L'Oyapoc et l'Amazone : question brésilienne et française. Tome second

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DES

ETATS UNIS DU BRÉSIL BERNE

L'OYAPOC ET

L'AMAZONE

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LOYAPOC ET

L'AMAZONE QUESTION BRÉSILIENNE E T FRANÇAISE

PAR

JOAQUIM CAETANO D A SILVA M e m b r e honoraire de l'Institut Historique et Géographique d u Brésil M e m b r e d e la Société d e Géographie d e Paris

TOME

SECOND

TROISIÈME

ÉDITION

PARIS A. L A H U R E ,

IMPRIMEUR-ÉDITEUR

9, R U E

DE

FLEURUS,

1899

9



L'OYAPOC TROISIÈME

PARTIE

Argumentation Française.

SEIZIÈME

LECTURE

L'historique de la question de l'Oyapoc prouve donc : 1760. Que c'est avec toute justice que le Traité d'Utrecht a conservé au Brésil les deux bords de l ' A m a z o n e (Lectures 1, 2, 3, 15); 1761. Et que c'est hors de l ' A m a z o n e qu'il faut chercher la rivière stipulée pour limite dans l'article 8 du m ê m e traité(Lecture14). Nous avons vu : 1762. Que l'article 8 du Traité d'Utrecht est ainsi rédigé : « Sa Majesté Très-Chrétienne se desistera pour toûjours, c o m m e Elle se desiste dés à present par ce Traité , de tous droits & prétentions qu'Elle peut ou pourra prétendre sur la proprieté des terres, appellées du C a p - d u - N o r d , & situées entre la riviere des A m a z o n e s & celle de Japoc ou de Vincent Pinson. » (§ 859) : 1763. Que l'article 107 de l'Acte de V i e n n e a stipulé que « l'on procédera à l'amiable à la fixation définitive des limites des G u y a n e s portugaise et française, con­ formément au sens précis de l'article huitième du Traité d'Utrecht, » (§ 858) : T. II.

1


( 2 )

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16 L E C T U R E

§§ 1764-1770

1764. Que l'article 2 de la Convention de Paris a confirmé la stipulation de « fixer définitivement les limites des G u y a n e s Française et Portugaise, conformément au sens précis de l'article VIII du Traité d'Utrecht. » (§ 930) : 1765. Que la note française du 5 juillet 1841, acceptée par le Brésil en décembre de la m ê m e année, a reconnu qu'avant d'envoyer sur les lieux des commissaires démarcateurs, il fallait d'abord « s'entendre sur l'interprétation de l'article 8 du Traité d'Utrecht. » (§§ 1050-1051) : 1766. Qu'un essai de conférences tenté dans ce but en 1842 et en 1843 n'a pu avoir de suite, par la faute des commissaires français (§§ 1052-1055) : 1767. Que, dans le m ê m e but d'interpréter l'article 8 du Traité d'Utrecht, une importante conférence a été tenue à Paris, depuis le 30 août 1855 jusqu'au 1 juillet 1856, — sans résultat (Lecture 13). er

Nous avons vu : 1768. Que pendant les quatorze premières années qui suivirent le Traité d'Utrecht, Français et Portugais, Brésiliens et C a y e n n a i s , tous reconnurent unani­ m e m e n t que le Japoc ou V i n c e n t P i n s o n du Traité d'Utrecht n'était autre que l'Oyapoc, la rivière du Cap d'Orange (§§ 323-335) : 1769. Que le 30 septembre 1732, d'après une révé­ lation de M. D E S A I N T - Q U A N T I N , page 210 de la Revue coloniale d'août 1858, page 30 du tirage à part, le Gouver­ nement Français, adoptant l'idée émise en 1727 par u n magistrat de C a y e n n e , considéra c o m m e limite d'Utrecht le Cap Nord (§§ 336-339, 348, 492) : 1770. Qu'en 1776 et en 1777, d'après une révélation de M . le baron D E B U T E N V A L , page 91 des Protocoles de Paris, imprimés à Rio de Janeiro en 1857, le Gouverne­ ment Français, adoptant l'idée émise en 1729 par un gou-


§§ 1771-1774

16

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(3 )

LECTURE

verneur de C a y e n n e , considéra c o m m e limite d'Utrecht le Mayacaré, quinze lieues portugaises au Nord du G a p N o r d (§§ 350-352, 496, 510-522) : 1771. Que le 10 août 1797, d'après le témoignage d'un traité ratifié par la France, et publié dans le Moniteur le 14 septembre de la m ê m e année, le Gouvernement Français considéra c o m m e limite d'Utrecht le Carsevenne, neuf minutes au Nord du M a y a c a r é (§§ 615-641) : 1772. Que depuis 1824 jusqu'en 1837, d'après une autre révélation de M. D E S A I N T - Q U A N T I N , page 225 de la Revue coloniale, page 45 du tirage à part, et d'après le témoignage de M. P A S S Y , Secrétaire d'État, de M. D E C H O I S Y , gouverneur de C a y e n n e , et de M. PENAUD, coopérateur de la mise en pratique de la doctrine ministé­ rielle, le Gouvernement Français, adoptant l'idée émise en 1791 par u n ex-ordonnateur de C a y e n n e , considéra c o m m e limite d'Utrecht l'Araguari, le véritable A r a guari, au Sud du C a p N o r d , en dedans de l ' A m a z o n e (§§ 594-602, 795, 948-949, 989, 1002-1005, 1026) : 1773. Que depuis 1838, d'après le témoignage des Notices statistiques, de M. le B A R O N D E F F A U D I S , de M. le B A R O N R O U E N , de

M.

DE

SAINT-QUANTIN

et de

M. le

BARON

le Gouvernement Français, adoptant l'idée professée depuis 1781 jusqu'en 1791 par les gouverneurs de C a y e n n e , et se persuadant que le Carapapori, le premier cours d'eau en dehors de l ' A m a z o n e , était une branche Nord de l'Araguari, considère c o m m e limite d'Utrecht, la branche méridionale du canal de Carapa­ pori, la rivière de Carapapori et l'Araguari (§§ 538593, 1054-1055, 1112-1135, 1233, 1235-1237) : DE

BUTENVAL,

1774. Que, faisant droit aux objections présentées par M. le V I C O M T E D E L ' U R U G U A Y , le Gouvernement Fran­ çais a reconnu la nécessité d'une modification, officielle­ m e n t formulée en ces termes, le 1 juillet 1856, par M. le B A R O N D E B U T E N V A L : — « Le canal de Carapaporis, ER


( 4 )

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16

LECTURE

§§ 1775-1779

séparant l'île de M a r a c á des terres adjacentes au C a p d u Nord, — puis la branche Nord du fleuve Araouari, si cette branche est libre, ou, dans le cas où cette branche serait aujourd'hui obstruée, le premier cours d'eau suivant, en remontant vers le Nord et se jetant, sous le n o m de M a n n a i e ou de rivière de Carapaporis, dans le canal de Carapaporis, à u n degré quarante-cinq • minutes environ de latitude Nord » (§ 1238) : 1775. Que, la prétendue branche Nord de l'Araguari se trouvant obstruée depuis longtemps, si bien qu'on ne la n o m m e que Rio T A P A D O , Rivière bouchée, et, qui plus est, la rivière de Carapapori n'ayant jamais été une dépen­ dance de l'Araguari, mais bien de la Manaye, la préten­ tion actuelle du Gouvernement Français peut être formulée de la manière suivante : — « La branche méridionale du canal de Carapapori; la rivière de Carapapori jusqu'à la M a n a y e ; la rivière de M a n a y e jusqu'à sa source » (§§ 398-415, 569-574, 1171-1208) : 1776. Et que le Gouvernement Brésilien, ainsi que le Gouvernement Portugais l'a toujours fait, soutient inva­ riablement que la limite stipulée par l'article 8 du Traité d'Utrecht est l'Oyapoc, la rivière du Cap d'Orange. 1777.

Nous nous s o m m e s convaincus

Que ceux qui enlèvent du C a p d'Orange la limite d'Utrecht, se sont trop souvent prononcés sans une préparation suffisante ; 1778. C o m m e le chevalier D E M I L H A U , qui a mal compris deux cartes de D E L I S L E (§§ 341-348) : 1779. C o m m e le gouverneur C H A R A N V I L L E , c o m m e M. L E S C A L L I E R , c o m m e M. A U G U I S , c o m m e M . D E S A I N T Q U A N T I N , c o m m e la Réponse Préliminaire de 1855, qui n'ont pris la dénomination de Cap du Nord que dans son acception restreinte (§§ 58-61, 187, 360-362, 682, 1066, 1128, 1137-1141, 1231) :


§§ 1780-1787

16

e

(5 )

LECTURE

1780. C o m m e le gouverneur C H A R A N V I L L E et le géo­ graphe S I M O N M E N T E L L E , qui voyaient le Japoc du Traité d'Utrecht dans le Warÿpoco de V A N K E U L E N (§§ 353357, 620, 945) : 1781. C o m m e M. A U G U I S , qui a affirmé, à la Chambre des Députés, que sur la carte de V A N K E U L E N « est mar­ quée effectivement, prés du C a p Nord, une petite rivière désignée sous le n o m de Yapock », tandis que le n o m que portent toutes les éditions de V A N K E U L E N est celui de Warÿpoco, avoué par le gouverneur C H A R A N V I L L E et par le géographe S I M O N M E N T E L L E (§ 1066) : 1782. C o m m e B E L L I N , c o m m e M . D E L A R U E , c o m m e M. C O U V R A Y D E B E A U R E G A R D , c o m m e M. W A R D E N , c o m m e M . D ' A V E Z A C , en 1834, c o m m e le Journal de la Marine, c o m m e M. P A U L T I B Y , c o m m e M . P I C Q U E T , c o m m e M . le BARON WALCKENAER, c o m m e M. C O N S T A N C I O , comme M. C O C H U T , qui ont affirmé qu'il existe effectivement tout à côté du C a p N o r d une rivière Oyapoc, Yapoc, Japoc, qui n'a jamais existé que dans leur imagination (§§ 441448, 942, 947, 957, 963, 966, 967, 968, 981, 1060, 1061, 1062, 1064, 1065, 1074) : 1783.

C o m m e M.

D E SAINT-QUANTIN,

qui n'a pas lu le

Traité de 1700, sur lequel il appuie la partie essentielle de son travail (§§ 1128, 1214-1220) : 1784.

C o m m e M.

LESCALLIER,

qui n'a lu ni le Traité de

1700 ni le Traité d'Utrecht (§§596-630) : 1785. C o m m e M . D E L A R U E , conservateur des Archives de F r a n c e ; c o m m e M. P A S S Y , ministre du roi; c o m m e le noble D U C D E V A L M Y , représentant de la nation : qui n'ont m ê m e pas lu ni l'Acte de V i e n n e ni la Convention de Paris (§§ 939-943, 988-989, 1072). 1786. Mais nous avons eu la consolation de distinguer dans la foule quelques arguments honorables. 1787. L A C O N D A M I N E , le premier, a justifié de la


( 6 )

e

16

LECTURE

§§ 1788-1794

manière la plus spécieuse la prétention de la F r a n c e , en invoquant le témoignage des anciennes cartes (§§ 382389). 1788. Cent deux ans après L A C O N D A M I N E , M . L E S E R P E C a fourni à la F r a n c e u n second argument sérieux, en produisant u n texte du gouverneur portugais B E R R E D O (§§ 1095-1098). 1789. E n 1855, M. le B A R O N D E B U T E N V A L , parlant au n o m de la F r a n c e , a développé, pour la première fois, l'ar­ gument de L A C O N D A M I N E , et a opposé au Brésil plusieurs autres arguments d'une grande force, — notamment u n document du cabinet de L i s b o n n e remis à l'ambassadeur de F r a n c e pendant la négociation du Traité primordial de 1700 (§ 1233). 1790. M. D ' A V E Z A C enfin, dans ses beaux travaux de 1857 et 1858, a fait encore valoir en faveur de la F r a n c e quelques puissants arguments, parmi lesquels il faut remar­ quer la carte de S É B A S T I E N C A B O T et le témoignage de l'Anglais W I L S O N (§§ 1745-1752). 1791. Maintenant, en augmentant m o i - m ê m e considé­ rablement le nombre et la force de ces arguments, je vais détailler tous les motifs que la F r a n c e peut alléguer pour soutenir que la limite d'Utrecht doit être réellement au voisinage immédiat de l ' A m a z o n e . 1792. Les voici, pour la première fois, dans leur imposant ensemble : 1793. = Pour acquérir la conviction pleine et entière que la limite fixée par le Traité d'Utrecht est le C a r a p a pori, tout à côté de l ' A m a z o n e , il suffit d'avoir égard à l'intention de ce traité. 1794. = La question de l'Oyapoc n'a jamais été autre chose que la question de l ' A m a z o n e . Argumentation française.


§§ 1795-1801

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LECTURE

(7 )

1795. = Le Traité d'Utrecht a eu pour but essentiel de réserver au Portugal la possession exclusive du grand fleuve. 1796. = Pour assurer l'accomplissement de cette stipu­ lation fondamentale, il fallait sans doute céder encore au Portugal une certaine portion des terres de la G u y a n e . 1797. — Mais il aurait été absurde d'étendre l'intervalle jusqu'au G a p d'Orange, pendant l'espace de quatre-vingts lieues françaises. 1798. = La F r a n c e prétendait l ' A m a z o n e depuis plus de deux siècles. Elle renonce enfin à sa longue prétention. Mais, ce résultat acquis au Portugal, la F r a n c e n'a pu accepter de limite plus étroite que le cours d'eau le plus voisin du fleuve qu'elle avait prétendu pendant si long­ temps. 1799. = Or, ce cours d'eau est le Carapapori. 1800. = Le Carapapori est donc forcément la limite d'Utrecht. 1801. = Cela est si vrai, que l'article 12 du Traité d'Utrecht porte : « Que les habitants de C a y e n n e ne pourront entreprendre de faire le commerce dans le M a r a g n o n et dans l'embouchure de la rivière des A m a z o n e s , et qu'il leur sera absolument défendu de passer la rivière Vincent-Pinson. » « Or, la navigation de l ' A m a z o n e appartenant aux riverains, d'une part; de l'autre, la F r a n c e venant, par les articles précédents, de renoncer aux deux rives de l'Ama­ z o n e : ou l'article 12 n'a aucun sens, ou il se rapporte au cas de communications accidentelles entre le fleuve limite et l ' A m a z o n e . « Donc, on a pris pour limite, à Utrecht, u n fleuve qui a nécessité l'insertion de l'article 12. « Donc, le fleuve limite est, aux termes m ê m e s du Traité d'Utrecht, en communication possible avec l'Amazone. » Argumentation française.


( 8 ) 1802.

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LECTURE

§§ 1802-1808

Or, la seule rivière qui se trouve dans ce cas,

c'est le Carapapori, le premier cours d'eau en dehors de Amazone. 1803. = Mais restreignons-nous à l'article 8 du Traité d'Utrecht, c o m m e le prescrivent l'Acte de V i e n n e , la Convention de Paris et la Note du 5 juillet 1841. Nous arriverons par là, avec la m ê m e rigueur, à la m ê m e conclusion. 1 8 0 4 . = L'article 8 du Traité d'Utrechtfixepour limite la rivière de Vincent Pinçon. 1805. Rivière de Vincent Pinçon veut dire, sans doute, rivière où a été V I N C E N T P I N Ç O N . Or, le seul parage de toute la G u y a n e où V I N C E N T P I N Ç O N ait mouillé, ce fut devant l'Araguari, dont le Carapapori est la branche Nord. V I N C E N T P I N Ç O N éprouva dans son mouillage amazo­ nien le p h é n o m è n e terrible de la pororoca, qui est parti­ culier à l'Araguari, et qui a dû le frapper vivement.

L'Araguari, le tronc du Carapapori, est donc la seule rivière de toute la G u y a n e qui ait pu recevoir le n o m de Vincent Pinçon. 1806. = L'article 8 du Traité d'Utrecht donne à la rivière limite le double n o m de Vincent Pinçon et Yapoc. Or, ce double n o m ne se trouve qu'au voisinage i m m é ­ diat de l ' A m a z o n e . 1807. = Le M a r o n i , à 125 lieues de l ' A m a z o n e , a bien reçu de V A N L A N G R E N en 1596, et de W Y T F L I E T en 1597, le n o m de rivière de V i n c e n t P i n ç o n . Mais personne n'a jamais appliqué au M a r o n i le n o m de Yapoc. 1808. = La rivière du C a p d'Orange, à 8 0 lieues de l ' A m a z o n e , se nommait bien indistinctement Oyapoc ou Yapoc, et ce n o m lui venait probablement de la tribu des Argumentation française.


§§ 1809-1810

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LECTURE

(9 )

Yaos domiciliés sur ses bords après leur émigration de l'Orénoque. Mais la rivière du C a p d'Orange n'a jamais été appelée par u n géographe indépendant et sérieux, avant le Traité d'Utrecht, Vincent Pinçon. 1809. = « U n e seule carte, gravée à Quito en 1707 par u n des jésuites de la mission du P é r o u d'après le tracé du Père S A M U E L F R I T Z (et reproduite ultérieurement dans le recueil des Lettres édifiantes), laquelle offre spécialement le cours entier de l ' A m a z o n e , que ce religieux avait des­ cendue jusqu'au Para au c o m m e n c e m e n t de 1689, indique aussi quelque partie des côtes voisines de l'embouchure; et dans l'Ouest, à l'entrée d'une rivière qui pourrait repré­ senter l'Oyapoc actuel, est inscrit d'une manière très apparente le n o m de Rio de Vicente Pinçon. Mais il n'est pas hors de propos de s'enquérir des sources où le Père F R I T Z a puisé ses renseignements sur les abords extérieurs du grand fleuve : or il est bon de rappeler ici qu'à peine arrivé à Para, il fut arrêté c o m m e espion, et détenu près de deux ans jusqu'à ce qu'ayant fait parvenir ses plaintes en Portugal, ordre fut envoyé de le reconduire honora­ blement; et une escorte militaire le raccompagna en effet jusqu'au centre de sa mission. Il est donc évident que ce bon religieux n'a eu, sur la valeur géographique de la déno­ mination de rivière de V i n c e n t P i n ç o n , d'autres lumières que les dires intéressés des Portugais de Pará, alors dans la ferveur de leurs prétentions nouvel écloses. » 1810. = U n seul texte, celui de M A N O E L P I M E N T E L , en 1712, a identifié le V i n c e n t P i n ç o n avec la rivière du C a p d'Orange, en le situant par la latitude de 4 degrés 6 minutes Nord. Mais ce texte a été écrit à douze ans du Traité de Lisbonne, et par un cosmographe du Roi de Portugal. « Aucun témoignage ne saurait mieux autoriser cer­ tains soupçons que cette latitude nouvelle indiquée, à la Argumentation française.


( 10 )

16

e

LECTURE

1811-1818

veille du Traité d'Utrecht, par u n auteur à la solde de la cour de L i s b o n n e . » 1811. =

Le voisinage immédiat de l'Amazone, au con­

traire, présentait simultanément u n légitime Yapoc et u n légitime Vincent 1812. =

Pinçon.

Il existait réellement au voisinage immédiat de

l'Amazone, beaucoup au Sud du G a p

d'Orange, une

seconde rivière Yapoc. 1813. =

Car le Vocabulario do Alto-Amazonas de M. A N ­ D I A S , publié en 1854 dans la Revista de l'Institut Historique et Géographique du Brésil, nous offre le m o t indien ipóca avec le sens du m o t portugais furo, c'est-à-dire ouverture, percée, rupture, et le Tesoro du père M O N T O Y A nous offre le mot indien ia avec le sens du mot espagnol calabaço, c'est-à-dire calebasse. TONIO G O N Ç A L V E S

1814. = E n outre de sa signification de rivière des Yaos, Yapoc signifie donc aussi, sans la moindre torture éty­ mologique, Crique Calebasse. 1815. = Or, nous voyons encore aujourd'hui, tout près de l'Amazone, la Crique Calebasse, traduction littérale de Yapoc, s'ouvrant à l'Ouest de l'île de M a r a c a , dans la branche occidentale du canal de Carapapori, dans cette branche justement où L A C O N D A M I N E faisait commencer la véritable rivière de V i n c e n t P i n ç o n . 1816. = Et c'est réellement dans ce m ê m e parage du Y a p o c méridional que la rivière de V i n c e n t P i n ç o n était située par tous les anciens géographes, aux seules exceptions de V A N L A N G R E N et W Y T F L I E T . 1817. = Cela est démontré par la plus décisive de toutes les preuves, — par l'indication de la latitude. 1818. = La position delarivière du C a p d'Orange,entre Argumentation française.


§§ 1819-1826

16

e

LECTURE

( 11 )

E

le 4 et le 5° degré de latitude septentrionale, était parfai­ tement connue bien avant l'époque du Traité d'Utrecht. 1819. = Déjà en 1625, J E A N D E L A E T , dans son texte, assignait expressément au C a p d'Orange la latitude de 4 degrés 3 0 minutes. 1820. = E h bien, mettons en regard de cette latitude de l'Oyapoc celles que donnent les anciennes cartes à la rivière de V i n c e n t P i n ç o n . 1821. = Dès l'année 1544, S É B A S T I E N C A B O T , capitaine et pilote-major de l'empereur C H A R L E S - Q U I N T , Grande m a p p e m o n d e , sans titre : Rio de Vincenanes [c'est-à-dire V i n c e n t e Y a ñ e z ] , latitude septentrionale de moins d'un D E G R É . 1822. = Vers l'année 1550, m a p p e m o n d e peinte en vélin par ordre de H E N R I II, roi de F r a n c e . R. de Vincent, D E U X D E G R É S vingt minutes. 1823. = E n 1569, G É R A R D M E R C A T O R , dans sa carte marine, intitulée : « Nova et aucta orbis terræ descriptio ad u s u m navigantium emendate accommodata » : R. de Vincente Pinçon, U N D E G R É vingt minutes. 1824. = E n 1570, A B R A H A M O R T E L I U S , dans son « Theatrum orbis terrarum », réimprimé en 1571, 1572, 1573, 1574, 1579, 1581, 1584, 1587, 1592, 1603, 1608 : 1° « Typus orbis terrarum », R.

de S.

Vin.,

UN

DEGRÉ.

2° « A m e r i c æ sive novi orbis, nova descriptio », R. de S. Vincente Pinçon, U N D E G R É . 1825. = E n 1575, A N D R É T H E V E T , cosmographe du roi, dans le second volume de sa « Cosmographie univer­ selle », M a p p e m o n d e intitulée : « Nouveau m o n d e descouuert et illustré de nostre temps » : R. Vinc. Pinço, U N D E G R É et quelques minutes. 1826. = Vers l'année 1584, G I O V A N N E B A T T I S T A M A Z Z A , « A m e r i c æ et proximarum regionum oræ descriptio » : Argumentation française.


( 12 )

16

e

§§ 1827-1832

LECTURE

R. de S. Vincente Pinçon,

UN

1827. =

D E BRY,

ricæ

E n 1592,

THÉODORE

DEGRÉ.

dans son « A m e ­

tertia pars »,

« Chrorographia nobilis &

opulentæ

Peruanæ

pro­

vinciæ, atque Brasiliæ », reproduite en 1605 : R. de S. Vincente Pincon, 1828. =

UN

E n 1594, le m ê m e

DEGRÉ.

THÉODORE DE

B R Y , dans son

« A m e r i c æ pars quarta », « Occidentalis A m e r i c æ partis tabula geographica » : R. de S. Vincente Pincõ,

UN

DEGRÉ.

1829. = E n 1595, les deux fils de G É R A R D M E R C A T O R , dans l'ouvrage posthume de leur père, intitulé : « Atlas sive cosmographicæ meditationes », reproduit en 1606, 1609, 1630, 1633, 1635, 1°« Orbis terræ compendiosa descriptio quam... fieri curabat. A M . D . L X X X V I I » :

R. de Vincente Pinçon,

UN

DEGRÉ.

2° « A m e r i c a sive India nova... per CATOREM

RUMOL-

0

DUS MERCATOR

MICHAELEM

MER-

» :

R. de Vincente Pinçon, 1830. = LINSCHOTEN,

UN

DEGRÉ.

E n 1596, dans l'Itinerario de J A N H U Y G E N V A N reproduit en 1598, 1599, 1610, 1619, 1638,

1644, « Orbis terrarum typus de integro multis in locis emendatus auctore P E T R O P L A N C I O 1594 » : R. de Vincente Pinçon, U N D E G R É . 1831. =

E n 1596, encore

THÉODORE

D E BRY,

dans son

« America? pars sexta », « A m e r i c a sive Novus Orbis, » reproduite en 1617 et en 1624 : R. de Vincente Pinçon, 1832. =

UN

E n 1602, Jodocus

DEGRÉ.

HONDIUS,

« N o v a universi orbis descriptio » : R. de S.

Vin.,

UN

DEGRÉ.

Argumentation française.


§§ 1833-1839 1833. =

e

16

( 13 )

LECTURE

Dans la m ê m e année 1602, le m ê m e

JODOCUS

HONDIUS,

« Orbis terræ novissima descriptio », reproduite en 1633 : R. de Vincente Pincon, moins d'un D E G R É . 1834. = E n 1661, R O B E R T D U D L E Y , dans le second vo­ lume de son « Arcano del Mare », Carte 14 de l'Amérique : R. di Vincent :° Pincon,

U N DEGRÉ

quarante minutes.

1835. = Le V i n c e n t P i n ç o n des anciennes cartes, le véritable V i n c e n t P i n ç o n , entre la latitude septentrionale de moins d'un degré et celle de deux degrés et quelques minutes, n'était donc pas l'Oyapoc d u C a p d'Orange, entre le 4° et le 5° degré. 1836. = Cela est confirmé d'une manière irréfragable par « le témoignage direct et formel des colons anglais qui avaient tenté un établissement à l'embouchure de ce m ê m e O y a p o c , en 1604, sous la conduite du capitaine C H A R L E S L E I G H et de son frère O L A V E L E I G H . J E A N W I L S O N , de W a n s t e e d , l'un des dix survivants qui revinrent en A n ­ gleterre en 1606, a laissé une relation, imprimée dans la collection de P U R C H A S , où il est expressément consigné que le Wiapoco, où ils s'étaient établis, était appelé par les Espagnols rivière de Canoas; d'où il suit assez clairement que le n o m indigène d'Oyapoc avait, pour les E u r o ­ p é e n s , une synonymie connue et certaine, exclusive du n o m de V i n c e n t P i n ç o n . » 1837. = Aussi, tous les savants de notre époque s'ac­ cordent-ils à regarder le V i n c e n t P i n ç o n c o m m e une rivière distincte de celle du C a p d'Orange. 1838. = A L E X A N D R E D E H U M B O L D T parlera pour tous. 1839. = Ce grand h o m m e , dont la science étendue et profonde a tant fait avancer l'étude de la géographie améArgumentation française.


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e

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LECTURE

§§ 1840-1844

ricaine, s'est prononcé en cette question plus d'une fois. 1840. = E n 1817, dans u n travail qui lui avait été demandé par la légation m ê m e de Portugal à Paris : « L'article 8 du Traité d'Utrecht était très-vaguement énoncé. La cession va jusqu'au Rio Japoc ou V i n c e n t P i n ç o n ; or il y a une différence de près de deux degrés en latitude entre le Rio P i n ç o n et le Rio Japoc ou O y a pock, appelé anciennement W i a p o c o par les navigateurs hollandais. » 1841. = E n 1822, dans le tome VIII du Voyage aux régions équinoxiales : « Les géographes ne sont pas toujours consultés par les diplomates, et des erreurs de position, que nous aimons à croire involontaires, sont devenues, depuis le huitième article de la paix d'Utrecht, une source de contestations renaissantes sur les limites des G u y a n e s françoise et portugaise. » 1842. = E n 1825, dans le tome IX du m ê m e ouvrage : M . D E L A O N D A M I N E , à la sagacité duquel rien n'échappe, a déjà dit, dans la Relation de son voyage à l ' A m a z o n e , page 199 : « Les Portugais ont leurs raisons pour con­ fondre la baie (?) de V i n c e n t P i n ç o n , près de la bouche occidentale du Rio A r a w a r i (Araguari), latitude 2° 2'; avec la rivière O y a p o c k . latitude 4° 15'. La paix d'Utrecht en fait une m ê m e rivière. » 1843. = La distinction du V i n c e n t P i n ç o n et de l'Oyapoc a été formellement reconnue par les Portugais eux-mêmes, par les Brésiliens eux-mêmes, 1844. = Le Traité de limites des possessions améri­ caines, signé à M a d r i d le 13 janvier 1750 entre l'Es­ p a g n e et le Portugal,futrédigé sur une carte manuscrite dressée tout exprès à cette fin, en 1749, et il est notoire que tout ce qui regardait cette grande affaire était m e n é Argumentation française.


§§ 1845-1846

16

e

LECTURE

( 15 )

par le Brésilien A L E X A N D R E D E G U S M Ã O , également re­ marquable par ses lumières et par son amour pour le Brésil, et remarquable encore par la circonstance d'être le frère du véritable inventeur du ballon aérostatique. E h bien, cette carte officielle, dont il existe à Paris une copie légalisée, donnait au Carapapori, à la rivière du C a p N o r d , le n o m de Rio de Vicente Pinçon. 1845. = Quand la Révolution Française mit le Portugal en alarme sur la frontière septentrionale du Brésil, u n Brésilien très éclairé, le docteur A L E X A N D R E R O D R I G U E S F E R R E I R A , fut chargé de démontrer les droits du Portugal à la possession des terres du C a p Nord. Ce travail, daté de Para le 24 avril 1792, a été imprimé en janvier 1842 dans la Revista de l'Institut historique et géographique du Brésil, et il est ainsi devenu doublement brésilien. E h bien, on lit dans ce travail les passages suivants : « O n sait que l'Oyapock et le P i n ç o n sont deux rivières différentes; le P i n ç o n plus près du C a p N o r d , l'Oyapock plus loin. » « Que l'Oyapock et le P i n ç o n étaient deux rivières, c'est ce qu'il fallait bien considérer lors de la négociation du Traité d'Utrecht; mais l'attention des deux cours se trouvant absorbée par d'autres questions généralement graves et pressantes, on n'étudia pas celle-ci avec la m a ­ turité que son importance réclamait. » Que l'Oyapock débouche à la côte du N o r d par la latitude boréale de 4 degrés 15 minutes, à peu de chose près, et le P i n ç o n par celle de 2 degrés 10 minutes, c'est ce que les Portugais affirment, et les Français ne le contredisent pas. » 1846. = Lorsque le Traité d ' A m i e n s fut déchiré par l'invasion du Portugal, et que le général J O S É N A R C I S O D E M A G A L H Ã E S D E M E N E Z E S , gouverneur de Para, se décida, en 1808, à reprendre possession de la rive droite de l'OyaArgumentation française.


(

16

)

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LECTURE

§

1847

p o c c o m m e ayant toujours été pour le Portugal la limite d'Utrecht, il fit dresser une carte du littoral de la G u y a n e , depuis l ' A m a z o n e jusqu'à l'Oyapoc. E h bien, sur cette carte officielle, on a donné au Cars e v e n n e , par la latitude de 2 degrés 30 minutes, le n o m de R. Calçoene ou de Vicente Pinçon. 1847. = A u Congrès de V i e n n e , les trois Plénipoten­ tiaires de Portugal, qui n'étaient rien moins que le C O M T E de P A L M E L L A , postérieurement D U C du m ê m e n o m , A N T O N I O D E S A L D A N H A D A G A M A , postérieurement C O M T E D E P O R T O S A N T O , et D O M J O A Q U I M L O B O D A S I L V E I R A , postérieurement C O M T E D ' O R I O L A , entamèrent la négociation sur la G u y a n e en remettant au P R I N C E D E T A L L E Y R A N D , au mois de jan­ vier 1815, une note verbale. E h bien, on remarque dans cette pièce, émanée de la fleur de la diplomatie portugaise, les passages suivants : « Le Traité d'Utrecht, du 11 avril 1713, ayantfixédéfi­ nitivement les limites entre les deux G u y a n e s Portu­ gaise et Française, on s'attendait à voir par là disparaître toute dispute ultérieure à cet égard. « Cependant les négociateurs du Traité, induits en erreur par le géographe F R I T Z , rédigèrent l'article huitième de manière qu'il a été possible de confondre la Rivière d ' O y a p o c k avec celle de V i n c e n t Pinzon... « Le Traité d'Utrecht étant pris pour base des limites que l'on vafixer,toute discussion se réduit à savoir à qui appartiendra le territoire situé entre les deux Rivières de V i n c e n t P i n z o n et de l'Oyapock : puisque la contes­ tation vient de ce que l'on a pris à cette époque ces deux Rivières pour une m ê m e rivière, c o m m e on peut le voir par l'article ci-joint dudit Traité. « Il n'y a point entre les deux Rivières ci-dessus m e n ­ tionnées d'autre Fleuve, ou enfin aucune base locale sur laquelle on puisse tracer les limites de manière à éviter toute contestation. L'Oyapock est beaucoup plus considéArgumentation française.


§§ 1848-1850

e

16

LECTURE

( 17 )

rable que le Vincent P i n z o n , et par conséquent il serait plus convenable par cela m ê m e de le prendre pour limite. » 1848. = Dans les premiers mois de l'indépendance du Brésil, on dessina dans la ville de P a r a une carte ayant pour titre : « Carta topographica das Provincias do Grão Para e Rio Negro. » E h bien, dans cette carte brésilienne, le premier cours d'eau au Nord de l'île de M a r a c á , tout près du C a p N o r d , porte le n o m de R. de Vicente Pensan. 1849. = M. I G N A C I O A C C I O L I D A C E R Q U E I R A E S I L V A , Bré­ silien recommandable, qui a voué son existence à l'étude de la géographie et de l'histoire de son pays, a imprimé en 1833, dans la ville brésilienne de Bahia, après u n sejour de treize ans dans la province du Pará, u n volume d'une grande autorité, qui porte ce titre : Corografia Paraense, ou Descripçãofisica,historica, e politica, da Provincia do Grain-Para. E h bien, on lit dans ce volume le passage suivant : « Jusqu'en 1723 on confondait les deux rivières, tandis que l'Oyapok, véritable limite du Brésil, se trouve à la latitude septentrionale de 4 degrés 11 minutes, et le Vicente Pinçon à 2 degrés 10 minutes. Cette erreur, non aperçue par les signataires du Traité d'Utrecht. a produit toutes les contestations qui ont eu lieu. » 1850. = Lorsque M. L A U R E N S D E C H O I S Y , gouverneur de C a y e n n e , notifia au président du Para l'établissement du poste de M a p á , beaucoup au Sud de l'Oyapoc, le pré­ sident du Para, qui était le général du génie F R A N C I S C O J O S É S O A R E S D E S O U S A D E A N D R É A , Portugais-Brésilien fort éclairé, répondit par une protestation datée du P a r a le 18 octobre 1836. E h bien, on remarque dans cette pièce officielle le passage suivant : « Quoique j'eusse déjà appris qu'il existait quelques T. H. Argumentation française. 2


( 18 )

16

forces françaises à Amapá »

e

§§ 1851-1853

LECTURE

Vicente

Pinçon

ou

sur le lac

1851. = U n autre Portugais-Brésilien fort estimable, M. A N T O N I O L A D I S L A U M O N T E I R O B A E N A , établi au Para depuis 1803, et qui s'était attaché d'une manière toute spé­ ciale à l'étude de la géographie et de l'histoire de la pro­ vince de sa résidence, a publié au Para m ê m e deux ouvrages qui font autorité : E n 1838, Compendio das eras da provincia do

Pará;

E n 1839, Ensaio Corografico sobre a provincia do Partá. E h bien, M. B A E N A a dit en 1838 : « La rivière de C a l ç o e n e vient après le C a p N o r d Les cartes lui donnent le n o m de Vicente Pinçon. » Et il a répété en 1839 : « L'embouchure de cette for­ midable rivière [l'Amazone] a eu le n o m de Mer douce, que lui donna V I C E N T E P I N S O N , après avoir pénétré dans la rivière C a l ç o e n e , à laquelle il imposa son n o m , qui apparaît encore aujourd'hui sur quelques cartes. » 1852.

=

En

1841,

M. M A N O E L J O S É M A R I A D A C O S T A E

SÁ,

ancien secrétaire général au ministère de la Marine et des Colonies à L i s b o n n e , et qui était peut-être le Por­ tugais de son temps le mieux informé de tout ce qui regardait les limites du Brésil, offrit à S A M A J E S T É B R É ­ S I L I E N N E u n travail spécial sur la question de l'Oyapoc, intitulé : « Compendio historico do occorrido na demarcação dos limites do Brasil do lado da Guyana Franceza. » E h bien, après avoir rapporté dans son texte l'article 8 du traité d'Utrecht, M. C O S T A E SÁ ajoute en note : « Re­ marquons, en passant, la confusion de ces n o m s [Japoc et Vincent Pinson] appliqués à une seule et m ê m e rivière, tandis qu'ils appartiennent à deux rivières différentes. » 1853. = E n 1842, quand il y avait six ans que le Gou­ vernement Brésilien n'avait pas cessé de se préoccuper sérieusement de la question de l'Oyapoc, on lithographia aux archives militaires de Rio d e Janeiro, dépendant du Argumentation française.


§§ 1854-1855

16

e

( 19 )

LECTURE

ministère de la guerre, une carte portant ce titre : « Caria geographica da Costa do norte que comprehende a foz do rio das Amazonas desde hum ate quatro graos de latitude boreal. » E h bien, dans cette carte du Gouvernement Brésilien, publiée à une époque où la question des limites guyanaises était palpitante, on a maintenu à la latitude de 2 degrés 30 minutes le n o m de R. Calçoene ou de Vicente Pinçon. 1854. = U n Brésilien légitime, hautement respectable par sa position sociale, par ses lumières et par son caractère, feu M. le V I C O M T E D E S. L E O P O L D O , ancien Con­ seiller d'Etat, ancien Ministre de l'Intérieur, Sénateur de l'Empire, président de l'Institut Historique et Géographique du Brésil, — qui avait écrit en 1839 u n travail spécial sur les limites du Brésil — présenta à l'Institut Brésilien, au mois de janvier 1843, u n complément de son premier travail, que l'Institut s'empressa de publier dans la m ê m e année parmi ses Memorias. E h bien, voici ce que dit dans son dernier travail ce personnage brésilien, si compétent pour tout ce qui regarde l'histoire et la géographie du Brésil : « L'article 8 \du Traité d'Utrecht] renfermait u n germe de futures questions et mésintelligences, dans la disjonctive — ou — , qui confondait et identifiait les deux rivières d'Oyapock et de V i n c e n t P i n ç o n , sans faire attention aux distances, car la première de ces deux rivières reste à la latitude Nord de 4 degrés 11 minutes 51 secondes, et l'autre dans celle de 2 degrés 10 minutes. » 1855. = Dans la m ê m e année 1843, u n autre Brésilien éminent, hautement zélé pour tous les intérêts du Brésil, M.

ANTONIO

DE

MENEZES

VASCONCELLOS

DE

DRUMMOND,

alors envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire à L i s b o n n e , offrit à son gouvernement u n travail ayant pour titre : « Nota sobre a negociação pendente para se fazer Argumentation française.


e

( 20 )

16

LECTURE

§§ 1856-1860

effectivo o tratado de limites do imperio do Brasil com a Guyana

Francez a. »

E h bien, M. le C H E V A L I E R

DE DRUMMOND,

lui aussi, dé­

clare dans son texte que l'article 8 du Traité d'Utrecht a confondu l'Oyapoc avec le Vincent Pinzon, et il ajoute en note : « Ce dernier fleuve est beaucoup plus au Sud que le premier; on le connaît aussi sous le n o m

de

Calsoene ou fleuve des Calções. » 1856. =

Mais il y a bien plus que tout cela.

1857. =

Les Portugais et les Brésiliens ne se sont

pas bornés à reconnaître que le V i n c e n t P i n ç o n est une rivière fort distincte de l'Oyapoc et située au voisinage immédiat de l'Amazone. 1858. = Ils ont encore avoué eux-mêmes que le V i n ­ c e n t - P i n ç o n , tout près de l'Amazone, et non pas l'Oya­ poc, sous le C a p d'Orange, était la limite septentrionale du Brésil. 1859. = Et ils ont fait ce grand aveu à toutes les époques : Avant la négociation du Traité du 4 mars 1700 : Pendant la négociation de ce Traité primordial : Après la conclusion du traité final d'Utrecht. 1860. = G A B R I E L S O A R E S , ce recommandable habitant de l'ancienne capitale du Brésil, dont l'exactitude a mérité de M . D E V A R N H A G E N les honneurs d'une édition soigneusement annotée, écrivait en 1587 : « La côte du Brésil c o m m e n c e au delà de la rivière des A m a z o n e s , du côté d'Ouest, par la terre dite des Caribes, depuis la rivière de V i n c e n t P i n ç o n qui reste sous la ligne. D e cette rivière de V i n c e n t P i n ç o n , à la pointe de la rivière des A m a z o n e s qu'on appelle cap Corso [Raso], laquelle pointe est sous la ligne équinoxiale, il y a quinze lieues. » Argumentation française.


§§ 1861-1863

16

e

( 21 )

LECTURE

1861. = Le capitaine S I M Ã O E S T A C I O D A S I L V E I R A , habi­ tant de l'État de M a r a g n an nouvellement créé, imprimait à L i s b o n n e en 1624 : « Le M a r a g n a n est une colonie d'une grande magni­ ficence et d'une vaste étendue, dont Sa Majesté a marqué le gouvernement depuis C e ará (qui se trouve à trois degrés du côté du Sud) jusqu'à la dernière borne du Brésil, qui se trouve à deux degrés du côté du Nord ; il présente u n littoral de près de quatre cents lieues jusqu'à la rivière de V i c e n t e Y e n e s P i n ç o n , où l'on dit qu'il existe u n pilier de marbre, avec les armes du Portugal sur une face et celles de Castille sur l'autre, planté à cet endroit par ordre de la Majesté Césarienne de l'Empereur C H A R L E S QUINT. »

Et ce texte portugais a été répété deux fois dans l'année 1630, à M a d r i d et à Barcelone, par l'historien espagnol M A R C O S D E G U A D A L A X A R A Y X A V I E R . 1862. = J O Ã O T E I X E I R A , cosmographe royal portugais, a écrit ces deux notes sur la dernière carte de son atlas spécial des côtes du Brésil, daté de 1640 : À côté du C a p Nord, « cabo do Norte e m altura de 2 graos do norte », C a p d u N o r d à la hauteur de 2 degrés Nord ; te

Tout à l'Ouest du C a p N o r d , « Rio de V Pison per donde passa a linha de demarcaçâo das duas conquistas », Rivière de Vincent P i n s o n par où passe la ligne de démarcation des deux conquêtes. 1863. — S I M Ã O D E V A S C O N C E L L O S , habitant notable de l'ancienne capitale du Brésil, où il avait été provincial de l'ordre de Jésus, imprimait à L i s b o n n e en 1663 : « Le méridien de démarcation qui sépare les posses­ sions de l'Amérique, c o m m e n c e auprès de la rivière des Amazones, à la petite rivière de V i n c e n t P i n ç o n . » — « De la petite rivière de V i n c e n t P i n ç o n , à la pointe de Argumentation française.


( 22 )

e

16

LECTURE

§§ 1864-1865

là rivière du G r a n d Pará ou des A m a z o n e s , du côté d'Ouest, il y a quinze lieues. » 1864. = A u début de la négociation qui produisit le Traité provisionnel de 1700, — lorsque le président R O U I L L É eut remis au Gouvernement Portugais son exposé des droits de la F r a n c e aux deux bords de l'Amazone, M . M E N D O D E F O Y O S P E R E I R A , Ministre des Affaires Étran­ gères de P E D R O II, après avoir consulté le général G O M E S F R E I R E , ex-gouverneur de l'État de M a r a g n a n , et le jeune C O M T E D ' E R I C E I R A , encore plus distingué par son instruc­ tion que par sa noblesse, opposa à l'ambassadeur de Louis XIV, en janvier 1699, une réponse ayant pour but d'établir que le Brésil s'étendait légitimement jusqu'à la rivière d'Oyapoc ou de Vincent Pinson. E h bien, cette pièce officielle, faisant partie intégrante de la négociation du traité fondamental sur les limites de la G u y a n e Française et du Brésil, renferme les deux passages suivants : « Le G a p d u N o r d est situé à peine à deux degrés, et la rivière de Vincent-Pinson A PEINE A TROIS D E G R É S . » « La rivière d'Oyapoc ou de Vincent-Pinson se trouve située à D E U X D E G R É S C I N Q U A N T E M I N U T E S du côté du Nord, et de là à C a y e n n e il y a environ soixante lieues de côtes avec quelques ports. » 1865. = E n 1727, quatorze ans après le Traité d'Utrecht, la m ê m e latitude de 2 degrés 5 0 minutes a été donnée à la rivière limite par le Père D O M I N G O S T E I X E I R A , dans les deux passages suivants de la Vie du général Gomes Freire, faite sur les papiers de ce personnage, qui avait été, nonseulement gouverneur de l'État de M a r a g n a n au com­ m e n c e m e n t des différends avec les C a y e n n a i s , mais encore l'un des signataires du Traité de 1700 : « L'État de M a r a g n a n s'étend pendant l'espace de 435 lieues de côtes. Il c o m m e n c e à quatre degrés trente minutes de la ligne équinoxiale vers le Sud, et Argumentation française.


§

1866

16

e

LECTURE

( 23

)

finit à deux degrés cinquante minutes de l'autre côté de l'équateur, à la rivière de V i n c e n t P i n ç o n au delà du C a p Nord. » « L'empire portugais [en A m é r i q u e ] s'étend sur le littoral jusqu'à la rivière Ojapoc ou de V i n c e n t Pinson, située à la hauteur de deux degrés cinquante minutes de la ligne vers le Nord. » 1866. = E n 1746, trente-trois ans après le Traité d'Utrecht, étaient livrées à l'impression, à L i s b o n n e , les Annales historiques de l'État de Maragnan de B E R N A R D O P E R E I R A D E B E R R E D O , publiées en 1749, après la mort de l'auteur. B E R R E D O avait servi glorieusement pendant la guerre qui fut terminée par la paix d'Utrecht. Il avait été gouverneur de l'État de M a r a g n a n pen­ dant quatre ans, à partir du 18 juin 1718, c'est-à-dire à partir de la cinquième année après le Traité d'Utrecht. Dans tout le cours de ses Annales il fait éclater le plus vif intérêt pour la question des limites du Brésil avec la G u y a n e Française. Il rend compte de la prétention émise en 1691 par le M A R Q U I S D E F E R R O L L E S , — que la limite des deux colonies devait être formée par l'Amazone. Il donne la substance du Traité provisionnel du 4 mars 1700. Il s'exprime en ces termes sur le Traité définitif d'Utrecht : « C o m m e il comprenait le renoncement du Roi Très-Chrétien au droit qu'il voulait avoir sur la partie Nord de la grande rivière des A m a z o n e s , les injustes prétentions de la monarchie française ont cessé pour toujours. » Et il se fait u n plaisir de proclamer que son ouvrage n'est pas u n impromptu, mais le fruit de vingt-huit années de travail. E h bien,

BERNARDO

PEREIRA

DE BERREDO.

Argumentation française.

qui, mieux


e

( 24 )

16

LECTURE

§§ 1867-1868

que personne, était à m ê m e d'interpréter dûment le Traité d'Utrecht, nous a légué dans ses Annales ce témoignage décisif en faveur de la F r a n c e : « La véritable démarcation de l'État est à quatre degrés trente minutes au Sud de la ligne.... Et la côte se pro­ longeant de l'Est à l'Ouest pendant le long espace de 455 lieues, le domaine de l'État se termine, avec celui de toute l'Amérique Portugaise, à la rivière de V i n c e n t P i n ç o n , que les Français appellent W i a p o c , TRENTE

MINUTES

UN

DEGRÉ

au Nord de l'équateur. »

Et ce texte de B E R R E D O , si formellement condemnatoire de la prétention actuelle du Brésil, a été reproduit tel quel en 1849-1851, sans la moindre remarque, dans une édition brésilienne des Annales historiques de l'État de Maragnan,

imprimée à M a r a g n a n m ê m e .

=

1867. Certes ils paraissent invincibles, les arguments de la F r a n c e pour transporter la limite d'Utrecht au voisinage immédiat de l'Amazone. 1868.

