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Violence liée au genre en milieu scolaire (VGMS) - Agir

VIOLENCE LIÉE AU GENRE EN MILIEU SCOLAIRE (VGMS) - AGIR

Kakunta Kabika Mbuyu

BETUZ

(Syndicat des enseignant.es de l’enseignement primaire de Zambie)

La première fois que j’ai entendu parler de Violence liée au genre en milieu scolaire (VGMS), je me suis mis sur la défensive parce que je n’arrivais pas à croire que ce qu’on me racontait était vrai. À mon sens, on cherchait à prendre en faute nos enseignants.

Lorsque notre coordinatrice du comité des femmes a expliqué aux employés du Basic Education Teachers’ Union of Zambia (BETUZ) le principe de la VGMS et son incidence sur les performances des élèves à l’école, je lui ai fait remarquer que les enfants de nos écoles ne connaissaient rien à la notion de genre et que ce concept n’existait pas dans nos écoles en Zambie.

Ma position en tant que syndicaliste, c’était que la priorité était de protéger la dignité des enseignants membres de notre syndicat et que tout ce qui serait révélé et qui démontrerait que les enseignants ne se comportaient pas de manière professionnelle ne devait être aucunement toléré par le représentant des enseignants, à savoir leur syndicat.

Cependant, en écoutant la conviction de la coordinatrice du comité des femmes et son insistance à dire qu’il était essentiel que les établissements scolaires soient des lieux sûrs alors qu’il s’y passait beaucoup d’actes contraires à l’éthique professionnelle, j’ai décidé d’accorder le bénéfice du doute à cette question.

J’ai donc remarqué qu’il était nécessaire de comprendre ce concept de façon plus claire et que nous devions également veiller à ce que les intérêts de nos membres soient préservés.

Par ailleurs, j’ai aussi indiqué à la coordinatrice que nous avions besoin de données empiriques pour mettre en place une stratégie de mobilisation contre la VGMS. Mais au fond de moi, je me disais qu’on ne pouvait pas mordre la main qui nous nourrit et qu’il fallait gagner du temps. J’ai donc recommandé que soit menée une étude pour comprendre la notion de VGMS et savoir si elle existait dans nos écoles, afin de mieux savoir comment s’attaquer à cet éventuel phénomène.

Une enquête de base a donc été prévue et le syndicat a élaboré des procédures et des outils de recherche clairs. Nous nous sommes mis d’accord pour réaliser l’enquête dans les 10 provinces de la Zambie.

Il a été déterminé que les structures provinciales du syndicat constitueraient les équipes dirigeant la recherche pour collecter les données et un questionnaire a été mis au point comme principal outil de recueil de données. Trois questionnaires ont été élaborés : un pour les directeurs et directrices, un pour le personnel enseignant et un pour les élèves.

Lorsque les questionnaires nous ont été retournés pour analyses, les résultats nous ont choqués. L’étude faisait apparaître une prévalence de différentes formes de VGMS dans la plupart des établissements scolaires de Zambie. Il était très clair que la VGMS était un phénomène réel et que nos membres s’étaient rendus coupables de nombreux actes répréhensibles. Il était évident qu’ils commettaient des actes contraires à la conduite qu’on attendait des enseignants et qui pourraient déboucher sur leur licenciement. Cette étude montrait clairement que le métier d’enseignant était en danger et, qu’en tant que dirigeants d’un syndicat d’enseignants, nous devions prendre des mesures pour faire obstacle à la VGMS.

Cette étude de base montrait que la VGMS ne touchait pas seulement les élèves mais que certaines de nos membres enseignants en étaient également victimes. Certaines personnes ont indiqué ne plus vouloir enseigner à leur poste actuel parce que l’environnement de travail était devenu hostile.

Les principales formes de VGMS révélées par l’enquête étaient : des avances sexuelles des enseignants envers les élèves, des avances sexuelles entre membres du personnel enseignant et administratif, des tenues vestimentaires indécentes, du harcèlement, des propos injurieux de la part du personnel

enseignant ou administratif, pour n’en citer que quelques-unes. Ces révélations témoignaient clairement que la lutte contre la VGMS était une urgence pour moi et mon syndicat.

L’un des constats de cette étude qui m’a particulièrement touché était l’absence de structure de soutien fiable dans certains établissements scolaires pour les filles qui avaient leurs règles. Certaines filles manquaient l’école en période de menstrues de crainte de subir des quolibets des garçons si elles se tâchaient de sang faute de serviettes hygiéniques, que certaines écoles ne fournissaient pas en dépannage. Également important, l’étude de base du BETUZ indiquait clairement que si l’on n’empêche pas la VGMS, il sera difficile de dispenser un enseignement et un apprentissage de qualité. Elle montrait que la VGMS avait une incidence sur la performance du corps enseignant et affaiblissait aussi l’estime de soi des élèves. Les recommandations de cette étude comprenaient la création de départements fonctionnels d’orientation et d’accompagnement dans tous les établissements ainsi qu’une action de toutes les parties prenantes de l’éducation contre la VGMS.

C’est à ce moment que j’ai intégré la VGMS à mes activités syndicales et que je me suis intéressé davantage à ce combat. J’ai réalisé que nous avions tous la responsabilité de débarrasser nos établissements scolaires de la VGMS, pour ainsi en faire des lieux sûrs afin que chaque personne puisse bénéficier d’un enseignement et d’un apprentissage de qualité.