qui se passe dans la vie des autres, même s'il ne s'agit que de rumeurs ou de commérages.

POURQUOI CROYONS-NOUS AUX RUMEURS ?

L’art de cancaner est maîtrisé tant par les hommes (hé oui !) que par les femmes. Mais les rumeurs existent surtout parce que certains sont là pour les croire.

Dans son livre « Quand la rumeur fait parler d’elle », Eric Sotto explique : « Les individus affectionnent les détails croustillants : “Tu ne vas pas me croire !” ou les révélations sensationnelles : “Tu ne connais pas la dernière ?” » En effet, qui sait dire “non” au collègue qui vient vers vous avec le dernier scoop du quatrième étage ?

Nous avons tous une curiosité naturelle pour les informations sensibles, négatives ou sensationnelles. Et lorsqu’une rumeur est crédible – notamment lorsqu’elle émane de personnes que nous estimons « légitimes » (directeur, représentant du personnel, collègue de confiance…) – elle ne tarde pas à circuler. Les ragots les plus rapidement partagés sont ceux visant une personne clairement identifiée, ou revêtant un caractère inattendu. En effet, qu’il s’agisse de se réjouir ou de médire, l’être humain s’intéresse instinctivement à la vie de ses pairs et de la communauté dans laquelle il évolue. Et pour celui qui détient les informations, partager une rumeur est aussi une façon de s’attirer de l’attention ou de la reconnaissance.

POURQUOI LES PROPAGEONS-NOUS ?

Eric Sotto nous explique que le fait de détenir une information importante avant les autres permet d’attirer l’attention, de connaître un court moment de gloire, d’avoir le pouvoir.

La présence de rumeurs sur les salariés est donc “normale” et courante. Mais quand les rumeurs se concentrent sur l’organisation elle-même - autour d’une réorganisation, d’un rachat, de licenciements ou autre - elles sont le signe de l’inquiétude des collaborateurs. En l’absence de source officielle, elles sont la seule alternative à l’inconnu et c’est alors au management de savoir rassurer ses équipes.

QUE FAIRE FACE AUX COMMÉRAGES ?

Vous êtes la cible d’une rumeur ? Le plus simple reste parfois l’indifférence. Les colporteurs et les bruits de couloir finiront par se taire pour se concentrer sur une nouvelle rumeur, plus fraîche et donc plus intéressante. Mais si la situation s’envenime, il est parfois nécessaire de faire un démenti public. Vous pouvez alors profiter d’une réunion d’équipe ou simplement envoyer un e-mail concis pour rétablir la vérité. Eric Sotto va jusqu’à suggérer de retourner la situation contre les colporteurs : « Le collaborateur avisé parvient à culpabiliser ceux qui véhiculent de tels propos, à insister sur leur crédulité, ignorance ou irresponsabilité : “Ce sont des ragots de bas étage” ».

Vous entendez une rumeur sur un collègue ?

Il est plus judicieux de garder l’information pour vous et ne pas prendre part aux commérages. Et si ce collègue est proche, pourquoi ne pas aller le voir directement et l’aider à la gérer ? Car attention, si une rumeur porte atteinte à la dignité d’une personne et impacte négativement son travail, celle-ci peut engager des poursuites judiciaires.

Vous entendez des rumeurs sur l’avenir de votre entreprise ?

Si les rumeurs concernant les salariés peuvent se contenter d’être croustillantes, celles concernant l’entreprise expriment souvent une inquiétude. Rachat, fusion, changement de direction, restructuration, réorganisation d’un service… Les rumeurs surviennent lorsque l’entreprise s’abstient de fournir des informations officielles. Ces « bruits de couloir » ne sont généralement que des fragments de vérité : la meilleure attitude à adopter est simplement de se renseigner auprès de sa hiérarchie, et de prendre du recul pour démêler le vrai des affabulations.

L'ASTUCE DE SOCRATE

En cas de doute, voici un dernier petit conseil pour trier les bonnes et les mauvaises rumeurs qu'on nous souffle à l'oreille. C'est le test des trois passoires :

1. l'information est-elle vraie ?

2. l'information est-elle positive / bonne ?

3. l'information est-elle utile ?

"Alors, conclut Socrate, si ce que tu as à me raconter n’est ni vrai, ni bien, ni utile, pourquoi vouloir me le dire ?" À méditer !