Mais écoutons l'argumentation du Brésil.


§§ 1869-1870

e

17

LECTURE

QUATRIÈME

( 25 )

PARTIE

Argumentation Brésilienne.

DIX-SEPTIÈME

LECTURE

Titres en faveur du Brésil.

1869. « La limite entre le Brésil et la G u y a n e Fran­ çaise passera le long de la rivière O y a p o c , située entre le 4 et le 5 degré de latitude septentrionale. A l'endroit où cette rivière se divisera, ladite limite passera par son em­ branchement ou affluent le plus considérable par le volume de ses eaux en temps sec, jusqu'à la source de cet embran­ chement ou affluent. » e

e

Voilà la prétention du Brésil en vertu de l'article 8 du Traité d'Utrecht, formulée officiellement, le 15 juin 1855, par

M.

le V I C O M T E D E

L'URUGUAY.

1870. Entre l'embouchure de l ' O y a p o c et celle du Carapapori, prétendu par la F r a n c e , on n'aperçoit qu'une côte bourbeuse, qui semble peu digne d'être disputée avec ardeur. Mais c'est la gangue du diamant. Ce sont les dunes de sable qui, à l'autre extrémité du Brésil, cachent au navigateur la superbe province de Rio G r a n d e do Sul.


e

( 26 )

17

LECTURE

§§ 1871-1873

Derrière ce pauvre rideau de palétuviers, se déploie jusqu'au Rio B r a n c o et au Rio N e g r o u n territoire magni­ fique, dont la position, le long de l'Amazone, a été exaltée avec enthousiasme par M. D E S U Z A N N E T , par M . D E M O N T R A V E L , par

M.

LE

S E R R E C , par

M.

D E SAINT-QUANTIN,

par

M . É M I L E C A R R E Y ; dont la richesse a été proclamée par le Père A C Ñ U A , par le B A R O N W A L C K E N A E R , par M. R E Y N A U D , par M . L A C R O S S E , par M. D E S A I N T - Q U A N T I N ; et dont la sur­ face est évaluée par ce savant officier du génie, au cinquième de celle de la France, c'est-à-dire à une étendue plus vaste que la province de Rio G r a n d e do Sul, plus vaste que le royaume de Portugal, plus vaste que les deux royaumes de H o l l a n d e et B e l g i q u e ensemble. 1871. Or la F r a n c e ne prétend pas seulement la gangue. Elle veut aussi le diamant. 1872. Ce n'est donc pas une bagatelle que la question de l'Oyapoc. 1873. Des titres irréfragables la résolvent en faveur du Brésil.


§ 1874

e

17

PREMIER

LECTURE

TITRE

DU

( 27 )

BRÉSIL

Document Espagnol et Portugais en 1637.

1874. « Je trouve bon et il m e plaît de lui faire donation irrévocable des terres qui gisent au Cap du Nord, en depuis ce cap jusqu'à la rivière de Vincent Pinçon(*), où c o m m e n c e le département des Indes du royaume de C a s tille, et à l'intérieur, en remontant l'Amazone le long du canal qui débouche à la mer, quatre-vingts à cent lieues jusqu'à la rivière des T a p u y a u s ù s . » Ce sont les termes essentiels des Lettres patentes du roi IV d'Espagne, conjointement roi de Portugal, sous le n o m de P H I L I P P E III, datées de L i s b o n n e le 14 juin 1637, et créant, au bénéfice de B E N T O M A C I E L P A R E N T E et de ses successeurs, la capitainerie brésilienne du C a p d u N o r d (§§ 67-72). PHILIPPE

Ces termes se trouvent publiés en portugais depuis 1749, d'après l'enregistrement des lettres de donation dans u n livre de la Provedoria du Para, au paragraphe 674 de l'ouvrage de B E R R E D O , — « Annaes Historicos do Estado do Maranhaõ, cm que se dá noticia do seu descobrimento, e tudo o mais que nelle tem succedido desde o anno em que foy descuberto até o de 1718 : offerecidos ao augustissimo Monarca D. Joaõ V. Nosso Senhor. Escritos por B E R N A R D O P E R E I R A D E

(*) « Trente à quarante lieues sur la côte de la mer... » («pella costa do mar trinta té quarenta leguas... » ) ; et, plus loin, « trente-cinq à quarante lieues de côte maritime ». Les 30, 35 ou 40 lieues portu­ gaises, de 1 7 1/2 au degré, doivent d o n c être comptées sur la côte maritime, à partir d u C a p d e N o r d , et n o n sur la rive gauche d u fleuve des A m a z o n e s , qui n'est pas u n e côte maritime. TITRE

1


( 28 ) BERREDO,

17

e

LECTURE

§§

1875-1876

do Conselho de Sua Magestade, Governador, e Capi-

taõ General, que foy do mesmo Eslado, e de Mazagaõ. Lisboa. FRANCISCO LUIZ A M E N O .

M. DCC. XLIX. » In-f°, 683 pages de

texte. Bibliothèque impériale de Paris, Fol. 0. 1055. Ils ont été reproduits dans une seconde édition du m ê m e ouvrage, imprimée à M a r a g n a n , en 1849-1851, aux frais de M . le D P E D R O N U N E S L E A L . Et M. D ' A V E Z A C les a donnés en français dans son travail de 1857, page 210 du Bulletin de la Société de Géographie de Paris, 122 du tirage à part. R

1875. Ce titre fondamental fut produit en 1699, par le cabinet de Lisbonne, dans la discussion qui précéda le Traité de 1700. Et le président R O U I L L É , ambassadeur de Louis XIV, reconnut que la rivière marquée dans ce document c o m m e limite septentrionale du Brésil, était bien l'Oyapoc, la rivière du Cap d'Orange. Il prétendit seulement que la donation était caduque, parce que, disait-il, la prise de possession n'avait pas été suivie d'habitation actuelle. 1876.

Le m ê m e titre a été allégué en 1855, par M. le dans la conférence de Paris. Et M. le B A R O N D E B U T E N V A L , Plénipotentiaire de France, a cru préférable cette autre réponse :

VICOMTE D E L'URUGUAY,

« Il semble au Plénipotentiaire Français que l'honorable Plénipotentiaire du Brésil arrive à prouver seulement, ou que le Roi P H I L I P P E IV, non content des couronnes de Por­ tugal et d'Espagne, cherchait encore à usurper sur celle de France(*); ou (ce qui est plus vraisemblable) que les

(*) Il faut r e m a r q u e r

ici, puisqu'on

a parlé d'usurpation, que le

littoral de la G u y a n e et le fleuve S a n t a M a r i a d e la M a r D u l c e , o u M a r a ñ o n , puis A m a z o n e s , furent découverts dès le xv° siècle TITRE

1


§

1877

e

17

LECTURE

( 29

)

employés de sa chancellerie n'avaient pas de notions géo­ graphiques bien exactes... — Le Plénipotentiaire Français pense que l'honorable Plénipotentiaire du Brésil n'entend pas insister sur la valeur d'un document pareil. » Mais le n o m de Rivière de Vincent Pinçon avait été introduit sur le littoral de la G u y a n e par les E s p a g n o l s . Les cartes gravées au xvi siècle, — c o m m e le montre leur nomenclature, — n'avaient admis la rivière de Vin­ cent P i n ç o n que d'après les cartes manuscrites espa­ gnoles et portugaises. Depuis l'année 1632, la totalité du delta de l'Amazone, y compris le C a p d u Nord, se trouvait au pouvoir des Portugais, assujettis au Roi d'Espagne. Si donc, en 1637, la chancellerie du Roi d'Espagne et de Portugal ignorait la distance du C a p d u N o r d à la rivière de V i n c e n t P i n ç o n , qui pouvait la savoir? 1877. Cette considération frappante a suscité dans l'esprit de M . D ' A V E Z A C u n nouveau système de réfutation, ainsi formulé par l'ingénieux critique : e

« Qui voudra croire que P H I L I P P E IV, Roi des E s p a g n e s (le Portugal y compris), ait pu créer sur la rive gauche du bras le plus occidental de l'Amazone, une capitainie por­ tugaise, telle qu'au dire de B E R R E D O ce monarque l'aurait concédée, le 14 juin 1636, à B E N T O M A C I E L P A R E N T E , qui avait été commandant de Pará! Les termes de la donation, connue seulement par la citation de B E R R E D O , sont très significatifs : il s'agit « des terres qui gisent au C a p N o r d , « en comptant trente-cinq à quarante lieues sur le littoral « depuis ce cap jusqu'à la rivière de V i n c e n t P i n ç o n , « où c o m m e n c e le département des I n d e s du royaume de « Castille, et à l'intérieur, en remontant l'Amazone le

par les Espagnols et explorés et occupés ensuite par des sujets d u Roi d ' E s p a g n e avant que d'autres E u r o p é e n s eussent essayé de s'éta­ blir dans ces parages. TITRE

1


(

30

)

e

17

LECTURE

§

1877

« long du canal qui débouche à la mer, quatre-vingts à « cent lieues jusqu'à la rivière des T a p u y a u s s ú s . » « Si cet acte est réel, il ne le peut être qu'à la condi­ tion de s'accorder avec les idées ayant cours chez le prince qui l'octroye. E n ce cas, d'AcuñA, l'envoyé de P H I L I P P E IV en ces parages m ê m e s , nous dicte la seule interprétation rationnelle, et nous savons à quoi nous en tenir : l'Ama­ z o n e véritable, ainsi qu'il le déclare, c'est la branche ou rivière de Pará, au bord oriental de laquelle sont précisé­ ment établis les Portugais ; et c'est la terre au delà qu'on veut tenter de coloniser. Le Cap du Nord de la rivière de Pará, c'est ce que nous appelons aujourd'hui la pointe de Magoari ; voilà où commencera la capitainie nouvelle. D e ce point, comptez à l'Ouest trente-cinq ou quarante lieues pour arriver à la rivière de Vincent P i n ç o n , et vous aboutirez en effet à ce bras occidental où G A B R I E L S O A R E S vous a déjà montré la rivière de Vincent P i n ç o n , sous l'équateur m ê m e . D e ce cap de M a g o a r i , comptez, d'autre part, en remontant la rivière de Pará, quatre-vingts à cent lieues, et vous atteindrez le fleuve des T a p u y a u s ­ sús c o m m e écrit B E R R E D O , O U des T a p a j o s o s c o m m e dit A C U Ñ A , ou Topajós c o m m e portent nos cartes modernes. « Dans ces conditions géographiques, la concession est possible, naturelle; disons plus, elle a dû être réellemenl ainsi effectuée ; car le père A N T O I N E V I E I R A , dans un m é ­ moire au Roi de Portugal, du 2 8 novembre 1659, constate que le gouvernement général de M a r a g n a n , attaqué du côté de Ceará par les Tobaj5ras, et du côté du C a p d u N o r d par les N h e e n g a h i b a s , se trouve ainsi assiégé et bloqué à ses deux extrémités : or l'habitat des N h e enga­ híbas, bien connu sur les terres de Marajó et nullement sur la rive gauche de l'Amazone actuelle, caractérise suffisamment l'extension véritable de la frontière portu­ gaise de ce côté, et confirme d'autant la synonymie incon­ testable de la rivière de V i n c e n t P i n ç o n avec le bras le TITRE

\


e

§§ 1878-1880

17

( 31 )

LECTURE

plus occidental de l'Amazone, c o m m e limite extrême de l'Amérique portugaise (*). » 1878. E n soutenant cette thèse, l'honorable M. D ' A V E Z A C se compromet grandement aux yeux des Brésiliens; car la situation de l'ancienne capitainerie du C a p d u Nord, tout entière dans le continent de la G u y a n e , est au Brésil u n fait de notoriété universelle. Mais, c o m m e le n o m de M. D ' A V E Z A C pourrait séduire des étrangers habitués à admirer la sûreté de son savoir, il faut que je m e résigne à la tâche pénible de mettre à nu, chez u n h o m m e hautement estimable, une attristante énormité. 1879. Sans faire attention à la fausse date de 1636, prise par M . D ' A V E Z A C à M M . A C C I O L I et B A E N A , et non à la source de B E R R E D O , constatons d'abord que l'Acte de 1637 est réel. 1880. L'authenticité des Lettres patentes du 14 juin 1637 ne s'appuie pas uniquement sur B E R R E D O . La première inscription de cet acte, faite le 15 août de la m ê m e année par M A N O E L F E R R E Y R A , greffier de la ChancellaríaMór du R o y a u m e de Portugal, existe encore à Torre do Tombo, c'est-à-dire aux Archives Royales de L i s b o n n e , dans u n livre in-folio portant sur le dos le

(*) D'AVEZAC prétend ainsi que l'Ile de Marajó,

o u de Joanes,

se trouve le cap M a g o a r i , formait la partie principale de la Capitainerie du

Gap

de Nord,

créée en 1637. C A E T A N O D A SILVA réfute

victorieusement cette supposition, m a i s il y a u n fait qui, s'il avait été produit ici, aurait rendu superflue la savante argumentation l'auteur : —

c'est q u e par Lettres patentes d u 2 0 septembre 1665,

alors que la Capitainerie retour à la Couronne,—

du Cap l'ile

de Nord

de Joanes

n'avait pas (Marajó)

de —

encore fait

fut constituée

en Capitainerie au profit de A N T O N I O D E S O U Z A D E M A C E D O , ancien a m ­ bassadeur en H o l l a n d e et secrétaire d'État, ou Ministre des affaires étrangères. TITRE 1


( 32 )

e

17

LECTURE

§§ 1881-1882

titre de = D. Felipe III. Doaç. Liv. 34. = , et revêtu de trois signatures autographes, dont l'une, à la fin du volume, est celle de C H R I S T O V A Õ D E M A T T O S D E L U C E N A , Gardien-Major de Torre do Tombo, attestant, le 23 juillet 1642, que ce livre y fut reçu de la Chancellaria Mór du R o y a u m e ce jour-là. Par l'entremise de l'illustre H E R C U L A N O , j'ai pris moim ê m e à Torre do Tombo, au mois de mars 1852, une copie intégrale des Lettres de donation du 14 juin 1637, inscrites dans ce registre officiel de folio 2 à folio 5 verso. Et j'aurai le plaisir de publier ce grand document parmi les pièces justificatives du présent travail. L'Acte du 14 juin 1637 est donc réel, de la plus réelle réalité. 1881. E h bien, cet acte royal, é m a n é de la chancellerie qui devait le mieux connaître la rivière de V i n c e n t Pin­ çon, déclare en toutes lettres, non pas une, mais six fois, que l'on compte du Cap du Nord à la rivière de Vincent Pinçon, un littoral de 35 à 40 lieues. 1882. M . D ' A V E Z A C prétend que cette distance ne doit pas être mesurée sur le littoral de la G u y a n e , mais bien sur la côte septentrionale de l'ile de Marajó. Mais l'honorable M. D ' A V E Z A C part de ces deux pré­ misses : Qu'en 1637, l ' A m a z o n e véritable, pour les E s p a g n o l s et pour les Portugais, était la branche ou rivière du Pará : Qu'en 1637, le véritable C a p d u N o r d , pour les Espa­ gnols et pour les Portugais, était la pointe M a g u a r i de l'île de Marajó, la pointe Nord de la branche ou rivière du Para. Or, la quatorzième lecture a montré longuement que ces deux prémisses sont fausses et ne proviennent que d'une TITRE 1


§

1882

e

17

LECTURE

( 33 )

interprétation indue des textes allégués par M . D'AVEZAC. E n 1637, c o m m e à toutes les époques avant et après, tout le m o n d e étendait l'embouchure de l ' A m a z o n e jus­ qu'au continent de la G u y a n e . E n 1637, c o m m e à toutes les époques avant et après, tout le m o n d e regardait

Cap

du

c o m m e le n o m

Nord

propre et exclusif de la pointe orientale de la G u y a n e . M . D'AVEZAC a beau écrire cap nord,

sans lettre majus­

cule ; cela ne fait qu'une cacographie, et pas autre chose. Après l'avoir imprimé en hollandais dans les années 1625 et 1630, et en latin dans l'année 1633, JEAN DE LAET imprimait en français, dans l'année 1640, le passage sui­ vant, qui fait connaître à la fois la véritable limite occi­ dentale de l'embouchure de l ' A m a z o n e

et la véritable

position du Cap d u N o r d , à l'époque de la création de la capitainerie brésilienne du G a p d u N o r d : « La continente qui borne cette riuiere [des A m a z o n e s ] deuers l'Occident, auance en m e r u n grand Cap sur la hauteur des deux degrés de la ligne vers le Nord ; lequel est n o m m é par d'aucuns Capo Race, par d'autres Cap de Nord,

& par ceux de nostre nation de Noord

Caep.

»

Dans leurs atlas manuscrits de 1627 et 1640, les cosmo­ graphes portugais ALBERNAZ et TEIXEIRA inscrivaient le nom

de Cabo

do Norte

sur la pointe

orientale de la

Guyane. Et sur sa dernière carte, TEIXEIRA ajoutait cette note à côté de la m ê m e pointe : « C a b o d o N o r t e e m altura de 2 graos do norte. » Ce

n'est

qu'en

1731, dix-huit ans après le Traité

d'Utrecht, que le chevalier d'AUDIFFRÉDY supposa,

le

premier, que le véritable C a p d u N o r d des anciennes cartes était la pointe Nord de la branche du Para. Ce n'est qu'en 1797, quatre-vingt-quatre ans après le Traité d'Utrecht, que NICOLAS BUACHE affirma, le premier, T.

II.

TITRE

I

3


( 34 )

e

17

LECTURE

§§ 1883-1885

que la pointe Nord de la branche du Para était effective­ m e n t le G a p N o r d des anciennes cartes. Buache a été suivi par M M . L E S E R R E C ,

D'AVEZAC

et

BONNEAU.

Mais que penser d'une cause que des esprits supérieurs ne savent défendre qu'en mettant le cœur à droite ! 1883. Le titre seul de capitainerie du Cap du Nord, donné par les Lettres patentes de 1037 aux terres de B E N T O M A C I E L , montre que cette capitaineri était située à l'Ouest de l ' A m a z o n e . E n outre du sens restreint du mot Cap du Nord, ce mot avait aussi, jusqu'au c o m m e n c e m e n t du xvii siècle, une acception étendue, aujourd'hui oubliée ; et cette accep­ tion étendue était celle de Guyane. e

Nous l'avons déjà établi ailleurs, et nous le verrons en détail dans cette m ê m e lecture. 1884. Indépendamment de la situation du C a p d u N o r d , qui suffit, à elle seule, pour anéantir l'interprétation donnée par M . D ' A V E Z A C à l'Acte de 1637, cet acte contient encore quatre preuves surabondantes de la méprise du docte novateur. 1885. 1° Pour la limite méridionale de la capitainerie du C a p d u N o r d , il faut compter quatre-vingts à cent lieues, en remontant l ' A m a z o n e le long du canal qui débouche à la mer. Dans le fait, tous les canaux du delta de l ' A m a z o n e débouchent à la mer. Quel peut donc être celui d'entre eux qui mérite par excellence cet attribut c o m m u n ? Évidemment, le canal qui longe le continent de la Guyane. Car ce canal guyanais est celui qui porte le plus prompTITRE 1


§

1886

17

e

LECTURE

( 35

)

tement à la m e r les eaux du lit de l ' A m a z o n e , par la double raison de sa moindre longueur et de sa plus grande rapidité, — rapidité tellement impétueuse, que ce canal est le seul qui refoule l'Océan et qui produise la pororoca. Aussi M. O S C U L A T I , intéressant explorateur du N a p o et de l'Amazone, a-t-il imprimé, en 1854, ce commentaire lumineux de l'Acte de 1637 : « Près du X i n g ù , l ' A m a ­ z o n e a une largeur immense et forme deux grands bras séparés par l'île vaste de Javari. Le bras gauche est celui de M a c a p à , qui débouche directement à lu mer. 1886. 2° Il faut remonter l'Amazone, le long du cana qui débouche à la mer, quatre-vingts à cent lieues jusqu'à la rivière des Tapajusus. M. D ' A V E Z A C , séduit par la ressemblance de ce n o m de Tapujusus avec celui de Tapujosos donné par A C U Ñ A au Tapajós, tient pour incontestable que cet affluent méridional de l'Amazone était la véritable borne intérieure de la capitainerie du C a p d u N o r d . Mais B E R R E D O , parlant d'une époque bien voisine de l'acte de 1637, distingue formellement Tapujusus et Tapajós. Car il dit, § 568, que dans l'année 1626, le capitaine P E D R O T E I X E I R A partit de la ville du Para à la recherche d'esclaves T a p u y a s ; « mais, arrivant à l'habitation des Tapuyusús, et apprenant qu'ils commerçaient dans le Tapajós avec une tribu fort nombreuse appelée du n o m de cette rivière, il se hâta de quitter l ' A m a z o n e , qu'il avait suivie jusqu'alors, et il pénétra dans cette autre rivière pendant douze lieues, jusqu'à une anse d'eau cristalline, ombragée d'arbres touffus. Il rencontra dans ce beau site les nouveaux T a p u y a s , déjà prévenus de cette visite par leurs amis les Tapuyusús. » Le cosmographe T E I X E I R A , trois ans après l'Acte de 1637, tranche la question encore plus nettement. TITRE

1


( 36

e

)

17

LECTURE

§

1887

Car, dans la dernière carte de son atlas de 1640, il écrit Prouincia

dos Tapuyos-sus,

dans la rive guyanaise du

tronc de l ' A m a z o n e , immédiatement

à l'Ouest

d'une

rivière a n o n y m e qui se jette dans le grand fleuve tout près de sa bifurcation. Et encore en 1687, la première carte de la cinquième partie du Flambeau

de VAN K E U L E N , construite évidem­

ment sur des matériaux portugais, présente sur la rive guyanaise de l'Amazone le n o m de « Prouencia de Indios Tapyjosus. » 1887.

3° Dans sa traduction de l'extrait des Lettres de

donation de 1637 publié par

BERREDO,

M.

D'AVEZAC

s'est

borné aux paroles que nous avons lues en tête de cet article (§ 1869). Mais chez

BERREDO

l'extrait est plus long.

M. D ' A V E Z A C l'a transcrit lui-même intégralement dans sa note finale cc ; malheureusement dans la langue portu­ gaise, inconnue à la presque totalité des lecteurs français. B E R R E D O donne encore ce qui suit : « Et de m ê m e aussi seront au dit B E N T O M A C I E L P A R E N T E et ses succes­ seurs, les îles qu'il y aura jusqu'à dix lieues au large en face de la démarcation des dites trente-cinq à quarante lieues de côte de sa capitainerie ; lesquelles [trente-cinq à quarante lieues] s'entendront mesurées en droite ligne, et pénétreront dans l'intérieur de la terre ferme de la manière susdite jusqu'à la rivière T a p u y a u s s ú s . »

M. D ' A V E Z A C dit à ce sujet, dans la m ê m e note : « Les îles jusqu'à dix lieues au large étant comprises dans cette donation, on voit que l'étendue de la concession, progres­ sant en longitude d'Est en Ouest pour arriver jusqu'à la rivière de V i n c e n t P i n ç o n , c'est-à-dire jusqu'au bras occidental de l ' A m a z o n e actuelle, dut en m ê m e temps progresser en latitude vers le Nord pour englober les îles voisines surajoutées ; la limite extrême de la concession TITRE

1


§

1887

e

17

LECTURE

( 37

)

ainsi mesurée put donc aller atteindre la P o n t a - G r o s s a ou cap méridional de l'Araouary. » Mais les termes de la donation font bien entendre que les trente-cinq à quarante lieues de côte de la nouvelle capitainerie se trouvaient dans le continent : « elles péné­ treront dans l'intérieur de la terre-ferme de la manière susdite. » Marajó, où M. D ' A V E Z A C prétend situer la capitainerie du C a p d u N o r d , est une Î L E , bien connue des Portugais c o m m e telle longtemps avant l'année 1637; car, ainsi que le raconte B E R R E D O , aux numéros 502-512 de ses Annales, B E N T O M A C I E L lui-même, le donataire de la capitainerie du C a p d u N o r d , avait remonté, en juin et juillet 1623, toute la branche du Pará et tout le canal qui joint cette branche au tronc de l'Amazone, et il avait fondé à l'extrémité occidentale de ce canal le fort de G u r u p á (§ 47). Et si le docte critique s'était souvenu de la teneur générale des premières Lettres de donation du territoire brésilien, octroyées par le roi J E A N III, teneur qu'il con­ naît bien, c o m m e le prouve son travail, page 120 du Bulletin de la Société de Géographie, page 3 2 du tirage à part ; s'il s'était souvenu de la teneur spéciale des Lettres de donation d e P E R O L O P E S , datées d'Evora le 21 janvier 1535, et publiées par M. D E V A R N H A G E N dans le Diario du m ê m e P E R O L O P E S , publication qu'il connaît également, c o m m e le prouve encore son travail, page 114 Du Bulletin, page 26 du tirage à part : le docte critique ne se serait pas trompé sur l'Acte de 1637. Ainsi que celles de B E N T O M A C I E L , toutes les lettres primitives de donation du territoire brésilien s'accordent à dire que les lieues marquées sur la côte de la m e r pénétreront D A N S L ' I N T É R I E U R D E L A T E R R E - F E R M E tant que le permettront les droits de la couronne portugaise. Ainsi que celles de B E N T O M A C I E L , toutes déclarent que le donataire possédera aussi « les îles qu'il y aura en TITRE. I


( 38

)

e

17

LECTURE

§

1887

face de sa démarcation jusqu'à dix lieues au large de la côte. » Sur ce point, les Lettres de donation de P E R O L O P E S offrent u n détail qui les distingue des autres; mais ce détail devient u n commentaire décisif de l'Acte de 1637. Voici ce que dit le Roi J E A N III dans les Lettres de P E R O : « Je trouve bon et il m e plaît de lui faire donation irrévocable de 80 lieues de terre sur la côte du Brésil, partagées de cette manière : 40 lieues c o m m e n ç a n t douze lieues au Sud de l'île de Cananéa... : 10 lieues c o m m e n ­ çant à la rivière Curparê... ; et les 30 lieues restantes commenceront à la rivière qui entoure l'île d'Itamaracá.... Et de m ê m e seront à lui toutes les autres îles qu'il y aura jusqu'à 10 lieues au large en face la démarcation des dites 80 lieues. Lesquelles 80 lieues s'entendront et seront en largeur le long de la côte, et pénétreront dans l'intérieur de la terre-ferme autant qu'elles le pourront d'après les droits de m a conquête. » LOPES

Remarquons cette expression : Toutes L E S A U T R E S îles. L'acte de 1535 s'est exprimé de la sorte, parce qu'il venait de n o m m e r les îles de Cananéa et Itamaracá. L'acte de 1637 dit simplement : Les îles. C'est qu'il n'avait encore parlé d'aucune île. O n voit bien qu'il n'y a à songer ni à l'île de Marajó, ni aux îles de M e x i a n a et C a v i a n a , ni au groupe de Bailique. A u x termes m ê m e s de l'Acte royal, la capitainerie du C a p d u N o r d se trouvait dans le continent. Or, c o m m e nous allons le voir, le continent oriental de l ' A m a z o n e était demeuré réservé pour la Couronne. La capitainerie concédée à B E N T O M A C I E L , la capitainerie brésilienne du C a p d u N o r d , se trouvait donc forcément dans le continent occidental de l ' A m a z o n e , c'est-à-dire dans la Guyane. TITRE

1


§§ 1888-1889

e

17

LECTURE

( 39 )

1888. 4° M. D ' A V E Z A C déclare, dans une note, qu'une lecture passagère et rapide du document entier, lui a donné lieu de croire que « tout ce qu'il y a d'essentiel pour la discussion actuelle, dans cette pièce tant de fois invoquée à rencontre des droits de la F r a n c e , se trouve renfermé dans l'extrait de B E R R E D O . » Cela est rigoureusement vrai, puisque B E R R E D O a con­ servé l'indication fondamentale de Cap du Nord, et les indications subsidiaires de « canal de l'Amazone qui débouche à la mer », de rivière des Tapujusus, et de terre-ferme. Mais le document entier présente encore une autre indication, qui aurait dû frapper l'honorable M. D ' A V E Z A C et le faire renoncer à son innovation. P H I L I P P E III de Portugal rappelle qu'il avait décidé, par lettres patentes du 13 avril 1633, que les deux capi­ taineries particulières de M a r a g n a n et Pará demeureraient réservées pour la couronne, et que celle du Para « com­ mencerait à la pointe de la rivière M a r a c a n á , remonterait la bouche du Pará, et finirait à la. première chute de la rivière des Tocantins. »

Les lettres patentes de 1637 distinguent donc, expli­ citement, la branche du Para et le canal de l'Amazone qui débouche à la mer. C'est sur ce canal qu'elles établissent la limite méri­ dionale de la capitainerie du C a p d u N o r d . Elles ne l'établissent donc point sur la branche du Pará. 1889.

Mais voici une preuve au-dessus de tout.

La situation guyanaise de la capitainerie brésilienne du C a p d u N o r d a été formellement proclamée, en 1641, par le témoignage public du père espagnol A C U Ñ A , « l'en­ voyé de M.

PHILIPPE

IV en ces parages m ê m e s », c o m m e dit

D'AVEZAC TITRE

1


(

40

)

17

e

LECTURE

§

1890

N o u s nous s o m m e s déjà convaincus, à la quatorzième lecture, que le Père A C U Ñ A , faisant c o m m e tout le m o n d e a fait de tout temps, entendait par rive septentrionale de l ' A m a z o n e la rive guyanaise; et qu'il prolongeait cette rive, c o m m e tout le m o n d e le fait de nos jours, jusqu'au Cap du Nord. E h bien, dans le m ê m e volume, le m ê m e Père dit encore ce qui suit :

ACUÑA

N° L X X I V . « La majestueuse rivière des T a p a j o s o s débouche dans l ' A m a z o n e par le côté du Sud. » V L X X V I . « A u n peu plus de quarante lieues de l'embouchure de la rivière des Tapajosos, on trouve la rivière de C u r u p a t u b a , qui se jette dans l ' A m a z o n e du côté du Nord. » N° LXXVII. « La rivière de G i n i p a p e coule égale­ m e n t du côté du Nord, et débouche dans l'Amazone soixante lieues plus bas que celle de C u r u p a t u b a . . . . Les terres arrosées par cette rivière sont de la capitainerie de B E N I T O M A Z I E L P A R I E N T E , gouverneur duM a r a g n a n . . . .Elles se trouvent T O U T E S du côté du N O R D . » 1890. Et il n'y a rien de surprenant à ce que le Roi d'Espagne ait adopté en 1637 une mesure contraire à l'interprétation que l'Espagne avait toujours donnée au Traité de Tordesillas, lequel, d'après elle, faisait terminer la part du Portugal beaucoup à l'Est de la branche du Pará. Depuis 1580, le Portugal appartenait à l'Espagne. L'Acte international du 7 juin 1494 était devenu pure­ m e n t administratif. Aussi, c o m m e nous venons de le voir, le méridien de démarcation de Tordesillas avait déjà été considérable­ m e n t reculé vers l'Ouest par les Lettres patentes du 13 avril 1633, qui portaient jusqu'au T o c a n t i n s la limite occi­ dentale de la capitainerie brésilienne du Para. TITRÉ. 1


§§ 1891-1892

e

17

( 41 )

LECTURE

Et une modification bien plus profonde que celle de 1637 avait déjà été projetée quinze ans plus tôt. Il existe au

Muséum

Britannique de L o n d r e s ,

Egertonian Collection, manuscrit

1131, folio

36, —

un

document espagnol de l'année 1622, dans lequel, après avoir rappelé u n ordre ministériel du 4 novembre 1621 sur les m o y e n s à prendre pour peupler et fortifier toute la côte de la G u y a n e depuis l'Amazone jusqu'à l'Orén o q u e , on ajoute les paroles suivantes : « Bien cette

conquête

que

soit de la Couronne de Castille, on

pourrait la confier aux Portugais, car

cela leur va

mieux. » Et le rapprochement des dates fait voir que le Cabi­ net de M a d r i d fut poussé à ce projet par la création de la Compagnie hollandaise des Indes Occidentales le 3 juin 1621, dont les Lettres patentes se trouvent résu­ mées dans l'excellent ouvrage de M.

NETSCHER,

publié

à la H a y e , en 1853, sous le titre de Les Hollandais

au

Brésil (§ 1603). 1891.

Il est donc indubitable que Capitainerie D U veut dire Capitainerie D E L A G U Y A N E , et que c'est sur le littoral de la G u y a n e qu'il faut compter la distance du C a p d u N o r d à la rivière de V i n c e n t Pinçon. CAP

D U

1892.

NORD

Mais le C a p

du

Nord

se trouve dans les

cartes sur deux positions différentes : A la pointe continentale séparée de l'île M a r a c á par le canal de Carapapori, c o m m e c'est depuis longtemps l'usage général : Et à la pointe Nord de l'île M a r a c â , ainsi qu'on le voit dans plusieurs dans

cartes

françaises, et

celle de F R O G E R , dressée TITRE

1

notamment

à C a y e n n e en 1696,


( 42 )

17

e

§§ 1893-1896

LECTURE

sur les mémoires du M A R Q U I S D E F E R R O L L E S , qui connais­ sait par lui-même les deux positions. Lequel de ces deux C a p s d u N o r d pour point inchoatif de notre mesurage?

faut-il prendre

1893. Il faut prendre celui de M a r a c á . Pour deux raisons. 1894. D'abord la capitainerie du C a p d u N o r d était portugaise, et le C a p d u N o r d portugais est celui de M a r a c á . M. L E S E R R E C le reconnaît lui-même, à la page 34 de son travail philamazonien de 1847 : « La ressemblance du n o m de M a r a c á avec celui de Marajó [!!!] pour­ rait expliquer le transport du C a p N o r d d'une île à l'autre par les Portugais, qui le marquent toujours sur l'île, et non c o m m e nous sur la terre voisine. » 1895. E n second lieu, c'est réellement à la pointe Nord de l'île M a r a c á que le n o m de C a p d u N o r d appartenait en propre. C'est u n fait mis hors de doute par le texte du Français P A U L B O Y E R , dans la relation de son à C a y e n n e avec B R É T I G N Y , écrite à C a y e n n e imprimée à Paris, en 1654, et conservée à la thèque Impériale de Paris, 8° 0. 1795 :

suivant voyage même, Biblio­

Page 71. « Le vingt & deuxiesme & le vingt-troisiéme [de novembre 1643] nous ne fismes que costoyer la terre, & nous passâmes à la veuë du C a p de N o r d , qui est u n e pointe grandement auancée dans la mer, & directement opposée au lieu dont elle est surnommée. » Directement opposée A U

NORD !

Ce n'est donc pas le C a p N o r d vulgaire ; Car celui-ci, au s o m m e t d'un triangle dont la base est formée par une ligne Nord-Sud tirée du Carapapori à l'Araguari, regarde directement L ' E S T . 1896. C'est et ce ne peut être que la pointe Nord de l'île M a r a c á . TITRE

1


§

1897

17

e

LECTURE

( 43

)

Gela est si vrai, que l'île M a r a c á a conservé chez les Français eux-mêmes, le n o m d'Ile du Cap Nord, long­ temps après qu'ils ont contracté l'habitude de situer le C a p N o r d au Sud de cette île. S I M O N M E N T E L L E , dans sa carte de la G u y a n e F r a n ­ çaise, dressée à C a y e n n e en 1778 par ordre du gou­ vernement, et publiée en 1780 (réduite) dans le n° 32 de l'atlas de R A Y N A L , — bien que situant le C a p N o r d dans la prétendue île séparée du continent par les deux prétendus bras de l'Araguari, — bien que marquant tout près de ce cap l'île de Paraitari, — n'applique pourtant pas le n o m d'île du C a p N o r d à aucune de ces deux îles. C'est dans l'intérieur de l'île de M a r a c á qu'il place cette inscription : « M a r a c a ou Isle du Cap Nord (*). »

1897. Et le fait est justifié par le droit. La nature a imprimé à la pointe Nord de l'île de M a r a c á des traits hydrographiques qui ont dû frapper vivement les marins qui fréquentaient la G u y a n e depuis l'Amazone jusqu'à l'Oyapoc. C'est ce que prouvent les témoignages de trois m o ­ dernes explorateurs Français de cette côte : M. P E N A U D , Ai. R E Y N A U D , et

M.

ÉMILE

CARREY.

Al. P E N A U D . « Dès qu'on a doublé la pointe de M a ­ racá [en sortant de l'Amazone], le fond augmente et les eaux changent de couleur. » M. R E Y N A U D . « La hauteur de la marée n'est nulle­ ment uniforme; son m a x i m u m est à l'île de M a r a c á , et à partir de ce point, elle décroît progressivement, d'une part vers la baie d'Oyapock, de l'autre vers l'embouchure de l'Amazone. » AI.

ÉMILE

CARREY.

« La prororoca se lève par le tra-

(*) W A L C K E N A E R en 1837 : « L'île de M a r a c á ou du Cap Nord n'est séparée de l'embouchure de la M a p a que par u n canal de deux lieues ». ( T o m e L X X V des Nouvelles Annales des voyages, p. 14.) TITRE

1


e

( 44 )

17

§§ 1898-1899

LECTURE

vers de M a r a c á , au-dessus du cap N o r d , et vient, ran­ geant la côte, mourir dans la grande bouche, pour repren­ dre à toute force sur les bancs de B r a g a n c e et au long de l'île de C a v i a n n a . » 1898.

Et pour plénitude de conviction, le C a p N o r d

européen n'est pas dans le continent de la N o r v è g e , mais dans l'île Mageroë. 1899. Comptons maintenant. La distance du C a p d u N o r d à la Rivière de V i n c e n t P i n ç o n , six fois marquée dans les Lettres patentes de P H I L I P P E III de P o r t u g a l , est de trente-cinq à quarante lieues. Ce sont des lieues portugaises. Elles étaient, depuis le c o m m e n c e m e n t du xvi siècle, jusqu'au c o m m e n c e m e n t du xviii , de dix-sept et demie au degré, c o m m e le montrent F E R D I N A N D C O L O M B en 1524 e

e

et P I M E N T E L en

1712.

Cela fait la valeur de deux degrés à deux degrés dixsept minutes. Ce n'est pas une indication privée, basée sur des cartes générales construites dans u n autre but. C'est le résultat de l'étude directe et officielle de la côte concédée. C'est l'indication du u n m û r examen.

Gouvernement

suprême, après

L'Acte royal de 1637 renferme lui-même ces deux décla­ rations : Que l'assurance d'une concession de capitainerie dans la région amazonienne avait déjà été donnée â B E N T O M A C I E L P A R E N T E par Lettres patentes du 18 mai 1634 : Q u e le Gouvernement ne réalisa cette promesse qu'après avoir pris les informations nécessaires. Prenons donc la meilleure carte des parages qui nous occupent : la « Carte du littoral de la Partie méridionale TITRE

1


e

§ 1900

17

LECTURE

de la G u y a n e », dressée en 1850 par M.

( 45 ) D E SAINT-QUANTIN

et publiée en 1858 dans la Revue coloniale. La valeur de deux degrés nous m è n e du C a p N o r d de M a r a c á à u n point intermédiaire entre le C a c h i p o u r et l ' O y a p o c , sur une côte dépourvue de cours d'eau. La valeur de deux degrés dix-sept minutes nous m è n e du m ê m e cap à deux minutes au Nord du C a p d'Orange, en dedans de la baie d'Oyapoc. 1900.

Refuse-t-on, pour l'année 1637, un autre C a p

d u N o r d que celui d'aujourd'hui ? Refuse-t-on, pour l'année 1637, u n mesurage exact de la côte méridionale de la G u y a n e ? Que l'on veuille alors écouter cette autre considération : Les trente-cinq à quarante lieues portugaises font 50 à 57 lieues françaises (*). Or, bien que les cartes les plus récentes, c o m m e celle de M . D E M O N T R A V E L en 1844 et celle de M. D E S A I N T Q U A N T I N en 1850, mettent beaucoup plus de 57 lieues fran­ çaises entre le C a p N o r d et l'Oyapoc, les anciennes cartes ne séparaient pas autant ces deux points. Encore en 1749, clans le texte de son édition acadé­ mique, L A C O N D A M I N E , qui avait relevé lui-même la côte méridionale de la G u y a n e , depuis l'Amazone jusqu'à C a y e n n e , ne mettait entre l'Oyapoc et le Carapapori que 50 lieues. Encore en 1838, les « Notices statistiques sur les Colo­ nies Françaises », publication officielle du Gouvernement Français, ne donnaient, de l'Oyapoc

au Carapapori,

que 45 à 50 lieues. Et de la rive gauche du Carapapori au C a p d u N o r d , la carte de L A

CONDAMINE

marque 8 lieues.

(*) 50 à 57 lieues françaises de 25 au degré, soit 40 à 45,7 lieues de 20 au degré. TITRE

1


(

46

)

17

e

LECTURE

§

1901

Donc, de nos jours encore, le Gouvernement Français lui-même, et justement le Ministère de la Marine et des Colonies, ne comptait du C a p d u N o r d à l'Oyapoc que 53 à 58 lieues françaises. C'est précisément la distance marquée en 1637 par le Gouvernement Portugais, entre le C a p d u N o r d et la rivière de Vincent P i n ç o n . 1901. O ù que l'on place le C a p d u N o r d existant, il est donc certain que la limite septentrionale assignée au Brésil dans la Concession royale du 14 juin 1637, est la rivière du Cap d'Orange. Le premier titre du Brésil demeure inébranlable.

TITRE

1


§§ 1902-1903

17

DEUXIÈME

e

( 47 )

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Document Français en 1637. 1902. « Description Generale del ' A m e r i q u etroisiesme partie du Monde. Auec tous ses empires, royaumes, estats, et republiques. Où sont deduicts & traictés par ordre leurs noms, assiette, confins, mœurs, richesses, forces, gouuernement, & Religion : Ensemble la Genealogiedes Empereurs, Roys, & Princes souuerains lesquels y ont dominé iusques à nostre temps. Faicte par P I E R R E D ' A V I T Y Seigneur de Montmartin, Gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roy. A Paris. Chez Claude Sonnius, ruë sainctlacques,à l'Escu de Basle, & au Compas d'or. M.DC. XXXVII. » In-folio, 189 pages de texte. Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine à Paris, Fol. 3237. Page 111 : « P A I S des C A R I P O V S , ou D ' Y A P O C O . Ce pays porte le n o m de ses habitans n o m m e z Caripous, & celui d'Yapoco, à cause de la riuiere qui l'arrose. C'est celle que H A R C O U R T appelle VViapoco..., dont l'embouchure est enuiron les quatre degrez du costé du Nord. » 1903.

C'est une pierre d'attente.

TITRE

2


e

17 LECTURE

( 48 )

TROISIÈME

Document

TITRE

Espagnol

DU

en

§ 1904

BRÉSIL

1641.

1 9 0 4 . « NVEVO || DESCVBRIMIENTO || DEL GRAN RIO DE LAS || AMAZONAS. || POR EL PADRE CHRISTOVAL || DE ACUÑA. Religioso||de la Compañia || de Iesus, y Calificador de la Suprema || General Inquisicion. || AL QVAL FVE, Y SE IIIZO POR ORDEN||de su Magestad, el año de 1639. || POR LA PRO-

IVNCIA DE QVITO || en los Reynos del Perù, AL||EXCELENTISSIMO SEÑOR CONDE || D u q u e de Oliuares. || Con licencia; en Madrid, en la Imprenta del Reyno, || año de 1641. » Petit in-4°, 6 feuillets préliminaires n o n chiffrés, et 46 feuillets chiffrés. Bibliothèque Impériale de Paris, Réserve, 4° O. 1418. Numéro LXXVII : « La rivière de G i n i p a p e coule également du côté du Nord, et débouche dans l ' A m a z o n e soixante lieues plus bas que celle de C u r u p a t u b a . Les Indiens parlent tant d e la grande quantité d'or que l'on peut ramasser sur ses rives, que, s'il en est ainsi, cette seule rivière suffira pour surpasser les plus grandes richesses de tout le P é r o u . Les terres arrosées par cette rivière sont de la capitainerie de BENITO MAZIEL PARIENTE, gouverneur du M a r a g n a n ; outre qu'elles sont, à elles seules, plus grandes que l'Es­ p a g n e tout entière, et qu'elles possèdent, à ce qu'on assure, des mines nombreuses, elles sont, pour la plupart, de la meilleure qualité, et peuvent rapporter beaucoup plus que toutes les autres terres qui existent dans l'im­ m e n s e région de l ' A m a z o n e . Elles se trouvent toutes du côté du Nord. »

TITRE 3


§ 1905

17

e

( 49 )

LECTURE

1905. Nous avons déjà vu, au titre premier, une partie de ce m ê m e texte. Mais c'était pour nous assurer de la véritable position de la capitainerie brésilienne du C a p d u N o r d ; c'était pour nous convaincre que cette capitainerie se trouvait réellement tout entière dans le continent de la G u y a n e . Maintenant le texte intégral nous fait apprécier l'im­ portance de cette m ê m e capitainerie, de ces terres appelées du Cap du Nord, objet du Traité de 1700 et du Traité d'Utrecht. L ' E s p a g n o l A C U Ñ A , venant d'habiter le P é r o u , où il était un grand personnage ; venant d'explorer officiellement, dans une étendue immense, les deux bords de l ' A m a z o n e ; venant de s'entretenir, au fort guyanais du Parú, avec le fils de B E N T O M A C I E L ; venant de séjourner trois mois dans la ville du Para, parmi les gens qui savaient le mieux ce que c'était que la capitainerie brésilienne du C a p d u N o r d : déclare par la presse, dans u n livre adressé au premier ministre d'Espagne, que cette capitainerie était plus riche en productions végétales que tout le reste du bassin de l ' A m a z o n e , plus riche en or que tout le Pérou, et plus grande à elle seule, que L ' E S P A G N E tout entière. Était-ce donc là, c o m m e l'a soutenu M. L E S C A L L I E R , c o m m e l'ont surtout ressassé M . D E S A I N T - Q U A N T I N et M . le B A R O N D E B U T E N V A L . le misérable recoin du C a p Nord, — dont la richesse végétale ne consiste qu'en palétuviers et en cambrousses, — dont la richesse minérale ne consiste qu'en fange, — et dont la grandeur, dans ces vastes régions, n'est qu'un point?

T. II.

TITRE 3

4


( 50 )

17

QUATRIÈME

Document

e

§§ 1906-1908

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Français en 1643.

1906. « Hydrographie contenant la théorie et la pratique de toutes les parties de la Nauigation. Composé par le Père G E O R G E S F O U R N I E R de la Compagnie de Iesus. Paris, Michel Soly, 1643. » In-folio, 922 pages de texte. Bibliothèque du Dépôt Général de la marine à Paris, 424. « Seconde Edition. Reueuë, corrigée & augmentée par l'Autheur auant son deceds... Paris... 1667. » In-folio. Bibliothèque Impériale de Paris, fol. Y, 501. 1. Dans chacune des deux éditions, liv. VI, chap. X X I X : « Le 27 de Iuin 163.3. Monsieur le Cardinal permit au sieurs R O S É E , & R O B I N , & leurs Associez Marchands de R o u e n , & D i e p e d'enuoyer au Cap de Nord, coste de l ' A m e r i q u e , depuis les trois degrez trois quartz de Nord iusques aux quatre degrez trois quarts y compris, vers la riuiere d'auant le vent, & celle de M o r a n i tel n o m b r e de Vaisseaux que bon leur semblera, deffendant à tout autre François d'y negotier dans dix ans sans leur permission. » 1907. Donc, déjà quatre ans avant la création de la capitainerie brésilienne du Cap du Nord, le Gouvernement Français lui-même employait ce n o m dans son acception étendue, c o m m e s y n o n y m e de Guyane. 1908. Mais le document de R I C H E L I E U constate encore deux faits : 1° Q u e dans l'année 1633 le Gouvernement Français assignait à l'Oyapoc, à la rivière du C a p d ' O r a n g e , la fausse latitude de trois degrés trois quarts : 2° Q u e le Cardinal D E R I C H E L I E U , réduisant à des pro­ portions pratiques la prétention qu'avait la F r a n c e d'ocTITRE

4


§§ 1909-1910

e

17

LECTURE

( 51 )

cuper la G u y a n e tout entière, depuis l ' A m a z o n e jusqu'à l'Orénoque, fixa à la G u y a n e Française ses limites actuelles, — le M a r o n i et l'Oyapoc. 1909. C'est bien l'Oyapoc qui formait la limite méri­ dionale de la Concession de 1633. Le m ê m e Acte, désignant le Maroni par son n o m , le met à la latitude de Q U A T R E degrés trois quarts. Mais les cartes de M . D E M O N T R A V E L et celle de M . Romontrent que la vraie latitude du M a r o n i est de C I N Q degrés trois quarts.

BIQUET

Donc, tout c o m m e il faut évidemment ajouter u n degré à la seconde des deux latitudes marquées dans l'Acte de 1633, de m ê m e faut-il porter l'autre latitude à Q U A T R E degrés trois quarts. 1910. Ainsi rectifiée, la latitude de la limite méridio­ nale de la G u y a n e Française en 1633 conviendrait mieux à l ' A p p r o u a g u e qu'à l'Oyapoc. Mais une autre indication du m ê m e Acte tranche la question en faveur de la rivière du C a p d'Orange. La concession,finissantau M a r o n i , commençait à la rivière d'avant le vent. Or, c o m m e on peut le voir sur toutes les cartes, y compris celle de M. D E S A I N T - Q U A N T I N et celle de M. D ' A V E Z A C , la côte de la G u y a n e suit du G a p d u N o r d à l'Oyapoc une certaine direction, et de l'Oyapoc au M a r o n i une direction toute différente. Jusqu'au terme oriental de l'Oyapoc, jusqu'au G a p d'Orange, la direction est du Sud au Nord, presque sans déviation. A partir du terme occidental de l'Oyapoc, à partir de la M o n t a g n e d'Argent, la côte s'infléchit tellement qu'elle court presque de l'Est à l'Ouest. Ce second système du littoral guyanais est balayé par TITRE

4


(

52

)

e

17

LECTURE

§

1911

des vents soufflant de l'Est, et ayant pour point de départ la M o n t a g n e d'Argent. Donc, pour ces parages, la rivière d'avant le vent est forcément l'Oyapoc. E

1911. Mais u n document que nous verrons au titre 12 enlève toute espèce de doute.

E n 1633, le Cardinal D E R I C H E L I E U fixait pour limite orientale de la G u y a n e F r a n ç a i s e la latitude septentrio­ nale de 3°45'. E h bien, en 1666, encore trente-trois ans après cet acte, u n gouverneur de C a y e n n e déclarait que la véritable limite orientale de la G u y a n e F r a n ç a i s e était le Cap d'Orange, et assignait à ce cap la latitude septentrionale de 3° 40'.

TITRE

4


§§ 1912-1913

e

17

CINQUIÈME

( 53 )

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Document Portugais en 1645. 1912. Les Archives Royales de L i s b o n n e , d'où j'ai copié m o i - m ê m e les Lettres de donation de la capitainerie brésilienne du C a p d u N o r d en 1637, renferment égale­ ment les Lettres de succession de cette capitainerie, en faveur du fils aîné de B E N T O M A C I E L P A R E N T E . Elles sont datées de L i s b o n n e le 9 juillet 1645, au nom

du

roi J E A N

IV.

1913. Je n'ai pas vu ce document. Mais M. D E V A R N H A G E N , qui l'a compulsé, et qui apprend, à la page 468 du tome second de son Historia Geral do Brazil, qu'il se trouve enregistré dans le livre I de la Chan­ cellerie de J E A N IV, folio 280, a eu l'obligeance de m'en fournir une copie. er

Les Lettres patentes du 14 juin 1637 s'y trouvent insé­ rées mot à mot, avec la déclaration, six fois produite, que la rivière de Vincent Pinçon, limite septentrionale de la capitainerie brésilienne du Cap du Nord, était éloignée du Cap du Nord jusqu'à la distance de quarante lieues por­ tugaises.

TITRE

5


( 54 )

e

17

SIXIÈME

TITRE

Document

§ 1914

LECTURE

DU

BRÉSIL

Français en 1651.

1914. « Lettres patentes du Roy [Louis XIV), en forme de Concession, accordées aux sieurs del'IsleMariuault, de Royuille & leurs Associez pour l'Etablissement de Colonies dans la Terre Ferme de l ' A m e r i q u e . » — « Donné à Paris au moys de Septembre, l'an de grace mil six cents cinquante vn. » Imprimé, in-4°, 8 pages, sans indication d'année ni de lieu. Bibliothèque Impériale de Paris, département des Manuscrits, dans le volume in-folio S. F. 303. Page 1. « Louis par la grace de Dieu R o y de F r a n c e et de N a u a r r e . A tous presens & aduenir, Salut. Nous ayant esté représenté par M L O U Y S D E L'ISLE M A R I U A U L T Prestre Docteur en la sacrée Faculté de Theologie à Paris, & M E S T I E N N E L E Roux Cheualier sieur D E R O Y U I L L E . Q u e le feu Roy d'heureuse memoire nostre tres-honnore seigneur & Pere, Reconnoissant qu'il n'y a rien de plus digne de la grandeur des Roys que d'establir la veritable Religion, n o n seulement dans l'estenduë de leurs Estats, mais aussi dans les lieux les plus éloignez du commerce ordinaire des h o m m e s : Auroit concedé à aucuns de nosdits sujets la Terre ferme du C A P D E N O R D en l'Amerique, depuis la Riuiere des A M A Z O N E S , icelle comprise iusques à la Riuiere d ' O R E N O Q U E , icelle pareillement comprise... à con­ dition » Page 2. « à quoy lesdits Associez de ladite Concession du Cap de Nord n'auroient aucunement satisfait ; En telle sorte que lesdits pays, terres & Isles du Cap de Nord, sont depuis long-temps, & à present denués de tous Habitans François » R E

R E

TITRE

6


§

1915

e

17

LECTURE

( 55

)

Page 3. « lesdits Associez du Cap de Nord Et d'autant que lesdits sieurs D E M A R I U A U L T & D E R O Y U I L L E , auec plusieurs autres de nos Sujets, se disposeroient volon­ tiers d'executer les bonnes intentions du feu Roy nostre tres-honoré Seigneur & Pere & les nostres, & qu'ils iroient en personne en ladite terre du Cap de Nord Page 5. « Avons par ces presentes, reuoqué & reuoquons ladite Concession faite à I A C O B B O N T E M P S & ses Associez ou ayans cause, soubs le titre de Compagnie du Cap de Nord, & en leur lieu & place : Avons subrogé & subrogeons par cesdites presentes. Donné & accordé, & donnons & accordons à perpetuité, tant que besoin est ou seroit, ausdits sieurs D E M A R I U A U L T & D E R O Y U I L L E & leurs Associez, leurs hoirs, successeurs & ayans cause, la pro­ prieté des fonds & tresfonds, & superficie des terres & eaux de quelque qualité & nature qu'elles soient & se trouueront, & tous fruits & reuenus naturels & artificiels qui s' pourront tirer dans l'enclos des bornes & limites portées par la Concession cy-deuant faite pour ledit Cap de Nord aux droits & priuileges contenus aux Contracts d'icelle du 9. Decembre 1638. Arrest de Ratification du 26. M a y 1640 » 1915. Voilà u n second témoignage français, et bien éclatant, en faveur de l'ancienne synonymie de Cap du Nord et Guyane.

TITRE

6


( 56 )

17

SEPTIÈME

e

TITRE

Document

§§ 1916-1917

LECTURE

DU

BRÉSIL

Français en 1653.

1916. « Lettre escrite de Cayenne ; contenant ce qvi s'est passé en la descente des François, & leur establissement enl'Amerique.A Paris, Guillaume de Luyne, 1653. » In-4°, 14 pages. Bibliothèque Impériale de Paris, dans le m ê m e volume du titre 6 . e

Bibliothèque du Dépôt 4°, 7144.

Général

de la Marine à Paris,

Page onze : « Le Bresil n'est pas vn si beau pays que le nostre, &

les Portugais

n'y ont pas si bien cõmencé que nous

faisons dans nostre Cap de Nort. » 1917. C'est u n troisième témoignage français de l'an­ cienne synonymie de Cap du Nord et Guyane.

TITRE

7


e

§§ 1918-1919

17 LECTURE

HUITIÈME

TITRE

DU

( 57 )

BRÉSIL

Document Français en 1654. 1918. « Relation du voyage des Francois fait au Cap de Nord en Amerique, par les soings de la Compagnie establie à Paris, & sous la conduite de Monsieur de Roy ville leur General; auec une ample description du Pays, des mœurs & façon de viure des Saunages, & obseruation des hauteurs. Dédiée à Madame la Duchesse d'Esguillon. Par I. de LAON Sieur DAIGREMONT, Ingenieur du Roy, & Capitaine dans les Troupes de la France Equinoctialle. A Paris, chez M.DC.LIV.» Petit in-8°, 200 pages. Bibliothèque Impériale de Paris, 8° O. 1795. Page 99 : « Ce pays est placé dans le nouueau m o n d e , d'assez grande estenduë, & fort agreable, quoyqu'il soit dans la zone torride, & contient depuis la riuiere des A M A Z O N E S , jusqu'au fleuue d ' O R E N O Q U E , &ce commencement s'appelle le C A P D E N O R T . » 1919. Quatrième témoignage français de la synonymie de Cap du Nord et Guyane.

TITRE

8


( 58 )

e

17

NEUVIÈME Document 1920.

§§ 1920-1921

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Français dans la même

année 1654.

« Veritable relation de tout ce qui s'est fait et

passé au voyage que Monsieur de Bretigny fit à Occidentale.

l'Amérique

Auec vne Description des Mœurs,

&

des

Prouinces de tous les Sauuages de cette grande partie du Cap de Nord

: vn Dictionnaire de la Langue, & vn aduis tres-

necessaire à tous ceux qui veulent habiter ou faire habiter ce Païs-là, ou qui desirent d'y establir des Colonies. Le tout fait sur les lieux, par

PAVL

BOYER,

Escuyer, Sieur de Petit-Puy.

A Paris, chez Pierre Rocolet, Impr. & Lib. Ordin. du Roy & de la Maison de Ville, au Palais. M. DC. LIV. Petit in-8°, 433 pages. Bibliothèque Impériale de Paris, 8° 0. 1795, dans la m ê m e reliure que l'ouvrage précédent. A la page 136, en tête d'un règlement donné par TIGNY,

CHARLES QUINT

BRÉ­

le titre de ce personnage est celui-ci : « Messire PONCET,

Cheualier, Seigneur

D E BRETIGNY, &

DU

de toutes les terres, qui sont situées aux Indes

dentales, entre les riuieres des A

M A Z O N E S

&

Occi-

D'ORENOQ,

lesdites riuieres y comprises, aussi bien que toutes les Isles qui sont tant en icelles, qu'en toute la dite estenduë, Conseiller du Roy en ses Conseils, Gouuerneur & Lieutenant General pour sa Majesté, sur toutes les terres susdites. » Et à la page 2, ce titre se trouve résumé en ces termes : « Monsieur

D E BRETIGNY

Gouuerneur & Lieutenant generai

pour le Roy au païs du

CAP

D E

NORT,

terre ferme de

l'Amerique. » 1921. Cinquième temoignage français de la syno­ nymie de Cap du Nord et Guyane. TITRE

9


§§ 1922-1923

17

e

( 59 )

LECTURE

DIXIÈME TITRE

DU

BRÉSIL

Document Français en 1655. 1922. « Relation historique et géographique, de la Grande Riuiere des Amazones dans l'Amerique, Par le C O M T E D E P A G A N . Extraicte de diuers Autheurs, & reduitte en meilleure forme. Auec la Carte d'icelle Riuiere, & de ses Prouinces. A Paris, chez Cardin Besongne. M. DC. LV. » Petit in-8°, pages X-199. Bibliothèque Impériale de Paris, 8° 0. 1796. Page 101 : « Mais ensuiuant le m e s m e cours de la Riuiere des A M A Z O N E S , & du costé du S E P T E N T R I O N : vous trouuez apres la Prouince d'Apante celle de Corope, qui estend ses limites iusques à la Riuiere de G e n i p a p e . . . . Cette Prouince a son N o m de la Riuiere de C o r o p a t u b e Elle est presque au milieu de sa longueur; & vn Village de m e s m e N o m , est sur son entrée dans le G r a n d A m a ­ zone, lequel est en paix & soubs l'obeïssance des Portugais D U R O Y A U M E D U B R A Z I L . » Page 103 : « Mais dans cette m e s m e Prouince de C o r o p e , sur le riuage S E P T E N T R I O N A L DE la grande Riuiere; & à 6. lieuës deuant que trouuer celle de G e n i p a p e est le Fort du Destierro, ou 30. P O R T U G A I S sont d'ordinaire en garnison, soubs vn Capitaine qui commande & regit toutes les contrées circonvoisines S A N S L I M I T E S D A N S L E U R S E S T E N DUËS. »

1923.

Nossa Senhora do

DESTERRO,

Notre Dame

de

L'EXIL, était l'invocation du fort du Parú, bâti par B E N T O MACIEL

PARENTE

à l'extrémité

occidentale

tainerie (§ 73). TITRE

10

de sa capi­


e

( 60 )

17

LECTURE

§ 1924

U n Français confirme donc, en 1655, le témoignage espagnol de 1641, sur la position et l'importance de la capitainerie brésilienne d u C a p d u N o r d . Il se prononce m ê m e avec plus d'énergie que l'Espa­ gnol. Car le Père ACUÑA s'était contenté de dire que les terres de BENTO MACIEL étaient plus grandes, à elles seules, que

l'Espagne

tout

entière.

Et le COMTE PAGAN affirme que les contrées régies par le c o m m a n d a n t du fort brésilien du Parú étaient SANS

LIMITES

dans

leurs

estenduës.

1924. Voici maintenant u n e curiosité remarquable. Ce m ê m e COMTE PAGAN, qui, dans son texte, reconnaît que les Portugais du Royaume du Brazil possédaient amplement les deux bords de l'Amazone, s'exprime en ces termes dans sa dédicace « A MONSEIGNEUR L'EMINEN-

TISSIME CARDINAL MAZARIN », datée de « Paris le

12.

Mars 1655 » : « Monseigneur, Q u e peut-on offrir de plus grand dans u n petit ouurage, que la grande Riuiere d e s A m a z o n e s . Elle se presente maintenant auec toutes ses grandeurs a V. E. apres les auoir si long-temps cachées. Elle vous d e m a n d e le Baptesme, pour tous ses Peuples. Elle vous d e m a n d e des Loix, pour toutes ses Nations. Et vn Roy valeureux,

pour

toutes ses Prouinces;

AFIN DE LES VNIR A SA

COURONNE. Si la conqueste en est facile, la despence n'en est point excessive Il ne faut que des Appareils conuenables, pour dresser d'abord cinq Colonies. La premiere dans l'Isle d u Soleil [dans le bras oriental de l'Amazone, tout à côté de la ville du Para, occupée par les Portugais depuis l'année 1616], pour garder la meilleure entrée de son Emboucheure : La seconde sur le B o s p h o r e fameux [le détroit de Pauxis, autrement dit O b i d o s , dans le tronc TITRE

10


§

1925

e

17

LECTURE

( 61

)

de l'Amazone], pour en défendre & conseruer le pas­ sage. » etc., etc. 1925. Et quand un Français parlait ainsi au premier ministre de son Roi, la F r a n c e entretenait avec le Por­ tugal la paix la plus cordiale. Et le Portugal possédait dans la G u y a n e le fort du Parú, depuis l'année 1638. Et en 1651, c o m m e nous l'avons déjà entendu, au titre 6, de la bouche m ê m e de Louis XIV, les terres de la G u y a n e étaient depuis long-temps dénuées de tous Habitans François.

TITRE

10


( 62 )

17

ONZIÈME

Document

e

§§ 1926-1927

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Français en 1664.

1926. « Voyage de la France Equinoxiale en l'isle de Cayenne, entrepris par les François en l'année M. DC. LU e

[sous Roy ville]. Divisé en troislivres....Par M A N T O I N E B I E T , Prestre, Curé de S Geneuiéue de Senlis, superieur des Prestres qui ont passé dans le Pais. A Paris. M. DC. LXIV. » In-4°. Bibliothèque Impériale de Paris, 4° 0. 1414. te

Preface, premiers mots : « Toute la F r a n c e a esté dans l'attente du succez de la genereuse entreprise de l'établissement d'une Colonie Françoise, dans cette partie de l'Amerique, que l'on appelle C A P - D E - N O R D , en l'isle de Cayenne. » Pages 1, 97, 329, titre de chacun des trois livres dont se compose l'ouvrage : « Recit veritable de ce qui s'est passé au Voyage entrepris par les F r a n ç o i s en la partie de l'Amerique Meridionale, appellée C A P D E N O R D , en l'isle de Cayenne. » er

e

Page 329, début du chapitre 1 du livre III : « Per­ sonne n'a iamais parlé jusqu'à present auec certitude, ny auec la pure verité de cette partie de l'Amerique qui est appellée C A P D E N O R D , & que nous appelions F R A N C E E Q U I ­ NOXIALE.

»

Page 399 : « Petit Dictionnaire de la Langue des Sauuages Galibis, en la partie de l'Amerique Méridionale, appellée CAP

D E NORD. »

1927. Sixième témoignage français de la synonymie de Cap du Nord et Guyane. TITRE

11


§§ 1928-1929

17

DOUZIÈME

e

( 63 )

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Document Français en 1666. 1928. « Description de la France Equinoctiale, cydeuant appellée Guyanne, et par les E spagnols, El Dorado. Nouvellement remise sous l'obeïssance du Roy, par le sieur L E F E B V R E D E L A B A R R E , son Lieutenant General dans ce Païs. Auec la carte d'iceluy, faite et presentée à Sa Majesté par ledit Sieur D E L A B A R R E . Et vn Discours tres-vtile et necessaire pour Ceux qui voudront établir des Colonies en ces Contrées; Qui les détrompera des Impostures dont tous Ceux qui en ont parlé ont remply leurs Ecrits; Et leur fera connoistre la force, le nombre, & le naturel des Indiens de cette Coste, & ce quelle peut produire d'auantageux pour le Commerce de l'Europe. A Paris, Chez Iean Ribou, au Palais, vis à vis la Sainte Chapelle, à l'Image Saint Louis. M. DC. LXVI. Auec Priuilege du Roy. » In-4°, 52 pages. Bibliothèque Impériale de Paris, 4° 0. 1415. 1929. L'honorable M. D E S A I N T - Q U A N T I N , dans la table des ouvrages qu'il a consultés pour la composition de son beau Mémoire, n'indique pas celui-ci. L'honorable M . D ' A Y E Z A C l'a eu entre les mains ; mais, c o m m e nous l'avons vu à la 14 lecture, il n'a pu en lire qu'une phrase tronquée. Le petit livre de L A B A R R E mérite pourtant l'attention la plus sérieuse de la part de ceux qui, c o m m e M . D E S A I N T Q U A N T I N et M. D ' A V E Z A C , s'engagent consciencieusement dans la question de l'Oyapoc. e

Car il fournit à cette grave question les données sui­ vantes : TITRE

12


( 64

)

e

17

LECTURE

§

1929

Page 13. « La F r a n c e Equinoctiale, appellée cydeuant G u y a n n e , & par les E s p a g n o l s El Dorado, est cette Coste de Terre ferme, qui c o m m e n c e sous la Ligne à la pointe d u N o r d de l'embouchure de la grande Riuiere des A m a z o n e s , & court premierement au Nord, quart de Nordest, jusqu'au C a p de N o r d puis Nord-Nordoüest jus­ qu'au Cap d'Orange, de là jusqu'à l'embouchure de la Riuiere de M a r o n y Nordoüest quart à l'Ouest, & depuis celle de M a r o n y jusqu'à celle d'Orinoque Oüest, Nord­ oüest, & quart de Nordoüest » Pages 13-14. « Pour en faire vue exacte Description, nous la diuiserons en trois Parties. La premiere contiendra toutes les Terres qui sont depuis la Ligne, jusqu'au Cap d'Orange : La seconde, celles qui forment la Coste depuis ce Cap jusqu'à la Riuiere de M a r o n y ; Et la troisiéme, celles qui sont depuis cette Riuiére jusqu'à celles de l'Oren o q u e : Lesquelles trois Parties l'on pourra proprement appeller du n o m de ceux qui les habitent ; sçauoir, la pre­ miere, I n d i e n n e , à cause que toutes ces Terres ne sont occupées que par les I n d i e n s ; la seconde, Françoise, parce que les F r a n ç o i s sont à present Maistres de toute la Coste, & y ont étably des Habitations considerables, auec des Forts pour s'y maintenir; la troisiéme, A n g l i ­ c a n e & B e l g i q u e , parce que les A n g l o i s & & Seigneurs. »

Pages 14-15. « L a G u y a n n e I n d i e n n e , qui contient enuiron quatre-vingts lieuës Françoises, est vn Païs fort bas & inondé vers les Costes Maritimes, & depuis l'em­ bouchure des A m a z o n e s jusqu'au C a p de N o r d , qui est presque inconnu aux F r a n ç o i s » Page 16. « La Guyane Françoise, proprement F r a n c e Equinoctiale, qui contient quelques quatre-vingts lieuës Françoises de Coste, commence par le C A P D'ORANGE, qui est vne pointe de Terre basse qui se jette à la Mer, & TITRE

12

Flaman


§§ 1930-1931

e

17

( 65 )

LECTURE

dont l'on prend connoissance par trois petites Montagnes que l'on voit par dessus, & qui sont au dela de la Riuiere de Y A P O C O , qui se jette à la Mer sous ce Cap, lequel pousse vn banc de vase dix à douze lieuës à la Mer; en sorte qu'à six & sept lieuës de Terre, vous ne trouuez que quatre brasses & demie d'eau de basse Mer, vis à vis la pointe de ce Cap : Il gist par les trois degrez, quarante minutes Nord de la Ligne, quoy qu'aucuns le mettent par les quatre degrez. » 1930. Lieutenant Général de Louis XIV dans la G u y a n e , L A B A R R E indique d'abord l'étendue assignée à son gouvernement par les Lettres patentes de son Roi. C'était « depuis la Rivière des A m a z o n e s jusqu'à celle d ' O r e n o q u e . » Mais tout de suite, s'en tenant à la réalité, et consi­ dérant qu'il n'était gouverneur de toute la G u y a n e , de­ puis l'Orénoque jusqu'à l ' A m a z o n e , qu'à la façon dont le Roi d'Angleterre s'intitulait Roi de F r a n c e , le gou­ verneur de C a y e n n e déclare formellement : Que, dans le fait, la partie de la G u y a n e comprise entre le M a r o n i et l'Orénoque n'était point française, mais anglaise et hollandaise : Que, dans le fait, la partie de la G u y a n e comprise entre le C A P D ' O R A N G E et l ' A m a z o n e n'était point française, mais indienne, attendu que, d'après lui, cette por­ tion se trouvait encore au pouvoir des Indiens, et attendu que les Français, non-seulement n'en avaient jamais rien occupé, mais ne la connaissaient m ê m e presque pas : Que, dans le fait, la Guyane Française restreinte entre le Maroni et la rivière du

se trouvait CAP

D'ORANGE.

1931. L'assertion de L A B A R R E , sur l'inoccupation absolue du territoire qu'il dénommait G u y a n e I n d i e n n e , était démentie par les documents portugais de 1637 et T.

II

TITRE

12

3


(

66

)

e

17

LECTURE

§

1932

1645, par le document espagnol de 1641, et par le docu­ m e n t français de 1655. Mais on doit le croire sur parole, quand il avoue que cette partie de la G u y a n e était presque inconnue aux Français, et quand il déclare, lui gouverneur de la G u y a n e Française, que le domaine de C a y e n n e ne dé­ passait ni la rivière de M a r o n i , ni celle du C A P D ' O ­ R A N G E .

1932. Mais ne perdons pas de vue deux détails. 1° L A B A R R E , en 1666, assigne à la limite méridionale de la G u y a n e Française la latitude de T R O I S degrés quarante minutes Nord, en déclarant que cette latitude est celle du C a p d ' O r a n g e ; et en 1633, c o m m e nous l'avons vu au titre 4, R I C H E L I E U avait fixé à T R O I S degrés quarantecinq minutes Nord la limite méridionale de la G u y a n e Française. L a conformité du gouverneur de C a y e n n e aux ordres de la métropole est évidente. 2° Ainsi que D ' A V I T Y l'avait fait en 1637, L A B A R R E donne à l'Oyapoc le n o m de Yapoco; c'est la seule forme dont il se sert, et il l'emploie huit fois : deux fois à la page 16, deux autres à la page 17, puis aux pages 29, 35, 42, et sur la carte. Cela aidera à éclaircir le Traité d'Utrecht.

TITRE 1 2


§§

1933-1934

e

17

TREIZIÈME

Document

1933.

«

Relation

de

LECTURE

( 67 )

TITRE

DU

Français

en

BRÉSIL

1674.

la Guiane,

et de ce qu'on

y

peut

faire. »

Écrite en 1663, d'après l'éditeur de G O M B E R V I L L E , « pour informer Monsieur L E M A R É C H A L D ' E S T R A D E de cette partie de l'Amérique. » Publiée en 1674, aux pages 41-50 de la quatrième pagination de l'ouvrage suivant : «

Recueil

de

divers

l ' A m e r i q u e , qui

n'ont

l'Origine, les Mœurs, tans de ces deux touchant mer de

Cartes

choses dans

&

&

du Monde.

Ethyopie,

le Prete-Jean.

Geographiques,

contenues

faits

dans

la Grand'Salle

du

Afrique

publiez;

le Commerce

Avec

et

des

des Traitez

le débordement

servent

Volume.

Palais,

à

du

habi-

curieux Nil,

l'intelligence

A Paris,

au

second

en

contenant

Le tout enrichi de Figures,

qui

ce

en

esté encore

les Coutumes

Parties

la Haute

Rouge,

Voyages point

Louïs

la & des

Billaine.

Pillier, au

grand

» In-4°, avec cinq différentes paginations, sans compter huit feuillets préliminaires non chiffrés. Cesar,

M. DC. LXXIV.

Avec

privilege

du

Roy.

Bibliothèque Impériale de Paris, 4° O. 1407. A. Réimprimée en 1682, au tome quatrième de G O M B E R V I L L E , pages 179-206 avec ce titre : « Relation de la Guyane, et du commerce

1934.

qu'on

Édition de

y peut

faire. »

1674, page

43; édition de 1682,

page 179 : « La G u i a n e est u n grand païs dans la terre ferme de l'Amerique Septentrionale

[l'auteur faisait la division

des deux A m é r i q u e s par l'équateur], qui s'étend en latiTITRE

13


(

68

)

e

17

LECTURE

§

1935

tude depuis la ligne Equinoctiale, jusqu'au dixiéme degré du costé du Pole Arctique, & en longitude depuis la Riviere des A m a z o n e s jusques à celle d ' O r e n o c q u e . . . . Nos navigateurs François ont accoustumé de donner à la G U I A N E le nom de C A P D E N O R T , à cause qu'il est le plus remarquable de toute cette coste, & que ceux qui y ont affaire y vont prendre ordinairement la connoissance de la terre. » 1935. Septième témoignage, et bien explicite, de la synonymie de Cap du Nord et Guyane parmi les F r a n ­ çais.

TITRE

13


§§ 1936-1938

17

QUATORZIÈME

e

( 69 )

LECTURE

TITRE

DU

Document Français dans la même

BRÉSIL année 1674.

1936.

« Journal du voyage qu'ont fait les Peres J E A N F R A N Ç O I S B E C H A M E L de la Compagnie de Jesus, dans la Goyane, l'an 1674. » GRILLET &

Publié en 1682, par l'éditeur de G O M B E R V I L L E , tome IV, pages 3-178. 1937. Texte, page 7 2 : « Nous allâmes [le 1 mai 1674] coucher dans les bois sur la Riviere d'Inipi où nos conducteurs raccommoderent le canot & le lendemain deuxiéme de M a y ayant descendu sur cette Riviere qui est fort rapide environ dix lieues, nous entrâmes dans la Riviere de C a m o p i où montant contre le cours de la Riviere nous fismes encore quatorze lieües, Inipi perd son n o m & fait une grosse Riviere avec C a m o p i qui va se joindre au fleuve d ' Y A P O Q U E à cinq journées de là. » er

Note de l'éditeur, page 152, se rapportant à Y A P O Q U E du texte : « C'est une Riviere dont l'emboucheure est entre celle des A m a z o n e s & celle de C a y e n n e , environ à vingt lieuës de celled ' A P R O U A G U E; & c'est d'où M O N S I E U R D E L E R Y [LEZY] Gouverneur de C a y e n n e chassa avec dix h o m m e s six ou sept cens Hollandois pendant les der­ nieres guerres qu'on a eues avec eux. Ils y avoient u n Fort avec du Canon. » 1938. Nous avons déjà relevé, au paragraphe 160, l'erreur de ceux qui, ne connaissant la relation de G R I L L E T et R É C H A M E L que par le mémoire de F E R R O L L E S en 1688, s'imaginent, c o m m e M. D E S A I N T - Q U A N T I N , que les deux pères dépassèrent l'Oyapoc et explorèrent la région guyanaise de l'Amazone. TITRE

14


( 70 )

e

17

QUINZIÈME

Document

1939. sur

SANSON Roy.

« Le Cours

la Relation

L E C T U R E

TITRE

DU

Français

en 1680.

de la Rivière

du R. P. Christophle

D ' A B B E V I L L E [GUILLAUME],

Avec

Privilege.

§ 1939

BRÉSIL

des Amazones d'Acugna. Geographe

dressé

Par le Sieur ordinaire

du

1680. » Carte dans la traduction du

Père A c u ñ a par Gomberville. La rivière du Cap

d'Orange

porte sur cette carte, à

son embouchure le n o m de Viapoco n o m de Y A P O Q U E

R.

TITRE

15

R., et dans son lit le


§§ 1940-1941

17

SEIZIÈME

e

LECTURE

TITRE

DU

( 71 )

BRÉSIL

Document Français en 1682. 1940. « Relation de la Riviere des Amazones traduite par feu M. D E G O M B E R V I L L E del'AcademieFrançoise. Sur l'Original Espagnol du P. Christophle d'Acuña Jesuite. Avec une Dissertation sur la Riviere des Amazones pour servir de Preface. Paris, Claude Barbin, 1682. » 4 volumes in-12. Bibliothèque Impériale de Paris. 12. O. 1797. T o m e IIP, chapitre 77 : « La riviere de Ginipape, qui descend du côté du Nord, & entre dans l'Amazone soixante lieuës au dessous des habitations de G u r u p a t u b a , ne promet pas moins de tresors que les riches montagnes dont nous venons de parler. Les Indiens assurent qu'il y a tant d'or le long de ses rivages que si la chose est c o m m e ils le disent, cette riviere seule possede plus de richesses qu'il n'y en a dans tout le Perou. Les terres que cette riviere arrouse sont du gouvernement de Maragnon, qui est entre les mains de B E N E D I T O M A Z I E L ( * ) : Mais sans faire aucun compte de ce que ces terres toutes seules sont de plus d'étenduë que toute l'Espagne reünie ensemble, & qu'il y a quantité de mines dont on a des connoissances tres-assurées ; je diray seule­ ment que ces terres sont la plus grande partie de la meil­ leure qualité & bonté pour rapporter toutes sortes de grains, de fruits, & faire du profit aux habitans, qu'il n'y en aye dans toute l'étenduë de la grande Riviere des A m a z o n e s ; elles sont situées du côté du Nord. » 1941.

GOMBERVILLE,

qui n'avait aucune connaissance

(*) B E N T O M A C I E L P A R E N T E . TITRE

16


(

72

e

)

17

LECTURE

§

1942

de la Concession royale de 1637, n'a pu bien comprendre le passage où l'explorateur espagnol n o m m e B E N T O M A C I E L ; mais cela n'altère en rien le fond des choses. La partie essentielle du témoignage du Père

ACUÑA

demeure intacte. 1942. Nous avons déjà vu, au titre 10, que dès l'année 1655, u n auteur français avait proclamé que la portion guyanaise du bassin de l'Amazone se trouvait tout entière soubs l'obeïssance des Portugais du Royaume du Brazil, mais que, ce nonobstant, il convenait que Louis XIV l'unît à sa couronne, ainsi que tout le reste des terres amazoniennes. Le m ê m e auteur avait prôné avec enthousiasme les richesses de la G u y a n e Brésilienne. Mais, bien qu'il eût tiré tout son livre de celui du Père le C O M T E P A G A N avait passé sous silence le n o m du respectable explorateur espagnol, et il semblait ne parler que de sa seule autorité. ACUÑA,

O n le tint pour u n visionnaire ; d'autant que l'original du Père A C U Ñ A , détruit par ordre du gouvernement espagnol, était devenu rarissime. Mais, par la traduction de G O M B E R V I L L E , la F r a n c e apprit de bonne source, en 1682 : Que ce que L A B A R R E , en 1666, avait appelé G u y a n e I n d i e n n e , était G u y a n e Portugaise : Et que cette proche voisine de la G u y a n e Française, était, toute seule, de plus d'étendue que T O U T E L ' E S P A G N E R É U N I E E N S E M B L E , était plus fertile que tout ce qu'il y avait DANS

TOUTE

ZONES, TOUT

LE

L'ÉTENDUE

DE LA

GRANDE

RIVIÈRE

DES

A M A ­

et possédait plus de richesses qu'il n'y en avait D A N S PÉROU.

C'est en allusion à cet éloge p o m p e u x de la G u y a n e Portugaise que l'éditeur a n o n y m e de G O M B E R V I L L E a dit dans sa Dissertation, page 76 : « Outre qu'elle [la Relation TITRE 16


§

1942

17

e

LECTURE

( 73

)

du P. A C U Ñ A ] peut satisfaire la curiosité de ceux qui aiment cette sorte de lecture, elle peut encor devenir utile un jour A U X C O L O N I E S F R A N Ç A I S E S D E C A Y E N E , lorsqu'elles seront assez nombreuses pour s'étendre. » Ce cri d'éveil retentit aussitôt dans l'âme de F E R R O L L E S . O n résolut à C a y e n n e de réaliser, — mais seulement du côté de l'Amazone — , les anciennes lettres patentes des rois de F r a n c e concédant à leurs sujets la G u y a n e tout entière, depuis l'Amazone jusqu'à l'Orénoque. Et ces terres amazoniennes, où les C a y e n n a i s n'avaient jamais paru que pour s'y procurer des esclaves, furent dès lors recherchées pour elles-mêmes.

TITRE

16


( 74 )

17

e

DIX-SEPTIÈME

§§ 1943-1944

LECTURE

TITRE

DU

Document Portugais dans la même

BRÉSIL

année 1682.

1943. « Le Portugal possède le C A P D U N O R D par le droit de démarcation, par le droit des armes, et par le droit des Missions L'année 1682, le Roi de Portugal D O M P E D R O II, second du n o m , premier pour la piété, ordonna au supérieur des Missions, qui était alors le Père P E D R O L U I Z , et au Père A L O I S I O C O R R A D O , de la Compagnie de Jésus, personnages distingués par leur zèle, de pénétrer dans l'intérieur de ces terres, de prêcher aux sauvages la loi évangélique dans les limites de sa couronne, d'admi­ nistrer les sacrements à ceux qui seraient déjà convertis à notre foi, et de divulguer la loi qui défendait que ceux-ci fussent faits esclaves. » Ce sont des paroles du général G O M E S F R E I R E D ' A N D R A D A , gouverneur de l'État de M a r a g n a n depuis le mois de mai 1685 jusqu'au mois de juillet 1687. Elles ont été imprimées, en 1727, à la page 469 du tome second de l'ouvrage suivant : « Vida de Gomes Freyre de Andrada, General da Artelharia do Reyno do Algarve Governador, e Capitaõ General do Maranhaõ, Parà, e Rio das Amazonas no Estado do Brasil, composta por F R . D O M I N G O S T E I X E Y R A , Eremita de Santo Agostinho Lisboa Occidental M. DCC. XXIV — 1727. 2 volumes, petit in-8°. » E n m a possession. 1944.

Ce document constate deux faits :

1° C o m m e en 1637 et en 1645, le Gouvernement Portu­ gais, de m ê m e que le Gouvernement Français, entendait toujours par C A P D U N O R D la G U Y A N E . TITRE

17


§

e

1944

17

LECTURE

( 75

)

2° CE Ne fut pas en 1686, c o m m e le dit M. D ' A V E Z A C ,

mais quatre ans plutôt, que le Gouvernement Portugais songea à occuper effectivement la rive gauche du delta de l ' A m a z o n e (*). Les mots droit de démarcation se rapportent aux lettres patentes de 1637, expressément alléguées dans le m ê m e texte, donné par le père T E I X E Y R A c o m m e u n discours adressé oralement par A N D R A D A au président R O U I L L É , mais qui est réellement un résumé du travail fourni par l'exgouverneur de M a r a g n a n au Ministre portugais, et dont il est question dans nos paragraphes 154-170.

(*) « Quatre

ans plutôt », c'est-à-dire, en

1682. C'est, d'après

D O M I N G O S TEIXEYRA, la date de l'Ordonnance d u Roi D O M P E D R O II p o u r l'établissement de missions dans la partie septentrionale des T e r r e s d u C a p d e N o r d . Cette Ordonnance, d'après le Père ALOISIO C O N R A D O PFEIL, missionnaire dans la région de l ' A r a g u a r y , fut expédiée en 1680. 11 convient de r e m a r q u e r q u e depuis 1632, avec la prise du fort de

Cumaú

rendus maîtres comme

(Macapá)

aux

Anglais, les Portugais

de « la rive gauche du

delta

l'auteur lui-même, le m o n t r e (§§ 1692

s'étaient

de l ' A m a z o n e

»,

à 1695; § 1720; et

§ 1876), et que, en 1647, ils s'étaient e m p a r é d'un fort construit par les Hollandais

au M a y a c a r é , entre le C a p

d'Orange.

TITRE

17

du N o r d

et le C a p


( 76 )

17

DIX-HUITIÈME

e

§§ 1945-1946

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Document Espagnol en 1684. 1945. « El Marañon, y Amazonas. Historia de los descubrimientos, entradas, y reduccion de naciones, trabajos malogrados de algunos conquistadores, y dichosos de otros, assi temporales, como espirituales, en, las dilatadas montañas, y mayores rios de la America. Escrita por el P A D R E M A N U E L R O D R I G U E Z , de la Compagnie de Iesus, Procurador General de las Provincias de Indias, en la Corte de Madrid. Con licencia. En Madrid, en la Imprenta de Antonio Gonçalez de Reyes. Año de 1684. » In-folio. Bibliothèque Impériale de Paris, Fol. 0. 1172. 1946. Le Père R O D R I G U E Z a eu l'heureuse idée d'in­ sérer dans son gros volume, tantôt par sommaire, tantôt textuellement, la petite relation du Père A C U Ñ A , déjà introu­ vable de son temps. Et il dit aux pages 138-139 : « La grande rivière de Ginipape, qui débouche dans l ' A m a z o n e , du côté du Nord, soixante lieues au-dessous de C u r u p a t u b a , ne promet pas moins de trésors que les rivières déjà mentionnées ; car, indépendamment du bruit général, les Indiens de cette rivière assurent que l'on peut ramasser sur ses bords une telle quantité d'or, que, s'il en est ainsi, cette seule rivière serait de beaucoup plus riche que toutes celles qui donnent de l'or dans le Pérou et dans le Nouveau-Royaume. Les terres arrosées par cette rivière sont de la capitainerie de B E N I T O M A S I E L ( * ) , gouver­ neur de M a r a g n a n ; et outre que leur district est plus (*) B E N T O M A C I E L P A R E N T E . TITRE 1 8


§

1947

e

44

LECTURE

( 77

)

grand que l''Espagne tout entière, et qu'elles possèdent, à ce qu'on affirme, des mines nombreuses, elles sont de la meilleure qualité, et peuvent rapporter beaucoup plus que toutes les autres terres qui existent dans la région de l'Amazone. » 1947. Voilà la presse proclamant pour la troisième fois, que la capitainerie de B E N T O M A C I E L , la capitainerie brési­ lienne du C A P D U N O R D , était u n territoire immensément grand et immensément riche.

TITRE

18


( 78 )

e

17

DIX-NEUVIÈME

Document

§§ 1948-1949

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Portugais le 2 4 février 1686.

1948. « Le 2 4 février 1686. Lettres royales au gou­ verneur de l'État d e M a r a g n a n [ G O M E S F R E I R E D E A N D R A D A ] , ordonnant de bàtir une forteresse dans la terre ferme, à l'endroit appelé T o r r e g o , où les Anglais en ont eu une, que nos armes leur ont enlevée ; et de rechercher en m ê m e temps l'amitié des Indiens T u c u p á s , qui habitent ces parages, en employant à cette fin les pères de Saint-Antoine, qui se sont acquis auprès d'eux une bonne réputation et du respect. » Ce fait se trouve consigné au folio 99 d'un manuscrit de la Bibliothèque Publique d'Évora, coté Il a été publié à la page 66 de l'ouvrage suivant : « Catalogo dos Manuscriptos da Bibliotheca Publica Eborense ordenado pelo Bibliothecario Joaquim Heliodoro da C U N H A R I V A R A . Tomo 1 que comprehende a noticia dos codices e papeis relativos ds cousas da America, Africa, e Asia. Lisboa Na Imprensa Nacional. 1850. » In-folio. 1949. Ce document est doublement remarquable : 1° Il constate la position du fort de Torrego dans le continent de la G u y a n e ; 2° Il confirme le second fait attesté par le titre 17. Puisque en février 1686, les missionnaires portugais de la portion guyanaise du delta de l ' A m a z o n e s'étaient déjà acquis auprès des Indiens de cette région une bonne réputation et du respect, c'est que ces Indiens les connaissent depuis longtemps. TITRE

19


§ 1950

17

VINGTIÈME

e

( 79 )

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Document Portugais le 21 décembre 1686.

1950.

« GOMES FREYRE

D E A N D R A D A , ami,

Moi, le

Roi

je vous envoie beaucoup de salutations. O n a vu votre lettre du 2 3 août de cette année, dans laquelle vous m e rendez compte de la conduite que vous avez tenue envers le Gouverneur de C a y e n n e , et de la réponse qu'il vous a faite sur l'entrée et le commerce que les sujets du Roi T R È S C H R É T I E N cherchent à avoir dans les terres de cet Etat qui demeurent du côté du Nord ; et ayant fait examiner cette affaire avec l'attention que sa qualité réclame, il m'a paru bon de vous dire, que la mesure que vous avez prise, de renvoyer à leur Gouverneur les prisonniers français [arrêtés en décembre 1685] a été fort sage, c o m m e toutes celles de votre gouvernement. Et attendu que les m o y e n s les plus efficaces pour empêcher le projet des Français sont ceux que votre lettre contient, vous tâcherez de les laisser si bien disposés, q u ' A R T U R D E SA D E M E N E Z E S , qui va vous succéder, les puisse mettre à exécution avec la promptitude que je lui recommande par une autre lettre. Pour les forteresses, qui sont u n des moyens que vous indi­ quez, je vous ai déjà fait expédier les ordres nécessaires dès le premier avis que vous m'avez fait à ce sujet, en vous disant quelles sont les ressources dont vous devez vous servir ; et c o m m e il n'y a d'approuvé qu'une seule de ces forteresses [celle de Torrego, au litre 19], et il peut se faire que, dans l'intervalle, vous ayez changé d'avis sur l'empla­ cement où elle doit être bâtie, vous pourrez, nonobstant lesdits ordres, choisir de nouveau la place que l'expé­ rience vous aura montré être plus convenable ; vous TITRE 20


( 80

)

e

17

LECTURE

§

1951

pourrez m ê m e faire bâtir, non pas une forteresse seule­ ment, mais encore toutes celles que vous jugerez néces­ saires, tant pour assujettir les sauvages du côté du Nord, que vous aurez soin de persuader avec les cadeaux qu'ils aiment, que pour mettre obstacle à toute nation qui entrera dans les terres de cette couronne sans les conditions re­ quises pour le faire. Et comprenant qu'au c o m m e n c e m e n t de la construction des forteresses peut être nécessaire dans l'intérieur des terres la présence de quelqu'un qui ait de l'autorité pour tout ce qui regardera ce travail, — informé par vous du zèle et du soin que met à m o n service A N T O N I O DE ALBUQUERQUE G O E L H O , Capitaine-Major du Pará, je trouve bon de lui prescrire qu'aussitôt qu'il aura reçu vos ordres, il aille avec l'ingénieur de l'État, et avec quelques pratiques de cette partie de l'intérieur, marquer et disposer les forteresses. Et vous aurez recours, en m ê m e temps, aux Missionnaires Capucins de Saint-Antoine, qui tiennent les Missions du Cap du Nord, et aux Pères de la Compagnie de Jésus qui seront les plus convenables à cette fin, les prévenant en m o n n o m de ce qu'ils doivent faire J'ai ordonné aux Pères de la Compagnie de Jésus d'établir une nouvelle Mission au Cap du Nord, et vous les trouverez dans la disposition habituelle à leur zèle dans les matières du service de Dieu notre Seigneur, et du mien. Et pour que les uns et les autres agissent sans se disputer leurs juridic­ tions, vous prendrez soin de séparer leurs résidences et leurs Missions, par des distances telles qu'ils n'aient point à avoir de doutes sur ce qui revient aux uns et aux autres pour la conservation des sauvages et pour le bien de l'État Écrite à L i s b o n n e le 21 Décembre 1686. — L E R O I . » C'était D O M P E D R O II, le m ê m e avec qui Louis X I V signa, quatorze ans après, le Traité fondamental de la question de l'Oyapoc. 1951.

Ce document se trouve imprimé, tout au long, TITRE

20


§§ 1952-1953

e

17

( 81 )

LECTURE

aux pages417-421 du livre de T E I X E Y R A , cité au titre 17, et au paragraphe 1356 des Annales de B E R R E D O , citées au titre 1 . er

Il constate, de la manière la plus authentique : la con­ viction du Gouvernement Portugais sur ses droits à la por­ tion guyanaise du bassin de l'Amazone : et la synonymie portugaise de Cap du Nord et Guyane. 1952. Nous passerons donc sous silence d'autres docu­ ments confirmatifs des m ê m e s faits. Bornons-nous à citer : Deux Lettres royales du 22 mars 1688, au gouverneur de l'Etat de M a r a g n a n , A R T U R D E SÁ E M E N E Z E S ; Deux Lettres royales du 23 mars 1688, au m ê m e gou­ verneur ; Des Lettres royales du 2 septembre 1691, à A N T O N I O D ' A L B U Q U E R Q U E , gouverneur de l'État de M a r a g n a n ; U n e lettre d'ANTONIO D ' A L B U Q U E R Q U E au M A R Q U I S D E F E R R O L L E S , datée du 13 octobre 1691 ; Des Lettres royales du 19 mars 1693, au m ê m e gou­ verneur de l'Etat de M a r a g n a n , A N T O N I O D ' A L B U Q U E R Q U E . 1953. Les six Lettres royales, toutes de D O M P E D R O II, se trouvent résumées dans le Catalogue de M. R I V A R A cité au titre 19, pages 67, 69, 73, 76. La lettre d ' A L B U Q U E R Q U E est donnée intégralement dans u n précieux opuscule dont voici le titre : « Discurso ou Memoria sobre a intrusão dos F r a n c e z e s de C a y e n a nas Terras do C a b o do Norte e m 1836 : escrita para ser apresentada ao Instituto Historico e Geographico do Brasil, por Antonio Ladislau M O N T E I R O B A E N A Moço Fidalgo da Casa Imperial, Cavalleiro da Ordem Militar de S. Bento de Aviz, Tenente Coronel de Artilharia Reformado, antigo Professor da Aula Militar da Provincia do Para, e Socio Correspondente do Instituto Historico e Geographico do Brasil & c M a r a n h ã o , Typographia da Temperança. Impresso por Manoel P E R E I R A R A M O S , Rua Formosa N. 2. 1846. » Petit in-4°. En m a possession. T.

II

TITRE

20

6


( 82 )

17

VINGT

ET

e

§§ 1954-1955

LECTURE

UNIÈME TITRE

DU

BRÉSIL

Document Portugais et Français en 1688. 1954.

Dans les recherches que le Gouvernement de permit à feu le V I C O M T E D E S A N T A R E M , pour la composition de son Tableau des relations politiques et diplomatiques du Portugal, le zélé Portugais découvrit aux Archives du Ministère de la Marine et des Colonies à Paris, le rapport officiel de F E R R O L L E S , revêtu de la signa­ ture autographe de ce personnage, sur son expédition à l'Amazone en 1688 (§§ 123-125). LOUIS-PHILIPPE

Le vénérable investigateur a fait u n extrait de ce docu­ ment, et il a eu l'obligeance de m e le communiquer en juillet 1852, à condition que je n'en ferais aucun usage pendant sa vie, trop courte pour le Portugal et pour les amis des études sérieuses. 1955.

Or cet extrait est de la teneur suivante :

« A u mois de Juin 1688, le C H E V A L I E R D E F E R R O L L E S , par ordre de M. D E L A B A R R E , gouverneur de C a y e n n e , se rendit dans l ' A m a z o n e , pour s o m m e r les Portugais d'abandonner les forts qu'ils venaient de bâtir sur la rive gauche de ce fleuve, attendu que toute la rive septentrio­ nale de l ' A m a z o n e appartenait de droit à Sa Majesté Très-Chrétienne. « F E R R O L L E S partit de l'Ouya, sur u n brigantin et deux pirogues; il explora l'Approuague, l'Oyapoc et le Cassipour ; laissa son brigantin à l'embouchure du C a s sipour, et continua à longer la côte avec les deux pirogues. « Arrivé au M a y a c a r é , il pénétra, par cette rivière, dans le lac M a c a r y ; traversa les savanes noyées ; et, touTITRE 21


§

1956

e

17

LECTURE

( 83

)

jours embarqué, parvint, à la fin du mois, à la forteresse portugaise de l'Araguary, qu'il trouva située sur la pointe occidentale de l'embouchure de la rivière Batabouto, affluent de la rive gauche de l'Araguary, et garnie de vingt-cinq soldats et de trois petits canons de fonte. « Ilfitsa sommation au commandant portugais. « Et le commandant portugais lui répondit : « Qu'en « vertu d'une donation faite à B E N T O M A C I E L P A R E N T E , les « limites des possessions portugaises étaient à la rivière « du C a p d'Orange, appelée par les Portugais rivière « de V i n c e n t P i n s o n , et par les Français O y a p o c . » « F E R R O L L E S le menaça de venir le déloger de force, s'il ne prenait pas le parti de décamper volontairement ; et il lui remit une lettre de D E L A B A R R E pour le Capitão Mór du Para. « U n e indisposition l'empêcha d'aller jusqu'à M a c a p á , et le premier Juillet il se retira à C a y e n n e , par l'Ara­ guary, l'Amazone et la mer, passant entre le continent et l'île de Maracá, à laquelle il donnait le n o m de Carapapoury. » 1956. Quoi de plus concluant? Douze ans avant le Traité primordial de 1700, vingtcinq ans avant le Traité final d'Utrecht, un fonctionnaire Portugais, préposé à la garde de la frontière septentrio­ nale du Brésil, déclare officiellement à un fonctionnaire Français, que la rivière portant chez les Portugais le n o m de Vincent Pinson, et que le Portugal considère c o m m e la limite septentrionale du Brésil, est celle que les Français appellent Oyapoc, celle que tout le m o n d e reconnaîtra au n o m de Rivière du C A P D ' O R A N G E . Rivière du

CAP D ' O R A N G E . . . .

c A p D ' o R A N G E n'est plus un n o m que l'on puisse accu­ ser d'être générique. C'est un n o m propre, dans toute la rigueur du terme. TITRE

21


( 84 )

e

17

LECTURE

§§ 1957-1959

C'est une désignation plus précise que ne l'aurait été la latitude. La latitude peut varier avec l'observateur. Mais, depuis son introduction, peu avant l'année 1625, le n o m de Cap d ' O R A N G E , m o n u m e n t hollandais sur les côtes américaines, a toujours appartenu invariablement, dans toutes les cartes, dans tous les textes, à la pointe orientale de la baie actuelle d'OYAPOC. 1957. La déclaration officielle du commandant por­ tugais, faite à la fin du mois de juin 1688, fut officielle­ m e n t portée aussitôt à la connaissance du Gouvernement Français. Donc, en signant, en 1700, le Traité de L i s b o n n e ; en signant, en 1713, le Traité d'Utrecht, le Gouvernement Français savait parfaitement que la limite réservée par le premier de ces traités, la limite définitivement accor­ dée au Portugal par le second, était la rivière du C A P D ' O R A N G E , appelée par les Portugais Rivière de V I N C E N P I N S O N et par les Français OYAPOC. 1958. Il devient superflu de continuer à dérouler les titres du Brésil, puisque, par ce seul document, la cause brésilienne est gagnée. Poursuivons toutefois, et nous verrons de plus en plus, combien la vérité est harmonique. 1959. Mais ne laissons pas échapper la parfaite con­ cordance de la déclaration de l'officier portugais en 1688 avec celle du gouverneur français en 1666, avant l'appa­ rition de F E R R O L L E S à C a y e n n e .

TITRE

21

T


e

17 LECTURE

§§ 1960-1961

VINGT-DEUXIÈME

Document

1960.

« Relation

d'un

Côtes d'Afrique,

Cayenne

&

du

Ingenieur

glois. Enrichie

par

par

de Monseigneur

du

sur

Palais,

le Quay

chez

MICHEL BRUNET,

cure

galant.

fait en

par

une

1695.

Escadre

M . DE GENNES. nombre

de Figures aux

le Dauphin.

frais

M. DC. XCVIII.

la grande Avec

Vaisseaux le Sieur

le Faucon dessinées

sur les

du

FER,

Dans l'Isle Royale.

Salle du Palais,

privilege

An-

du sieur D E

A Paris,

&

Bresil,

des

de l'Horloge, à la Sphere dans

1696.

Faite par

sur le Vaisseau

les soins &

Geographe

1699.

Détroit de Magellan,

Volontaire

de grand

lieux. Imprimée

en 1698 et

Voyage

Isles Antilles,

Roy, commandée

FROGER

TITRE D U B R É S I L

Français

1697. aux

( 85 )

Roy.

au

Et Mer-

» In-12,

7 feuillets préliminaires et 220 pages ; avec cette déclara­ tion finale : « Achevé d'imprimer pour la premiere fois le 9. Janvier 1698. » Bibliothèque Impériale de Paris, 8° 0. 1760. Seconde édition, en 1699, à Paris, chez NICOLAS LE GRAS, avec cette déclaration finale : « Achevé d'imprimer pour la seconde fois le 18. Mars 1699. » Également in-12. Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine à Paris, 4243. Troisième édition, dans la m ê m e année 1699, à A m s t e r ­ d a m , chez les Héritiers d'ANTOINE SCHELTE ; toujours in-12. Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine, 4242. 1961.

Dans chacune des trois éditions :

Préface. « Je m e suis surtout appliqué à faire des Cartes particulieres de l'entrée des Ports & des Rivieres, soit par m o y - m ê m e , lorsque le temps l'a permis, c o m m e à G a m b i e , à Rio-Jàneiro &

à la B a y e d e tous les

Saints, soit par des Cartes ou des Memoires que j'ay reTITRE 2 2


e

( 86 )

17

§§ 1962-1963

LECTURE

formez, c o m m e au Détroit de M a g e l l a n , au Debouquem e n t des Isles Antilles, & au Gouvernement de C a y e n n e , qui n'avoit point encore parû sous le n o m de F r a n c e Aequinoctiale avec l'étenduë & les limites que je luy donne. » Page 165. « Le Gouvernement de C a y e n n e a plus de 100 lieuës de Côtes sur l'Ocean, dont il est borné à l'Orient & au Septentrion : il a à l'occident la Riviere de M a r o n y , qui le separe des terres de S u r i n a m , occupées par les Hollandois, & au Midy le Bord Septentrional des A m a ­ zones, où les Portugais ont déjà trois Forts sur les Rivieres de P a r o u &

de M a c a b a . O n verra par la Carte

de ce Gouvernement (que j'ay reformée sur les Memoires de M.

DE FEROLES

pour envoyer en Cour) le chemin qu'on

a fait pour les en chasser. Ce chemin c o m m e n c e à la Ri­ viere d'Oüia, &

doit se rendre à celle de Parou, qu'on

descendra ensuite avec des Canots. »

Page 166 : « Carte du Gouvernement de C a y e n n e ou F r a n c e Æquinoctiale. » 1962. F R O G E R déclare lui-même, pages 153, 172, 157, qu'il arriva à C a y e n n e le 3 0 août 1696, qu'il repartit de cette colonie le 25 septembre, et que Monsieur D E F E R R O L E S en était le gouverneur. Ce ne fut donc pas seulement sur les mémoires de F E R mais sous les yeux m ê m e de ce personnage, que F R O G E R construisit sa carte : c'est-à-dire sous les yeux de celui qui, en 1688, avait essayé d'enlever aux Portugais les positions qu'ils occupaient sur la rive guyanaise de l ' A m a z o n e ; de celui qui, en 1691, avait représenté au gouverneur de l'État de M a r a g n a n qu'il fallait prendre pour limite de la G u y a n e Française et du Brésil l'Ama­ z o n e ; de celui qui, au m o m e n t m ê m e du séjour de F R O GER à C a y e n n e , préparait avec ardeur un m o y e n qui devait lui réussir pendant u n mois (§§ 109-130, 137-146).

ROLLES,

1963.

Cela posé, remarquons, avant tout, cet aveu TITRE

22


§§

1964-1965

e

17

( 87 )

LECTURE

public de l'hôte de F E R R O L L E S : « Le Gouvernement de C a y e n n e n'avoit point encoreparúsous le n o m de France Æquinoctiale avec l'étenduë & les limites que je luy donne. » Ces paroles ne se rapportent point à la frontière hollan­ daise, puisque, de ce côté, les Français s'en sont con­ stamment tenus au Maroni. Elles font évidemment allusion au prédécesseur de F E R R O L L E S , à l'ancien gouverneur L A B A R R E , qui, dans sa Description de la France Equinoctiale, avait arrêté au C a p d'Orange la limite du côté du Brésil (titre 12), 1964. Voyons maintenant la carte de F R O G E R , O U plutôt de F E R R O L L E S . Elle va du M a r o n i à l'Amazone. O n y lit, à sa véritable place, le n o m de C. d'Orange, Immédiatement à l'Ouest de ce cap, on trouve un grand cours d'eau portant pour n o m celui d'Oyapoc R. Et dans toute la carte, ce n o m à'Oyapoc ne reparaît nulle autre part. Or c'était F E R R O L L E S lui-même qui, au mois de juin 1688, avait reçu dans ses oreilles la notification du com­ mandant d'Araguari, — que la limite du Brésil était à la rivière du CAP D ' O R A N G E , appelée par les Portugais Rivière de V i n c e n t Pinson, et par les Français O Y A POC. L'OYAPOC

de la carte de

FERROLLES

était donc, évidem­

ment, la limite prétendue par le Portugal. 1965.

La carte de

FERROLLES

fut faite pour envoyer en

Cour. Le porteur en dut être M. D E G E N N E S , le c o m m a n ­ dant de l'escadre sur laquelle se trouvait F R O G E R . Or F R O G E R nous apprend, page 218, que l'escadre de M. D E G E N N E S mouilla à la Rochelle le 21 avril 1697. Nous savons par M. le V I C O M T E D E S A N T A R E M , Quadro TITRE

22


(

88

)

17

e

LECTURE

§

1966

Elementar, tome IV, seconde partie, pages 733, C C C L I V , C C C L X : que le 18 mai de la m ô m e année 1697, le président H O U I L L É fut n o m m é Ambassadeur de Louis XIV auprès de D O M P E D R O II de Portugal ; que le 28 juillet il reçut des instructions dans lesquelles il lui était ordonné de repré­ senter contre l'établissement des Portugais au Nord de l'Amazone, c o m m e étant une usurpation des droits de Sa Majesté Très C h r é t i e n n e ; qu'il débarqua à L i s b o n n e le 2 septembre ; et qu'il eut le 30 octobre une première audience particulière. Et nous savons par le Mercure historique et politique, tome XXIV, page 471, que l'ambassadeur R O U I L L É ne lit son entrée publique à L i s b o n n e , et ne remit à Sa M a ­ jesté Portugaise ses lettres de créance, que le 6 février 1698. Donc, dès le mois d'avril 1697, le Cabinet de V e r ­ sailles avait connaissance de la carte de F E R R O L L E S , O Ù le n o m d'OYAPOC était appliqué à la rivière du C A P D ' O R A N G E , et rien qu'à cette rivière. Donc, dès le mois de juillet 1697, le nouvel Ambassa­ deur de Louis XIV dut recevoir, c o m m e annexe à ses in­ structions, une copie de cette m ê m e carte. E n tout cas, dès le début de sa négociation, le prési­ dent R O U I L L É dut prendre pour règle la carte de F E R ­ R O L L E S , puisque la négociation n'a pu être entamée avant le 6 février 1698, et que le livre de F R O G E R avait été publié au mois de janvier de la m ê m e année, et fut réim­ primé deux fois en 1699, pendant la négociation m ê m e . 1966. Et quelle carte plus digne de foi pour le Cabi­ net de Versailles et pour l'Ambassadeur de F r a n c e à L i s b o n n e , que celle de l'instigateur m ê m e de la négo­ ciation confiée à cet ambassadeur?

TITRE

22


§§ 1967-1968

17

e

( 89 )

LECTURE

VINGT-TROISIÈME

TITRE

DU

BRÉSIL

Document Français en 1699. 1967. « Année 1699 Septembre 2. Dans les instruc­ tions adressées par le Gouvernement Français au Gou­ verneur de C a y e n n e , on lui ordonne de s'informer dans le plus grand détail des titres qu'avaient les Français pour pouvoir naviguer sur l'Amazone, afin que l'on pût les opposer aux Portugais, qui disputaient à la F r a n c e le droit de naviguer sur ce fleuve, prétendant réduire ses limites à l ' O Y A P O C . » Ce fait se trouve consigné à la page 753 du volume suivant : « Quadro Elementar das Relações Politicas e Diplomaticas de Portugal com as diversas Potencias do Mundo... Pelo V I S C O N D E D E S A N T A R E M . T o m o 4° Parte 2 . Pariz, 1844. » In-8°. Et le docte vicomte ajoute en note, au bas de la m ê m e page : « Archives du Ministère de la Marine en F r a n c e , Documents historiques de la G u y a n e , 1664 à 1716. » a

1968.

Le2septembre 1699, le gouverneur de C a y e n n e

était encore le

MARQUIS D E FERROLLES,

le véritable auteur de

la carte de la F r a n c e Æquinoctiale dessinée

par F R O G E R ,

c o m m e nous venons de le voir au titre 22. Cela est attesté par l'Almanach de la Guyane Française pour l'An de Grâce M. DCCC XXII, dans sa « Liste chronologique de tous les Gouverneurs en Titre et par Interim, depuis l'Année 1667 jusqu'à l'Année 1822. » Parlant à F E R R O L L E S lui-même, après la réception de sa carte, le Ministre Français ne pouvait entendre par Oyapoc que ce que F E R R O L L E S entendait. TITRE

23


( 90

)

e

17

LECTURE

§

1969

Donc, le 2 septembre 1699, six mois avant le traité de 1700, le Gouvernement Français se montra parfaitement informé de la prétention du Portugal à la limite du C A P D'ORANGE.

1969. Le 2 septembre 1699, le Ministre de la Marine et des Colonies en F r a n c e , celui qui dut écrire au M A R ­ Q U I S D E F E R R O L L E S , était Louis P H E L Y P E A U X , C O M T E DE PONTCHARTRAIN.

Il fut remplacé, quatre jours après, par son fils également C O M T E D E P O N T C H A R T R A I N .

JÉROME

PHELYPEAUX,

Et celui-ci garda le portefeuille jusqu'au 31 août 1715, plus de deux ans après le Traité d'Utrecht. Ce sont des dates fournies par M. D ' A V E Z A C , dans sa « Chronologie des Ministres et Secrétaires d'État de la Marine et des Colonies », imprimée dans les Nouvelles Annales de la Marine et des Colonies, n° de janvier 1849. Donc, en signant en 1700 le Traité de L i s b o n n e , en signant en 1713 le Traité d'Utrecht, le Gouvernement Français savait parfaitement qu'il s'engageait envers le Portugal au sujet de la rivière du C A P D ' O R A N G E .

TITRE 2 3


§§ 1970-1971

17

e

LECTURE

VINGT-QUATRIÈME

TITRE

( 91 )

DU

Document Français dans la même

1970.

BRÉSIL

année 1699.

Le président R O U I L L É , Ambassadeur de F r a n c e

à L i s b o n n e , répliqua à la réponse que le Cabinet portu­ gais lui avait faite en janvier 1699 (§§ 154-170). Le texte m ê m e de cette réplique m'est inconnu. Mais il en existe une analyse détaillée dans la contreréplique du Cabinet portugais, datée du 30 juillet de la m ê m e année 1699. 1971.

Ce nouveau Mémoire du cabinet de L i s b o n n e

a déjà été allégué, dans u n autre but, par M. le DE

L'URUGUAY,

le 15 juin 1855 ; et M. le B A R O N

DE

VICOMTE BUTEN-

V A L lui a répondu, le 18 octobre : « Le Plénipotentiaire français n'a pu rien reconnaître et rien accepter c o m m e avéré quant au Projet de Mémoire de M. P A I M , et quant à ses effets, puisque ce Mémoire, quant à présent, n'existe pas pour lui. « Il a déjà eu l'honneur de dire à son honorable collègue que toutes les pièces échangées, entre les Plénipotentiaires de Portugal et M. le président D E R O U I L L É , en 1699 et en 1700,

existent reliées et cotées dans les Archives des

Affaires Étrangères ; que deux Mémoires du Cabinet por­ tugais y sont conservés avec leur traduction ; mais que ce troisième Mémoire, dont la Minute est demeurée à Lis­ b o n n e , ne fait pas partie de ce volume des Archives, qu'on a lieu de croire complet. « U n simple rapprochement de dates semble suffire, d'ailleurs, pour ôter toute valeur à la pièce invoquée. « Cette pièce est datée du 30 juillet 1699 : les Pouvoirs TITRE 24


( 92

)

e

17

LECTURE

§

1971

de M. P A I M , conservés dans nos Archives, portent la date du 21 novembre suivant. « Ainsi, à l'époque où M. P A I M aurait remis sa pré­ tendue Note à M. R O U I L L É , il n'avait pas qualité pour le faire; il n'était pas Plénipotentiaire de son pays. « Jusqu'à nouvel ordre, donc, le Plénipotentiaire fran­ çais est dans son droit, ou plutôt dans son devoir, en déclinant toute discussion actuelle, ou ultérieure, qui se rattacherait au travail de M . P A I M . » Mais, Pour ce qui est du manque de qualité chez R O Q U E M O N T E I R O P A I M pour s'adresser diplomatiquement à l'Ambassa­ deur de F r a n c e le 30 juillet 1699 : il est incontestable que ce personnage ne fut n o m m é Plénipotentiaire pour le Traité de 1700 que le 21 novembre 1699, et qu'il ne fut Ministre des Affaires Étrangères que plus tard. E n 1699 et en 1700, le Ministre des Affaires Étrangères, le Secrétaire d'État, c o m m e on disait alors en Portugal, et c o m m e on dit encore aujourd'hui en E s p a g n e , c'était M E N D O D E F O Y O S P E R E I R A ; on le voit à la contre-signature des Pleins Pouvoirs portugais pour le Traité de 1700, et au préambule du Traité m ô m e . C'est donc M E N D O D E F O Y O S P E R E I R A qui a dû adresser à l'Ambassadeur de F r a n c e le Mémoire du 30 juillet 1699. Mais ce mémoire, ainsi que celui de jan­ vier de la m ê m e année, fut l'œuvre exclusive de R O Q U E M O N T E I R O P A I M , qui faisait aussi partie du Cabinet portu­ gais, c o m m e le déclarent le préambule du Traité de 1700 et les Pleins Pouvoirs du 21 novembre 1699. B R O C H A D O , que nous connaîtrons au titre 26, le déclare positivement en ces termes, parlant du Traité de 1700 : « Toute cette affaire a été très mal conduite par R O Q U E M O N T E Y R O P A Y M , qui a été le véritable auteur des réponses et des expédients. » — Voilà pourquoi les copies du Mémoire du 30 juillet 1699 portent en tête le n o m de R O Q U E M O N T E I R O P A I M . Pour ce qui est de la non-existence de ce document TITRE

24


§

1971

17

e

LECTURE

( 93

)

dans le volume cité par M. le B A R O N D E B U T E N V A L , il serait certainement oiseux de chercher dans ce volume une pièce antérieure au 21 novembre 1699 avec la signature de R O Q U E M O N T E I R O P A I M . Mais, sans signature, ou avec celle de M E N D O D E F O Y O S P E R E I R A , il est probable qu'un des deux Mémoires avoués par M. D E B U T E N V A L est celui du 30 juillet 1699. Et si ce document ne se trouve pas dans le volume en question, peut-être se trouve-t-il dans un autre volume de la correspondance de R O U I L L É . L'hono­ rable baron lui-même, dans la conférence du 17 novembre, nous apprend que ce volume porte le n° 33. Or, nous savons par le Quadro Elementar de M. le V I C O M T E D E S A N T A R E M , tome IV, partie II pages C C C L X , C C C L X X I X , que la correspondance du président R O U I L L É , pendant les six années qu'il résida à L i s b o n n e , occupe au Ministère des Affaires Étrangères à Paris, non pas un, mais sept volumes, numérotés de 31 à 37, et que le n° 37 est un volume supplémentaire renfermant les originaux qui lui avaient été adressés. e

Pour ce qui est de la non-existence du document pour M. le

BARON DE

BUTENVAL,

il nous suffit que le document

existe. Or, il existe en manuscrit, d'après le témoignage de M. le

VICOMTE

DE L'URUGUAY,

à la Bibliothèque Nationale

de L i s b o n n e , dans le tome II des Memorias pertencentesàpaz d'Utrecht, par D. Luiz

C A E T A N O D E LIMA,

qui

avait été secrétaire de la légation de Portugal à Utrecht même. Il existe en manuscrit, d'après le témoignage de M. R I V A R A , à la Bibliothèque Publique d'Evora, dans un cv volume coté y^. Il existe imprimé, conformément au manuscrit d'Evora, dans la Revista de l'Institut Historique et Géographique du Brésil, année 1846, pages 453-493. TITRE

24


( 94 )

e

17

LECTURE

Nous pouvons donc recourir, en Mémoire du 3 0 juillet 1699.

§§ 1972-1973 toute sécurité, au

1972. E h bien, voici c o m m e n t le Ministre portugais résume dans ce document le dernier point de la réplique de l'Ambassadeur de F r a n c e (page 491 de la Revista) : « Sixième et dernier point de la réplique de l'Ambassa­ deur de F r a n c e . O n dit dans ce point, qu'il est à remar­ quer que l'on n'a rien répondu aux raisons qui ont été alléguées pour montrer qu'il ne fallait pas faire le partage des terres dont il s'agit, autrement que par la rivière des A m a z o n e s , le partage que l'on propose par la rivière d'Oyapoc étant inutile et insuffisant, attendu que cette rivière vient du midi et a sa source par la hauteur ou latitude du Cap du Nord (*), de sorte que, quand on serait arrivé à l'endroit où elle prend naissance, il serait indis­ pensable de convenir d'autres limites, ce qui serait impraticable et exposerait les deux nations à des guerres continuelles. » 1973. Or, sur la carte de F E R R O L L E S , dont il vient d'être question aux titres 2 2 et 23, L'Oyapoc, la rivière du Cap d'Orange, coule du Sud au Nord, prenant sa source par la même latitude que le Cap du Nord. Avant F E R R O L L E S , en 1664, la m ê m e configuration avait été donnée à la rivière du C a p d'Orange par D U V A L , dans sa carte de la « Coste de la G u y a n e », extraite par M.

D E S A I N T - Q U A N T I N , S O U S le

n°4.

Et après F E R R O L L E S la m ê m e disposition a été repro­ duite : Par D E L I S L E , en 1703, dans sa « Carte de la Terre F e r m e , du P e r o u , du Bresil, et du P a y s des A m a ­ z o n e s », extraite également par M. D E S A I N T - Q U A N T I N , sous le n° 6 ; (*) « ... sendo a divisão q u e se propõe pelo rio O y a p o c inutil e insufficiente, por vir este rio do meiodia, e ter a sua origem da alturã ou latitude do Cabo do Norte... » TITRE

24


§

1974

e

17

LECTURE

( 95

)

Par L A C O N D A M I N E , en 1745 et en 1749, dans la « Carte du Cours du M a r a g n o n ou de la grande Rivière des A m a z o n e s », en tête des deux éditions originales de sa Relation ; Par B E L L I N , en 1763, dans la « Carte de la G u i a n e », en tète de sa « Description géographique de la G u i a n e » ; Par P O I R S O N , en 1806, dans sa « Carte de la Capitai­ nerie Générale de Caracas », en tête du voyage de DEPONS;

Et encore en 1857, dans la « Carte de la G u y a n e Française », jointe à la « Mission de C a y e n n e » du Révérend Père D E M O N T É Z O N . Et rien de pareil n'a jamais été attribué, dans toute la G u y a n e , à aucune autre rivière que celle du C a p d'Orange. 1974. Donc, O Y A P O C et rivière du C A P D ' O R A N G E étaient exactement la m ê m e chose pour le négociateur français du Traité de 1700.

TITRE 24


( 96 )

17

e

§ 1975

LECTURE

VINGT-CINQUIÈME

TITRE D U

RRÉSIL

Document Portugais et Français en 1700. TRAITÉ

DE

LISBONNE

1975. « Traitté prouisionel Entre les serenissimes et trespuissants Princes Louis XIV. Tres Chretien Roy de France et de Nauarre & . Et D. Pedro II. Roy de Portugal et des Algarues a Lisbonne le 4 du mois de mars de Vannée mil sept cens. » (§§ 178-183, 1220). a

e

Préambule. « S'etant m e u depuis quelques années en ça dans l'Etat du M a r a g n a n quelques contestations et differents entre les sujets du R o y tres Chretien et ceux du R o y de Portugal au sujet de l'vsage, et de la pos­ session des Terres du Cap de Nord situées entre Cayenne r

et la riuiere des Amazones , le S R O U I L L É President du grand Conseil de Sa Ma . T. Ch. et son ambassadeur en cette Cour, ayant demandé des conferences qui luy ont été accordées, on y a discuté et examiné les raisons de justice de part et d'autre, et l'on y a veu les autheurs et les Caries concernant l'acquisition, et la diuision desdites té

Terres.... à l'effet de conferer et conuenir d'vn Traité sur la possession desdites Terres du Cap de Nord situées entre Cayenne et la riuiere des Amazones » er

Article 1. « Le Roy de Portugal fera euacuer et demolir les forts de A r a g u a r y et de C u m a u , autrement dit M a c a p a , et en cas qu'il y ait d'autres forts dans l'estendüe des Terres, depuis lesdits forts jusques a la riuiere des A m a z o n e s vers le C a p de N o r d , et le long de la coste de la mer jusqu'à la riuiere d'Oyapoc dite de Vincent Pinson, ils seront pareillement demolis » e

Article 4. « Les François pourront s'estendre dans TITRE 25


§

e

1976

17

LECTURE

( 97 er

)

e

lesd. Terres dont par les articles 1 et 2 du present Traitté la possession demeure indécise, jusqu'à la riuiere des A m a z o n e s , depuis la situation desd. forts de A r a guary et de C u m a u ou M a c a p a vers le C a p de N o r d et coste de la mer, et les Portugais pourront faire de m e s m e jusques a la riuiere d'Oyapoc ou Vincent Pinson » 1976. Le texte portugais de ce Traité a été publié en 1844, par M. le V I C O M T E D E S A N T A R E M , — mais sous la forme analytique, malheureusement habituelle au noble auteur, — dans son Quadro Elementar, tome IV, 2 partie, pages 758-764 e

Il a été donné littéralement en 1856, mais avec une orthographe moderne, — d'après u n registre du Ministère des Affaires Étrangères à L i s b o n n e , — aux pages 83-88 du second volume de l'ouvrage suivant : « Collecçào dos Tratados, Convenções, Contratos e Actos Publicos celebrados entre a Coroa de Portugale as mais Potencias desde 1640 até ao presente Compilados, coordenados e annotados por José Ferreira B O R G E S D E C A S T R O , Secretario da Legação d Sua Magestade na corte de Madrid, Associado provincial da Academia Real das Sciencias de Lisboa. Lisboa Imprensa Nacional. » 1856-1857, 5 vol in-8°. Et il vient d'avoir, en 1859, une nouvelle édition à Rio de Janeiro, dans u n intéressant travail de feu M. Manoel José Maria D A C O S T A E SÁ, inséré au tome II de la publication c o m m e n c é e en 1858 par M. le D M E L L O M O R A E S sous le titre de « Corographia historica, chronographica, genealogica, nobiliaria, e politica, do Imperio do Brasil. » Mais, bien que M. C O S T A E S A ait été secrétaire g é n é r a l au Ministère de la Marine et des Colonies à Lisb o n n e , et qu'il eût étudié avec soin tout ce qui regarde les limites brésiliennes, sa copie du Traité fondamental de 1700 est fort incorrecte, notamment pour le préambule et pour les articles 1 et 4 . r

er

T.

II

e

TITRE

25

7


e

( 98 )

17

1977.

LECTURE

§§ 1977-1980

Le texte français, pour les dispositions essener

tielles, y compris celles du préambule et des articles 1 E

et 4 , a été donné littéralement, en 1857, par M. D'AVEZAC, dans sa note finale E E , mais avec l'orthographe également rajeunie. 1978.

Je dois à l'obligeance de feu M. le VICOMTE DE

SANTAREM les deux textes, d'après des copies officielles contemporaines, conservées à Paris, aux Archives du Ministère de la Marine et des Colonies. Et je les publierai tous les deux, parmi les pièces justificatives de ce travail. 1979. Le Traité de 1700 renferme quatre éléments déterminatifs : Terres

du

CAP DE NORD :

LE LONG de la coste de la mer :

OVAPOC : Rivière

de

VINCENT PINSON.

Étudions-les dans l'ordre m ê m e où ils se présentent à nous. Terres

1980. du

Cap

Cayenne

du

CAP DE NORD.

Le préambule déclare deux fois que les Terres Nord, objet du Traité, étaient situées entre

de

et la rivière des

Amazones.

Ce n'étaient donc point les terres immédiatement adjacentes au C a p N o r d proprement dit. Il est évident que le Traité de 1700 emploie le n o m de CAP DE NORD dans son acception étendue, c o m m e synon y m e de GUYANE. Il fait c o m m e avaient fait le Gouvernement Français et des auteurs français en 1633, en 1640, en 1651, en 1653, en 1654, en 1664, en 1674, d'après les titres 4, 6, 7, 8. 9, 11, 13. Il fait c o m m e avaient fait le Gouvernement Portugais TITRE

25


e

17

§§ 1981-1982

( 99 )

LECTURE

et un gouverneur portugais, en 1637, en 1645, en 1682, en 1686, en 1688. en 1691, en 1693, d'après les titres 1 , 5, 17, 20. ER

LE

de la coste de la mer.

LONG er

1981. L'article 1 déclare que les terres laissées pro­ visoirement neutres étaient situées sur la rive guyanaise de l ' A m a z o n e , depuis M a c a p á jusqu'au C a p d u N o r d , et L E L O N G de la coste de la mer, depuis le C a p d u N o r d jus­ qu'à la rivière prétendue par le Portugal c o m m e limite. Cette rivière n'était donc point le

Carapapori.

Car le Carapapori, tout à côté du C a p d u N o r d , n'admet point une expression qui implique évidemment l'idée d'un grand intervalle. Et, qui plus est, le Carapapori, débouchant au s o m m e t de l'angle formé par les deux branches du canal de M a r a c á , et complétement caché par l'île de ce n o m , ne se trouve m ê m e pas sur la côte de la mer. Cela se voit parfaitement sur la carte de M.

D E SAINT-

QUANTIN.

OYAPOC.

1982. Le Traité de 1700 applique deux fois à la rivière prétendue par le Portugal c o m m e limite le n o m d ' O Y A P O C , « écrit bien correctement et en toutes lettres », pour m e servir des propres termes de M . le B A R O N D E B U T E N V A L , page 89 des Protocoles. Mais le préambule du m ê m e Traité déclare que, dans les conférences qui précédèrent la rédaction de cet instrument, on a veu les autheurs et les Cartes concernant l'acquisition, et la diuision des Terres du C a p d u Nord. Et ces conférences avaient eu lieu entre les signataires m ê m e s du Traité : d'une part le président R O U I L L É , A m b a s ­ sadeur de F r a n c e ; d'autre part, le D U C D E C A D A V A L , R O Q U E TITRE 2 5


(

100

e

)

17

MONTEIRO FOYOS

LECTURE

PAIM, H O M E S

FREIRE

DE

§ ANDRADA.

E

MENDO

1983 DE

PEREIRA.

Les cinq signataires du Traité de 1700 connaissaient donc le livre de F R O G E R , constituant notre titre 22, ce livre où se trouvait insérée une carte de la G u y a n e construite à C a y e n n e sous la direction de F E R R O L L E S , et qui, publié pour la première fois la veille des conférences, avait eu deux autres éditions pendant les conférences m ê m e s . Cette carte devait être pour les signataires du Traité un document d'une valeur incomparable, puisque le M A R Q U I S D E F E R R O L L E S , élevé au gouvernement de C a y e n n e en 1691 et mort dans ce gouvernement en 1705, c o m m e l'attestent, non-seulementl'Almanachde la Guyane Française, mais encore le Mercure Galant d'avril 1706, et encore M. D ' A V E Z A C en 1857, était gouverneur de la colonie fran­ çaise, et lors de la construction de sa carte et lors du Traité. Or, de toutes les cartes gravées, celle-ci était L A S E U L E qui portât le n o m d'Oyapoc, tel que l'écrit le Traité de 1700, tel qu'on l'écrit aujourd'hui ; et ce n o m y était exclusive­ ment appliqué à la rivière du C a p d'Orange. Donc,

l'OYAPOC

du Traité de 1700 est la rivière du

CAP

D'ORANGE.

Rivière de

V I N C E N T

PINSON.

1983. « La rédaction du Traité de 1700 fut l'œuvre exclusive du Cabinet portugais, le texte français n'en a été que la traduction. » Ce sont des paroles de M. le B A R O N des Protocoles.

DE BUTENVAL,

page 90

Et cette grande révélation est confirmée, en ces termes, par B R O C H A D O , envoyé de Portugal en F r a n c e à l'époque du Traité de 1700, dans une lettre du 2 7 août de la m ê m e année : « O n a déjà fait corriger les fautes de la traduction du Traité provisionnel sur les Terres du C a p d u N o r d ; et TITRE

25


e

1984

17

LECTURE

( 101

)

si vous en désirez une copie, je vous l'enverrai à votre demande. » Mais, puisque le Traité de 1700 a été rédigé par le Cabinet Portugais, il est évident que le n o m de Rivière de Vincent Pinson, donné deux fois dans ce Traité, c o m m e synonyme d'Oyapoc, à la limite prétendue par le Portugal, a dans ce Traité le m ê m e sens que le Portugal avait l'habitude de donner à ce n o m . Or, dans les Lettres patentes de 1637, et dans celles de 1645, constituant le 1 et le 5 titre du Brésil, le Cabinet Portugais avait caractérisé la rivière de Vincent Pinson par une marque qui ne convenait qu'à la rivière du cap d'Orange; et dans sa notification de 1688, con­ stituant le 2 1 titre brésilien, le commandant portugais d'Araguari s'était exprimé de la manière la plus expli­ cite, en disant à F E R R O L L E S , que, en vertu des Lettres pa­ tentes de 1637, les limites despossessionsportugaises étaient à la rivière du C A P D ' O R A N G E , appelée par les Portugais rivière de V I N C E N T P I N S O N , et par les Fran­ çais O Y A P O C . ER

E

E

1984.

Les signataires du Traite de 1700 avaient vu

les auteurs et les cartes concernant l'acquisition et la division des terres de la G u y a n e (§ 1982). E

Ils connaissaient donc le livre de L A B A R R E , le 12 titre du Brésil. La connexion de ce livre avec le Traité de 1700 est on ne peut plus étroite. Les négociateurs de L i s b o n n e voulurent laisser pro­ visoirement indécis le droit de possession sur la portion de la G u y a n e que le prédécesseur de F E R R O L L E S , mal informé, avait assuré être Indienne, n'appartenant à au­ cune nation de l'Europe, ni à la F r a n c e , ni au Por­ tugal. TITRE

25.


( 102 )

17

e

LECTURE

§§ 1985-1986

1985. Mais pourquoi les rédacteurs du Traité de L i s b o n n e n'ont-ils pas, c o m m e le gouverneur français en 1666, n o m m é le Cap d'Orange ? Pourquoi n'ont-ils pas, c o m m e le commandant portugais en 1688, ratta­ ché au Cap d'Orange les n o m s d'Oyapoc et Vincent Pinson? 1986. C'est qu'ils ont bien senti qu'à eux seuls, les n o m s d'Oyapoc et Vincent Pinson déterminaient la limite portugaise aussi mathématiquement que deux points déterminent une ligne droite. Car, pour le Gouvernement Portugais, il n'y avait jamais eu d'autre rivière de Vincent Pinson que celle du C a p d'Orange, et pour tout le m o n d e la même ri­ vière du C a p d'Orange était la seule qui eût jamais porté le n o m d'Oyapoc. Jusqu'au 4 mars 1700, et encore pendant trente et un ans, le n o m d'Oyapoc ne fut jamais appliqué à aucune autre rivière que celle du Cap d'Orange, J A M A I S , J A M A I S , JAMAIS.

Et quand le Gayennais D ' A U D I F F R É D Y avança le pre­ mier, en 1731, qu'il existait loin du C a p d'Orange une autre rivière du n o m d'Oyapoc, il ne la situa pas sur la côte maritime de la G u y a n e , mais en dedans de l'Ama­ z o n e (§§ 662, 1393). L'introduction d'une rivière d'OYAPOC tout au NordOuest du C a p N o r d , à la place m ê m e du Carapapori, ne date que de B E L L I N , S O I X A N T E - T R O I S A N S après le Traité de 1700 (§§ 431-448).

TITRE 25


§ 1987

17

e

( 103 )

LECTURE

VINGT-SIXIÈME

TITRE

DU

Document Portugais dans la même

BRÉSIL

année 1700.

1987. J O S E P H D A C U N H A R R O C H A D O , Portugais d'un mérite éminent, résida près la cour de Louis XIV, de 1695 à 1704; — jusqu'en juillet 1699 c o m m e secrétaire d'ambassade, ensuite c o m m e envoyé. E n outre d'un grand nombre de lettres manuscrites, ce diplomate a laissé, également en manuscrit, une composition intitulée : « Memorias particulares, ou Anecdotas da corte de França, apontadas por J O S E P H D A C U N H A B R O C H A D O , no tempo que servio de Inviado naquella corte. » Il existe à la Bibliothèque Nationale de Rio d e Ja­ neiro une copie de ce double travail. C'est le manuscrit ^y-, en 500 pages in-folio. Les 120 premières de ces pages contiennent les Mé­ moires. O n y lit, page 33, une brève narration de la prise et reprise de M a c a p á en 1697 ; et de page 100 à page 105, u n aperçu de la négociation du Traité de 1700, à laquelle B R O C H A D O déclare avoir pris part. Et dans cet aperçu, extrêmement défavorable au Ca­ binet de L i s b o n n e , le diplomate portugais s'exprime en ces termes, page 104 : « Nos Plénipotentiaires se sont donc réunis avec ce­ lui de F r a n c e , et ils ont fait d'emblée tout ce que le Français a voulu. Ils ont promis de démolir les forts, de retirer les missionnaires des villages indiens, et de se désister de la possession et de l'habitation des terres qui vont de la rive septentrionale [de l'Amazone] TITRE

26


( 104 )

e

17

LECTURE

§ 1988

au V i n c e n t P i n s o n , ce qui est un G R A N D espace de terre. » 1988. Or, cette dernière phrase est analogue à celle de l'article 1 du Traité de 1700 : L E L O N G de la coste de la mer. Parfaitement applicable au territoire bordé par l'Oyapoc, elle ne convient nullement à l'étroite lisière du Carapapori, tout à côté de l'Amazone. er

TITRE

26


§§ 1989-1992

17

e

( 105 )

LECTURE

VINGT-SEPTIÈME

TITRE

DU

BRÉSIL

Document Français et Portugais. TRAITÉ

1989. de

DE

1701.

Traité d'alliance et de garantie du testament II entre la F r a n c e et le Portugal.

CHARLES

Article 6. « Leurs Majestés veulent que le traité pro­ visionnel conclu le 4 mars de l'année précédente 1700, sur la possession des terres du C a p d u N o r d confinant à la ri­ vière des A m a z o n e s , soit et demeure désormais c o m m e traité définitif et perpétuel à toujours. »(§§202-212). 1990. Le texte français de ce traité éphémère ne m'est connu que par l'article ci-dessus, produit par M. le DE

BUTENVAL

BARON

le 4 janvier 1856, et répété en 1857 par

M . D ' A V E Z A C , dans sa note finale EE. 1991. Mais le texte portugais se trouve intégralement à la Bibliothèque Nationale de Rio de Janeiro, pages 294-304 du tome I du manuscrit immense collection en quatre magnifiques volumes in-folio, portant chacun le titre suivant : « Tratados, Convençoens, e outros Papeis, que respeitão a Paz de Utrecht. » er

L'acte est daté de L i s b o n n e le 18 juin 1701 ; il est signé par le président R O U I L L É , et par le M A R Q U I S D E A L E GRETE,

le

COMTE

DE ALVOR,

et

MENDO

DE

FOYOS

PEREIRA ;

et il est renfermé en onze articles, dont celui qui concerne l'Oyapoc est bien le sixième. 1992. Je suis surpris de rencontrer dans la collection de M. C A S T R O (§ 1976), tome 2 pages 128-137, d'après un registre du Ministère des Affaires Étrangères à L i s b o n n e , un traité présentant le m ô m e titre, la m ê m e date, les d

TITRE 2 7


(

106

)

e

17

LECTURE

§

1993

m ê m e s signatures, mais composé de vingt articles, dont celui qui nous occupe forme le quinzième. r

Et je vois dans le second volume de M. le D M E L L O M O R A E S , que M. C O S T A E Si, juge compétent, donnait éga­ lement vingt articles au Traité du 18 juin 1701. Mais le manuscrit de L i s b o n n e , à en juger par son titre, — I N S T R U C Ç Õ E S nos E M B A I X A D O R E S — , n'est pas u n registre spécial de traités, mais u n mélange où les traités ne figurent qu'en seconde ligne. Et le superbe manuscrit de Rio de Janeiro est exclu­ sivement consacré aux documents relatifs à la paix d'Utrecht, entre toutes les nations qui y prirent part; il appartenait au Roi de Portugal, c o m m e le prouvent, aux angles de la reliure, les armes royales portugaises ; et il est, non pas l'œuvre du C O M T E D E T A R O U C A , c o m m e je le croyais en 1851, avant d'avoir pu connaître les Mémoires de D O M Luis D A C U N H A , mais, ce qui revient au m ê m e , l'œuvre du très digne collègue du noble comte. L'authenticité du texte de D O M L U I S D A C U N H A est d'ail­ leurs constatée par sa concordance avsec le texte français, d'après le témoignage de M. D E B U T E N V A L . 1993. Mais, que le Traité de 1701 ait onze articles ou vingt ; que l'article afférent à l'Oyapoc soit le sixième ou le quinzième : cet article est toujours le m ê m e , et il a tou­ jours la m ê m e valeur. E n ce qui nous intéresse, le Traité de 1701 avait pour but de trancher la question guyanaise réservée en 1700. Il la tranche en décidant « que le Traité provisionnel du 4 mars 1700 soit et demeure désormais c o m m e traité défi­ nitif et perpétuel à toujours. » Mais nous venons de voir, au titre 25, que le Traité de 1700 avait établi provisoirement pour limite Nord des terres neutres la rivière du C A P D ' O R A N G E . Donc, c'est la rivière du T1TP.E

CAP D ' O R A N G E 27

qui fut fixée


e

§§ 1994-1995

17

LECTURE

( 107 )

c o m m e limite septentrionale définitive et perpétuelle de ces m ê m e s terres par le Traité de 1701. 1994. NANT,

M.

DE

BUTENVAL

croit voir dans le mot

CONFI­

du Traité de 1701, une preuve décisive de la justesse

de l'interprétation française de l'article 8 du Traité d'Utrecht. L'honorable Plénipotentiaire de F r a n c e dit une pre­ mière fois, dans la onzième séance, page 137 des Protocoles : « Le Plénipotentiaire français appelle l'attention de son honorable collègue sur ces mots, si précisément expli­ catifs du Traité de 1701, rapprochés de ceux du Traité de l'année précédente. Après les avoir lus, est-il possible d'aller chercher le fleuve limite des terres du C a p d u N o r d qui confinent avec l ' A m a z o n e , à cent dix lieues de l'Amazone m ê m e ? » Et il répète, dans la m ê m e séance, page 143 : « La partie des terres du C a p d u N o r d (terres que l'honorable Plénipotentiaire brésilien a dit lui-même s'étendre de l ' A m a z o n e à l'Orénoque), adjugée au Portugal, c'està-dire celle qui confine à l ' A m a z o n e (pour m e servir des termes explicatifs du Traité de 1701, Traité destiné à donner un caractère perpétuel aux stipulations suspensives et provisionnelles de 1700) — celle qui confine à l ' A m a z o n e et dont le V i n c e n t - P i n s o n est la limite, demeure bien et dûment au Portugal, aujourd'hui au Brésil; mais la F r a n c e retrouve la part qui lui revient, c'est-à-dire, la portion de ces m ê m e s terres du C a p d u N o r d qui s'étend du Vincent-Pinson, de l'Araouari, au Maroni. Le Traité d'Utrecht n'est donc pas déchiré. Il est strictement interprété selon son esprit et sa lettre, — selon l'esprit et la lettre des Traités antérieurs de 1700 et de 1701. » 1995. Mais, à l'inverse du Traité de 1700, la rédaction du Traité de 1701 fut l'œuvre exclusive du Cabinet de Versailles. TITRE

27


(

108

)

e

17

LECTURE

§

1996

Cela devait être, puisque ce fut le Cabinet de Ver­ sailles qui proposa le Traité (§§ 203-210). Et cela a été réellement ; car le texte portugais montre qu'il n'est qu'une traduction du français, — et une m a u ­ vaise traduction. Or, en 1701, pas plus qu'aujourd'hui, le verbe français C O N F I N E R n'impliquait nullement l'idée d'étroitesse du ter­ rain confinant. La première édition du Dictionnaire de l'Académie Françoise, publiée en 1694, Éclaircit par cet exemple la signification du verbe C O N F I N E R : « La France confine avec l'Espagne. » La phrase de 1701 ne veut donc pas dire terres restreintes à la lisière de l'Amazone, mais bien terres de la Guyane A L ' E S T D E C A Y E N N E , du côté D E L ' A M A Z O N E , en contraste avec les terres de la Guyane A L'OUEST DE C A Y E N N E , confinant A L ' O R É N O Q U E . C'est ainsi que les Pleins-Pouvoirs de Louis XIV au président R O U I L L É , pour le Traité de 1700, désignent les terres en litige par la dénomination de Terres situées A U X E N V I R O N S D E L A R I V I È R E D E S A M A Z O N E S , et que le Traité m ê m e substitue à cette désignation celle de Terres situées ENTRE

C A Y E N N E

ET

LA

RIVIÈRE D E S

A M A Z O N E S .

1996. Mais ne passons pas outre, sans déplorer une nouvelle méprise de M. D E S A I N T - Q U A N T I N . L'honorable champion du C a r a p a p o r i , qui, ainsi que nous l'avons déjà vu (§§ 1209-1220), s'est trompé si grave­ m e n t sur le Traité fondamental de 1700, n'était pas mieux renseigné sur le Traité de 1701. Je transcris les paroles de M. D E S A I N T - Q U A N T I N , adres­ sées en 1851 au Ministère de la Marine et des Colonies, et imprimées en 1858 par ordre de ce Ministère (pages 201202 de la Revue coloniale, 21-22 du tirage à part) : « Louis XIV, qui cherchait à se créer des alliés, conclut, avec le PortuTITRE

27


§ 1997

e

17

LECTURE

( 109 )

gal, le Traité du 18 juin 1701, par lequel, c o m m e conces­ sion, il abandonnait toutes prétentions sur la province de M a r a g n o n , c'est-à-dire sur une partie du territoire de la rive droite de l'Amazone. » C'est M . DE SAINT-QUANTIN lui-même qui, pour bien faire sentir que le Traité de 1701 avait pour objet la province de Maragnan,

relève par des italiques le mot droite.

Je ne change rien, ni ne dis rien. Je m e borne à gémir. 1997. Et m a douleur augmente, quand je vois M . le BARON DE BUTENVAL répétant, et à deux reprises, l'inexac­ titude de M . DE SAINT-QUANTIN. Oui, dans la huitième séance, page 90 des Protocoles, l'honorable Plénipotentiaire de F r a n c e a dit : « M . DE ROUILLÉ réclamait, au n o m de Louis XIV, non pas l'Oyap o c de VINCENT PINSON, non pas l ' A m a z o n e m ê m e , mais le P a r t á Et qu'on ne dise pas que ces prétentions de Louis X I V sur le Maragnon sont chimériques, car c'est de l'abandon de ces m ê m e s prétentions qu'il entend payer, une année plus tard, l'alliance du Portugal. Le Traité de 1701 n'a pas d'autre objet : Louis X I V abandonnait ses droits sur le Maragnon au roi Très-Fidèle qui devenait son allié. » L'honorable Plénipotentiaire de F r a n c e a dit encore, clans la onzième séance, pages 136-137 des Protocoles : « Le Plénipotentiaire français doit avertir son honorable collè­ gue qu'il n'a jamais reconnu que, par le Traité de 1700, Louis X I V eût rien abandonné sur le Maragnan et le Pará. Le Plénipotentiaire français a reconnu précisément le con­ traire, à savoir, que, par ce Traité de 1700, Louis X I V avait maintenu ses prétentions, mais avait consenti à en suspen­ dre l'effet. Tandis que, par le Traitè subséquent de 1701, Louis X I V les abandonna, en effet, et en fit le prix de l'al­ liance du roi Très Fidèle. »

El le Traité de 1701, c o m m e M . le BARON DE BUTENVAL TITRE 2 7


(

110

)

17

e

LECTURE

§

1997

le déclare lui-même quelques lignes après ce dernier pas­ sage, et c o m m e il le répète à la page 143 de la m ê m e séance, n'avait fait que rendre définitif et perpétuel le Traité provi­ sionnel de 1700... Et dans la m ê m e séance du premier passage, c o m m e il est consigné à la page 91 des Protocoles, « M. le Plénipotentiaire de F r a n c e lut, article par article, le Traité de 1700 »... Et le Traité de 1700, c o m m e le prouve notre titre 25, n'avait fait que rendre provisoirement neutres entre la F r a n c e et le Portugal les terres situèes entre la rive gauche de l'Amazone et la rive droite de l'Oyapoc

TITRE 27


§§ 1998-1999

17

e

( 111 )

LECTURE

VINGT-HUITIÈME

TITRE

DU

BRÉSIL

Document Portugais, Anglais, Hollandais et Autrichien. TRAITÉ

DE

1703

1998. Article xxii. « E o d e m m o d o etiam pax fieri non poterit c u m Rege Christianissimo, nisi ipse cedat quocunque jure quod habere intendit in Regiones ad Promontorium Boreale vulgo Caput de Norte pertinentes, et ad dition e m Status M a r a n o n i j spectantes, jacentesque interfluvios A m a z o n i u m et Vincentis Pinsonis, non obstante quo­ libet fœdere sive provisionali sive decisivo inter Sacram Regiam Majestatem Lusitaniæ et ipsum R e g e m Christianissimum inito super possessione, jureque dictarum Regionum. » (§§ 214-224). 1999. Le texte intégral du Traité de la quadruple alliance, signé à L i s b o n n e le 16 mai 1703, se trouve dans la grande collection manuscrite de D O M L U I S D A C U N H A , tome I , pages 644-673. (§ 1991). Le m ê m e Traité a été publié en 1725, par L A M B E R T Y , tome 2 page 502. Il a été redonné en 1731 par D u M O N T , tome VIII, pre­ mière partie, page 127. ER

d

Et le texte de D u M O N T est devenu classique ; — si bien que c'est celui que donne M . B O R G E S D E C A S T R O , tome 2 page 160. d

Mais il ne mérite certainement pas u n pareil honneur, pour ce qui est de l'article XXII. Car, au lieu de ad ditionem, on y lit Additionem, et au lieu de Maranonii M.

D'ÀVEZAC,

on y lit

Mararconii.

dans sa note finale FF, suit également le

texte de D u M O N T , —

mais en le corrigeant. TITRE

28


( 112 )

e

17

LECTURE

§§ 2000-2002

L A M B E R T Y avait été beaucoup plus exact, sans l'être toutefois autant que D O M L U I S D A C U N H A .

C'est pourquoi j'ai donné la préférence au manuscrit inédit de Rio de Janeiro. 2000.

Le Traité de 1703 est doublement intéressant.

2001. Remarquons d'abord que l'Angleterre, la Hol­ lande et l'Autriche y ont garanti au Portugal la posses­ sion exclusive des Terres du Cap du Nord situées entre la rivière des Amazones et celle de Vincent Pinson, tenant pour non avenus le Traité de 1700, qui laissait ces m ê m e s terres provisoirement neutres entre la F r a n c e et le Por­ tugal, et le Traité de 1701, qui les rendait neutres pour toujours entre les m ê m e s puissances. Cette référence aux deux traités antérieurs est d'autant plus importante que, des cinq signataires portugais du Traité de 1703, deux, le due D E C A D A Y A L et R O Q U E M O N T E I R O P A I M , avaient signé aussi le Traité de 1700, et deux autres, le M A R Q U I S D E A L F G R E T E et le C O M T E D E A L V O R , avaient signé aussi le Traité de 1701. Et nous nous s o m m e s convaincus, au titre 25, que le n o m d'OYAPOC, donné c o m m e synonyme de V I N C E N T P I N S O N , dans le Traité fondamental de 1700, montre que le V I N C E N T P I N S O N de 1700 et de 1703 est la rivière du CAP

D'ORANGE.

2002. E n second lieu, pesons bien le mot employé deux fois dans l'original latin, — qui est le texte unique du traité de 1703, — pour désigner les T E R R E S du Cap du Nord. C'est le pluriel

REGIONES.

Ce m ê m e pluriel est appliqué, dans le second article secret du m ê m e Traité, au territoire immense qui forme aujourd'hui la République de l'Uruguay : « R E G I O N E S ad R i p a m borcalem fluminis argentei sive Rio da prata sitas. » Et le premier article secret, parlant de la grande proTITRE

28


e

§ 2002

17

LECTURE

( 113 )

vince espagnole d'Estramadura,n'emploie que le singu­ lier du m ê m e n o m : « in R E G I O N E Extramadura. » Ce n'est donc pas le tout petit recoin des terres i m m é ­ diatement adjacentes au C a p d u N o r d que le Traité de 1703 désigne par le pluriel : R E G I O N E S ad P r o m o n t o r i u m Boreale vulgo

Caput

de Norte

pertinentes.

C'est, de toute necessité, quelque chose de bien grand, tel que l'indiquent A C U Ñ A , P A G A N , G O M B E R V I L L E , R O D R I G U E Z et B R O C H A D O , aux titres 3, 10, 16, 18, 26.

T. II

TITRE 2 8

8


17

( 114 )

e

LECTURE

VINGT-NEUVIÈME

Document

2003. Terre

«

Ferme,

Français

Atlas

de

§§ 2003-2004

TITRE

dans

DU

la même

BRÉSIL

année

G. DELISLE. » N° 78. «

du Perou,

du

Bresil,

et du

Pays

1703.

Carte

de

des

la

Ama-

Dressée sur les Descriptions de H E R R E R A , de LAET, et des PP. d ' A c u ñ A , et M. RODRIGUEZ, et sur plusieurs Relations et Observations postérieures par GUILLAUME DE L'ISLE, Premier Geographe du Roy de l'Academie Royale des sciences. A Paris chez l'Auteur sur le Quai de l'Hor­ loge à l'Aigle d'Or avec privilége du Roy pour 20 ans. 1703. » zones.

Bibliothèque Impériale de Paris, cartes, vol. 376. Cap

d'Orange,

à sa véritable place.

Et immédiatement à l'Ouest de ce cap, une rivière, portant trois fois, — son embouchure —

grande

à sa source, sur son lit, et à

le n o m de

Yapoco

R.

2004. Dans l'extrait de cette carte donné par M. DE SAINT-QUANTIN sous le n° 6, on a gravé erronément Yacopo à la source, et Oyapoco à l'embouchure. Mais dans sa liste des variations du n o m de la rivière du C a p d'Orange, page 3 1 5 de la Revue Coloniale, 68 du tirage à part, M. D E SAINT-QUANTIN donne correctement Yapoco pour la m ê m e carte de DELISLE.

TITRE 29


§§ 2005-2007

e

17

TRENTIÈME

( 115 )

LECTURE

TITRE DU

BRÉSIL

Document, Espagnol en 1707.

2005.

« EL GRAN

RIO M A R A Ñ O N , O A M A Z O N A S

Con la Mis-

sion de la Compañia de Iesus Geograficamente delineado Por el P Samuel F R I T Z Missionero continuo en este Rio. P. I. de N. Societatis Iesu quondam in hoc Marañone Missionarius sculpebat Quiti Anno 1707. — A la Catolica y Real Magestad del Rey N° S D Felipe V. La Provincia de Quito de la C o m p de Iesus ofrece y dedica en eterno reconocimiento este M a p a del Gran Rio M a r a ñ o n como a su Soberano Patrono, y Mantenedor, por M a n o de su Real Audiencia de Quito. » 1 feuille. e

r

n

a

Bibliothèque Impériale de Paris, cartes, collection Gosselin, 490. 2006. Travaillante C a y e n n e , M. D E S A I N T - Q U A N T I N ne pouvait connaître la carte de F R I T Z que par la réduction donnée en 1717 dans le XII recueil des Lettres édifiantes, où le n o m de Rivière de Vincent Pinçon est donné à l'Approuague, et ne favorise qu'imparfaitement l'inter­ prétation brésilienne de l'article 8 du Traité d'Utrecht. e

Cette édition de 1717 est aussi la seule dont M. le ait eu connaissance.

BARON

DE BUTENVAL

Mais M. D ' A V E Z A C a eu soin de consulter le précieux exemplaire, peut-être unique, de la carte originale de F R I T Z , conservé à la Bibliothèque Impériale de Paris. Et il a vu que la réduction de 1717 est infidèle. 2007. L'honorable savant reconnaît que ce n'est pas à l'embouchure del ' A p p r o u a g u eque F R I T Z a inscrit le n o m TITRE

50


(116)

e

17

LECTURE

§§2008-2009

de Vincent Pinçon, mais « à l'entrée d'une rivière qui pourrait représenter l'Oyapoc actuel. » Et M . D'AVEZAC aurait pu prendre cette fois u n ton plus affirmatif. Car, dans sa véritable carte, FRITZ donne le n o m de Rio de Vicente Pinçon à u n grand fleuve de la G u y a n e , de très large embouchure, situé à 46 2/3 lieues espagnoles (66 2/3 lieues françaises) d u G a p d u N o r d , et immédiate­ m e n t à l'Est de

l'Aperuaque.

Ces marques caractérisent parfaitement et exclusive­ m e n t le fleuve du C a p d'Orange. FRITZ ne l'a pas désigné par le n o m d ' O y a p o c , parce que sa carte est espagnole, et que les Espagnols c o m m e les Portugais, conservaient encore au fleuve du C a p d'Orange le n o m de Vincent Pinçon que les Espagnols eux-mêmes lui avaient donné longtemps avant que le n o m indigène de cefleuvelui eût été rendu par les Anglais. 2008. Tout en reconnaissant que le V i n c e n t P i n ç o n de FRITZ est le fleuve d u C a p d'Orange, M . D'AVEZAC élève des soupçons contre les sources où le respectable missionnaire a p u puiser ses renseignements sur ce point. M . D'AVEZAC rappelle : Que FRITZ avait descendu l ' A m a z o n e jusqu'à Para en 1689 ; Qu'à peine arrivé à P a r á , il fut arrêté dans cette ville c o m m e espion et détenu près de deux ans ; Qu'il retourna de P a r a à ses missions accompagné d'une escorte brésilienne, sans avoir p u sortir de l ' A m a z o n e . Et il conclut ainsi : « Il est donc évident que ce bon religieux n'a eu, sur la valeur géographique de la dénomi­ nation de rivière de V i n c e n t P i n ç o n , d'autres lumières que les dires intéressés des Portugais du Para, alors dans la ferveur de leurs prétentions nouvel-écloses. » 2009. Les faits allégués par M . D'AVEZAC, à l'exception TITRE

30


§§ 2010-2013

e

17

( 117 )

LECTURE

d'un détail, sont attestés par D O N A N T O N I O avait lu le journal inédit du Père F R I T Z .

D E ULLOA,

qui

S A M U E L F R I T Z , missionnaire de la compagnie de Jésus, arriva dans la ville de Para, en descendant l'Amazone, au mois de septembre 1689.

Il y fut détenu par le gouverneur A R T U R D E SÁ, non pas comme espion, mais pour avoir établi des missions espa­ gnoles à l'Est du Javari. Il resta vingt-deux mois dans la ville de Pará, et re­ partit pour ses missions le 8 juillet 1691, déjà du temps d'ANTONIO D E A L B U Q U E R Q U E , gouverneur général de l'État de M a r a g n a n depuis le 17 mai 1690. qui possédait une copie du journal de F R I T Z , atteste m ê m e que ce fut en 1690, et par conséquent dans la ville de Para, et sous le gouvernement d'ANTONIO D E A L B U Q U E R Q U E , que le savant missionnaire dressa la carte gravée à Quito. LA CONDAMINE,

2010. O n peut donc poser encore en fait, avec M. d'AvEZAC, que F R I T Z introduisit sur sa carte la rivière de Vin­ cent P i n ç o n d'après les renseignements des Portugais de Para. O n doit m ê m e croire que ces renseignements lui furent tout spécialement fournis par A L B U Q U E R Q U E , personnelle­ ment engagé dans la question amazonienne depuis 1688. 2011.

Mais il faut voir dans ces faits toute autre chose

que ce que l'honorable M. D ' A V E Z A C y a V U .

2012. Il faut y voir, en premier lieu, que déjà en 1690, dix ans avant le traité de Lisbonne, les Portugais de Para, les Portugais les mieux en état de savoir au juste ce que c'était que la rivière de Vincent Pinçon, appli­ quaient ce n o m à la rivière du C a p d'Orange. 2013. Et il faut remarquer, en second lieu, que l'au­ teur de la carte de 1707 était bien loin d'avoir des motifs pour se rendre compère des Portugais de Para. M. D ' A V E Z A C rappelle lui-même qu'à peine arrivé à TITRE. 30


( 118 )

17

e

LECTURE

§§ 2014-2015

l'ará,F R I T Z fut arrêté, et détenu pendant près de deux ans. Et

ULLOA

articule d'autres griefs.

F R I T Z s'était rendu à P a r a pour y être soigné d'une grave maladie qu'il avait contractée dans les déserts de ses missions ; et au lieu de charité, il avait trouvé à P a r a une prison.

Il retournait de Para, accompagné d'une escorte bré silienne, dans la douce persuasion d'aller jouir paisible m e n t de toutes les missions qu'il avait fondées. Mais arrivés au Javari, le 18 octobre 1691, le souslieutenant A N T O N I O D E M I R A N D A lui signifia que l'escorte brésilienne n'était venue si loin que pour prendre posses­ sion de cette frontière, en vertu d'un ordre du gouverneur général A N T O N I O D E A L B U Q U E R Q U E : qu'il eût donc à éva­ cuer les missions qu'il avait établies à l'Est du Javari, parce que tout le territoire qui s'étendait depuis ce point jusqu'à la côte de Para, appartenait de droit à la Couronne de Portugal. 2014. Et le Père F R I T Z était u n h o m m e intelligent, dont L A C O N D A M I N E admirait l'habileté. Et, quoique dressée dès 1690, la carte de F R I T Z ne cessa d'être retouchée par son auteur jusqu'à sa publication ; car L A C O N D A M I N E rapporte que la partie supérieure du cours du M a r a ñ o n fut perfectionnée en 1693, et la teneur des notes qui accompagnent la gravure de 1707 prouve qu'elles ont été écrites dans cette dernière année. Et en 1707, il y avait quatre ans que l'Espagne, unie à la F r a n c e , était en guerre avec le P o r t u g a l .

2015. Donc, si le Père F R I T Z a maintenu sur sa carte, en 1707, le V i n c e n t P i n ç o n que les Portugais de Para lui avaient inculqué dix-sept ans auparavant, c'est qu'il s'est assuré ultérieurement, par ses propres recherches, TITRE

50


§ 2015

17

e

LECTURE

( 119

)

que le V i n c e n t P i n ç o n des Portugais de Para était bien réellement celui des Espagnols. Il a donné le n o m de Vincent P i n ç o n à l'Oyapoc, non parce, que c'était, mais quoique ce fût l'intérêt des Por­ tugais de Para.

TITRE

30


( 120 )

e

17

TRENTE

ET

UNIÈME

Document 2016. rique

§§ 2016-2017

LECTURE

TITRE

DU

BRÉSIL

Français en 1708.

« Dictionnaire Universel, Géographique et Histole tout recueilli des meilleurs livres de voyages &

autres qui ayent paru jusqu'apresent. Par M . l'Académie Françoise, & Medailles. A MDCCVIII.

Paris,

CORNEILLE,

de celle des Inscriptions &

chez

JEAN

BAPTISTE

de des

COIGNARD

» Trois volumes in-folio.

Bibliothèque Mazarine à Paris, 4863. L. M . N. T o m e second, article G U I A N E : « La G u i a n e Françoise, proprement F r a n c e Equinoxiale, contient environ quatre-vingt lieuës, &

com­

m e n c e par le C a p d'Orange, qui est une pointe de terre basse qui se jette à la mer, & dont on prend connoissance par trois montagnes qu'on voit par dessus. Ces montagnes sont au-delà de la riviere d'Yapoco. » 2017.

C'est le texte de L A

BARRE

en 1666, constituant

notre titre 12. Mais c'est plus qu'une répétition à quarante-deux ans d'intervalle. C'est une sanction, et avec des circonstances remar­ quables. E n décembre 1697, le Mercure Historique avait publié que le gouverneur de C a y e n n e considérait la rive gauche de l ' A m a z o n e c o m m e appartenant de droit à la F r a n c e (§ 1709). E n avril 1706, le Mercure Galant avait publié que la rive gauche de l ' A m a z o n e était considérée c o m m e limite m é ­ ridionale de la G u y a n e Française, non-seulement par le TITRE

31


§

2016

e

17

LECTURE

( 121

)

gouverneur de C a y e n n e , mais encore par le Cabinet de Versailles lui-même (§ 1707). Et en 1708, il y avait cinq ans que la F r a n c e était en guerre avec le Portugal. 2018. Notons aussi le n o m de Yapoco rivière du C a p d'Orange.

TITRE

31

donné à la


( 122 )

17

e

TRENTE-DEUXIÈME

Document

2019.

« Mémoire

§§ 2019-2020

LECTURE

TITRE

Portugais

présenté

en

DU

BRÉSIL

1711.

par D O M LUIS DA C U N H A à la

Reine d ' A n g l e t e r r e le 14 décembre 1711. »

« J'ai ordre du Roi m o n maître pour prier Votre M a ­ jesté de recommander

tout particulièrement, dans les

instructions qu'Elle donnera à ses Plénipotentiaires au Congrès d'Utrecht, les points suivants : « Article 5 . Pour ce qui concerne le Roi de F r a n c e , ce Prince devra céder aussi au Roi de Portugal, moyen­ nant les vigoureux offices de V. M., le droit qu'il prétend avoir sur les terres du C a p d u N o r d situées entre la rivière des A m a z o n e s et celle de V i n c e n t P i n s o n , afin que le Roi de P o r t u g a l et ses successeurs en jouissent à tou­ jours, nonobstant tout traité provisionnel fait entre les deux couronnes. » E

Ce document est u n de ceux que contient la grande collection manuscrite de Rio d e Janeiro, mentionnée au D

titre 27. Il s'y trouve au tome 2 , page 524. Il a été publié en 1851, dans la Revista de l'Institut His­ torique et Géographique du Brésil, page 504 du volume de mil huit cent

cinquante.

Et M . D'AVEZAC a bien voulu rendre au Brésil le ser­ vice de l'insérer textuellement dans son beau travail de 1857, note finale FF. 2020.

Le Traité provisionnel

rappelé en 1711 par le

ministre de P o r t u g a l à L o n d r e s , c'est celui d u 4 mars 1700, celui où l'identité de la rivière de V i n c e n t P i n s o n avec celle du C a p d ' O r a n g e avait été solennellement étaTITRE 32


§ 2020

e

17

LECTURE

( 123 )

blie par le synonyme caractéristique Oyapoc. (Titre 25.) E n demandant pour le Portugal les terres bornées par le Vincent Pinson du Traité provisionnel, D O M LUIS DA GUNHA demandait donc pour frontière du Brésil la rivière du CAP D'ORANGE.

TITRE

32


17

( 124 )

e

|TRENTE-TROISIÈME

Document

2021.

§§ 2021-2022

LECTURE

Portugais

TITRE

DU

en janvier

BRÉSIL

1712.

Le P o r t u g a l ne put être représenté à Utrecht

dès l'ouverture du Congrès. Le Congrès s'ouvrit le 29 janvier 1712, et le COMTE DE TAROUCA n'y fut introduit que le 12 février, et D O M LUIS DA C U N H A le 5 avril. Pour parer à cet inconvénient, —

lorsque les Plénipo­

tentiaires anglais partirent pour Utrecht, dans les Pre­ miers jours de janvier, D O M Luis DA C U N H A , Ministre à L o n d r e s , prit soin de remettre au premier des deux, qui était le docteur JEAN ROBINSON, alors Evêque de Bristol et ensuite Evêque de L o n d r e s , u n M e m o r a n d u m où il lui recommandait les intérêts du Portugal. Or le premier article de ce M e m o r a n d u m était celui-ci : « O n d e m a n d e , quant à la F r a n c e , la cession des terres appelées du C a p d u N o r d , situées entre les Rivières des A m a z o n e s et de V i n c e n t P i n s o n , et appartenantes à l'État du M a r a g n a n , dont le Portugal a toujours été en possession, et sur lesquelles on a fait dans l'année 1700 un Traité Provisionnel, à l'occasion de quelques contesta­ tions qui y étaient survenues, par suite duquel Traité les Portugais ont démoli les forts qu'ils y avaient bâtis. O n d e m a n d e aussi que la F r a n c e cède tout le droit qu'elle prétend avoir sur lesdites terres du C a p d u N o r d , ainsi que sur tout autre pays du domaine du Portugal. » 2022.

C'est encore le grand manuscrit du titre 27 qui

fournit ce document ; tome 3, page 355. Et c'est encore la

Revista TITRE

de l'Institut Historique et 53


§ 2022

e

17 LECTURE

( 125 )

Géographique du Brésil qui l'a publie pour la première fois; année 1850, page 504. Il confirme, de la manière la plus formelle, le fait déjà constaté par le titre 32 : — Que la limite demandée par le Portugal à Utrecht était la rivière du CAP D'ORANGE. Et c'est encore un bonheur pour le Brésil qu'il ait été également reproduit par l'honorable M. D'AVEZAC.

TITRE

55


17

e

( 126 )

LECTURE

TRENTE-QUATRIÈME

Document

2023. Portugal. Chevalier,

«

Demandes

En

Latin

Marchand

TITRE

Portugais

en

specifiques et François. Libraire,

§§ 2023-2024

&

mars

de A

Sa

DU

BRÉSIL

1712.

Majesté

Utrecht.

Medailliste

le Roi

Chèz

de

Nicolas

MDCCXII.

»

In-12, cinq pages. Bibliothèque Nationale de Rio d e Janeiro, tome 2 d'un recueil unique réuni par BARBOSA M A C H A D O , et auquel il a fait mettre ce titre imprimé, en ayant soin de donner à toutes les pièces le format in-folio : « Tratados de Pazes de Portugal, Celebrados c o m os Soberanos da E u r o p a Collegidos por DIOGO BARBOSA M A C H A D O , Abbade da Igreja de Santo Adriaõ de Sever, e Academico da Academia Real. » d

er

Réimprimé en 1714, tome I , pages 326-330 « Actes, etc. concernant la paix d'Utrecht. »

des

Reproduit par M . D'AVEZAC, mais seulement en latin, dans sa note FF. 2024.

Textes originaux :

« Postulata specifica Serenissimi ac Potentissimi Regis L u s i t a n i æ . — Sacra Regia Majestas L u s i t a n a Con­ tendit 11. Q u ò d sibi, cæterisque Lusitaniæ Regibus cedatur à G alliâ in perpetuum q u o d c u m q u e jus, quod habere intendit in Regiones ad Promontorium Boreale vulgò Caput do Norte pertinentes, & ad ditionem statûs M a r a n o n i i spectantes, jacentesque inter fluvios A m a s o n u m & Vincentis Pinsonis, n o n obstante quolibet fœdere, sivè Provisionali sivè Decisivo inito super possessione, jureque dictarum Regionum ; quin etiam quodcum­ que aliud jus, quod eadem Gallia habere intenderit in TITRE

34


§§ 2025-2027

e

17 LECTURE

( 127 )

cæteras Monarchiæ Lusitanæ ditiones Dabantur, Ultrajecti ad R h e n u m die 5 Martii 1712. J. COMES DE TAROUCA. » « Demandes specifiques de Sa Majesté le Roi de Por­ tugal. — Sa Majesté Portugaise demande 11. Que la France lui céde, & à tous les Roys de Portugal après lui pour toûjours tout le droit qu'elle prétend avoir sur les terres appellées c o m m u n é m e n t du Cap de Nord, appartenantes à l'Etat du Maragnan, & situées entre les Ri­ vieres des A m a s o n e s , & de Vincent

Pinson,

nonobstant

tout Traité Provisionnel ou Décisif, qu'on peut avoir fait sur la possession, & sur le droit des dites terres ; aussibien que tout autre droit que la F r a n c e pourroit avoir sur les autres Domaines de la Monarchie de Portugal

Fait à

Utrecht le 5. Mars 1712. J. COMTE DE TAROUCA. » (§§ 235241.) 2025.

O n a souvent essayé de retourner ce document

contre le Brésil. 2026. M. LESCALLIER, en 1797, page 6 : « Une de­ m a n d e préliminaire, et antérieure d'une année au traité [d'Utrecht], faite de la part du Roi de Portugal à la France, sous le n o m de Postulata specifica, propose pour nouvelles limites [!] la rivière de V i n c e n t P i n ç o n , sans y ajouter d'autre dénomination. » 2027. M. DE SAINT-QUANTIN, page 215 de la Revue colopage 68 du tirage à part. « Si l'on avait voulu indi­ quer la rivière d'Oyapock, en aucun cas, et surtout dans les demandes préliminaires d'un traité, les Portugais ne l'eussent certainement pas désignée exclusivement par le n o m de V i n c e n t - P i n ç o n qui ne lui est donné nulle part dans les cartes, tandis que l'on retrouve invariablement le mot O y a p o c k ou un n o m approchant dans toute la série de celles qui ont été publiées jusqu'à nos jours, depuis l'atlas de JACOB HONDIUS qui parut en 1599. »

niale,

TITRE

54


e

( 128 )

17

2028. Revue

LECTURE

§§ 2028-2031

Le m ê m e M . D E SAINT-QUANTIN, page 345 de la 98dutirage à part. «L'Oyapock n'est

Coloniale, page

pas la rivière de Vincent

parce que le m o t de

Pinçon

J a p o c ne figure pas du tout dans les demandes prélimi­ naires d u Traité d'Utrecht et ne paraît qu'une fois, c o m m e épithète, dans le traité lui-même ; que le n o m d'Oyapock, ou u n de ses dérivés, ayant été de tout temps le n o m , et vulgaire, et constamment employé pour désigner la grande rivière qui coule entre la montagne d'Argent et le cap d'Orange, on l'aurait clairement employé c o m m e nom principal si l'on avait voulu désigner cette rivière. » 2029. M . le BARON D E BUTENVAL, onzième séance, page 136 des Protocoles : « E n 1712, dans les demandes préliminaires (postulata specifica) qui précédèrent les négo­ ciations d'Utrecht, le P o r t u g a l ne parle plus d'Oyapoc, il dit, le Vincent-Pinson tout court. » 2030. M . D'AVEZAC, en 1857, note FF, immédiatement après avoir transcrit le texte latin du 5 mars 1712 : « Jus­ que-là il n'était fait mention nulle part, dans les négo­ ciations, de la rivière J a p o c ou O y a p o c , et l'on ne voit ce n o m équivoque apparaître que dans le texte définitif du traité, c o m m e u n s y n o n y m e glissé dans u n des articles où sans doute figurait d'abord le n o m exclusivement pro­ noncé jusqu'alors, de V i n c e n t P i n s o n . » Mais

:

2031.

Bien que les demandes du COMTE D E TAROUCA

au mois de mars 1712, le M e m o r a n d u m

de D O M LUIS DA

C U N H A en janvier 1712 (titre 33), la représentation de ce dernier diplomate en décembre 1711 (titre 32), et le Traité de la Quadruple Alliance en mai 1703 (titre 28), ne pro­ noncent que le n o m de Vincent

Pinson,

chacun de ces

actes avertit que les terres prétendues par le Portugal sont celles qui avaient été laissées neutres par le Provisionnel

Traité

du 4 mars 1700. Et dans sa note EE, rien TITRE

54


e

§ 2032 que

17 LECTURE

trois

( 129 )

pages avant celle de la note F F où M. D'AVEZAC

affirme que jusqu'au Traité d'Utrecht le n o m donné à la rivière limite prétendue par le Portugal avait été exclu­ sivement celui de Vincent Pinson, l'honorable critique imprime lui-même le texte français de l'article 1 du Traité du 4 mars 1700, où la limite septentrionale des terres neutres porte le n o m de rivière d'OYAPOC dite de Vincent Pinson, et l'article 4 du m ê m e Traité fondamental, où la m ê m e limite prétendue par le Portugal porte le n o m de er

e

rivière d ' O Y A P O C ou de

Vincent

Pinson.

2032. Sans nous arrêter à ce que JODOCUS HONDIUS, en 1599, n'avait pas encore publié d'atlas, prenons note d'une vérité confessée par M. DE SAINT-QUANTIN. C'est que le n o m indigène de la rivière du C a p d'Orange n'a c o m m e n c é à figurer sur les cartes qu'en 1599. Toute la côte de la G u y a n e était cependant bien connue des E u r o p é e n s dès le commencement du xvi siècle ; ils avaient donné un n o m à chacune des nombreuses rivières qui découpent ce littoral. e

Quel était donc, avant 1599, le n o m européen de la rivière du Cap d'Orange? C'était, c o m m e tous les autres n o m s de la G u y a n e avant R a l e g h et K e y m i s , un n o m espagnol. C'était Rivière

de Vincent

Pinçon.

Quand les Anglais d'abord, et puis les Hollandais, et puis les Français, eurent substitué aux n o m s espagnols les n o m s indigènes, les Espagnols eux-mêmes se confor­ mèrent au nouvel usage. Toutefois, et chez les Espagnols et chez les Portu­ gais, le n o m espagnol de Rivière de Vincent Pinçon survécut longtemps à tous les autres. er

E n 1637, c o m m e le prouve le titre 1 , le Roi d'Es­ p a g n e et de Portugal n'avait donné àlarivière du C a p d'Orange que le n o m de Vincent Pinçon. T. II.

- TITRE

34

9


§

e

( 130 )

17 LECTURE

203

E n 1645, c o m m e le prouve le titre 5, le roi de Por­ tugal avait reproduit pour la m ê m e rivière le m ê m e n o m unique de Vincent P i n ç o n . E n 1688, c o m m e le prouve le titre 21, le commandant du fort brésilien

avait déclaré officiellement

d'Araguari

que la rivière du C a p d'Orange avait parmi les Portu­ gais le n o m

de

Vincent

çais lui donnaient celui

tandis que les Fran­

Pinçon, d'Ogapoc.

Encore en 1707, c o m m e le prouve le titre 30, une carte espagnole, construite par u n h o m m e qui avait beaucoup à se plaindre des Portugais, —

tout en donnant

aux

autres rivières de la G u y a n e leurs n o m s indigènes, ne désignait celle du Rivière

de

Vincent

C a p d'Orange que par le n o m

de

Pinçon.

Et cette persistance, alors que tous les autres n o m s espagnols

avaient disparu de la G u y a n e

depuis plus

d'un siècle, montre bien, à elle seule, que la rivière de V i n c e n t P i n ç o n n'était pas quelque chose d'insignifiant, c o m m e la rivière du C a p d u N o r d proprement dit. 2033.

Cela est confirmé par un mot du texte français

des D e m a n d e s spécifiques de 1712. Le COMTE DE TAROUCA ne dit point de

les terres du

Cap

Nord.

Il dit : « les terres APPELLÉES C O M M U N É M E N T du Nord.

Cap

de

»

O n ne saurait mieux indiquer qu'il ne s'agit point des terres immédiatement adjacentes à la pointe appelée pro­ prement C a p d u N o r d . Et la m ê m e conviction est produite par un autre mot du texte latin. C'est le pluriel REGIONES, appliqué deux fois aux terres du C a p d u N o r d prétendues par le Portugal, et dont nous avons déjà apprécié la valeur au titre 28, à propos de l'article xxii du Traité de 1703, modèle de l'article 2 du COMTE DE TAROUCA. d

TITRE

34


§§ 2034-2036

e

17 LECTURE

TRENTE-CINQUIÈME

Document

Portugais

TITRE

dans

la même

( 131 )

DU

BRÉSIL

année

1712.

2034. « Arte de navegar, e m que se ensinam as regras praticas, e o m o d o de cartear pela Carta plana, & reduzida, o m o d o de graduar a Balestilha por via de numeros, & muitos problemas uteis à Navegaçaõ; & Roteiro das Viagens, & Costas Maritimas de G u i n è , A n g o l a , Brasil, Indias, & Ilhas Occidentaes, & Orientaes, Agora novamente emendado, & accrescentadas muitas derrotas novas por M A N O E L P I M E N T E L , Fidalgo da Casa de S. Magestade, & Cosmographo m ó r do Reyno, & Senhorios de Portugal. Lisboa, N a Officina Real Deslandesiana. M. DCCXII. Com todas as licenças necessarias. » In-folio. Bibliothèque Na­ tionale de Rio de Janeiro. Bibliothèque Nationale de Lisbonne. Page 209 : « C. do Norte de G u i a n a lat. 1 ,54' N. » « C. de O r a n g e . 4°,04' N. » « Rio O y a p o c ou de Vicente Pinson. 4°,06' N. » 0

2035.

Ce document a été allégué par M. le VICOMTE

DE L'URUGUAY dans son mémoire du 15 juin 1855. Et M. le BARON DE BUTENVAL y a répondu deux fois. 2036. Dans la deuxième séance, après avoir cité le titre de la première édition du livre de PIMENTEL, donnée à L i s b o n n e en 1699, l'honorable Plénipotentiaire de F r a n c e a dit (page 29 des Protocoles) : « A la page 402, on trouve une table des latitudes et longitudes, comprenant Rio de Janeiro et M a r a n h ã o , mais rien au Nord de l'Equateur. Ce n'est que dans une TITRE

35


e

( 132 )

17

LECTURE

§§ 2037-2039

édition postérieure, de 1746, que sont données les latitudes suivantes: C a p N o r d , 1°,54' L. N. C a p O r a n g e , 4°, 4' L. N. Rio O y a p o k ou de Vincent-Pinzon, 4°, 6' L. N. « O n n'a pas à Paris l'édition de 1712, dont parle M. DE L'URUGUAY, mais elle est peut-être trop voisine de la conclusion du Traité d'Utrecht, pour ne pas accorder une plus grande valeur historique à la première

édition,

pour laquelle l'auteur obtint u n privilége en 1699, qua­ torze ans avant le Traité d'Utrecht. » 2037.

Et M. le BARON D E BUTENVAL a ajouté dans la

onzième séance (page 131 des

Protocoles) :

« Le Plénipotentiaire Français rappellera à son hono­ rable collègue que l'édition ORIGINALE de PIMENTEL (1699) n'indique, à la table des latitudes, aucune position au N o r d de l ' A m a z o n e , qu'il n'a point vu l'édition de 1712, mais bien celle de 1746, et que ce serait en tout cas, à douze

ans du

Traité

de Lisbonne,

que

le géographe de

la cour de Portugal indiquerait, pour la première fois, à la science étonnée, le V i n c e n t - P i n s o n par le travers du quatrième degré et à la place m ê m e de notre O y a p o c . « Le Plénipotentiaire Français confesse à son hono­ rable

collègue qu'aucun témoignage ne lui semblerait

mieux autoriser certains soupçons, que cette latitude nouvelle, indiquée, à la veille du Traité d ' U t r e c h t , par u n

auteur à la solde de la Cour de L i s b o n n e . » Mais : 2038.

L'édition de PIMENTEL citée par M. le VICOMTE

DE L'URUGUAY, l'édition de 1712, n'existe pas seulement à Rio d e Janeiro et à L i s b o n n e . Plus heureux que M. le BARON BUTENVAL, j'ai eu le plaisir de la lire également à la Bibliothèque Impériale de

Paris.

C'est le volume Fol. V. 501. 2. 2039.

Quoique publié en 1712, le livre de PIMENTEL TITRE

55


§§ 2040-2041

e

17 LECTURE

( 133 )

n'est pas aussi voisin de la conclusion du Traité d'Utrecht que cette date semblerait l'indiquer. Car la première approbation du manuscrit est du 20 septembre 1709, deux ans et quatre mois avant l'ou­ verture du Congrès d'Utrecht. 2040. Si la détermination de la latitude de la rivière de Vincent Pinson, publiée en 1712, est trop voisine de la conclusion du Traité d'Utrecht, la publication de la m ê m e latitude en 1699 aurait été trop voisine de la conclusion du Traité du 4 mars 1700. Et il s'ensuivrait que le Portugal n'aurait jamais été recevable à présenter la vraie position de la rivière qu'il réclamait pour limite. Mais la vérité est que, plus le livre de PIMENTEL était voisin de la conclusion du Traité d'Utrecht, et plus il devait être présent à l'esprit des négociateurs de ce Traité. 2041. Ce ne sont pas seulement, c o m m e l'affirme M. DE BUTENVAL, les positions guyanaises, les positions au Nord de l'Amazone, qui manquent dans l'édition de 1699, invoquée par l'honorable Plénipotentiaire de France. Ce sont toutes les positions du bassin de l'Amazone, soit au Nord de l'équateur, soit au Sud. O n peut le voir au dépôt général de la marine, à Paris, volume in-folio 799. Le point le plus septentrional de la côte brésilienne dont la latitude est marquée par PIMENTEL dans son édition ORIGINALE, c o m m e écrit M. DE BUTENVAL, en majusculant le mot, c'est la ville de Maranham, à 2° 30' Sud. Et personne ne s'avisera de s'appuyer sur ce fait pour prétendre que PIMENTEL mettait en doute les droits du Portugal à la ville du Para, habitée par les Portugais depuis 1616, et où il avait été lui-même. Si PIMENTEL n'a indiqué en 1699, ni la latitude du TITRE

55


( 134 )

e

17

LECTURE

§ 2042

V i n c e n t P i n s o n , ni celle du C a p d'Orange, ni celle du C a p d u N o r d , ni celle de la ville de Para, c'est que la question amazonienne n'avait eu encore aucun retentis­ sement. La première approbation de l'édition O R I G I N A L E de P I M E N T E L est datée, non pas de 1699, c o m m e dit M . BuT E N V A L , mais du 29 juillet 1698, avant la polémique de l'ambassadeur de F r a n c e avec le Cabinet de L i s b o n n e . Mais en 1709 il y avait eu le Traité de 1700, le Traité de 1701, le Traité de 1703, tous relatifs à l'Amazone. Le cosmographe major du royaume et domaines de Portugal aurait été bien blâmable, s'il n'avait pas étudié alors une question de sa compétence et du plus haut intérêt pour son pays. 2042. Si l'identité du V i n c e n t P i n s o n avec l'Oyapoc, avec la rivière du C a p d'Orange, proclamée en 1712 dans u n livre portugais, a pu exciter l'étonnement, ce ne fut certainement pas au sein du cabinet de V e r ­ sailles. Car dès 1688, c o m m e le prouve le titre 21, le gouver­ neur de la G u y a n e Française avait informé le cabinet de Versailles que les Portugais établissaient la limite du Brésil « à la rivière du Cap d'Orange, appelée par eux rivière de Vincent Pinson, et par les Français Oyapoc.» Le 2 septembre 1699, c o m m e le prouve le titre 23, alors que le n o m d ' O y a p o c n'avait jamais désigné que la rivière du Cap d'Orange, u n ministre de Louis XIV avait écrit au gouverneur de la G u y a n e Française que les Portugais ne voulaient point se départir de la limite à l'Oyapoc.

Et le 4 mars 1700, c o m m e le prouve le titre 25, le traité de L i s b o n n e entre le Portugal et la F r a n c e avait consacré, par le n o m décisif d ' O y a p o c , l'identité de la rivière de Vincent Pinson avec celle du Cap d'Orange. P I M E N T E L ne fit que porter à la connaissance de tout TITRE

35


§ 2043

e

17

LECTURE

( 135 )

le m o n d e ce qui, jusqu'alors, n'était connu que de quelques-uns. 2043. M . le BARON DE BUTENVAL flétrit le cosmographe major du royaume et domaines de Portugal par cette qualification : « un auteur à la solde de la Cour de Lisbonne.

»

Mais PIMENTEL était u n h o m m e respectable, nonseulement très éclairé, c o m m e l'assure BARBOSA MACHADO, et c o m m e le temoigne son livre, mais encore, c o m m e le dit également le biographe portugais, et c o m m e le constate sa conduite au second Congrès de Badajoz, éminemment consciencieux, sacrifiant tout à la vérité. Est-ce que la probité est le monopole de ceux qui vivent de leurs rentes ? Est-ce qu'on ne peut être rétribué sans perdre l'hon­ neur? Que seraient alors, dans tous les pays, les Secrétaires d'État, les Conseillers d'État?

TITRE

35


e

( 136 )

17

LECTURE

TRENTE-SIXIÈME

Document

2044.

§§

TITRE

Portugais

La correspondance

le 14

DU

2044-2046

BRÉSIL

février

1713.

officielle des deux Pléni­

potentiaires de Portugal à Utrecht existe. Elle se trouve à L i s b o n n e , soigneusement gardée, chez Son Excellence M. le MARQUIS D E PENALVA, dixième COMTE D E TAROUCA, dans le registre original, relié en plusieurs volumes in-folio, des N é g o t i a t i o n s du COMTE DE TAROUCA JOÃO G O M E S DA SILVA. Le sixième volume de cette précieuse collection porte ce titre : « Negociaçoens do CONDE

DE

TAROUCA

em

H o l a n d a , e e m Utrecht. T o m o VI. Cartas do Conde para o Secretario de Estado. A n n o de 1713. » Ce sont des dépêches par ordre chronologique, signées conjointement par le COMTE D E TAROUCA et par son bien digne collègue D O M LUIS DA CUNHA. 2045.

Dans une de ces dépêches, datée du 14 février

1713, les deux Plénipotentiaires Portugais rendent compte au ministre des affaires étrangères, de la conférence par­ ticulière qu'ils venaient d'avoir le 9 avec les Plénipoten­ tiaires de F r a n c e et d'Angleterre. Grace à l'exquise courtoisie du

noble MARQUIS

DE

PENALVA, j'ai pris m o i - m ê m e , le 23 mars 1852, une copie littérale de ce document. 2046.

E n voici les passages principaux, traduits en

français : « Nous avons eu dans cette conférence une grande discussion sur les terres du C a p d u N o r d confinant avec le M a r a g n a n , et l'Abbé DE POLIGNAC s'y est efforcé de soutenir sa cause en alléguant des faits notoirement TITRE

36


§ 2046

e

17 LECTURE

( 137 )

controuvés, et en se servant d'un grand nombre d'argu­ ments sophistiques ; et à la fin les Anglais, qui jusque-là avaient plutôt fait l'office de médiateurs que celui de bons alliés, quoique nous leur eussions rappelé qu'ils étaient tenus de s'intéresser à cette affaire parce qu'ils nous avaient promis la restitution desdites terres, ont demandé au maréchal D'UXELLES, si l'on ne pourrait trouver quelque m o y e n d'accommodement. Il a répondu que l'expédient serait de partager entre les deux Couronnes le territoire en question, pourvu que l'entrée et la navigation de la rivière des A m a z o n e s fût libre aux Français, et il a montré des instructions dans lesquelles on lui ordonnait d'insister sur cette navigation, et dont nous avons admiré la rédaction minutieuse ainsi que les documents et les cartes qui les accompagnaient. « Cet avis d'un partage des terres a plu grandement aux Anglais... « Mais avant de poursuivre la narration de ce qui s'est passé dans cette conférence, nous devons vous rappeler que dans la réponse que l'onfità L i s b o n n e au président ROUILLÉ, quand il alléguait les Lettres patentes accordées par le Cardinal DE RICHELIEU à la Compagnie appelée du C a p d u N o r d [titre 4], on a dit qu'elles étaient contra producentem, puisqu'elles ne donnaient à la Compagnie que la permission de négocier depuis trois degrés trois quarts jusqu'à quatre degrés trois quarts, tandis que la rivière de Vincent P i n s o n demeurait à peine à trois degrés... Cette ancienne réponse de notre cour a fourni aux Français un nouvel argument.... « E n cet état de choses, pour nous conformer à l'opi­ nion des Anglais, nous avons dit que si nous venions à consentir à un partage, il était indispensable d'arrêter d'abord la manière de le faire ; et n'approuvant pas l'expé­ dient suggéré par les Français, que ce fût au m o y e n de commissaires, afin d'éviter de grands embarras et des TITRE

36


( 138 )

e

17

LECTURE

§§ 2047-2048

•retards, nous avons proposé que ladite division et démar­ cation fût réglée par les degrés mentionnés dans les Lettres patentes de ladite Compagnie du G a p d u Nord, à savoir que les terres qui vont de trois degrés trois quarts vers C a y e n n e demeurassent aux Français, et que celles qui courent des m ê m e s degrés vers la rivière des A m a z o n e s et le C a p d u N o r d fussent du domaine de Portugal. « Malgré une longue discussion, les ministres de F r a n c e n'ont pas voulu convenir de cette manière de partage. Et à la fin, le maréchal D'UXELLES a dit qu'il était inutile de disputer plus longtemps là-dessus, puisque le point principal consistait à savoir si les Français auraient ou non la libre entrée et la libre navigation de la rivière des A m a z o n e s ; à quoi nous avons répondu que nous ne pouvions nullement consentir à une pareille prétention »

2047. rable.

Ce document est d'une importance incompa­

2048. E n décembre 1711 et en janvier 1712, c o m m e le prouvent les titres 32 et 33, DOM LUIS DA CUNHA avait demandé pour le Portugal les terres guyanaises situées entre la rivière des A m a z o n e s et celle de Vincent Pinson. Le 5 mars 1712, c o m m e le prouve le titre 34, le COMTE DE TAROUCA avait demandé également pour le Portugal les m ê m e s terres guyanaises situées entre la rivière des A m a z o n e s et celle de Vincent Pinson. Après avoir ainsi proclamé l'un et l'autre la totalité de la prétention portugaise, ce m ê m e DOM LUIS DA CUNHA et ce m ê m e COMTE DE TAROUCA, abandonnés par les Anglais, faisaient, le 9 février 1713, une concession, qui, heureuse­ ment pour le Brésil, ne fut pas acceptée. Les deux négociateurs portugais se résignaient à ce que la France, déjà maîtresse d'une grande partie de la G u y a n e , possédât encore une portion des terres guyaTITRE

36


e

§ 2048

17 L E C T U R E

( 139 )

naises situées entre la rivière de Vincent Pinson et l'Amazone. Mais ils ne consentaient à ce sacrifice qu'à la condition qu'on ferait le partage par la latitude de TROIS DEGRÉS TROIS

QUARTS. Donc, pour les deux signataires portugais du Traité d'Utrecht, la rivière de Vincent Pinson, le terme sep­ tentrional des terres guyanaises prétendues par le Por­ tugal et définitivement adjugées à cette Couronne le 13 avril, était AU NORD de la latitude de TROIS DEGRÉS TROIS

QUARTS. Ce n'était donc pas l ' A r a g u a r i , dont la bouche véri­ table est à 1° 10', et la prétendue bouche Nord (le Carapapori) à 1° 45'; Ni le Mapa,

à 2° 9';

Ni le Mayacaré,

à 2° 25';

Ni le Carsevenne, Ni le Conani,

à 2° 30';

à 2° 50';

Ni m ê m e le Cachipour, puisque le Cachipour se trouve justement à la latitude de trois degrés trois quarts, proposée pour point de partage. C'était, ÉVIDEMMENT, une rivière au Nord du Gachi­ pour. Or, la première rivière qui existe au Nord du Gachi­ pour, c'est l'OYAPOC, c'est la rivière du CAP D'ORANGE, entre le quatrième

et le cinquième

trionale.

TITRE

36

degré

de latitude septen-


§§ 2049-2050

e

17 LECTURE

( 140 )

TRENTE-SEPTIÈME

Document

TITRE

Portugais

et

DU

BRÉSIL

Français.

TRAITÉ D'UTRECHT. 2049.

Première

édition

des deux textes, sans ratifi­

cation ni pleins pouvoirs : « Traité de Paix, entre Sa Majesté très Chrêtienne, et Sa Majesté Portugaise, conclu a Utrecht le il. Avril 1713. —

Tratado de Pax, entre S u a M a g e s t a d e Christia-

nissima, e S u a M a g e s t a d e Portugueza, concluido e m Utrecht, a 11. de Abril, de 1713. » In-4°, 14 pages, portant chacune, en deux colonnes, à gauche le texte français, à droite le texte portugais. Inconnue

à M. COSTA E SÁ.

Bibliothèque Nationale de Rio de Janeiro, dans le m ê m e recueil de BARBOSA MACHADO cité au titre 34. Bien qu'elle ne présente, ni date, ni aucune indication de lieu ou d'imprimeur, on voit bien que c'est l'édition primitive, publiée à Utrecht m ê m e . Et en effet, D u M O N T nous apprend, tome VIII, page 353, que c'est une « copie imprimée à Utrecht chez GUILLAUME VAN DE W A T E R

&

JACQUES POLSUM par ordre ou permission des Plenipoten­ tiaires A n n o 1713. » 2050.

Deuxième

édition

du texte français, avec les

pleins pouvoirs des deux souverains et avec la ratification de LOUIS XIV : « Traité de Paix entre la F r a n c e et le Portugal. Conclu à Utrecht le 11. Avril 1713. France]

[Armes

royales

de

A Paris, chez FRANÇOIS FOURNIER, Libraire, ruë

Saint-Jacques, aux Armes de la Ville. M. DCC. XIII. Avec privilege de Sa Majesté. » In-4°, 20 pages. TIRRE 37


§§ 2051-2053 Inconnue

e

17

LECTURE

( 141 )

à M. COSTA E SÁ.

Bibliothèque Nationale de Rio de Janeiro, dans le m ê m e recueil de BARBOSA MACHADO, du titre 34. 2051. Deuxième édition du texte portugais, avec les pleins pouvoirs des deux souverains et avec la ratification de JEAN V : « Tratado de Paz, entre Sua M a g e s t a d e Christianissima, e Sua Magestade Portugueza, concluido e m Utrecht a 11. de Abril de 1713. [Armes royales de P o r tugal] Lisboa. Na Officina de ANTONIO PEDROZO GALRAM. C o m todas as licenças necessarias. Anno 1713. » In-4°, 12 pages. Inconnue

à Du

MONT.

Bibliothèque Nationale de Rio de Janeiro, m ê m e recueil de BARBOSA MACHADO, du titre 34. 2052. Troisième édition du texte français, avec les pleins pouvoirs des deux souverains, mais sans ratification : « Traité de Paix, entre Sa Majesté Très-Chrétienne, & Sa Majesté Portugaise, conclu à Utrecht le 11. Avril 1713. » Inséré, en 1714, au tome second, pages 544-564, de la collection suivante : « Actes, Memoires, & autres Pièces Authentiques concernant la Paix d'Utrecht. A Utrecht, chez GUILLAUME VANDE W A T E R , et JAQUES VAN POOLSUM. » 1714-1715, 6 volumes in-12. Inconnue

à M. COSTA E SÁ.

Bibliothèque Impériale de Paris, 12. L. 1896. 9-14. 2053. C'est de cette édition de 1714 que D u M O N T a tiré, en 1731, la copie qu'il donne du texte français, en lui appliquant toutefois cet autre titre, qui n'est qu'un som­ maire de sa façon, bien fidèle d'ailleurs : « Traité de Paix & d'Amitié entre Louis XIV. Roi de France, & JEAN V. Roi de Portugal, portant Cession & Renonciation de la part de Sa Majesté T. C. en faveur de Sa Majesté Portu­ gaise, à toutes les Terres appellées C a p d u Nord, à toutes celles des deux Costes de la Riviere des A m a z o n e s , & à la TITRE

37


e

( 142 )

17 LECTURE

§§ 2054-2057

Navigation & C o m m e r c e de cette Riviere ; sous la Garantie offerte & acceptée de la REINE DE LA G R A N D E - B R E T A G N E . re

Fait à Utrecht le 11 d'Avril 1713. » T o m e VIII, 1 partie, page

353-356, du « Corps

Universel

Diplomatique »

A m s t e r d a m , 8 volumes in-folio. Bibliothèque Mazarine à Paris, 2791. 2054.

C'est aussi de l'édition de 1714 directement que

M . DE SAINT-QUANTIN a copié, mais en rajeunissant l'ortho­ graphe, les articles 8 à 13; pages 311-313 de la niale,

Revue

colo-

63-66 du tirage à part.

2055.

M. D'AVEZAC, note F F de 1857, a fait ses extraits

d'après D u MONT, en rajeunissant également l'orthographe. 2056.

M. CASTRO, pages 242-245 du tome second de

la collection citée au titre 25, donne intégralement les deux textes, mais sans ratification ni pleins pouvoirs ; et il déclare les avoir tirés l'un et l'autre « de la copie authen­ tique gardée aux Archives Royales de

Torre

do Tombo.

»

Mais je suis informé par M . le CHEVALIER DE D R U M MOND, que cette copie gardée aux Archives Royales de L i s b o n n e est u n imprimé,

légalisé par le Secrétaire d'État

DIOGO DE M E N D O N Ç A CORTE REAL. Et la reproduction qui en est donnée par M. CASTRO montre que cet imprimé est u n exemplaire de l'édition primitive, laquelle présente l'avan­ tage de réunir les deux textes. 2057.

Toutefois, les éditions detachées de Paris et

de L i s b o n n e , publiées en 1713 également, mais avec les pleins

pouvoirs

des deux

souverains

CATIONS, et munies, l'une des l'autre des

armes

E T AVEC LES RATIFI­

armes

royales

de

royales deP o r t u g a l ,commandent

France,

évidem­

ment la préférence, quoique moins c o m m o d e s à garder, et quoique déparées, l'une et l'autre, non-seulement par l'erreur c o m m u n e de

Massapa

par celle à'Arguari

pour

pour

Macapá,

mais encore

Araguari.

C'est pourquoi je m e conforme à ces deux éditions officielles. TITRE

57


§ 2058

2058.

e

17 LECTURE

( 143 )

« Art. VIII. Afin de prévenir toute occasion de

discorde qui pourroit naître entre les Sujets de la Couronne de France

&

ceux de la Couronne de Portugal, Sa

Majesté Très-Chrétienne se desistera pour toujours, c o m m e Elle se desiste dès à present par ce Traité, dans les termes les plus forts & les plus autentiques, & avec toutes les clauses requises, c o m m e si elles étoient inserées icy, tant en son nom, qu'en celuy de ses hoirs, successeurs & heritiers, de tous droits & prétentions qu'Elle peut ou pourra prétendre sur la proprieté des terres, appellées du Cap-du-Nord, & situées entre la riviere des A m a z o n e s , & celle de Japoc ou de Vincent Pinson, sans se réser­ ver ou retenir aucune portion desdites terres, afin qu'elles soient desormais possedées par Sa Majesté Portugaise, ses hoirs, successeurs & heritiers avec tous les droits de Souveraineté, d'absoluë puissance, & d'entier Domaine, c o m m e faisant partie de ses Etats, & qu'elles lui demeurent à perpetuité, sans que Sa Majesté Portugaise, ses hoirs, successeurs & heritiers, puissent jamais être troublez dans ladite possession, par Sa Majesté Tres-Chrétienne, ny par ses hoirs, successeurs & heritiers. » « Art. IX.

En consequence de l'Article précedent, Sa

Majesté Portugaise pourra faire rebâtir les Forts d'Arguari & de C a m a u , ou Massapa. Aussi-bien que tous les autres qui ont été démolis, en execution du Traité provisionel fait à Lisbonne le 4. Mars 1700. entre Sa Majesté Tres-Chrétienne, & Sa Majesté Portugaise PIERRE II. de glorieuse memoire, Ledit Traité provisionel restant nul, & de nulle vigueur en vertu de celuy-cy ; C o m m e aussi il sera libre à Sa Majesté Portugaise de faire bâtir dans les terres mentionnées au précedent Article, autant de nou­ veaux Forts qu'elle trouvera à propos, & de les pourvoir de tout ce qui sera necessaire pour la deffense desdites Terres. » TITRE

37


§§ 2059-2065

e

17 LECTURE

( 144 )

2059.

Etudions l'article 8.

2060.

« Le Plénipotentiaire Français n'a jamais en­

tendu nier : « Ni que le Traité d'Utrecht ait été un retour sur le Traité provisionnel de 1700, retour tout au profit du Por­ tugal, « Ni que le territoire contesté en 1700 n'ait été, en 1713, abandonné par la F r a n c e , « Ni que la limite, refusée par elle, en 1700, du

Vin-

n'ait été par elle, en 1713, formellement

cent-Pinson,

acceptée. » 2061.

Ce sont des paroles de M. le BARON DE BUTEN-

VAL, quatrième séance, page 54 des 2062.

Protocoles.

Et ces paroles sont pleinement confirmées par

l'article9 du Traité d'Utrecht lui-même, c o m m e le montre le texte dudit article, donné ci-dessus intégralement. 2063.

Mais, c o m m e le prouve le titre 25, le Traité de

1700 ne donne pas à la limite septentrionale des terres neutralisées le seul n o m de

Vincent

Pinson.

Il joint à ce n o m , c o m m e synonyme, celui

d'Oyapoc.

L'honorable Plénipotentiaire de F r a n c e le sait fort bien, puisqu'il ajoute, dans la 8° séance, page 89 des Protocoles : « Le Traité provisionnel écrit bien correc­ tement, et en toutes lettres, le n o m 2064.

d'Oyapock.

»

Mais en 1700 c o m m e aujourd'hui, ainsi qu'il

demeure prouvé dans le m ê m e titre 25, le n o m appartenait exclusivement à la rivière du

Cap

d'Oyapoc d'Orange.

Donc, aux termes de l'article 9, c'est la rivière du Cap d'Orange

qui a été fixée pour limite définitive de la

G u y a n e Française et du Brésil par l'article 8 du Traité d'Utrecht. 2065.

Mais l'Acte d'Utrecht vient de plus loin.

C o m m e le Traité m ê m e de 1700, et plus que lui, il a TITRE 5 7


§§ 2066-2068

e

I7

LECTURE

( 145 )

ses racines dans l'Acte royal portugais du 14 juin 1637, constituant le premier titre brésilien. 2066.

La rédaction du Traité de 1700 fut l'œuvre

exclusive des Portugais, mais seulement pour le texte portugais. (§ 1983.) La rédaction du traité d'Utrecht est l'œuvre exclu­ sive des Portugais, non-seulement pour le texte portu­ gais, mais encore pour le texte français. 2067.

Ce fait capital est établi par les autorités les

plus dignes de croyance, —

par les rédacteurs du Traité

eux-mêmes. 2068.

Dans une dépêche du 24 mars 1713, inscrite

dans le grand registre mentionné au titre 36, le COMTE DE TAROUCA et DOM LUIS DA CUNHA écrivaient à leur Gou­ vernement, que le 15 au soir LORD STRAFFORD avait dit au COMTE DE TAROUCA que les Plénipotentiaires Portugais pouvaient rédiger leurs projets de paix avec la F r a n c e et avec l'Espagne, et les remettre à l'évêque de Bristol ; et ensuite ils continuent en ces termes : « Le 17 nous avons écrit le projet pour le traité de paix avec la France, dont nous vous envoyons la copie ci-jointe, et milord STRAF­ FORD étant arrivé à la H a y e le 19, nous le lui avons remis le 20, parce que l'évêque se trouvait indisposé. Ledit comte [DE STRAFFORD] l'a transmis aux ministres de France, et ceux-ci l'ont envoyé à leur cour. Pour que vous soyez informé des raisons que nous avons eues pour quelques-uns des articles, nous les avons

écrites à la

marge. » Or ce projet du 20 mars 1713, rédigé à Utrecht par les Plénipotentiaires de Portugal, existe, non-seulement à Lisbonne, annexé à leur dépêche du 24 mars, mais en­ core à Rio de Janeiro, pages 587-611 du tome III de la collection manuscrite de D O M LUIS DA CUNHA, mentionnée au titre 27.

T. II.

TITRE

37

10


e

( 146 ) En

17

tout ce qui

LECTURE regarde

la question

IDENTIQUE avec le traité définitif du La

seule différence

§ 2069 de l'Oyapoc,

onze

il est

avril.

est que, dans l'article 12, le projet

ne contenait pas la dernière clause, défendant aux Portu­ gais d'aller commercer à C a y e n n e . 2069.

Le témoignage est encore plus complet dans

le grand ouvrage auquel était destinée, c o m m e u n corps immense de pièces justificatives, la collection de Rio de Janeiro, et qui, de m ê m e que la collection, est encore inédit. Ce sont les « ElRey

ordinario,

Memorias

da

Pas

D. Luis DA CUNHA,

N. S. por

e Plenipotenciario

de Utrecht

oferecidas

seu Embaixador

de Portugal

no

a

Extra-

Congresso

da

ditta Pas. » Quatre volumes in-folio, mais dont on ne trouve pas le dernier, qui doit contenir tout ce qui con­ cerne le Traité de 1715 entre le Portugal et l'Espagne, —

volume qui n'a peut-être pas été écrit, mais auquel

supplée, jusqu'à u n certain point, le volume correspondant des documents. J'ai eu le bonheur de consulter à L i s b o n n e , dans le premier trimestre de 1852, deux copies des trois volumes connus de cet important ouvrage : — l'une faite en 1762, portant la déclaration d'avoir appartenu à l'archevêque d'Evora, et conservée à la Bibliothèque Royale d'Ajuda; —

l'autre, plus ancienne et plus correcte, provenant de

M. le COMTE DA CUNHA, l'héritier de Dom Luis DA CUNHA, de qui l'a eue M. ANTONIO D E MENEZES VASCONCELLOS DE D R U M M O N D , alors Envoyé Extraordinaire et Ministre Pléni­ potentiaire du Brésil, et toujours un h o m m e extrêmement eclairé, extrêmement courtois, et tellement zélé pour tous les intérêts de son pays, qu'il peut s'approprier le mot de Térence et dire : « alienum

puto.

Brasiliensis

sum,

brasiliense

a me

nihil

»

Grâce à M. DE D R U M M O N D , à qui le Brésil doit encore d'autres documents précieux, la meilleure de ces deux TITRE 57


§ 2069

e

17 LECTURE

( 147 )

copies se trouve, depuis la m ê m e année 1852, à Rio de Janeiro, au Ministère des Affaires Étrangères ; de sorte que le Rrésil possède maintenant, aussi complet que pos­ sible, le travail gigantesque du second Plénipotentiaire de Portugal à Utrecht. Eh bien ! voici ce que dit D O M LUIS DA CUNHA dans le troisième volume de ses Mémoires, volume dont la dédi­ er

cace (au COMTE DE TAROUCA) est datée d'Utrecht le 1 avril 1715. Paragraphe 172 de la copie de Rio de Janeiro, 198 de la copie de L i s b o n n e : « Dans ce m o m e n t les Pléni­ potentiaires des Alliés travaillaient aux minutes de leurs traités ; et nous autres, pour rédiger le nôtre, nous consi­ dérions si nous parlerions de la renonciation de PHILIPPE à la Couronne de France, et de celle des princes de France à la Couronne d'Espagne.... Nous n'avons pas touché à ce point, ni à nos prétentions envers l'Espagne.... Nous nous s o m m e s bornés, à notre grand regret, à pro­ tester à l'évêque et à STRAFFORD que nous ne désistions pas de demander la démolition de Badajoz et la conservation d'Albuquerque et Puebla, attendu que JOSEPH DA CUNHA BROCHADO, à L o n d r e s , n'avait jamais fait ni pu faire le prétendu désistement : à quoi ils répondirent, insistant dans cette fausse croyance qu'ils avaient, que la Reine ayant fondé sur ce fait le plan de notre paix, et la France l'ayant accepté, il nous fallait rédiger notre traité selon la teneur du m ê m e plan, et que ce devait être la nuit m ê m e , pour le leur envoyer à quelque heure que ce fût, afin que les Français, par le courrier qu'ils expédiaient à Paris, pussent annoncer qu'il se trouvait déjà dans leurs mains Il nous fallut travailler toute la nuit, non pas pour com­ biner les matières des articles, car nous les avions assez examinés entre nous, mais pour les placer dans l'ordre convenable, et dans

les deux

langues Portugaise

ÇAISE. » TITRE

37

ET F R A N ­


e

( 148 )

17

§§

LECTURE

2070-2071

Paragraphe 185 de Rio de Janeiro. 211 de L i s b o n n e : « C o m m e c'était nous autres qui composions le Traité, M E N A G E R voulut paraître u n grand ministre en élevant des doutes sur les mots, dans l'impossibilité de le faire désor­ mais sur les choses. Nous n'avons jamais cherché à éclaircir si les Français avaient jugé qu'il leur seyait mieux de nous charger de la rédaction des articles pour qu'il leur restât la prérogative de les corriger l'un

des originaux

était

; mais,

comme

E N F R A N Ç A I S , la juste défiance

de manquer à la gravité, à la clarté et à la formalité des termes requis dans les traites, nous obligeait à nous ser­ vir de certaines expressions qui donnaient lieu aux dites remarques. » 2070.

Il est donc de toute certitude que les deux

textes du Traité d'Utrecht ont été rédigés l'un et l'autre par les Plénipotentiaires de Portugal. Donc, en admettant qu'il y eût deux rivières du n o m de Vincent

Pinson,

il est incontestable que

P i n s o n du Traité d'Utrecht est celui des

2071.

le V i n c e n t

Portugais.

Or les Portugais avaient déclaré, à plusieurs

reprises, qu'ils n'appliquaient le n o m de V i n c e n t Pinson qu'au fleuve du C a p d'Orange. er

Le 14 juin 1637, c o m m e le prouve le titre 1 , le Roi de Portugal avait assigné au V i n c e n t P i n s o n la position du fleuve du C a p d'Orange. Le 9 juillet 1645, c o m m e le prouve le titre 5, u n autre Roi de Portugal avait confirmé textuellement l'indication royale de 1637. E n juin 1688, c o m m e le prouve le titre 21, u n officier portugais avait déclaré à u n fonctionnaire de C a y e n n e que le V i n c e n t P i n s o n des Portugais était la du

Cap

d'Orange,

appelée par les Français

rivière

Oyapoc.

Le 4 mars 1700, c o m m e le prouve le titre 25, le Traité provisionnel,

rédigé

par

le Cabinet TITRE

37

de

Lisbonne,

avait


e

§ 2071

17 LECTURE

( 149 )

donné deux fois c o m m e synonyme de Vincent Pinson le nom

d'Oyapoc.

Le 16 mai 1703, c o m m e le prouve le titre 28, 1 ar­ ticle xxII du Traité de la Quadruple Alliance, introduit par le Cabinet de Lisbonne, avait déclaré que le Vincent Pinson prétendu par le Portugal c o m m e limite du Bré­ sil, était le m ê m e du Traité de 1700, ce qui revenait à dire que c'était l ' O y a p o c .

E n 1707, c o m m e le prouve le titre 30, une carte espa­ gnole, construite, sur ce point, d'après les renseignements des Portugais du Para, avait situé le Vincent Pinson à la place m ê m e de la rivière d u C a p d'Orange. En décembre 1711, c o m m e le prouve le titre 32, DOM Luis DA CUNHA, l'un des rédacteurs du Traité d'Utrecht, avait identifié le Vincent Pinson avec l ' O y a p o c , par une référence au Traité de 1700. En janvier 1712, c o m m e le prouve le titre 33, le m ê m e DOM LUIS DA CUNHA avait de nouveau identifié le Vincent Pinson avec la rivière du C a p d'Orange, par la m ê m e référence au Traité de 1700. Le 5 mars 1712, c o m m e le prouve le litre 31, l'autre rédacteur du traité d'Utrecht, le COMTE DE TAROUCA, avait fait la m ê m e identification, par la m ê m e référence. Dans la m ê m e année 1712, c o m m e le prouve le titre 35, le cosmographe major du royaume et domaines de Portugal avait doublement identifié le Vincent Pinson avec la rivière du C a p d'Orange, et par son synonyme Oyapoc, et par sa latitude septentrionale de 4° 6'. Le 9 février 1713, c o m m e le prouve le titre 36, les deux Plénipotentiaires de Portugal à Utrecht, les rédac­ teurs des deux textes du Traité signé dans cette ville le 11 avril de la m ê m e année, avaient fait entendre tous les deux aux Plénipotentiaires de France, en présence de ceux d'Angleterre, que la latitude du Vincent Pinson était pour eux celle de la rivière du C a p d'Orange. TITRE 37


( 150

e

17

LECTURE

§§ 2072-2076

Et le Traité d'Utrecht lui-même, c o m m e nous venons de le voir (§ 2058) offre dans son article 9 une dernière preuve de l'identification portugaise de la rivière de Vin­ cent P i n s o n avec celle du C a p d'Orange. 2072.

Le V i n c e n t P i n s o n de l'article 8 du Traité

d'Utrecht peut-il donc être autre chose que le fleuve du C a p d'Orange? 2073.

Longtemps on a opposé à l'interprétation bré­

silienne de l'article 8 du Traité d'Utrecht, c o m m e objection sans réplique, le n o m de

Terres du

Cap

du

une Nord

contenu dans cet article. 2074.

C'était déjà en 1729 le grand argument des

C a y e n n a i s , c o m m e le prouve une lettre du gouverneur CHARANVILLE, publiée par M . BAENA dans l'intéressante brochure citée au titre 20. « Il falloit, —

écrivait le gouverneur de C a y e n n e au

gouverneur du Para, le 10 août 1729, —

« il falloit, pour

adoucir les expressions, être peu instruit ou fort prévenu, pour prétendre étendre les limites du Portugal jusqu'à notre rivière d'Ouyapoc... Si l'intention de nos Sou­ verains eût été telle, on eût énoncé dans ledit traité que le R o y de F r a n c e abandonnoit au R o y de Portugal, non seulement les terres du C a p d u Nord, mais encore celles du C a p d'Orange. » (§§ 360-362, 370-374.) 2075. d'Utrecht

E n 1797, M. LESCALLIER résumait ainsi le Traité : « La F r a n c e abandonne au Portugal la

navigation exclusive du fleuve des A m a z o n e s , et la pos­ session de ses deux bords, tant le septentrional que le méridional, de m ê m e que celle des qui sont des îles noyées,

terres du

Cap

de

Nord,

situées au Nord de l'embouchure

de ce grand fleuve, et s'étendent jusqu'au

deuxième

degré

de latitude Nord. » (§§ 680-682.) 2076.

Le 31 décembre 1835, le

Journal

de la

Marine,

dans u n prétendu historique de la question de l'Oyapoc, TITRE

57


§§ 2077-2079

e

17

LECTURE

( 151 )

disait : « Est-il permis de se méprendre sur la véritable position géographique du Cap de N o r d et de la baie de Vincent-Pinson, points de la côte connus de tous les navigateurs, et dont le gisement est tracé, sur les cartes E

de toutes les nations, sous le 2 degré de latitude septen­ trionale ? » (§ 981.) 2077. Marine

Le 18 juin 1840, ces paroles du

Journal

de la

étaient répétées littéralement à la tribune natio­

nale par M. le député AUGUIS. (§ 1066.) 2078.

En

1850, M. DE SAINT-QUANTINT

C a y e n n e , dans un travail destiné au (pages 314, 345 de la Revue

écrivait à

Gouvernement

coloniale de septembre 1858,

pages 67, 98 du tirage à part) : « Ils ont prétendu [les Portugais et les Brésiliens] que sous le n o m de terres du Cap

Nord

d'Orange,

on devait aussi comprendre les terres du

Cap

c'est-à-dire plus de 60 lieues marines de déve­

loppement de côtes. Il ne serait pas moins étrange de dire que sous le n o m de terres du cap Finistère, il faudrait comprendre en France le cap de la H o u g u e et le dépar­ tement de la M a n c h e . Le bon sens suffit pour réfuter l'idée que, sous la désignation de terres

du

Cap

Nord,

on

a compris aussi les terres du C a p d'Orange. » Et sur sa principale carte, M. DE SAINT-QUANTIN inscrivait le n o m de TERRES DU CAP N O R D dans l'intérieur de la petite péninsule formée par l'Araguari et par le Carapapori. 2079.

Le 5 juillet 1855, le [Département des Affaires

Étrangères répondait à M. le VICOMTE DE L'URUGUAY : « Le sens qu'il y a lieu de donner aux terres d u C a p d u N o r d est un élément considérable de la décision qui devra terminer ce litige. Si on laissait cet élément de côté, on supposerait que les négociateurs

français du Traité

d'Utrecht ont été, ou très-légers ou très-ignorants, puisque pour assurer au Portugal la souveraineté de la rive gauche de l'Amazone, ils auraient consenti à reculer TITRE

57


e

( 152 )

17

LECTURE

§§ 2080-2084

sa frontière, non jusqu'au C a p d u Nord, mais jusqu'au C a p d'Orange. » (Protocoles, p. 14.)

2080.

Le 2 7 mai 1856, M. le BARON DE BUTENVAL

disait : « A supposer que la latitude de l'Araouari ait étè inexactement calculée et indiquée, rien ne serait plus facile, dans u n Traité nouveau, que d'éviter les embarras que veut prévoir l'honorable Plénipotentiaire du Brésil. Il suffirait, pour cela, d'une délimitation astronomique précise, accompagnée d'une explication formelle, déclara­ tion en vertu de laquelle il serait bien entendu que quelle

que soit la latitude

l'Araouari, — couronne

2081.

les terres du

du Brésil.

de la branche

Cap

du

Nord

Nord

demeurent

de à la

» (Protocoles, p. 168.)

ER

Le 1 juillet 1856, l'honorable Plénipotentiaire

de F r a n c e disait encore : « Le gouvernement de l'Empe­ reur, pour écarter, à cet égard, toute chance d'équivoque, consent

à ce qu'un article du Traité à intervenir rap­

pelle d'une manière expresse et formelle, « que les terres « adjacentes au C a p d u N o r d appartiennent définitivement « et à toujours à Sa Majesté Brésilienne. » (Protocoles, p. 174.) 2082.

Mais, les titres 3, 10, 16, 18, 19, 20, 26, prouvent

que la portion de la G u y a n e possédée par le Portugal dès l'année 1637, était u n territoire immense, tellement vaste, quel'EspagnolACUÑA le déclarait plus grand tout

que l ' E s p A G N E

entière.

2083.

Mais,

dès 1633 pour les Français, dès 1637

pour les Portugais, CAP D U N O R D était synonyme de GUYANE : comme

le prouvent, pour les Français, les

titres 4, 6, 7, 8, 9, 11, 13; c o m m e le prouvent, pour les Portugais, les titres 1, 5, 17, 20 ; c o m m e le prouve, pour les uns et pour les autres, le préambule du Traité de 1700, au titre 25. 2084.

Mais,

les demandes spécifiques du Portugal,

présentées au Congrès d'Utrecht le 5 mars 1712 (titre 34), TITRE

37


§§ 2 0 8 5 - 2 0 8 8

17

E

LECTURE

( 153 )

emploient l'expression de Terres du Cap du Nord dans Son sens étendu, c o m m e synonyme de Guyane ; car elles disent « terres APPELLÉES COMMUNÉMENT du Cap de Nord. » 2085. Mais, le Traité d'Utrecht lui-même fait entendre bien clairement que l'objet du grand litige entre Louis XIV et le Roi de Portugal n'était pas la toute petite péninsule fangeuse formée par l'Araguari et par le Carapapori, et terminée par le Gap du N o r d : car l'article 8 du Traité d'Utrecht, à l'exemple des demandes spécifiques, dit « terres APPELLÉES du Cap du Nord » ; et l'article 1 3 , parlant des terres adjugées au Portugal par l'article 8 , emploie ces termes, bien analogues à ceux de 1 7 0 3 , « dans TOUTES lesdites terres. »

Le n o m de Japoc a fourni aussi, pendant de longues années, ample matière à des objections multiformes. 2087. O n prétendit d'abord à C a y e n n e , en février 1 7 3 0 , que Japoc n'était pas une forme d'Oyapoc; mais bien une altération évidente de Warÿpoco, n o m donné à une rivière voisine du C a p du Nord dans un atlas maritime hollandais, publié en 1 6 8 4 sous le titre de « De Nieuwe Groote Lichtende Zee-Fackel », traduit en français, 2086.

en 1 6 9 9 , par PIERRE FRANÇOIS SILVESTRE, SOUS le titre de « Le Nouveau

Grand

Illuminant

Flambeau

de

la Mer

»,

et

connu généralement par le n o m de l'éditeur de l'original et de la traduction, JOHANNES VAN KEULEN, libraire à A m s t e r d a m , quoique les véritables auteurs de ce grand travail soient JAN VAN LOON et CLAES JANSZOON VOOGHT. C'est ce que prouve une lettre du gouverneur du Pará JOSÉ DA SERRA au gouverneur de C a y e n n e LAMIRANDE, écrite le 2 novembre 1 7 3 3 , et publiée par M. BAENA dans sa brochure du titre 2 0 . 2088. U n an après, en 1 7 3 1 , le Cayennais D'AUDIFFRÉDY reconnaissait que Japoc était une forme d'Oyapoc; TITRE 37


e

( 154 )

17

LECTURE

§§

2089-2093

mais il assura qu'il existait positivement deux rivières de ce n o m , —

l'Oyapoc de tout le m o n d e , au cap d'Orange,

et u n O y a p o c par lui découvert, dans l'île amazonienne de M a r a j ó . (§ 662.) 2089.

E n 1748, la découverte du chevalier D'AUDIF-

FRÉDY fut sanctionnée par D'ANVILLE, dans sa belle carte de l'Amérique Méridionale. (§§ 667-669.) 2090.

E n 1763, BELLIN, ingénieur de la marine et du

dépôt des plans à Versailles, reconnaissait également dans

Japoc

l'existence

une forme de deux

et admettait également

d'Oyapoc

rivières de ce n o m ; mais c'était,

avec l'Oyapoc de tout le m o n d e , au G a p d'Orange, un O y a p o c par lui découvert, tout au Nord-Ouest du Cap d u N o r d . (§§ 431-446, 673.) 2091.

En

1796. le consciencieux SIMON MENTELLE,

garde du dépôt des cartes à C a y e n n e , revint timidement à l'ancienne idée du gouverneur CHARANVILLE, c o m m e étant le seul m o y e n de donner au Traité d'Utrecht une interprétation favorable à la France. C'est ce que prouve la Feuille

de la Guyane

Française

de l'année 1822, où on lit, page 341, ces paroles de MENTELLE : « U n seul article [du Traité d'Utrecht] n o m m e la rivière de Iapoco en la confondant avec celle de V i n ­ cent Pinson, ce qui paroit provenir de ce qu'en faisant le Traité, on se servoit de la Carte Hollandoise de VANKEULEN, sur laquelle il se trouve près du C a p d u N o r d une petite rivière n o m m é e 2092.

Warÿpoco.

» (§§ 619-620, 945.)

E n 1797, NICOLAS BUACHE, successeur de BEL-

LIN, revint hardiment à l'Oyapoc amazonien du cheva­ lier D'AUDIFFRÉDY. (§§ 689-700.) 2093.

Puis l'Oyapoc

de BELLIN, tout au Nord-Ouest

du C a p d u N o r d , fut transformé en

Yapoc.

C'est ainsi que M. DE LARUE, conservateur des Archives de France, affirma, en 1821, que la véritable limite d'U­ trecht était une rivière à la latitude de deux degrés Nord, TITRE

57


e

§§ 2094-2095 « appelée

17

LECTURE

( 155 )

par les Indiens, mais non pas

Yapoc

Oyapoc,

qu'ils distinguent bien de la première. » (§§ 939-942.) C'est ainsi que, en 1834, en 1835, en 1836, en 1837, en 1838, en 1839, en 1843, c o m m e nous l'avons vu aux para­ graphes 967, 968, 1060, 1061, 1062, 1063, 1064, 1065, 1067, plusieurs textes et plusieurs cartes placèrent tout au NordOuest du Cap du N o r d une petite rivière portant le double nom

de Yapoc

ou Vincent

Pinson.

C'est ainsi que, le 31 décembre 1835 et le 18 juin 1840, le Journal

de la Marine,

et M.

AUGUIS devant

la

Chambre

des Députés, altérant de la manière la plus blâmable les paroles de SIMON MENTELLE, assurèrent que « L'ambiguïté de l'article du Traité d'Utrecht provient de ce qu'en fai­ sant le Traité on se servit d'une carte hollandaise de VANKEULEN, sur laquelle

est marquée

effectivement,

près du Cap

Nord, une petite rivière désignée sous le n o m de

Yapock,

ayant son embouchure dans la baie de Vincent-Pinçon. » (§§ 981, 1066.) 2094.

Puis ce

Yapoc

du Cap d u N o r d devint

Japoc,

absolument avec la m ê m e forme employée dans le Traité d'Utrecht. C'est ainsi que, le 4 juillet 1834, l'honorable M . D'AVEZAC, alors sous-chef de bureau à la direction des Colonies, et Secrétaire général de la Société de Géographie de Paris, affirma devant cette respectable Société, qu'il existe à quelques milles du Cap N o r d « une petite rivière portant le n o m de Japoc

», et s'indigna hautement contre ceux

qui méconnaissaient une pareille vérité. (§ 963.) C'est ainsi que, sur l'autorité de M. D'AVEZAC, M. CoCHUT affirma, dans la Revue 1845,

des Deux

Mondes

que la véritable limite d'Utrecht

du mois d'août est cinquante

lieues au Sud du Cap d'Orange, à une « petite rivière qui porte à la fois le n o m indien de

Japoc

et celui de l'Euro­

p é e n VINCENT PINÇON ». (§ 1074.) 2095.

Puis enfin, on s'est aperçu que déjà en 1797, aux TITRE

37


( 156 )

e

17

LECTURE

§ 2096

pages 6 et 7 de sa seconde édition, M . LESCALLIER avait fait cet important aveu : « Le Traité d'Utrecht n o m m e une fois la rivière d' Yapoc ou de V i n c e n t P i n ç o n ; mais une autre fois il ne dit que la rivière de Vincent Pinçon : or, dans

le fait, ni l'un ni l'autre de ces noms

ne sont

table nom de la rivière dont il est question

le véri-

La rivière

principale qui afflue dans cette prétendue baie de V i n c e n t Pinçon, qui est une espèce de bras de mer, se n o m m e dans le pays Carapapouri. » (§ 942.) 2096. O n recourut alors à de nouvelles armes. Tantôt, c o m m e M . DE MONTRAVEL (page 408 de la Revue coloniale de 1847, page 171 du tome 103 des Annales maritimes et coloniales), on a dit : « Le mot indien Japock étant u n n o m générique donné par les Indiens à toute rivière, ainsi que l'indique sa signification

, nous serions aussi

fondés que les Portugais à prétendre que le Japock désigné dans le Traité d'Utrecht est, non pas notre Oyapock, mais bien toute autre rivière portant le n o m géné­ rique de Japock La question ne pourrait donc se résoudre que par la discussion de la route de VINCENT PINÇON et la détermination bien certaine de la rivière à laquelle ce voyageur a donné son n o m . » (§§ 1082-1084.) Tantôt, c o m m e M . DE SAINT-QUANTIN, dans son travail de 1850 (pages 315, 316, 345 de la Revue

coloniale, 68, 69,

98 du tirage à part), on a dit : « Le n o m inconnu de Japoc qu'on ne trouve accolé qu'une seule fois à celui de Vincent-Pinçon dans le traité, et qui ne figure pas du tout dans les demandes préliminaires, n'est point identique avec Oyapock et ne coïncide exactement avec aucune des déno­ minations variées dérivées de ce dernier mot C'est donc surtout le n o m de Vincent Pinçon qui caractérise la rivière limite. » (§ 1128.) Tantôt, c o m m e M . le BARON DE BUTENVAL et c o m m e M. D'AVEZAC, on a fait valoir simultanément ces deux TITRE

37


e

§§ 2097-2100

17 LECTURE

( 157 )

moyens, qui ont chacun pour but d'écarter le n o m de Japoc,

pour manier uniquement le n o m de

Vincent

beaucoup plus flexible.

Pinçon,

2097.

Mais,

par cela m ê m e que le n o m de Vincent

Pinçon pourrait prêter au doute ; par cela m ê m e que, tou­ jours appliqué par le Gouvernement Portugais à la rivière du Cap d'Orange, ce n o m se trouve quelquefois donné à la rivière du Cap d u N o r d : il est indispensable de prendre en sérieuse considération le synonyme prudem­ ment ajouté par les rédacteurs du Traité d'Utrecht. 2098. Japoc

Or, la prochaine lecture montrera que le mot

a une signification toute spéciale, décisivement

conforme à l'interprétation brésilienne du Traité d'Utrecht ; et pour condamner le sens générique attribué à ce mot, il suffit de cette franche déclaration de M. DE SAINT-QUANTIN (page 315 de la

Revue

coloniale,

68 du tirage à part), dans

une note ajoutée à son travail après que M. DE BUTENVAL et M. D'AVEZAC ont eu appuyé la doctrine de M. DE MONTRAVEL : « O n ignore à quelle source l'auteur a puisé l'in­ terprétation du mot

Japock

Il paraît plus dangereux

qu'utile de produire des assertions trop faciles à détruire. » 2099.

Et pour ce qui est de l'étrangeté de la forme

indienne introduite dans le Traité d'Utrecht, tout s'éclaircit par le fait capital, que les rédacteurs du Traité étaient Portugais.

2100.

(§§ 2066-2070.) De tout temps, les Portugais ont changé en J

l'Y espagnol employé c o m m e consonne. Ce qui, dans la langue espagnole, yesso, yogar, yugo, gema,

gesso, jogar,

est ya, yacer,

est dans la langue portugaise

yema,

jà, jazer,

jugo.

Or cet usage a été étendu par les Portugais à tous les mots américains où le son del'ifait avec la voyelle suivante une seule syllabe. L A CONDAMINE et M. ACCIOLI en ont fait la remarque TITRE 5 7


e

( 158 )

17

LECTURE

§§ 2101-2103

expresse, c o m m e nous l'avons vu à la quatrième lecture. (§§ 301-302.) A u lieu de Marayó, Yavary,

Yuruá,

payé,

Yutahy,

Yamundás, Cayary,

Yapurá,

Yary,

Tapayós,

Yacuhy,

Yaguaron,

les Portugais et les Brésiliens disent

rajó,

Jamunddá,

pagé,

Jutahy,

Cajary,

Japurá,

Tapajós,

Jary,

Jacuhy,

Javary,

Jaguarào,

Ma-

Juruá, —

mon

berceau bien-aimé. Dans le Traité de 1700, base de celui d'Utrecht, le texte original, rédigé par les Portugais, écrit 2101.

Ojapoc.

Qui plus est, les Français eux-mêmes conver­

tissent quelquefois en J l'Y des mots indiens. La CONDAMINE écrit sur sa carte de l ' A m a z o n e Yari,

Topagos;

Marajo,

Jari,

Marayo,

et M . D E M O N T R A V E L écrit sur les siennes Tapajoz.

Dans le m ê m e tome second du Bulletin de la Société de Géographie

de Paris,

de l'année 1834, où vient la protes­

tation de M. D'AVEZAC en faveur de son Japoc

du G a p d u

N o r d , on lit également un Rapport du docte critique sur le voyage de M. LEPRIEUR dans l'intérieur de la G u y a n e ; et dans ce travail, page 229, parlant d'une seule et m ê m e rivière, M . D'AVEZAC lui donne indistinctement le n o m de Yari

et celui de

Jari.

Bien plus : dans une lettre insérée dans les Mémoires Trévoux

de

de mars .1723, le Père D E LA NEUVILLE, arrivé de

C a y e n n e , où il avait été missionnaire pendant trois ans, donne à l ' O u y a le n o m d ' O u j a c , et au fleuve du C a p d'O­ r a n g e le n o m d'OUJAPOC. 2102. J A P O C du Traité d'Utrecht équivaut donc à Y A p o c (*). 2103.

Or Y A P O C était une forme de n o m

indien du

(*) « Yapoc qui doit se lire Japoc... » LECOCQ, La Question du Contesté sous le point de vue linguistique, dans La Marine française, 1897, p. 457. TITRE 5 7


§

e

2104

17

LECTURE

( 159 )

fleuve du Gap d'Orange, forme bien connue des Fran­ çais au temps du Traité d'Utrecht. En 1637, c o m m e le prouve le titre 2, le Français D'AVITY avait assigné au fleuve guyanais Yapóco la latitude septentrionale de quatre degrés, qui est celle du C a p d'O­ range. En 1666, c o m m e le prouve le titre 12, le Français LA BARRE avait expressément situé le fleuve

Yapóco

sous le

C a p d'Orange. E n 1674, c o m m e le prouve le titre 14, le Français GRILLET avait donné au fleuve du C a p d'Orange le n o m de

Yapoque.

En 1688, c o m m e le prouve le titre 15, le Français GUILLAUME SANSON avait appliqué au m ê m e fleuve du C a p d'Orange le m ê m e n o m de

Yapoque.

E n 1703, c o m m e le prouve le titre 29, le Français GUILLAUME DELISLE avait donné trois fois au fleuve du C a p d'Orange le n o m de

Yapóco.

E n 1708, c o m m e le prouve le titre 31, le m ê m e n o m de Yapóco

avait encore été appliqué au fleuve du C a p d'O­

range par le Français THOMAS CORNEILLE. E n 1850, c o m m e le prouve la

Revue

coloniale

de sep­

tembre 1858, page 315 (68 du tirage à part), M. DE SAINTQUANTIN a enregistré parmi les variations du n o m indien du fleuve du Cap d'Orange la forme Et en 1857, c o m m e le prouve le Géographie

Yapóco.

Bulletin de la Société de

de Paris, du mois d'octobre de la m ê m e année,

page 333 (245 du tirage à part), le docte M. D'AVEZAC range dans sa première catégorie des variantes du n o m indien du fleuve du Cap d'Orange, non-seulement encore Yapoque 2104.

Yapóco,

mais

et YAPOC.

En 1700, les rédacteurs portugais du Traité de

L i s b o n n e adoptèrent la forme

Oyapoc,

parce que c'était

celle qui se trouvait consignée dans le document français TITRE

57


( 160

e

)

17

le plus moderne, —

§§

LECTURE

2105-2108

la carte du gouverneur cayennais

FERROLLES, insérée dans le livre de FROGER (titre 22). E n 1713, les rédacteurs portugais du Traité d'Utrecht préférèrent

Yapoc,

par une raison analogue.

Quoique oubliée aujourd'hui depuis longtemps, celle-ci était la forme en usage parmi les Français avant FROGER, et elle avait été restaurée après le Traité de 1700 par deux Français notables, dont l'un était GUILLAUME DELISLE, de qui M. le BARON D E BUTENVAL a dit avec raison, page 79 des Protocoles : « C'était le premier géographe de son temps, et il a dù faire autorité à Utrecht. » 2105. Ojapoc,

Dans le Traité de 1700, l'original portugais écrit à la portugaise; mais le texte français écrit

Oyapoc.

Dans le Traité d'Utrecht, les deux textes écrivent uniformément

Japoc.

Cela provient de ce que, dans le Traité de 1700, le texte français est une traduction

corrigée

à

Versailles

(§ 1983),

tandis que dans le Traité d'Utrecht la rédaction des deux textes est l'œuvre exclusive des Portugais. C'est par la m ê m e raison que clans le Traité de 1700, le texte portugais écrit

Massapa,

et le texte français

Macapa,

tandis que clans le Traité d'Utrecht on lit clans les deux textes

2106.

Massapa.

Or,

Oyapoc

ou

Ojapoc,

Yapoc

ou

Japoc,

per­

sonne ne montrera jamais, avant le Traité d'Utrecht, ni pendant les premières années après ce Traité, aucun de ces quatre n o m s appliqué à un autre cours d'eau que le fleuve du

Cap

d'Orange.

2107.

J'EN DÉFIE H A U T E M E N T QUI QUE CE SOIT.

2108.

O n insiste cependant; on dresse contre le Bré­

sil une objection toute nouvelle. M. D E SAINT-QUANTIN, ingénieur de profession, avait remarqué en 1850 (page 314 de la TITRE

37

Revue

coloniale,

67 du


§§ 2109-2110

e

17

LECTURE

( 161 )

tirage à part) que « le texte [du Traité d'Utrecht] n'in­ dique aucune latitude, ni longitude pour la rivière de Vincent Pinçon. » M. le BARON DE BUTENVAL, ancien diplomate, s'est emparé de cette idée, et il en fait u n de ses arguments principaux. 2109. L'honorable Plénipotentiaire de France est revenu sur ce point à plusieurs reprises, notamment dans la onzième séance (page 142 des Protocoles), en ces termes : « Les Traités de L i s b o n n e et d'Utrecht présentent cette singularité, — inouïe jusques là et sans analogue depuis dans l'histoire diplomatique, — que le fleuve choisi pour limite n'est pas désigné par sa latitude. « Ce n'est donc pas l'Oyapoc, qui était lui, l'hono­ rable Plénipotentiaire Brésilien le dit lui-même, astronomiquement relevé et parfaitement connu ; c'est donc un fleuve qu'on n'avait pas relevé, qu'on ne pouvait relever qu'approximativement.

« Or, par suite de la prororoca, l'Araouari, l'Iapoc de VINCENT PINSON, se trouve dans ces conditions, qu'en­ core à l'heure qu'il est, on ne sait pas EXACTEMENT sa latitude.

« L'Oyapoc, le Vincent Pinson de L i s b o n n e et d'Utrecht est donc

forcément

le fleuve limite « à peine

au

troisième degré » (dit une première fois le M e m o r a n d u m préliminaire de 1699), à deux degrés cinquante minutes (dit-il la seconde), et ne peut être notre Oyapoc. « C'est le fleuve à latitude indécise, et non pas le fleuve à latitude déterminée et certaine. « Le silence des deux Traités successifs de L i s b o n n e et d'Utrecht est là pour l'attester. » 2110. Mais, les recueils diplomatiques sont là pour attester que l'honorable diplomate n'avait nullement à s'étonner du silence des Traités de L i s b o n n e et d'U­ trecht. I. II.

TITRE 3 7

il


( 162 )

e

17 LECTURE

§§ 2111-2115

Ils sont là pour attester que, ni avant ni après 1700 et 1713, il n'a jamais été d'usage de marquer dans un traité la latitude d'un point choisi pour limite, soit fleuve, soit montagne, soit une autre chose quelconque. 2111. Ce n'est que dans le Traité de 1797 que l'on a marqué pour la première fois la latitude du fleuve choisi pour limite. Ce fut une exception, motivée par les doutes soulevés depuis L A CONDAMINE sur la véritable position de la rivière de Vincent P i n ç o n . Et cette exception n'a été suivie que pour les limites de ces m ô m e s parages, en 1801, en 1802, et en 1815. 2112. L'Acte de V i e n n e , qui fixe la latitude contestée de la limite d'Utrecht, n'assigne aucune latitude à la Vlstule, à l'Elbe, au R h i n , à la M e u s e , à l'Escaut, au Pô, également choisis pour limites dans le m ê m e Acte. Pour tous ces fleuves, on s'en est rapporté purement et simplement, en 1815, à la notoriété du n o m . 2113. Il en était de m ê m e , en 1713, pour l'Oyapoc. 2114. L ' O y a p o c était, depuis fort longtemps, le fleuve le plus connu de toute la G u y a n e . (§§ 14-21, 99-103, 1600-1605.) Ilfiguraitdans toutes les cartes, ce qui n'avait lieu pour aucun fleuve guyanais plus méridional. Sous les n o m s d'Ogapoc, Yapoc, Ojapoc, Japoc, le m o n d e reconnaissait distinctement le fleuve du

tout Cap

d'Orange.

2115.

Aussi allons-nous voir que, malgré l'omission

de la latitude, et malgré des tiraillements opiniâtres, bien des témoignages attestent que l'article 8 du Traité d'U­ trecht reçut en F r a n c e et à C a y e n n e la m ê m e interpré­ tation qu'en Portugal et au Brésil. Mais établissons d'abord un nouveau fait.

TITRE.

57


§§ 2116-2118

2116.

e

17 LECTURE

( 163 )

Le Traité d'Utrecht n'a été nullement, c o m m e

on se plaît à le répéter, un pur sacrifice imposé à la France. 2117. France

Le désistement de la longue prétention de la aux

terres amazoniennes

a été obtenu

de

Louis XIV à une grande condition, dans l'intérêt de son petit-fils PHILIPPE V. Le Roi de Portugal dut se désister, à son tour, d'un avantage immense que l'Autriche, l'Angleterre et la Hollande lui avaient assuré dans le premier article secret du Traité de 1703, et qui avait été rappelé à Utrecht par le COMTE de TAROUCA, en tête des Demandes spécifiques de 1712. JEAN V fut tenu de renoncer à l'acquisition des huit places espagnoles de Badajoz, A l b u q u e r q u e , Valencia, Alcantara, Guardia, Tuy, B a y o n a , Vigo. (§§ 222, 261.) Et cette condition parut si dure aux deux Plénipoten­ tiaires Portugais, que, rendant compte à leur gouverne­ ment, le 12 mars 1713, de l'ultimatum qu'ils venaient de recevoir la veille, ils terminèrent leur dépêche par ces mots, que le Brésil leur pardonnera : « L'avantage que nous obtenons au Brésil est payé trop cher par la nonacquisition des places espagnoles sur nos frontières. » 2118. Et si, en outre de la non-acquisition des places espagnoles, le Portugal avait encore été frustré de la limite à l'Oyapoc, quel dédommagement aurait-il donc trouvé à Utrecht des pertes qu'il venait d'éprouver pen­ dant la guerre ? Sans parler du reste, la ville de Rio de Janeiro, alors très petite, mais déjà très riche, s'était vu arracher par DUGUAY-TROUIN, en septembre 1711, un butin de 36 mil­ lions de francs, et une rançon de 1 830 000 francs en numé­ raire, cent caisses de sucre et deux cents bœufs. TITREE

37


( 164 ) 2119.

e

17

LECTURE

§ 2119

Il y a bien eu, dans la longue question des

limites guyanaises, des traités

imposés.

Mais ce furent ceux qui transportaient ces limites au Sud du C a p d'Orange. Ce fut le Traité du 10 août 1797, où la F r a n c e imposa au Portugal, non-seulement la limite à C a r s e v e n n e , mais encore une contribution de 10 millions de francs. Ce fut le Traité du 6 juin 1801, où la F r a n c e imposa au Portugal, non-seulement la limite à l'Araguari, mais encore une contribution de 15 millions de francs. Ce fut le Traité du 29 septembre 1801, où la F r a n c e imposa au Portugal, non-seulement la limite au Carap a n a t u b a , mais encore une contribution de 20 millions de francs.

TITRE.

3


§ 2120

TRENTE-HUITIÈME

Document

2120. Tome

( 165 )

e

17 LECTURE

« Dictionnaire

troisième.

Imprimé

TITRE

Français

DU

BRÉSIL

en 1721.

Universel

François

à TREVOUX, & se vend

et

Latin....

à PARIS

M. DCCXXI. » In-folio. Bibliothèque Mazarine à Paris, Article GVIANE. « La nomme

aussi France

Guiane

Françoise, qu'on

équinoctiale, contient environ

80 lieuës en commençant au C a p d'Orange. »

TITRE

58


( 166 )

17

e

LECTURE

TRENTE-NEUVIÈME

Monument

2121.

« En

Français

§§ 2121-2123

TITRE

DU

en juillet

BRÉSIL

1726.

1724, M. D'ORVILLIERS, qui gouvernail

C a y e n n e depuis 1716, et qui avait depuis longtemps en vue la colonisation de la rivière d'Oyapock, y fit établir [proposa au Gouvernement d'y établir] un poste militaire, et adressa en F r a n c e un Mémoire détaillé sur son projet. Le ministre l'approuva, sous quelques modifications, par dépêche du 6 mars 1725. » Ce sont des paroles de M. DE SAINT-QUANTIN, page 206 de la Revue

coloniale

de 1858, page 26 du tirage à part.

Et le CHEVALIER D E MILHAU nous apprend, dans son manuscrit de 1732, tome second, page 75, qu'au mois de juillet 1726 fut élevé sur la rivière d'Oyapoc le fort

Saint-

Louis.

2122.

Mais où?

A la m ê m e place où avait existé, en 1677, le fort hol­ landais d'Orange, —

sur la rive

gauche

du fleuve du C a p

d'Orange. (§§ 103, 112, 189, 1603-1001.) Après la destruction du fort Saint-Louis, l'emplace­ ment de ce fort, sur la rive gauche

de

l'Oyapoc, est encore

marqué aujourd'hui clans la carte du R. P. DE MONTÉZON et dans celle de M. DE SAINT-QUANTIN. 2123.

M. DE SAINT-QUANTIN prétend que la construction

sur la rive gauche eut lieu forcément, attendu que cette rive était la seule qui présentât un terrain convenable. Mais, malgré la qualité du terrain, tout aussi mauvais que celui de la rive droite de l'Oyapoc, la F r a n c e a bien su établir TITRE

39


e

§§ 2124-2125

17 LECTURE

( 167 )

U n poste militaire sur le Mayacaré, en 1777 (§§ 521522) : U n poste militaire sur le Conani, en 1778 (§ 527) : Le fort de Vincent P i n ç o n sur le Carapapori, en 1782 (§§ 567-568) : U n poste militaire sur le lac Macari, en 1783 (§§ 576578). Et depuis l'année 1838, selon le témoignage de M. DE SAINT-QUANTIN lui-même, la France occupe sur cette rive droite de l'Oyapoc, si impropre pour un établissement militaire en 1726, 2124.

(§§ 1042-1045, 1761-1764).

le fort Malouet

Il est donc permis de supposer que la véritable

raison est celle-ci : E n 1776, et plus tard, le Gouvernement Français, mal informé, crut que le Traité d'Utrecht lui donnait le droit de s'étendre jusqu'au voisinage immédiat de l'Ama­ zone ; En 1726, il croyait encore que le Traité d'Utrecht lui défendait de franchir le fleuve du Gap d'Orange. 2125.

Et cette supposition est érigée en certitude par

un témoignage décisif. Rappelons-nous que

la proposition du

gouverneur

cayennais, en 1724, fut motivée par l'incursion reconventionnelle des Portugais du Para sur la rive gauche de l'Oyapoc, à la fin de 1723, incursion dont les causes se trouvent consignées dans la brochure de M. BAENA, du titre 20. (§§ 329-333.) E h bien! voici maintenant ce que dit de la construction du fort Saint-Louis sur cette m ê m e rive gauche de l'Oyapoc, le CHEVALIER DE MILHAU, l'instigateur en chef d'une nouvelle interprétation du Traité d'Utrecht : e

En 1730, tome 3 , page 77 du Marchais,

Voyage

du

chevalier

des

par LABAT, parlant de la rivière du Cap d'Orange :

« Le Gouverneur de C a y e n n e a fait bâtir ou rétablir l'an­ cien fort qui étoit à l'embouchure de cette riviere, & il y TITRE

59


( 168 )

e

17

LECTURE

§ 2125

entretient une petite garnison, tant afin de CONSERUER nos droits que pour empêcher que quelques aventuriers ne se saisissent de l'embouchure de cette rivière, ne s'y établis­ sent & ne s'y fortifient d'une manière qu'on ne les pourroit pas chasser facilement. » E n 1732, pages 7 2 et 73 du tome premier du manuscrit du M u s é u m d'Histoire Naturelle de Paris, dont il sera question au titre 42 : « Feu M. D'ORUILIERS qui estoit dans ce tems là Gouuerneur de C a j e n n e fit retablir le fort qui estoit dans cette riuiere où le roy entretient une petite garnison, qui est un demembrement de celle de C a j e n n e , pour

CONSERUER

nos droits. »

TITRE

39


§§ 2126-2128

17

e

LECTURE

QUARANTIÈME

Document

TITRE

Français

( 169 )

DU

en août

BRÉSIL

1726.

2126. « Lettre du R. P. LOMBARD de la Compagnie de Jesus, Supérieur Général des Missions de la m ê m e C o m ­ pagnie dans la G u i a n e Françoise. » Datée de C a y e n n e le 13 août 1726, et imprimée en 1730 par LABAT, dans le Voyage

du

chevalier

des

Marchais.

2127. Le Père LOMBARD nous apprend lui-même, dans une autre lettre, datée du 22 décembre 1723 et également imprimée par LABAT, qu'il était arrivé à C a y e n n e le 12 juin 1709. Il se trouvait donc dans la G u y a n e Française depuis quatre ans, lorsqu'on y mit à exécution le Traité d'Utrecht. Il habitait la colonie française depuis dix-sept ans, lorsqu'il écrivit sa lettre de 1726. Et LABAT dit de lui, tome 4, page 425 : « L'auteur de cette pièce ne peut être plus respectable, mieux instruit, moins sujet à prendre le change. » 2128.

Eh bien, voici ce que dit ce personnage, m ê m e

tome de LABAT, page 511 : « Le Gouvernement de C a y e n n e s'étend depuis la riviere de Maroni, jusqu'à celle d'Yapok. Il faut qu'il y ait dans cette étendue de pays au moins 20 mille Indiens de differens langages. Deux langues pourroient pourtant suffire pour cultiver tout cela, le Galibis & la langue des O ü a y e s ; le Galibis pour les Indiens des côtes, & l'autre langue pour ceux des terres. Les derniers sont plus nom­ breux. Ils sont dans le haut d'Yapok & il faut remonter TITRE

40


e

( 170 )

17 LECTURE

§ 2129

un mois, pour aller à eux. Ils habitent sur la riviere de C a m o p i , qui se jette dans l'Yapok vers sa source. » 2129.

Or le

Camopi

est un affluent bien connu de la

rive gauche du fleuve du G a p d'Orange.

TITRE 4 0


§§ 2130-2131

e

17 LECTURE

QUARANTE

ET UNIÈME

Document

2130.

« Voyage

de

Cartes &

en 1730.

du Chevalier D E S MARCHAIS en

une Description

Païs & du Commerce

TITRE D U BRÉSIL

Français

Isles voisines, et à Cayenne, Contenant

( 171 )

Fait en 1725, 1726 & très exacte &

qui s'y fait. Enrichi

de Figures

très étendue d'un grand

en Tailles douces.

LABAT, de l'Ordre des Freres Prêcheurs. grain

l'aîné, Quay

des Augustins,

Cœur.

3f.DCC.XXX.

Avec Approbation,

Guinée, 1727. de ces nombre

Par

le R. PERE

A Paris,

Chez Sau-

au coin de la ruë Gist le & Privilege

du Roy. »

4 volumes in-12. Bibliothèque Impériale de Paris, 12. 0. 1535, 5-8. Bibliothèque Mazarine à Paris, 30.559, L-O. Réimprimé à A m s t e r d a m , en 1731, également en 4 volumes in-12. Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine à Paris, 4249. 2131.

Dans chacune de ces deux éditions :

T o m e 3, page 75. « Les désordres qui sont arrivés dans cette Colonie depuis 1635, jusqu'en 1664 qu'elle fût reprise par Messieurs DE TRACI & DE L A BARRE, ayant donné aux Portugais tout le tems nécessaire pour s'affermir dans les terres qu'ils nous avoient enlevées au Nord de la riviere des A m a z o n e s ; il n'a pas été au pouvoir des Gou­ verneurs de C a y e n n e de leur faire repasser ce fleuve. Ils ont toujours gagné du terrain, & nous ont à lafinpoussés jusqu'au cap d'Orange. » M ô m e volume, page 76 : « Notre borne du coté de l'Est est donc à présent le Cap d'Orange. »

TITRE

41


QUARANTE-DEUXIÈME

Document

2132. Guianne. sieur

1732.

« Histoire Enrichi

Roy

au

» Manuscrit,

TITRE

Français

de L'isle de

de Pleusieurs

DE MILHAU Cheualier

seiller du

§§ 2132-2134

e

17 LECTURE

( 172 )

en

BRÉSIL

1732.

Cayenne

et Prouince

Cartes et Figures.

de L'ordre

Seneschal

DU

t

de S

et presidial

de

Par

Michel

et

de MonCon-

Montpellier.

3 volumes in-8, reliés. Sous forme de

Lettres. Bibliothèque du M u s é u m d'Histoire Naturelle à Paris, 476. 2133.

Rappelons-nous que le Chevalier DE MILHAU

est le premier qui ait prétendu que la limite d'Utrecht ne devait

pas

être

au C a p d'Orange, mais bien au C a p d u

Nord. (§§ 337-348, 364-367, 661.) Et nous saurons apprécier l'importance de son témoi­ gnage. 2134.

MILHAU nous apprend d'abord en ces termes,

page 3 de la

Preface,

que c'est dans son manuscrit que le

Père LABAT, du titre précédent, a puisé tout ce qu'il dit de la G u y a n e Française : « Ayant communiqué m e s Lettres au R. P. LABAT qui m e les avoit demendees auec empres­ sement, je n'aurois pas pensé a les faire paroitre sous m o n n o m , si je n'auois eu lieu de m e plaindre, de l'infidelité auec laquelle il s'en est serui. Ce bon pere en a fait u n m e ­ lange auec le uoiage du cheualier demarchais en guinee et cajenne, et il a confondu nos memoires de telle maniere, que j'ay eu peine à reconnoitre les miens. » Et il répète ensuite, tels quels, les deux passages que nous venons de voir au titre 41. er

T o m e I , pages 69-70. « Les desordres qui sont arriués dans cette colonie depuis mil six cens trente-cinq jusques TITRE

42


§§ 2135-2136

e

17

LECTURE

( 173 )

en mil six cens soixante quatre, qu'elle fut reprise par MONSIEUR DE LA BARRE, ayant donné aux portugais tout le temps necessaire pour s'affermir dans les Terres qu'ils nous auoient enleuées au Nord de la Riuiere des A m a z o n e s , il na pas été au pouuoir des gouuerneurs de Cajenne, de leurs faire repasser ce fleuve ils ont toujours gagné du Terrain, et nous ont à la fin poussés jusques au Cap d'Orange. » Page 71. « Notre Borne du côté de l'Est est donc apresent le C a p d'Orange. » 2135. Encore. Aux pages 73-74 du m ê m e tome premier de son manu­ scrit le Chevalier DE MILHAU ajoute le passage suivant, qui ne vient pas dans LABAT : « Ce qui a donné lieu aux pretentions des portugais, c'est qu'il y a au Cap de N o r d une Baye de uincente pinson, c o m m e on peut le uoir dans les anciennes cartes. Les modernes ayant été asses ignorans, pour placer une seconde Baye de m e m e n o m a Ouiapok, les portugais ont uoulu profiter de cette Beuüe, ils ont pretendu que c'étoit cette seconde Baye, et non la premiere qui deuoit être la Borne, et la separation de leurs terres d'auec les notres. » 2136. L'innovateur MILHAU ajoute donc à son grand aveu ces deux autres aveux : on ne trouvait au Cap du N o r d que le n o m de Vincent Pinson : on trouvait au Cap d'Orange, et le n o m de Vincent Pinson et celui d ' O u i a p o k , c'est-à-dire Oyapoc. Auquel de ces caps doit donc appartenir la rivière por­ tant dans le Traité d'Utrecht le double n o m de Vincent Pinson et Japoc, et dans le Traité fondamental de 1700 le double n o m

de Vincent

Pinson

TITRE

et Oyapoc

42

?


e

17 LECTURE

( 174 )

QUARANTE-TROISIÈME

Document

2137.

« Le

Français

Grand

§§ 2137-2139

TITRE

dans

la même

Dictionnaire

DU

année

PHILIPPE V.

Roi

1732.

Géographique

tique, par M. BRUZEN LA MARTINTERE, Géographe Catholique

BRÉSIL

des Espagnes

et

Cri-

de Sa Majesté et des

Indes.

T o m e quatrième, première partie. L a H a y e , A m s t e r d a m , R o t t e r d a m , 1732. » In-folio. Bibliothèque Mazarine à Paris, 4863. S. Page 378, article G U I A N E . « Tout ce qui est au Midi du C a p d u N o r d jusqu'à la source de la Riviere d'Iapoco, a été cédé aux Portugais et est annexé au Bresil. » 2138.

La rivière n o m m é e par LA MARTINIÈRE I a p o c o

est bien celle du C a p d'Orange. Car, le tome neuvième du m ê m e Dictionnaire, publié en 1739, donne, à la page 415, l'article suivant : « Y A P O C O , Riviére de l'Amerique Méri­ dionale dans la G u i a n e . Elle a une lieue et demie de large à son embouchure, et porte trois brasses de fond dans son canal, et se décharge dans la Mer près du C a p d'Orange. » 2139.

Cela posé, apprécions le témoignage du tome

quatrième. Le Traité d'Utrecht

avait fixé pour limite de la

G u y a n e Française et du Brésil la rivière de JAPOC ou de V I N C E N T PINSON. Tout en reconnaissant que,

en fait,

on avait entendu

par cette rivière celle du C a p d'Orange, le Chevalier DE MILHAU prétendait que,

en droit,

ce devait être celle du

G a p d u Nord. Mais cet innovateur, ainsi que nous venons de le voir au titre 42, ne prenait en considération qu'un seul des TITRE

45


e

§ 2139

17 LECTURE

deux n o m s de la rivière limite, —

( 175 ) celui de

Vincent

Pin-

son.

LA

MARTINIÈRE sentit qu'il fallait également tenir

compte de l'autre nom. Et il compléta l'œuvre du magistrat cayennais, en disant que la limite d'Utrecht allait du Cap d u N o r d à la SOURCE de la rivière du CAP D'ORANGE.

Dans sa totalité, cela était inadmissible, puisque l'ar­ ticle 8 du Traité d'Utrecht fixe pour limite, non pas la source

du Japoc, mais cette rivière m ê m e , c'est-à-dire tout

son cours. Mais il subsiste de cela un fait important. C'est que, du temps de LA MARTINIÈRE, on reconnais­ sait dans le Japoc

du Traité d'Utrecht le Yapoc

DU CAP

D'ORANGE. O n n'avait pas encore découvert le Japoc NORD.

TITRE 43

DU CAP D U


e

QUARANTE-QUATRIÈME

Document

21 40.

« Nouvelle

Relation

la Description

Cayenne;

le Commerce

arrivés dans

rais Peuples

seur de

Royale

en Médecine

l'Hôpital

Botaniste

de la France

Equinoctiale,

des Côtes de la Guiane;

& les Mœurs

de l'Isle de

& Coûtumes

de Paris,

changedes diffé-

des Figures

PIERRE BARRERE,

des Sciences

dessi-

Correspondant Docteur

&

Durand,

de la même

Médecin

Ville, ci-devant

l'Isle de Cayenne.

de

Profes-

dans l'Université de Perpignan,

Militaire

du Roi dans

Damonneville,

BRÉSIL

1743.

qui l'habitent. Avec

nées sur les lieux. Par l'Académie

en

DU

de celte Colonie ; les divers

ce Pays;

Sauvages

TITRE

Français

contenant

mens

§§ 2140-2141

17 LECTURE

( 176 )

Paris,

Médecinchez

Piget,

1743. » Petit in-12.

Bibliothèque Impériale de Paris, 12. 0. 1762, 4. 2141.

BARRÈRE avait habité la G u y a n e

Française

depuis 1720 jusqu'en 1723. Le

R. P. de MONTÉZON le qualifie

d'auteur

grave

et

impartial.

E h bien, voici ce que dit BARRÈRE : Pages 10-12. « Toute la G u i a n e est arrosée par u n grand nombre de riviéres... La plus considérable qu'on trouve après avoir doublé le Cachipour

Au-delà de

Cap

de Nord

Cachipour,

rien sur la côte que quelques

Criques.

est celle de

on ne voit plus Mais après cela, en

côtoyant u n peu avant, on reconnoît le Cap d'Orange Tout près de ce cap, on trouve une petite riviére qui ne mérite pas beaucoup appellent

Coupiribo.

d'attention, &

que les Indiens

E n rangeant ensuite la côte de l'Est TITRE

Ai


e

§ 2141

17 LECTURE

( 177 )

à l'Ouest, on entre dans l'embouchure d ' O u y a p o k . pok est la plus grande riviére de cette côte. »

Ouya-

Page 29. « Le gouvernement de la G u y a n e se voit resserré aujourd'hui entre Marony & Ouyapok. »

T. II

TITRE

44

12


e

17 LECTURE

( 178 )

QUARANTE-CINQUIÈME

Document

2142.

«

Encyclopédie,

lettres. Mis en ordre Royale

des Sciences

à la Partie Françoise, de

de l'Académie

medio

Tantum

l'aîné, rue & Imprimeur rue M.

du DCC.

vis-à-vis ordinaire

Foin, LVII.

par

une

raisonné

des Sciences

de

de

&

de

series juncturaque

la Grille du

Roy, la

petite

approbation

de

de celle l'Académie

l'Institut

Tome

à la Science,

la

Porte

Le

Harpe.

A

David Breton, Durand,

des

et privilege

de de

septieme.

des Mathurins. rue

quant

l'Académie

pollet, Tantum

HORAT. —

rue Saint-Jacques,

de

de

de

l'Académie &

de Paris,

de Londres, Suede,

des

société de gens

M. D'ALEMBERT,

Royale

vis-à-vis avec

1757.

M. DIDEROT,

par

accedit honoris !

chez Briasson,

par

BRÉSIL

des Relies-Lettres de Prusse;

Belles-Lettres

sumptis

Paris,

publié

en

dictionnaire

de la Société Royale

des

Bologne.

ou

métiers,

Mathématique,

Prusse,

Royale

&

&

TITRE DU

Français

sciences, des arts et des

§ 2142

Mathurins. du

Roy.

»

In-folio. Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine à Paris, 1651. Page 1004.

« GUIANE, Géog.) les Géographes donnent aujour­ d'hui ce n o m à tout le pays qui s'étend le long des côtes de l'Amérique méridionale, entre l'Orinoque & l'Amazone. O n peut le diviser du n o m de ses posses­ seurs d'orient en occident, en Guiane portugaise, Guiane françoise, Guiane hollandoise, & Guiane espa­ gnole. La Guiane portugaise, que la F r a n c e a cédée à la couronne de Portugal par la paix d'Utrecht, s'étend depuis la rive septentrionale & occidentale de l'Amazone jusqu'à la riviere d'Yapoco, que les F r a n TITRE 45


e

§§ 2143-2145

17

LECTURE

çois de C a y e n n e n o m m e n t propos

confondue

( 179 )

Oyapoc,

alors avec

Pinçon, qui est beaucoup

qui fut mal-à-

&

la riviere de Vincent

plus au Sud. La

Guiane

françoise, ou la France équinoxiale, qui est la colonie de G a y e n n e , embrasse

l'espace

compris entre la ri­

viere d'Oyapoc & celle de Marawini, que l'on n o m m e à C a y e n n e Marauni

2143.

ou Maroni.

»

O n ne devinerait jamais

déclaration, si formellement

l'auteur de cette

favorable

à

l'interpréta­

tion brésilienne de l'article 8 du Traité d'Utrecht. Mais l'Encyclopédie a pris soin de nous le faire con­ naître elle-même. A u bas de l'article G U I A N E , on lit : « Article de M. DE LA GONDAMINE. » Et au commencement du volume, page xiii, on lit : « M. DE LA CONDAMINE, de l'Académie Royale des Sciences de France, de celle de Berlin, et de la So­ ciété Royale de Londres, & c , a donné le mot G U I A N E . » 2144. Pour bien apprécier la valeur de ce témoi­ gnage de L A CONDAMINE, dans un ouvrage aussi ré­ pandu et aussi accrédité que l'Encyclopédie, compa­ rons-le avec ce que le m ê m e auteur avait publié en 1745 et en 1749. 2145.

«

Relation

abrégée

l'interieur

de l'Amérique

de

du

la Mer

Guiane, à

en

l'Assemblée

publique

28. Avril

1745. Par

Académie.

Avec

des

une

Amazones,

Veuve Pissot, Quay

Côtes

la Riviere de

M. D E Carte

Voyage

méridionale,

Sud, jusqu'aux

descendant

d'un

du

la &

des

CONDAMINE,

du Maragnon

levée par

depuis Brésil

des Amazones

l'Académie LA

fait

le même.

de Conti, à la Croix

Côte de la ; lue

Sciences, le

de

ou de A

dans

Paris,

la

même

la Riviere Chez

d'Or. M. DCC.

la XLV.

& Privilege du Roi. » In-8°, XVI-216 pages. Bibliothèque Impériale de Paris, 8. 0. 1798.

Avec Approbation

Pages 198-199 : « Quelques lieues à l'Ouest du TITRE

45

Banc


e

17

( 180 )

LECTURE

§ 2146

des sept jours [un banc du C a p d u Nord, où L A CON­ DAMINE était resté échoué pendant sept jours], & par la m ê m e hauteur [1 degré 51 minutes Nord], je ren­ contrai une autre bouche de l ' A r a w a r i , aujourd'hui fermée par les sables. Celte bouche & le profond & large canal qui y conduit en venant du côté du Nord, entre le continent du cap de N o r d , & les isles qui couvrent ce Cap, sont la Riviere & la Baye de Vincent Pinçon. Les Portugais du Para ont eu leurs rai­ sons pour les confondre avec la riviere d'Oyapoc, dont l'embouchure sous le Cap d'Orange, est par 4. degrés 15 minutes de Latitude Nord. L'article du Traité d'Utrecht qui paroît ne faire de l ' O y a p o c , & de la riviere de Pinçon, qu'une seule & m ê m e riviere, n'empêche pas qu'elles ne soient en effet à plus de 50 lieues l'une de l'autre. Ce fait ne sera contesté par aucun de ceux qui auront consulté les anciennes Caries & lû les Auteurs originaux, qui ont écrit de l'Amérique avant l'établissement des Portugais au Brésil. » 2146. Année de

« Histoire

MDCCXLV.

Physique,

de

Avec

pour

l'Académie

les Mémoires

la

même

Royale de

année.

des

Sciences.

Mathématique

Tirez

des

&

Registres

A Paris, de l'Imprimerie Royale. M.DCCXLIX. » In-4° — Pages 391 à 492 : « Relation abrégée de

cette

d'un

Académie.

Vogage

nale, depuis Brésil

& de la Guiane,

zones.

Par

publique Voyage

fait dans

le

l'intérieur de l'Amérique

la Côte de la Mer du Sud, jusques

M.

DE

en descendant LA

CONDAMINE.

à

28

Avril

la Rivière des Lue

à

Ama-

l'Assemblée

28 Avril 1745. » — Tirée à part, sous ce titre :

de la Rivière des Amazones.

méridio-

aux Côtes du

l'Assemblée

publique

1745. Avec

levée par le même.

une

Par M. de LA CONDAMINE.

de l ' A c a d é m i e des Sciences, le carte du cours

M.DCCXLIX.

de cette Rivière,

» In-4°, 104 pages.

Page 485 de l'Académie, 97 du tirage à part : « Quelques TITRE

45


§§ 2147-2149

e

17

LECTURE

( 181 )

lieues à l'Ouest du Banc des sept jours, & par la m ê m e hauteur, je rencontrai une seconde bouche de l'Arawari, aujourd'hui fermée par les sables. Cette bouche, & le pro­ fond & large canal qui y conduit en venant du côté du Nord, entre le continent du Cap de Nord, & les isles qui couvrent ce Cap, sont la rivière & la Baie de Vincent Pinçon, à moins que la rivière de Pinçon ne soit le M a r a ñ o n m ê m e . Les Portugais du Parà ont eu leurs raisons pour la confondre avec la rivière d'Oyapoc, dont l'embouchûre sous le C a p d ' O r a n g e , est par 4 degrés 15 minutes de latitude Nord. L'article du Traité d'Utrecht, qui paroît ne faire de l'Oyapoc, sous le n o m d'Yapoco & de la rivière de Pinçon, qu'une seule & m ê m e rivière, n'empêche pas qu'elles ne soient en effet à 50 lieues l'une de l'autre. Ce fait ne sera contesté par aucun de ceux qui auront consulté les anciennes Cartes, & lû les Auteurs originaux, qui ont parlé de l'Amérique avant l'établisse­ ment des Portugais au Brésil. » 2147. LA CONDAMINE maintient en 1757 sa fausse opi­ nion sur la diversité de l'Oyapoc et de la rivière de Vin­ cent Pinçon. Mais, pour ce qui est de l'interprétation de l'article 8 du Traité d'Utrecht, quelle prodigieuse différence! 2148. E n 1745 et en 1749, il ne se bornait pas à sou­ tenir que la véritable rivière de Vincent P i n ç o n était celle du Cap du Nord, par la latitude septentrionale de 1 degré 51 minutes. Il avançait que c'était là la limite d'Utrecht; il ajoutait m ê m e à chacune de ses deux édi­ tions une carte où la G u y a n e Française s'étendait jus­ qu'au tronc del ' A r a g u a r i .(§§ 425-427). E n 1757, il déclare nettement que la G u y a n e Fran­ çaise, en vertu du Traité d'Utrecht, s'arrête à la rivière du Cap d'Orange, par la latitude septentrionale de 4 de­ grés 15 minutes. 2149.

LA

CONDAMINE disait en 1745 et en 1749 : TITRE

45


e

( 182 )

17 LECTURE

§§ 2150-2152

— Les Brésiliens ont tort de prétendre que leur terri­ toire s'étend jusqu'à l'Oyapoc, jusqu'à la rivière du G a p d'Orange; car la véritable limite fixée par l'article 8 du Traité d'Utrecht, c'est le Vincent Pinçon, c'est la rivière du Cap du Nord, 50 lieues au Sud de l'Oyapoc. Il dit en 1757 : — Les Français ont tort de prétendre que la colonie de C a y e n n e s'étend jusqu'au V i n c e n t Pinçon, jusqu'à la rivière du G a p d u N o r d ; car la véri­ table limite fixée par l'article 8 du Traité d'Utrecht, c'est l'Oyapoc, c'est la rivière du Cap d'Orange, 50 lieues au Nord du V i n c e n t Pinçon. 2150. C o m m e n t LA CONDAMINE a-t-il été amené à une pareille rétractation ? Nous le savons aujourd'hui en détail. 2151. Il existe à la Bibliothèque Publique d'Evora, sous le n°cxv. 2-14, une chronique manuscrite, ayant pour titre « Maranhão conquistado a Jesu Christo, e á Coroa de

Portugal

pelos

Religiosos

da

Companhia

de

Jesus

»,

et composée, après l'année 1757, par le Père BENTO DA FONSECA, procureur général des Jésuites du M a r a g n a n à Lisbonne. Ce travail est partagé en chapitres, dont l'un, le cha­ pitre 6 du livre I , est précédé de ce sommaire : « O n décrit les terres du G a p d u N o r d et la véritable division des domaines de Portugal d'avec ceux de F r a n c e dans la colonie de C a y e n n e . » er

Ce manuscrit a été annoncé en 1850 par M. RIVARA, page 35 de son Catalogue, cité au titre 19. er

Et le chapitre 6 du livre 1 vient d'être publié à Rio de Janeiro, en 1859, par M. le D M E L L O MORAES, pages 213-219 du tome second de sa Corographia historica, citée au titre 25. r

2152. Or, voici le début de la chronique du Père FONSECA : TITRE

45


§ 2152

e

17 LECTURE

( 183 )

« M. CHARLES DE CONDAMINE, dans la description qu'il a faite de la rivière des A m a z o n e s en 1744, poussé par l'amour de sa nation, a prétendu obscurcir les véritables limites des domaines de Portugal et de France sur la côte de la mer et au Cap d u Nord, entre le Para et Cayenne

Peu de temps après la publication de ladite

Relation, il parut en Portugal un livre, Annaes Historicos do Maranhão, œuvre posthume de BERNARDO PEREIRA DE BERREDO, et ledit CONDAMINE en ayant connaissance, il écrivit à L i s b o n n e au père BENTO DA FONSECA, de la Compagnie de Jésus, avec lequel il était en correspon­ dance, lui disant qu'il avait appris que dans le dit livre on combattait ce qu'il avait avancé dans sa Relation, et lui demandait le livre, ou bien les raisons qu'on y présentait sur cette question. « Le Père lui répondit que les Annaes Historicos ne pouvaient nullement combattre ce qu'il disait dans sa Re­ lation ; car, bien que publiée plus tard, c'était une œuvre posthume, écrite auparavant. Mais le Père ajouta les rai­ sons qui lui venaient à lui-même contre ce qu'il avait avancé dans sa Relation, lesquelles, tirées de sa lettre, sont en substance celles-ci : 1° La déclaration du Traité d'Utrecht, au chap. 8, où l'on déclare que la rivière O y a p o c k est la m ê m e à qui VINCENT PINÇON a donné son nom 2° A l'embouchure de ce m ê m e O y a p o c k que M. CONDAMINE distingue de la rivière de Vincent Pinçon, il existe, sur une élévation, une borne de pierre aux armes de Portugal et d'Espagne

3° PHILIPPE IV, roi

de Castille, par Lettres du 14 juin 1636, enregistrées au livre second de la Provedoria du Pará, fit donation à BENTO MACIEL PARENTE, gouverneur et capitaine-général de l'État du M a r a g n a n , de la capitainerie du C a p d u N o r d ; et il est déclaré dans ces Lettres, qu'il lui fait donation — des terres (ce sont les termes formels) qui gisent au Cap d u Nord, en comptant trente-cinq à quarante lieues sur la TITRE

45


e

( 184 )

17

LECTURE

§§ 2153-2154

côte de la mer, depuis ce cap jusqu'à la rivière de V i n c e n t P i n ç o n , où c o m m e n c e le département des Indes royaume de

du

Castille.

« Ces Lettres de donation montrent avec évidence que la rivière d'Oyapock est la m ê m e à qui V I N C E N T

PINÇON

a donné son n o m ; car, le C a p d u N o r d se trouvant par 1 degré 51 minutes, et l'Oyapock par 4 degrés 15 minutes, selon les observations de M. D E C O N D A M I N E

lui-même,

dans sa Relation, cela fait à peu près la distance de 40 lieues du C a p d u N o r d à la rivière d'Oyapock, ou de V i n c e n t P i n ç o n , déclarées dans les Lettres de donation de la capitainerie du C a p d u N o r d , concédée à

BENTO

MACIEL « E n définitive, M. D E C O N D A M I N E , raisons que le Père B E N T O dans sa lettre, convint formé les

D A FONSECA

qu'il n'avait

sur ce qu'il avait avancé

dans

pas

convaincu par les lui avait exposées été assez bien

sa Relation, et

in-

approuva

raisons

du Père, comme

2153.

O n peut douter de la vertu des deux premiers

arguments du Père B E N T O

véritables. »

D A

FONSECA.

Mais les Lettres de création de la capitainerie brésilienne du C a p d u N o r d ne pouvaient manquer de produire leur effet. Elles expliquent suffisamment l'amende honorable de LA

CONDAMINE. 2154.

Et j'en fais une, moi aussi, en témoignant m e s

regrets d'avoir méconnu, en 1851, ce beau caractère.

titre

45


§§ 2155-2156

17

e

QUARANTE-SIXIÈME

Document

2155.

Français

« Histoire

( 185 )

LECTURE

dans

TITRE

la même

Générale

des

DU

BRÉSIL

année

Voyages,

Collection de toutes les relations des voyages

de toutes les Nations

connues

ou

par

terre, qui ont été publiées jusqu'à present dans Langues

1757.

mer

Nouvelle et par

les différentes

[Par l'abbé P R É -

V O S T ] . T o m e quatorzième. A Paris, chez Didot, Libraire, Quai des Augustins, à la Bible d'or. M. DCC. LVII. Avec approbation et privilege du Roi. » In-4°. Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine à Paris, 4090. Page 375. « La plus grosse Riviere qu'on trouve après avoir doublé le Cap d u Nord, est celle de Cachipour Ensuite, on reconnoît le Cap d'Orange Plus loin, ran­ geant la côte de l'Est à l'Ouest, on entre dans l'embou­ chure d'Ouyapock, la plus grande Riviere de toute cette côte. » Page 379. « Laissant la discussion des droits à ceux qui se les attribuent, on peut dire que le Gouvernement de C a y e n n e est aujourd'hui resserré entre le M a r o n y & l'Ouyapok. » 2156. Que l'on pèse bien cette phrase de l'auteur Français : Laissant la discussion des droits à ceux qui S E L E S ATTRIBUENT.

TITRE

46


17

( 186 )

e

QUARANTE-SEPTIÈME

Document

2157.

« Dictionnaire

§ 2157

L E C T U R E

TITRE D U

Français

Universel

en

BRÉSIL

1771.

François

et Latin,

vul-

appelé Dictionnaire de Trévoux Nouvelle édi­ tion, corrigée et considérablement augmentée. T o m e qua­ trième. A Paris, Par la Compagnie des Libraires associés. M. DCC. LXXI. Avec approbation et privilege du Roi. » In-folio.

gairement

Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine à Paris, 7521. Article G U I A N E : « La Guiane Françoise, qu'on n o m m e aussi F r a n c e équinoctiale, contient environ 80 lieues, en commençant au cap d'Orange. »

TITRE

47


§ 2158

17

e

QUARANTE-HUITIÈME

Document

2158.

« Rapport

( 187 )

LECTURE

TITRE

Français

en

DU

BRÉSIL

1776.

» présenté par M .

sur la Guiane

MA-

L O U E T , en 1776, au Ministre de la Marine et des Colonies. (§§ 478-485). er

Publié, en 1802, dans le tome I de l'ouvrage suivant : «

Collection

de Mémoires

et Correspondances

l'administration des Colonies, et notamment Française

et Hollandaise,

administrateur

par

des Colonies

et de

officielles sur sur

la

Guiane

v. P. MALOUET, ancien la Marine.

Paris, Bau­

douin, an X. » 5 volumes in-8°. Avec une carte intitulée «

Carte

Ratave.

des Parties connues

de la Guyane

Française

et

»

Bibliothèque Impériale de Paris, 8. 0. 1754. G. 1-5. Pages 107-110 : « La trop grande indifférence du Gouvernement pour les possessions de Guiane, occasionne depuis CINQUANTE ans un progrès d'usurpation de la part des Portugais et des Hollandais. Si sa majesté ne détermine incontesta­ blement ses droits sur cette partie du continent, il est trèsvraisemblable que les établissemens de nos voisins se mul­ tiplieront à notre détriment, et opposeront les plus grands obstacles à la prospérité des nôtres. Il est notoire que les Portugais ont reculé de cinquante lieues au-delà du cap d u N o r d leurs bornes prétendues, et qu'ils y ont établi des postes et des missions, à la faveur desquels ils enlèvent des Indiens établis dans notre territoire, et nous ferment toutes les avenues du Rio-Négro, dont la navigation seroit pour nous si importante. Cette portion de côte usurpée par eux est d'ailleurs très-précieuse par la faculté TITRE

48


e

( 188 )

17 L E C T U R E

§§ 2159-2161

que nous aurions d'y établir la pêche du lamentin

En

conséquence, on joint à cette feuille les anciens mémoires trouvés dans les porte-feuilles de G a y e n n e , dont u n de 1688, et deux de M. le B A R O N D E B E S N E R

: et c o m m e il

pourroit être dangereux de paroître douter de la légitimité de nos droits, on croit que le préambule nécessaire à toute négociation, seroit de déclarer à la cour de Portugal que le roi, aux termes du Traité d'Utrecht, a ordonné l'éta­ blissement d'un poste dans la baie de Vincent-Pinson, d'où sa majesté se propose de faire tirer une ligne droite de l'Est à l'Ouest pour lafixationdes limites

Indépen­

d a m m e n t de l'augmentation de terres que cet arrangement nous assure, il nous ouvre la traite des bestiaux au Para ; et par Rio-Négro, la navigation interlope sur le fleuve des A m a z o n e s . Ces différentes vues réunies à la nécessité de soutenir dignement les droits de la couronne, suffiront, sans doute, pour fixer l'attention du conseil sur un objet aussi important. »

2159.

Nous savons que,

lorsqu'il présenta au Gouver­

nement le rapport renfermant ce passage, AI.

MALOUET

était commissaire général de la Marine et m e m b r e du co­ mité de législation des Colonies : qu'à la suite de cette œuvre, il fut administrateur civil de la G u y a n e

Fran­

çaise pendant près de trois ans : et qu'au m o m e n t de sa mort, en 1814, il était Ministre de la Marine et des Colo­ nies. (§§ 478, 491-537.) 2160.

Le rapport, longtemps demeuré secret, a été

publié en 1802, quand le Traité d ' A m i e n s eut inspiré à son auteur une trompeuse sécurité. 2161.

C'est un bienfait dont le Brésil est redevable

au Traité d'Amiens. Car,

ainsi qu'il demeure exposé dans la sixième lecture

(§§ 486-490), M. M A L O U E T , autorité irrécusable, a révélé au m o n d e , en 1802,

que jusqu'en 1776 le Gouvernement FranTITRE

48


§ 2162

e

17

L E C T U R E

( 189 )

çais, d'accord avec le Gouvernement Portugais, consi­ déra c o m m e limite d'Utrecht l'Oyapoc, la rivière du Cap

d'Orange.

C'est ce grave personnage qui a fait réduire en pratique, après un demi-siècle de vaines insistances, la prétention cayennaise. 2162. Aussi un gouverneur de C a y e n n e a-t-il payé ce service dignement, en donnant le n o m de F O R T M A L O U E T au poste français établi en 1838 sur la rive brésilienne de l'Oyapoc, et qui s'y trouve encore. (§§ 1042-1046, 17561759.)

TITRE 48


17

( 190 )

e

QUARANTE-NEUVIÈME

Document

2163.

§§ 2163-2166

LECTURE

Français

TITRE

en

1776

DU

et

BRÉSIL

1777.

« En 1776 et 1777, le maréchal D E

CASTRIES,

ministre de la marine, donne l'ordre formel « d'établir un «

poste sur la rive gauche

du

; après avoir

Vincent-Pinson

« bien vérifié que ce fleuve est au-delà du deuxième degré « Nord et à quinze lieues portugaises de la rivière des « A m a z o n e s », c'est-à-dire à la limite d'Utrecht. » 2164.

Ce sont des paroles de M. le B A R O N D E

BUTEN-

V A L , dans la huitième séance, page 91 des Protocoles. 2165.

Il s'y est glissé une petite confusion de n o m s .

La Chronologie

de M . D ' A V E Z A C , citée au titre 23,

qu'en 1776 et 1777

montre

le porte-feuille de la Marine et des Colo­

nies était occupé par

ANTOINE-RAYMOND-JEAN-GUILBERT-

G A B R I E L D E S A R T I N E , ministre depuis le 24 août 1774, et que C H A R L E S - E U G È N E - G A B R I E L

D E L A CROIX,

MARQUIS

D E

C A S T R I E S , ne lui succéda que le 7 juin 1780. 2166.

Mais l'essentiel subsiste.

E n 1776 et 1777, le Gouvernement Français consi­ dérait c o m m e limite d'Utrecht, sous le n o m de V i n c e n t P i n ç o n , une rivière située à Q U I N Z E

lieues portugaises

de

l'Amazone. Ce n'était donc pas le V i n c e n t P i n ç o n réclamé depuis 1838,

c'est-à-dire le Car,

Carapapori.

d'après la carte de M . D E S A I N T - Q U A N T I N , le point

de l'embouchure du Carapapori

le plus reculé de l'Ama­

zone, n'est éloigné du grand fleuve que de trente-cinq c'est-à-dire, N E U F lieues portugaises C'était le Mayacaré.

nutes,

TITRE 49

et un

mi-

douzième.


§ 2167

17

e

LECTURE

( 191 )

2167. Cette diversité dans les indications officielles de la F r a n c e au sujet du Vincent Pinçon, est une pré­ somption très forte contre la justesse de son interprétation actuelle de l'article 8 du Traité d'Utrecht.

TITRE

49


( 192 )

17

e

CINQUANTIÈME

Document

2168. Commerce

TITRE

Français

dans

DU

en

« Histoire Philosophique des Européens

§§ 2168-2169

L E C T U R E

1780

des Etablissements

les deux

L A U M E - T H O M A S R A Y N A L . Genève,

BRÉSIL

Indes.

MDCCLXXX.

Par

et

du

GUIL-

» 5 vol. in-4°.

Bibliothèque Impériale de Paris. Tome

e

3 , page 355,

parlant de la G u y a n e : « Cette

vaste contrée, qu'on décora du magnifique n o m de F r a n c e équinoxiale, n'appartient pas toute entière à la cour de Versailles, c o m m e elle en eut autrefois la prétention. Les Hollandois, en s'établissant au Nord & les Portu­ gais au Midi, ont resserré les François entre la rivière de Marony 2169.

& celle de V i n c e n t P i n ç o n Or le texte de R A Y N A L

ou d'Oyapock. »

est accompagné

d'un

atlas, qui forme le cinquième volume de l'ouvrage ; et l'on trouve dans cet atlas les indications suivantes : N° 31. « Carte du Nouv. R

M E

de G r e n a d e , de la N o u v

le

A n d a l o u s i e , et de la G u y a n e , avec les Pays Limitrophes qui en sont au Sud, par M. B O N N E , Ingénieur-Hydrographe de la Marine.» — Sous le C. d'Orange, tentrionale de 4° 15', R. d'Oyapok N° 32. « La G u y a n e Guyane

ou de

par la latitude sep­ Vincent

Pinçon.

Françoise, avec partie de la

Hollandoise : suivant les Opérations et les

Cartes récentes des Ingénieurs Géographes François. Par M. B O N N E , Ingénieur-Hydrographe de la Marine.» (C'est la réduction de la grande carte manuscrite de S I M O N du paragraphe 4 5 3 ) . — Sous le C. d'Orange,

MENTELLE,

par la latitude

septentrionale de 4° 18', « Baye et Fleuve d'Oyapock.

»

A l'extrémité Nord de la branche occidentale du canal de TITRE

50


e

§ 2169

17

LECTURE

( 193 )

M a r a c á , par la latitude septentrionale de 2° 20', « B. et R. de Vincent

Pinçon

SELON M. D E LA CONDAMINE.

»

N° 35. « Carte de la partie Septentrionale du Brésil. Par M. B O N N E , Ingénieur Hydrographe de la Marine. » — Sous le C. d'Orange, par la latitude Nord de 4°15', « B. d'Oyapok

ou de Vincent

Pinçon.

»

R A Y N A L reconnaissait donc, en 1780, que la limite de la G u y a n e Française et du Brésil était à la riviere du Cap d'Orange.

T . II

TITRE

50

13


e

17 LECTURE

( 194 )

CINQUANTE

ET UNIÈME

Document

2170.

« Atlas

TITRE

Français

Géographique

l'Académie

Royale

du Roi et successeur

Paris

2170

D,U B R É S I L

en 1782.

et Universel,

DELISLE et PHIL. BUACHE, Premiers Géographe

§

Géographes

par

des Sciences. Et par DEZAUCHE,

des S

RS

GUILL.

du Roi, de Ingénieur

DELISLE et BUACHE. A

chez DEZAUCHE. 1789. » 2 vol. in-folio.

Bibliothèque Impériale de Paris, Département des Cartes, C. 14800. N° 137. « Carte de la Terre Ferme, du Perou, du Bre­ sil, et du Pays des A m a z o n e s A Paris, chez DEZAUCHE. 1782. » — Yapoco

R.,

Guiane

Françoise,

sous le C.

entre

d'Orange.

titre 5l

R. de Marony

et


e

17 LECTURE

§§ 2171-2172

CINQUANTE-DEUXIÈME

Document

2171. Tome

Français

dans

« Encyclopédie

premier.

TITRE

la même

Méthodique.

A Paris

DU

BRÉSIL

année

Géographie

1782.

Moderne.

PANCKOUKE, Libraire, hôtel de Liège, chez PLOMTEUX, Imprimeur

chez

Thou, rue des Poitevins ; à des Etats. M. DCC. LXXXII.

( 195 )

Avec

Approbation

et Privilége

du

Roi. » In-4°. Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine à Paris, 1653. Article GUIANE. « La G u i a n e Portugaise, que la F r a n c e a cédée à la couronne de Portugal, par la paix d'Utrecht, s'étend depuis la rive septentrionale de l'Ama­ zone jusqu'à la rivière d'Yapoco, que les François de C a y e n n e n o m m e n t Oyapoc, & qui fut mal-à-propos con­ fondue alors avec la rivière de Vincent Pinçon, qui est beaucoup plus au Sud. La G u i a n e Françoise, ou F r a n c e équinoxiale, qui est la colonie de C a y e n n e , embrasse l'espace compris entre la rivière d'Oyapoc & celle de Marawini, que l'on n o m m e à C a y e n n e Marauni ou Maroni.

2172.

»

Ce sont les mémorables paroles de LA GONDA-

MINE en 1757. Mais elles reçoivent maintenant une sanction précieuse. Car l'article de l'Encyclopédie Méthodique est signé par M. ROBERT, «

Géographe

ordinaire

TITRE 52

du Roi. »


( 196 )

17

e

CINQUANTE-TROISIÈME

Document

2173. Présentées

« Choix par

Précédé

Français

d'un

TITRE

en

DU

a paru

de Géographie, de Monseigneur

tois, de l'Acad. de la Historia

de Madrid,

Royal,

&c. Dédié à Madame

à faciliter

et de

l'Amé-

avec Cartes.

M. M E N T E L L E , Historiographe

Censeur

et Historiques.

le plus propre

de l ' A s i e , de l'Afrique

abrégé

BRÉSIL

1783.

de Lectures Géographiques

l'ordre qui

l'étude de la Géographie rique.

§§ 2173-2175

LECTURE

le comte

de celle de

la Comtesse

Par d'ArRouen,

de B***. Paris,

1783. » 6 volumes in-8°. Bibliothèque Impériale de Paris, 8. G. 535. C. 1-6. e

T o m e 5 , page 312. —

« De la Guyane.

»—

« Cette

vaste contrée, qu'on décora du magnifique n o m de équinoxiale,

France

n'appartient pas toute entière à la Cour de

Versailles, c o m m e elle en eut autrefois la prétention. Les Hollandois, en s'établissant à l'Ouest, & les Portu­ gais au Midi, ont resserré les François entre la rivière de M a r o n y & celle d'Oyapock. » 2174. Les détails suivants donnent à ce texte une importance merveilleuse. 2175.

L'auteur, E D M E M E N T E L L E , dit à la page 3.07, en

commençant à parler de la Guyane

Françoise

:

« Ce qui

va suivre, & que j'ai emprunté à l'Histoire Philosophique, étoit susceptible d'un grand nombre de corrections. J'en ai fait les plus essentielles, d'après des remarques que j'ai sollicitées & obtenues de C a y e n n e

m ô m e . O n en trou­

vera quelques-unes imprimées en entier à la fin de ce Volume, c o m m e pièces justificatives. » A la page 404, sous le titre de « Observations TITRE

55

adressées


§ 2176

e

17

LECTURE

( 197 )

à l'Auteur », on lit dans une colonne cet extrait de l'Histoire Philosophique de R A Y N A L (titre 50) : « Les Hollandois. en s'établissant au Nord, & les Portugais au Sud, ont resserré les Français entre la rivière de Maroni & celle de Vincent Pinçon ou d'Oyapock. »Et en regard de cet extrait, une autre colonne présente cette double observation : « Les Hollandois ne sont point établis au Nord des François, mais à l'Occident de ces derniers, qui dans cette partie, ont l'Océan au Nord & à l'Est. — O n con­ fond ici la rivière de Vincent-Pinçon avec l'Oyapock, quoiqu'il y ait très-loin de l'une à l'autre. » de Cayenne

Il n'y avait pas à balancer sur la première de ces deux corrections. Mais la seconde prêtait au doute. Quel n o m fallait-il supprimer dans le texte de l'abbé R A Y N A L ? Celui de Vincent Pinçon, ou celui d'Oyapoc? 2176. Tout semblait devoir faire exclure la rivière du Cap d'Orange. Car en 1776, le Ministre de la Marine et des Colonies avait ordonné aux administrateurs de la G u y a n e Fran­ çaise de prendre pour limite le Vincent Pinçon, à quinze lieues portugaises de l'Amazone (titre 49). E n 1777, M A L O U E T avait mis à exécution l'ordre de 1776, en prenant pour Vincent P i n ç o n le M a y a c a r é , à quinze lieues portugaises du G a p N o r d français. (§§ 499-522.) En 1778, le m ê m e M A L O U E T avait transféré la limite au Conani, à quinze lieues portugaises du Cap N o r d portu­ gais (§§ 523-537) : Depuis 1782, le B A R O N D E R E S S N E R entendait par Vincent P i n ç o n l'Araguari, le Carapapori et la branche méri­ dionale du canal de Maracá, et avait reculé la limite de fait, — à l'insu des Portugais, comme son prédécesseur —, jusqu'au C a p N o r d français (§§ 538-568). Et toutefois, en 1783,

parlant en public, ce fut le n o m TITRE

55


e

( 198 )

17

LECTURE

§§ 2177-2180

de V i n c e n t P i n ç o n qu'EDME M E N T E L L E

exclut du texte

de R A Y N A L . 2177. des

Il déclare lui-même qu'il prit ce parti « d'après qu'il avait sollicitées et obtenues de

remarques

même.

Cayenne

»

D e qui? 2178.

Pour bien éclaircir ce point, consultons d'abord

la Biographie

Universelle

de M I C H A U D ,

tome 2 8 de la pre­

mière édition. Elle nous dit que M E N T E L L E ( E D M E ) , né à Paris le il octobre 1730, « fut reçu de l'Institut national, dès la première organisation de ce corps savant », et que le principal ouvrage d'EDME M E N T E L L E

est le « Choix de

Lectures Géographiques et Historiques », publié en 1783. 2179.

Lisons maintenant, dans les Annales

et coloniales

maritimes

er

de 1834, seconde partie, tome I , pages 297-

310, une « Notice sur la vie et les travaux de S I M O N TELLE,

ingénieur géographe, à

C a y e n n e le 5 septembre 1833,

Cayenne

MEN-

», datée de

et signée par M . N O Y E R , qui

déclare lui-même, page 309, avoir voulu payer un tribut d'estime et de reconnaissance à celui qui fut son maître et son ami. Voici les premiers mots de M . N O Y E R : «

MENTELLE

( F R A N Ç O I S - S I M O N ) , ingénieur géographe, naquit à Paris en 1731.

Il était frère du géographe

M E N T E L L E ,

membre

de l'In-

stitut. »

2180.

Le biographe ajoute : que S I M O N M E N T E L L E arriva

à C a y e n n e en 1763

: que, sous la proposition de M. M A L O U E T ,

en date du 12 décembre 1776, on créa pour lui, en 1777, la place de « garde du dépôt des cartes et plans de la colo­ nie » : qu'il conserva cette place jusqu'à sa mort, arrivée le 21 décembre 1799 : qu'il construisait ses cartes avec l'exactitude la plus scrupuleuse : et qu'il « apportait dans toutes les circonstances de sa vie le m ê m e scrupule qu'il mettait à la construction de ses cartes. » Et nous venons de voir, au titre 51, une preuve de cette TITRE

55


§§ 2181-2183

e

17

dernière assertion, —

LECTURE

( 199 )

dans la carte N° 32 de l'atlas de R A Y N A L ,

publiée sous le n o m de B O N N E , mais qui,

d'après l'article

du m ê m e M. N O Y E R dans les Annales maritimes de janvier 1830 (§ 951),

n'est que la réduction

et

coloniales

littérale

de la

grande carte faite par S I M O N M E N T E L L E en 1778. E n 1778, après que M A L O U E T , son protecteur, eut con­ sidéré c o m m e le V É R I T A B L E

Vincent

Pinçon

le fleuve qui

débouche à l'extrémité septentrionale du canal de Maracá, SIMON M E N T E L L E

eut le courage d'inscrire dans ce parage

cette légende : « Baie et Rivière de Vincent M. D E L A 2181.

SELON

Pinçon

CONDAMINE. Il est donc permis d'attribuer à S I M O N

MENTELLE

les Observations publiées en 1783 par son frère aîné. Ce n'est m ê m e pas trop hasarder que d'attribuer à la m ê m e source la suppression faite par E D M E M E N T E L L E du n o m de Vincent

Pinçon

dans le texte de R A Y N A L .

2182.

Les observations reçues de C a y e n n e par E D M E

MENTELLE

sont datées du 26 mai 1783, au temps m ê m e

que,

par la coopération personnelle de S I M O N

la limite de F A I T , sous le n o m

MENTELLE,

de Vincent Pinçon, se

trouvait à la rivière du Cap d u Nord. Donc, en retranchant du texte de R A Y N A L le n o m de Vincent

Pinçon,

en ne maintenant que celui

d'Oyapoc,

E D M E M E N T E L L E , ou plutôt S I M O N M E N T E L L E , a voulu dire avec toute netteté, que la limite de la G u y a n e Française et du Brésil était de D R O I T , c'est-à-dire en vertu du Traité d'Utrecht, au fleuve du Cap 2183.

d'Orange.

Ce fait va recevoir la confirmation la plus écla­

tante.

TITRE

55


( 200 )

e

17

CINQUANTE-QUATRIÈME

Document

2184.

«

Mémoire

Française

et Portugaise

Cayenne

en Août

en

les limites

à la Guyane

DU

1796.

entre

les

et au

Para.

Possessions Fait

recueil suivant : « Feuille de la Guyane eme

1819, III

à

Géographe

» (§§ 618-619, 677).

Publié, le 31 août et le 7 septembre blie en Août

BRÉSIL

1796. » Signé « L'ingénieur

du dépôt, M E N T E L L E .

gardien

TITRE

Français

sur

§§ 2184-2185

LECTURE

1822, dans le

Française,

Eta-

volume. C a y e n n e , de l'Impri­

merie Royale. » In-4°. E n m a possession. N° du 7 septembre, page 339 : « Des recherches faites dans le dépôt de Versailles, en

1794 [1774], remirent sur la trace de ces projets,

anciennement conçus, de faire quelque rapprochât

218.7.

nos limites du bord septentrional

C H A N G E M E N T

qui

del ' A m a z o n e .»

Je m'abstiens de toute réflexion.

Je dis seulement : Q u e la date de 1794 est évidemment une faute d'im­ pression, pour 1774; car, précisément en

1794, c o m m e

il demeure exposé dans la sixième lecture, §§ 603 à 606, les Français s'étaient repliés sur la rive gauche de l'Oyapoc,

après s'être rapprochés de l'Amazone, autant que

possible, pendant dix-sept ans; et M. M A L O U E T , autorité irrécusable (titre 48), a consigné dans ses Mémoires, er

tome I , pages 6 et 13, ces faits positifs : « E n 1776 C a y e n n e redevint pour la troisième fois dans l'espace de douze ans u n nouveau P e r o u . U n baron D E avoit électrisé toutes les têtes »...

RESNER...

« Des missions envoyées

sur les bords de l ' A m a z o n e devoient attirer à nous les TITRE

54


E

§ 2185

17

LECTURE

( 201 )

Indiens portugais. Nos frontières, D ' A P R È S P R É T E N T I O N S , devoient être reculées jusque-là

D'ANCIENNES »:

Que la connexité de la date de 1774 avec les plans du B A R O N D E B E S S N E R en 1776, avec le rapport de M. M A L O U E T dans la m ê m e année, avec les instructions ministérielles de 1776 et 1777, et avec les voies de fait clandestinement opérées par M. M A L O U E T 1777

et par le B A R O N

D EBESSNER

en

et 1778, en 1782 et 1783, est saisissante (§§ 465-

602) : Que S I M O N M E N T E L L E , établi à C a y e n n e dès 1763, avait été créé gardien du dépôt géographique de la colonie par proposition de M. M A L O U E T

lui-même, et avait vécu

dans l'intimité de cet administrateur, et également dans l'intimité du B A R O N D E B E S S N E R : Et qu'il est admirablement remarquable que l'immense révélation de cet honnête h o m m e en faveur de l ' I N T É G R I T É du Brésil, ait paru à Cayenne ER

PEDRO I

le jour m ê m e que D O M

proclamait sur l'Ypiranga l ' I N D É P E N D A N C E du

Brésil.

TITRE 54


e

17 LECTURE

( 202

CINQUANTE-CINQUIÈME

Document

Français

§ 2186

TITRE

et Portugais

DU

en

BRÉSIL

1797.

TRAITÉ DE PARIS

2186. Française à Paris une

«

Traité

de paix

et Sa Majesté le 23 Thermidor

et indivisible

et d'amitié

Très-Fidèle

entre la

République

la Reine de Portugal,

an cinq de la République

fait

Française

(10 Août 1797). » (§§ 613-655).

ART. vi. « Sa Majesté Très-Fidèle reconnaît par le présent Traité, que toutes les terres situées au Nord des limites ci-après désignées entre les possessions des deux Puissances Contractantes, appartiennent en toute pro­ priété et souveraineté à la République Française, renon­ çant en tant que besoin serait, tant pour Elle que pour ses Successeurs et ayant cause, à tous les droits qu'Elle pour­ rait prétendre sur les dites terres à quelque titre que ce soit, et n o m m é m e n t en vertu de l'Article VIII du traité con­ clu à Utrecht le 11 Avril 1713 : réciproquement la Répu­ blique Française reconnaît que toutes les terres situées au Sud de la dite ligne appartiennent à Sa Majesté TrèsFidèle, en conformité du m ê m e Traité d'Utrecht. » ART. vu. « Les limites entre les deux G u y a n e s F r a n ­ çaise et Portugaise seront déterminées par la appellée par de

Vincent

les Portugais Pinson,

Calcuenne,

et par

les

rivière Français

qui se jette dans l'Océan au-dessus

du C a p N o r d , environ à deux degrés et demi de latitude septentrionale. Elles suivront la dite rivière jusqu'à sa source, ensuite une ligne droite tirée depuis la dite source vers l'Ouest jusqu'au Rio Branco. » ART. viii. « Les embouchures ainsi que le cours entier de la dite rivière

Calcuenne TITRE

ou de V i n c e n t 55

Pinson


e

§§ 2187-2188

17 L E C T U R E

( 203 )

appartiendront en toute propriété et souveraineté à la République Française, sans toutefois que les sujets de Sa Majesté Très-Fidèle établis dans les environs, au midi de la dite rivière, puissent être empêchés d'user librement et sans être assujettis à aucuns droits, de son embouchure, de son cours et de ses eaux. » 2187.

Ce traité, qui ne fut écrit qu'en

publié dans le Moniteur

F R A N Ç A I S , a été

du 28 fructidor an 5 (14 septem­

bre 1797). C'est de cette source que j'ai tiré, dans la septième lecture, les articles VI et VII, en m e permettant de substi­ tuer Calçoenne

à Calmeme,

qui est une faute évidente.

Mais je suis maintenant le texte donné en 1857 par M. C A S T R O ,

pages 32-42 du tome IV de sa collection

(§ 1976), « d'après l'Original

gardé à L i s b o n n e

aux

Archives du Ministère des Affaires Étrangères », et qui est parfaitement conforme à un texte existant aux Archives Publiques de l'Empire à Rio de Janeiro, et portant la ratification portugaise, tardive et inutilisée. 2188. 1797

M. LE SERREC a dit, page 6, que le Traité de

ne fut pas ratifié par

la

France.

M. D ' A V E Z A C dit aussi, note G G : « Le traité non ratifié de 1797 ». Mais le Moniteur

du 14 septembre 1797, immédiate­

ment après le texte du Traité du 10 août, continue en ces termes : « Le directoire exécutif arrête et signe le présent traité de paix entre sa majesté très-fidèle la reine de Portugal [sic], négocié au n o m de la République Française, par le citoyen C H A R L E S D E L A C R O I X , ministre plénipotentiaire, fondé de pouvoirs à cet effet par arrêté du 30 messidor dernier [18 juillet], et chargé de ses instructions. Fait au Palais-National du directoire exécu­ tif, le 24 thermidor, an 5 de la R é p u b l i q u e Française, une et indivisible [onze août 1797]. — TITRE

55

Pour expédition


e

( 204 )

17 L E C T U R E

conforme, —

Signé,

REVELLIERE-LEPEAUX,

Par le directoire exécutif, L A G A R D E , 2189.

§§ 2189-2190 président.

secrétaire-général. »

M . le B A R O N D E B U T E N V A L a dit dans la onzième

séance, pages 135-136 des Protocoles : « Le Plénipotentiaire Français prendra la liberté de protester, une fois pour toutes, contre cette imputation de diversité incessante, dans les indications de la F r a n c e au sujet du V i n c e n t - P i n s o n , et de la retourner, dans toute sa rigueur, contre le Portugal lui-même « E n 1797, la F r a n c e dit toujours « le Vincent-Pin­ s o n », et elle prend soin, cette fois, d'ajouter une latitude approximative

:

« Les limites entre les deux

française et portugaise, dit l'article 7

m e

Guyanes

du Traité de

1797, seront déterminées par la rivière appelée par les Portugais

Calmenne

et par les Français de

Vincent-

qui se jette dans l'océan, au-dessus du G a p d u

Pinson,

Nord, E N V I R O N à deux degrés et demi de latitude septen­ trionale. » « Des deux cours, de P o r t u g a l et de F r a n c e , quelle est donc celle qui a varié dans ses indications ! « Celle qui, de 1699 à nos jours, dit, chaque fois, le Vincent-Pinson;

et, en 1797, ajoute « E N V I R O N

» au

deuxième degré et demi de latitude. « O u bien celle qui a dit Oyapoc cinquante minutes, en 1699 ; puis, Iapoc 1713; puis Calmenne, 1797;

par deux degrés sans latitude, en

à deux degrés trente minutes, en

puis enfin Oyapoc,

par quatre degrés cinquante

minutes, en 1815 ? « D e quel côté est donc, sinon la bonne foi, du moins l'uniformité ? » 2190.

Mais,

Béservant pour une lecture spéciale le m e m o r a n d u m de 1699 ; Sans répéter que le Traité fondamental de 1700 dit TITRE

55


§§ 2191-2192 Oyapoc,

e

17

que Japoc

LECTURE

( 205 )

du Traité d'Utrecht, rédigé par

les Portugais, est la forme portugaise de Yapoc, nom alors très connu du fleuve du Cap d'Orange, — et que, si les Traités de 1700 et 1713 n'ont pas indiqué la latitude du fleuve choisi pour limite, c'est que ce n'était pas l'usage alors, pas plus qu'aujourd'hui ; Sans noter que l'Acte de V i e n n e ne place pas l'Oyapoc par quatre degrés cinquante minutes, mais bien entre le quatrième

dit pas

et le cinquième

Calmenne,

mais

degré, — Calmeme

et que

le Moniteur

ne

:

Remarquons seulement que l'erreur de Calmeme pour Calçuenne, et l'identification du C a l ç u e n n e avec le Vincent Pinçon, ne sont pas du fait du Portugal. 2191. L'original du Traité de 1797 porte Calçuenne, qui est, sans doute, une orthographe erronée, mais qui n'empêche nullement d'y reconnaître Calçuenne; tout c o m m e , chez O R T E L I U S en 1570, chez T H É O D O R E D E B R Y en 1592 et en 1594, chez H O N D I U S en 1602, chez D U D L E Y en 1661, on reconnaît parfaitement Pinçon sous la forme Pinçon.

(§§ 1824, 1827-1828, 1833, 1834).

C'est le Moniteur, c'est le journal officiel du Gouverne­ m e n t Français, qui a introduit la forme méconnaissable de Calmeme ; tout c o m m e , dans le m ê m e acte, le m ê m e journal a converti le chevalier d ' A R A U J O en A R A N J O . 2192. L'article VII porte que « les limites entre les deux G u y a n e s Française et Portugaise seront déter­ minées par la rivière appellée P A R

LES P O R T U G A I S

Cal-

et P A R L E S F R A N Ç A I S de Vincent Pinson, envi­ ron à deux degrés et demi de latitude septentrionale. » cuenne,

Le Portugal ne dit donc pas que le Vincent Pinson s'appelle Calmenne

ou

Calmeme.

Il ne donne à la rivière de 1797 que le n o m de

Cal-

çuenne.

Et il prend soin de déclarer, dans l'article VI, qu'il ne se résigne à cette nouvelle limite que par concession, avec TITRE

55


( 206 )

e

17

LECTURE

§§ 2193-2194

sacrifice des droits qu'il pouvait prétendre « en vertu de l'Article VIII du

Traité conclu à

Utrecht le 11 avril

1713. » C'est la F r a n c e , la F r a n c e toute seule, qui, en 1797, donne le n o m de Vincent Pinson à la rivière Calçuenne (autrement Carsevenne), par la latitude septentrionale de deux degrés et demi. Et la F r a n c e déclare, dans l'article VI, qu'elle recon­ naît dans le C a r s e v e n n e la limite du Traité d'Utrecht. 2193. Que l'on veuille bien comparer cette décla­ ration officielle de la F r a n c e , en 1797, avec sa conduite officielle en 1726, et avec ses déclarations officielles de 1732, de 1776, de 1824, de 1856. E n 1726, la F r a n c e élève un fort sur la rive gauche de l ' O Y A P O C , sur la rive gauche du fleuve du C A P D ' O R A N G E , pour conserver les droits acquis par le Traité d'Utrecht (titre 39). C A P

E n 1732, elle déclare que la limite d'Utrecht est le N O R D (§§ 492, 1769). Elle déclare en 1776, que c'est le M A Y A C A R É (titre 49). Elle déclare en 1797, que c'est le C A R S E V E N N E .

Elle déclare en 1824, que c'est le véritable A R A G U A R I (§§ 949, 1772). Elle déclare en 1856 que c'est le C A R A P A P O R I , la pré­ tendue branche Nord de l'Araguari (§ 1238). N'est-ce pas là de la diversité ? N'est-ce pas là une présomption extrêmement forte contre l'interprétation française actuelle de l'article 8 du Traité d'Utrecht? 2194. Mais, c o m m e n t le Gouvernement Français at-il pu être amené à placer au C a r s e v e n n e , environ à deux degrés et demi de latitude septentrionale, la limite d'Utrecht, tandis que le Traité d'Utrecht ne dit pas uni­ quement Vincent Pison, mais ajoute à ce n o m , c o m m e TITRE

55


e

§ 2194

17 L E C T U R E

synonyme, celui de Japoc,

c'est-à-dire Yapoc,

( 207 ) qui n'a

jamais appartenu qu'à la rivière du Cap d'Orange, entre le quatrième

et le cinquième

degré ?

Rappelons-nous le titre 43. LA

MARTINIÈRE

avait assuré, en 1732, que la limite

d'Utrecht était à la S O U R C E du

Yapoc.

Et cette assertion avait été répétée dans les autres éditions de son grand Dictionnaire, en 1740 et en 1768. Or, consultons les cartes générales de la G u y a n e , celle de M. D E S A I N T - Q U A N T I N , par exemple ; et nous y verrons la source de la rivière du Cap d'Orange environ degrés et demi

à

deux

de latitude septentrionale.

Ouvrons les dictionnaires de Géographie, celui de M. B O U I L L E T , par exemple ; et nous y lirons : « O Y A P O K , riv. de la G u y a n e , naît par 54" 40' long. 0., 2° 30' [deux degrés et demi] lat. N. » Ne serait-ce pas là la clef de l'énigme ?

TITRE

55


17

( 208 )

e

CINQUANTE-SIXIÈME

Document

2195.

« Exposé

d'administrer

LESCALLIER, Guiane

Français

Ancien

Hollandaise.

dans

TITRE

DU

la même

année

des moyens

la Guiane,

§ 2195

LECTURE

de

orné

Ordonnateur

d'une

mettre carte,

BRÉSIL

1797.

en

de celte Colonie,

Nouvelle

édition.

valeur

par

et

DANIEL et de la

Paris, D u Pont,

an VI. » In-8° (§§ 595-602, 680-687). Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine à Paris, 202. Pages 6-7 : « E n 1791, poussé sans doute par sa cour, et par l'es­ prit de vertige qui entrainoit alors l'immense coalition de tous les despotes contre la F r a n c e , le gouverneur portu­ gais du Para s'avisa d'élever quelques prétentions et fit m ê m e des incursions, prétendant étendre le domaine portugais jusqu'à la rivière d'Oyapoc. « Pour réfuter cette prétention, il suffit de dire que le Traité d'Utrecht afixénos bornes à 2 degrés Nord, et à 15 lieues de la rivière des A m a z o n e s , et que l'embou­ chure de l'Oyapoc nous rejetteroit à 70 lieues de l'Ama­ z o n e et par 4 degrés et demi de latitude Nord. « Il est vrai que le Traité d'Utrecht n o m m e une fois la rivière d'Yapoc ou de V i n c e n t P i n ç o n ; mais une autre fois il ne dit que la rivière de V i n c e n t P i n ç o n : or, dans le fait ni l'un ni l'autre de ces n o m s ne sont le véritable n o m de la rivière dont il est question dans le traité. Il y a, entre les terres du G a p d u N o r d et le continent, u n bras de m e r qui forme une espèce de baie, et où il y a u n mouillage Cet endroit, où on prétend qu'un voyageur n o m m é VINCENT PINÇON, qui avoit accompagné CHRISTOPHE COLOMB dans son premier voyage, aborda en l'année 1500, TITRE

56


e

§§ 2196-2197

17

LECTURE

( 209 )

a retenu chez quelques auteurs le n o m de

baie de

Vincent

mais ce n o m n'est pas connu dans le pays

Pinçon;

« La rivière principale qui afflue dans cette prétendue baie de Vincent Pinçon, qui est une espèce de bras de mer, se n o m m e dans le pays Carapa-pouri. « A u reste, ces terres étans noyées et sujettes à de fréquentes inondations et débordemens extraordinaires, à des ras de marée, il arrive souvent dans les gîsemens des terres, dans les branches et les embouchures de ces rivières, des changemens ; les noms connus dans le pays des peuples sauvages qui l'habitent, sont mal prononcés par les E u r o p é e n s , et peuvent m ê m e varier, ou avoir été mal indiqués ; et il ne peut y avoir de désignation qui puisse déranger celle aussi précisémentfixéede la latitude du lieu, et de sa distance de l'embouchure du fleuve des Amazones. » 2196.

Mais,

M.

LESCALLIER

n'a pas

lu le

Traité

d'Utrecht, qui ne parle ni de la latitude du fleuve limite, ni de sa distance de l'Amazone. L'honorable ex-administrateur de la G u y a n e Fran­ çaise a pris pour un extrait littéral du Traité d'Utrecht l'ordre ministériel de 1776 et 1777 (titre 49), dont il montre, à la page 5, avoir connaissance. 2197. Des assertions de M. L E S C A L L I E R il ne subsiste donc qu'un seul fait : c'est que la rivière prétendue par la France en vertu du Traité d'Utrecht, ne se nomme, ni

Vincent

Pinçon,

ni

Yapoc.

Mais, si la rivière prétendue par la France ne porte aucun des deux n o m s donnés par le Traité d'Utrecht à la rivière limite, comment peut-elle être la limite fixée par le Traité d'Utrecht ?

T. II

TITRE 56

14


( 210 )

e

17

CINQUANTE-SEPTIÈME

Document

2198. Française, citoyen

«

Français

B U A C H E . LU

TITRE D U

le 17 décembre

Considérations concernant

§ 2198

L E C T U R E

géographiques

ses

limites

le 27 frimaire

an

BRÉSIL

1797.

sur

la

méridionales,

Guiane Par

le

6. » (§§ 689-701).

Publié, entre le 21 mai et le 19 juin 1801, dans le volume suivant : « Mémoires de l'Institut National des Sciences et Arts. Sciences Morales et Politiques. T o m e troi­ sième. Paris, Baudoin, imprimeur de l'Institut National. Prairial an IX. » In-4°. Bibliothèque Mazarine à Paris. Premières paroles de B U A C H E , page 15 de la seconde pagination du volume : « A u m o m e n t où la F r a n c e s'occupe de la paix avec le Portugal, et que les v œ u x de tous les Français sont de faire une paix solide et durable avec toutes les nations, il m e paroît convenable et utile de rectifier une erreur de géographie qui a servi de base aux Portugais pour réclamer la partie la plus intéressante de la G u i a n e , sur laquelle ils n'avoient véritablement aucun droit. Malgré le Traité d'Utrecht, qui leur en a assuré la possession, et qui l'a en quelque sorte légitimée, cette possession, contraire à tous les principes d'usages et de convenances reçus jusqu'à présent, n'en a pas moins été considérée c o m m e une usurpation, et elle a été attaquée c o m m e telle dans plusieurs circonstances. » Page 16. « L'erreur que je m e propose de rectifier ici, est d'avoir confondu la rivière d'Oyapok, située à la côte de la G u i a n e par 4° 15' de latitude Nord, avec une autre rivière de m ê m e n o m , que l'on appeloit aussi rivière Vincent Pinson, située au-delà de l'équateur. » TITRE

57

de


§§ 2199-2200

2199.

e

17

( 211 )

LECTURE

Donc, le 27 frimaire an 6, c'est-à-dire le 17 dé­

cembre 1797, Trente-quatre ans après que B E L L I N ,

ingénieur de la

Marine et du dépôt des plans de la Marine et des Colonies, eut imprimé, dans un ouvrage publié par ordre du Gou­ vernement Français, que la limite d'Utrecht était le voisinage

immédiat

du Cap

du

Nord

dans

(§§ 431-446),

Six ans après que M. L E S C A L L I E R , ex-ordonnateur de la G u y a n e

Française, eut imprimé, dans un

livre

adressé à l'Assemblée Nationale Constituante, que la limite d'Utrecht était à l'Araguari, à environ un degré de latitude Nord

(§§ 594-602),

Trois mois après que le Moniteur

eut publié le Traité du

10 août, dans lequel on lisait que la limite d'Utrecht était pour le Gouvernement Français le Carsevenne, à

deux

degrés

et demi

de latitude septentrionale

environ

(titre 55),

U n Français déclara devant l'Institut de France, que le Traité d'Utrecht de

la

Guiane

qui

rivière d ' o Y A P O K , DE LATITUDE 2200.

AVAIT

ASSURÉ

s'étend depuis

A U X

PORTUGAIS

l'Amazone

la partie

jusqu'à

située par Q U A T R E D E G R É S Q U I N Z E

la

MINUTES

NORD.

Et ce Français était N I C O L A S

Non-seulement

membre

éminent

BUACHE. de

l'Institut

de

France. Mais encore successeur de B E L L I N

dans la place d'hy­

drographe de la Marine au dépôt des cartes et plans de la Marine et des Colonies ! Et il faisait cet aveu dans une œuvre de rancune contre les Portugais.

TITRE

57


( 212 )

e

17

LECTURE

CINQUANTE-HUITIÈME

Document

ACTE

2201.

TITRE

Européen

D E

§§ 2201-2202

en

DU

BRÉSIL

1815.

VIENNE.

Nous avons vu ailleurs, d'après le Moniteur

du

2 0 juillet 1815, l'article 107 de l'Actefinaldu Congrès de V i e n n e , fait le 9 juin de la m ê m e année (§ 858). Voici maintenant cet important article tel que le donne en 1857 M. C A S T R O (§ 1976), tome V, page 182, dans son texte du m ê m e acte, tiré de

l'original

gardé à L i s b o n n e

dans les Archives du Ministère des Affaires Étrangères. « S o n Altesse R o y a l e le Prince R é g e n t du R o y a u m e de Portugal et de celui du Brésil, pour manifester d'une manière incontestable Sa considération particulière pour Sa Majesté T r è s - C h r é t i e n n e , S'engage à restituer à Sa dite Majesté la G u y a n e

Française jusqu'à la rivière

d ' O y a p o c k , dont l'embouchure est située entre le qua­ trième et le cinquième degré de latitude septentrionale : limite que le Portugal a toujours considérée c o m m e celle qui avait étéfixéepar le Traité d'Utrecht. « L'époque de la remise de cette Colonie à Sa Majesté T r è s - C h r é t i e n n e sera déterminée, dès que les circon­ stances le permettront, par une Convention particulière entre les deux Cours ; et l'on procédera à l'amiable, aussitôt que faire se pourra, à lafixationdéfinitive des limites des G u y a n e s Portugaise et Française, conformément au sens précis de l'Article VIII du Traité d'Utrecht. » 2202.

Nous avons aussi vu ailleurs l'immense portée

de cet arrêt de l'Europe (§§ 860-866). Et réellement, on ne saurait trop insister sur le mot toujours. TITRE 58


e

§ 2203

17

LECTURE

( 213 )

Ce mot constate, bien explicitement, que le Portugal n'a jamais varié dans son interprétation de l'article 8 du Traité d'Utrecht. Et il constate implicitement, que la France elle-même entendait d'abord, par la rivière de Japoc Pinson

ou de

Vincent

du Traité d'Utrecht, la rivière du Cap d'Orange.

2203.

Quand M. D E S A I N T - Q U A N T I N a dit,

page 324 de

la Revue Coloniale, 77 du tirage à part, que depuis l'année 1724

« les Portugais ont imaginé de contester les résul­

tats du Traité d'Utrecht », l'honorable écrivain oubliait donc l'article 107 de l'Acte de Vienne. L'honorable M. D E B U T E N V A L oubliait également l'article 107

de l'Acte de V i e n n e , quand il disait, à la quatrième

séance, page 54 des Protocoles : « Ce que le Plénipotentiaire Français nie aujourd'hui, c o m m e tous les représentants de la F r a n c e l'ont fait antérieurement et chaque fois qu'une telle assertion s'est produite, c'est que le fleuve que le Plénipotentiaire Brésilien désigne aujourd'hui Vincent-Pinson, ait été, et accepté c o m m e tel.

soit en 1700,

»

TITRE

58

c o m m e le

soit en 1713,

connu


e

17

( 214 )

LECTURE

CINQUANTE-NEUVIÈME

Document

2204.

Guyane

TITRE

Français

« Mémoires

commandant

du

Française

en

Général

de Sinnamary

§§ 2204-2206

DU

BRÉSIL

1824.

.J. D. F R E Y T A G ,

et de Conamama, accompagnés par

de Notes

ancien dans

la

historiques,

topographiques

et critiques,

Mr. C. D E B. [ C O U V R A Y D E

BEAUREGARD].

Paris, Nepveu, 1824. » 2 volumes in-8°

(§ 947). Bibliothèque du Dépôt Général de la Marine, à Paris. 2205.

Voici d'abord le jugement porté sur ce livre par

M. D E N O U V I O N , page 328 de ses « Extraits des auteurs et voyageurs qui ont écrit sur la G u y a n e Mémoires

du général

Freytag,

» (§ 1073) : « Les

très médiocre roman enté sur

le triste drame de la déportation de fructidor, ne sauraient être comptés au nombre des livres dans lesquels on peut chercher une appréciation sérieuse et saine des h o m m e s et des choses. Mais cet ouvrage a été publié par un éditeur qui l'a enrichi de notes d'un grand intérêt et qui témoi­ gnent, dans leur auteur, d'une connaissance de tout ce qui a rapport

2206.

Écoutons

à la Guyane.

maintenant

approfondie

»

ce que dit cet éditeur

Français, si bien r e c o m m a n d é par u n autre Français : T o m e second, page 207. « La rivière d ' O y a p o c k a son embouchure sous le G a p d'Orange, à 4 degrés 15 minutes de latitude Nord. Elle est éloignée de près de 40 lieues de celle de V i n c e n t - P i n ç o n ; cependant les Portugais, par une fausse interprétation du Traité d'Utrecht, ont T O U J O U R S à

eu la prétention

la Guyane

2207.

d'assigner

Française.

M. le B A R O N

cette rivière comme

limite

»

D EB U T E N V A L TITRE

59

affirme, dans la


§ 2207

e

17

LECTURE

( 215 )

quatrième séance, page 54 des Protocoles, que la déclaration

relevée au titre précédent, a été introduite dans l'acte de V i e n n e par les représentants

du

Portugal.

Seraient-ce les Portugais aussi qui auraient soufflé à M. C O U Y R A Y D E B E A U R E G A R D

SON

TITRE

TOUJOURS?

59


( 216 )

e

17

SOIXANTIÈME

Document

2208.

la description rapport

de la statistique, du

Editeurs ordinaire

1828.

Géographes. : A.

DU

en

du

Universel,

et politique,

sous le

de l'histoire,

de l'industrie, etc., par

T o m e quatrième.

J. K I L I A N ,

contenant

globe intéressans

physique

commerce,

BRÉSIL

1828.

Géographique

de tous les lieux

de la Géographie

Société de

TITRE

Français

« Dictionnaire

§ 2208

LECTURE

A

Paris,

libraire, C H . P I C Q U E T ,

du Roi et de S. A. R. Mgr

le Duc

une

chez les géographe

d'Orléans.

Janvier

» In-8°. Bibliothèque Impériale de Paris, Départe­

ment des Cartes. Page 617 : « G U Y A N E

F R A N Ç A I S E .

Vers l'O., sa limite avec la

G u y a n e hollandaise court d'abord du N. au S., en suivant le M a r o n i , depuis son embouchure, jusqu'à son confluent avec l'Aroua, puis à l'O., jusqu'au 58° 35' de long. : là c o m m e n c e sa limite avec la G u y a n e brésilienne, déter­ minée par une ligne qui va d'abord droit au S., jusqu'à la Serra T u m u c u m a q u e , par 2° 16' de lat., court ensuite à l'E. avec cette chaîne, puis, d'après la Convention de Paris du 2 8 août 1817,

se dirige au N. E. et accompagne jusqu'à

la m e r le cours de l'Oyapok. Remarquons que cette der­ nière partie de la frontière de la G u y a n e française a souvent été l'objet de graves discussions. Suivant le Traité d'Utrecht, la limite des deux possessions devait suivre la rivière de V i n c e n t P i n ç o n ou de Japoc jusqu'à l'océan; mais la position douteuse de ce cours d'eau a laissé vague et indécise cette indication, qu'on aurait dû accompagner d'une désignation de latitude. T E M P S

la rivière de Vincent

Après

Pinçon TITRE

60

avoir

comme

regardé I D E N T I Q U E

LONGA V E C


§ 2208

e

17

LECTURE

( 217 )

L ' O Y A P O K , on a cru la retrouver plus au S. dans une rivière qui a son embouchure près du Gap Nord, par 1° 55' de lat. boréale, et qu'on n o m m e aussi A y a p o k ; mais les Portugais se montraient

peu disposés à reconnaître

TITRE (il)

C E T T E D É C O U V E R T E . »


e

17

( 218 )

S O I X A N T E

E T

U N I È M E

Document

2209. phiques

faites dans

Etablissement

Par

« Mémoire formé

T I T R E

Français

sur

§§ 2209-2210

LECTURE

en

DU

1837.

les nouvelles

la Guyane

découvertes

Française,

à l'île de Mapa.

B R É S I L

et sur

Accompagné

le

nouvel

d'une

carte.

M. le B A R O N W A L C K E N A E R . » Daté du 10 mars 1837, et e

inséré dans le tome 3 , pages 5-17, des « Nouvelles des

géogra-

Voyages

et des Sciences

géographiques.

Annales

Paris, 1837.

»

In-8°. Page 6. «D'après le Traité d'Utrecht, la G u y a n e avait pour limite dans le S . E . la rivière de Vincent-Pinçon

con­

nue des naturels sous le n o m de Y a p o k . L'embouchure de cette rivière fut long-temps inconnue ; mais en 1784 [1782], le B A R O N D E B E S S N E R , gouverneur de C a y e n n e , voulant fixer nos limites conformément aux traités, envoya M. M E N T E L L E , ingénieur géographe, explorer le littoral du conti­ nent, depuis le cap N o r d jusqu'au cap d'Orange. O n reconnut, on fixa positivement le cours de la rivière de Vincent-Pinçon

»

Page 7. « La rivière de V i n c e n t - P i n ç o n est donc bien connue; c'est celle que les Brésiliens n o m m e n t aujour­ d'hui Carapapoury.

»

Page 17. « Dans un second Mémoire, je traiterai de la vieille G u y a n e , depuis l'Oyapok jusqu'au Maroni. » 2210.

Remarquons d'abord cette déclaration finale :

que la vieille G u y a n e Française, c'est-à-dire celle du Traité d'Utrecht, avait pour limite méridionale l ' O y a p o c . Et arrêtons-nous ensuite au premier aveu de M. le B A R O N

W A L C K E N A E R . TITRE

61


§

e

2211

17

LECTURE

( 219 )

Un illustre géographe de France, parent du gouver­ neur de la G u y a n e Française, avoue, bien explicite­ ment, quel ' e m b o u c h u r em ê m e du Carapapori, de la rivière prétendue par la France en vertu du Traité d'Utrecht, fut longtemps

INCONNUE.

Ce n'est pas une méprise du savant géographe. Dans la « Carte du Gouvernement

de Cayenne

» publiée

par F R O G E R en 1698 et en 1699, et faite à C a y e n n e m ê m e sur

les mémoires

du

M A R Q U I S D E F E R R O L L E S , c o m m e nous

l'avons vu au titre 22, la rivière la plus méridionale du littoral océanique de la G u y a n e était le M A Y A C A R É ;

et

cependant le M A R Q U I S D E F E R R O L L E S , c o m m e nous l'avons vu au titre 21, avait parcouru dans sa totalité le canal de Carapapori, entre l'île Maracá et le continent. Encore en 1732, c o m m e nous le verrons au § 2410, le Chevalier D E M I L H A U , le premier instigateur de la nouvelle interprétation du Traité d'Utrecht, déclarait que la pre­ mière rivière à l'Ouest du Cap N o r d continental était ce même

M A Y A C A R É .

Ce n'est qu'en février 1744 que les Français ont eu connaissance de l'embouchure du Carapapori; et cette découverte n'a été annoncée en France que le 28 avril 1745, dans la lecture de L A C O N D A M I N E à l'Académie Royale des Sciences,— 22 ans après le Traité d'Utrecht. (§ 2145). 2211.

Et il y a une excellente raison pour que l'em­

bouchure du Carapapori soit restée longtemps inconnue. C'est que le Carapapori (autrement l'Amanahi, Français ont fait la Manaye)

dont les

n'a d'embouchure dans la

mer que depuis Tannée 1728. Jusque-là c'était un A F F L U E N T de l ' A r a g u a r i ,

un cours d'eau intérieur.

Ce grand fait, si péremptoirement confirmatif de nos paragraphes 570 à 574, 1171 à 1208, est attesté par le père B E N T O D A F O N S E C A , le m ê m e du § 2151, dans un Routier des rivières de l'État du M a r a g n a n , existant à la Bibliothèque Publique d'Évora dans le manuscrit cxv-2-15, annoncé en TITRE

61


e

( 220 )

17

LECTURE

1850 par M . R I V A R A ,

§§ 2212-2213

page 27, et extrait en 1859

par

M. M E L L O M O R A E S , tome second, pages 216-218. 2212.

Mais, si l'embouchure m ê m e du Carapapori

est restée longtemps inconnue, inconnue en F r a n c e pendant 22 ans après le Traité d'Utrecht; si l'embouchure du Carapapori n'a c o m m e n c é d'exister que 15 ans après le Traité d'Utrecht : est-il permis de prétendre que la véri­ table limite d'Utrecht est le Carapapori? 2213.

Quelle

différence d'avec

le fleuve

du

Cap

d'Orange! Celui-ci était connu, parfaitement connu, depuis son embouchure jusqu'au delà de son premier saut, dès la fin e

du xvi siècle : Connu sous le n o m de Wiapoco, KEYMIS DE

par les relations de

et de H A R C O U R T , par les quatre éditions de J E A N

L A E T , et par différentes cartes du géographe français

NICOLAS SANSON : Connu sous le n o m d'Oyapoc,

par le livre français de

F R O G E R , et par le livre portugais de P I M E N T E L : Connu sous le n o m de Yapoco,

par les livres français

de D ' A V I T Y , de L A B A R R E , de T H O M A S C O R N E I L L E , et par une carte de l'illustre géographe français D E L I S L E : C o n n u sous le n o m

de Yapoque,

par la relation du

missionnaire français G R I L L E T , et par une carte du géo­ graphe français G U I L L A U M E S A N S O N .

TITRE

61


§§ 2214-2215

e

17

SOIXANTE-DEUXIÈME

Document

2214. des Guyanes

( 221 )

LECTURE

TITRE

Français

en

BRÉSIL

1856.

« Protocoles de la conférence Française

DU

et Brésilienne.

sur

la

délimitation

Rio de Janeiro,

Typographie Universelle de Laemmert, Rue des Invalides, 61 B. 1857. » In-4°, 175 pages. Bibliothèque de la Société de Géographie de Paris. Séance du 10 novembre 1855, page 84 : « M. le Pléni­ potentiaire de France dit : Si le fleuve choisi pour limite, à L i s b o n n e et à Utrecht, n'a pu être qu'un cours d'eau considérable ; qu'il soit impossible, non pas m ê m e

de

prouver mais d'admettre que ce soit l'Oyapoc du quatrième degré; il demeure évident que ce fleuve est l'Araouari, car tous les cours d'eau intermédiaires sont sans impor­ tance et n'offrent pas les conditions requises pour une frontière. » (§ 1233.) Séance du 27 mai 1856, page 169 : « Le Plénipotentiaire de France répète encore une fois que cette limite de l'Araouari, — la seule vraie vraie —

en droit,

en fait : sauf l'Araouari,

est encore la seule

de l'Amazone à l'Oyapoc,

on ne compte que des cours d'eau insuffisants pour

déterminer une limite acceptable. » (§ 1237.) 2215.

Le fait allégué par M. le B A R O N

DE

BUTENVAL

est incontestable. Et il était déjà bien connu, non-seulement des négo­ ciateurs du Traité d'Utrecht, mais encore des négociateurs du Traité fondamental de 1700. Car sur la carte publiée par F R O G E R en 1698 et en 1699, TITRE

62


§§

e

( 222 )

17 L E C T U R E

2216-2218

se trouvent inscrits, depuis l'Araguari jusqu'à l'Oyapoc, les mots « Pays

2216.

noyez

».

Mais ce fait n'admet pas l'interprétation qui lui

est donnée par l'honorable Plénipotentiaire de F r a n c e . Deux raisons s'y opposent. 2217.

Première

raison.

Pour pouvoir prétendre à l'Araguari, placé tout entier au Sud du Cap du Nord,

il faut que la F r a n c e , à l'exemple

de L A C O N D A M I N E , considère c o m m e une bouche septen­ trionale de l'Araguari le Carapapori.

(§§ 397-415, 1128,

1233.) Mais il demeure démontré que le Carapapori n'a jamais été une bouche de l'Araguari ; il demeure démontré que le Garapapori ne m è n e que dans la Manaye

(*).

(§§ 569-574, 1171-1208.) 2218.

Seconde

raison.

Rappelons-nous l'article 1

er

du Traité provisionnel du

4 mars 1700 (titre 25) : « Le Roy de Portugal fera euacuer et demolir les forts de A r a g u a r y et de C u m a u , autrement dit Macapa..., et en cas qu'il y ait d'autres forts dans l'estendüe des Terres, depuis lesdits forts jusques a la riuiere des A m a ­ z o n e s vers le G a p de N o r d , et le long de la coste de la m e r jusqu'a la riuiere d'Oyapoc dite de V i n c e n t Pinson, ils seront pareillement demolis

»

Rappelons-nous les articles 8 et 9 du Traité définitif d'Utrecht (titre 37) :

Article 8. « Sa Majesté T r e s - G h r é t i e n n e se desistera pour toûjours, c o m m e Elle se desiste dés à present par ce Traité,... de tous droits & prétentions qu'Elle peut ou pourra prétendre sur la propriété des terres, appellées du Cap-

(*) Amanahy o u Carapaporis, aujourd'hui Tartaruyal source jusqu'à la région des lacs. TITRE

62

depuis sa


§§ 2219-2222

e

17 LECTURE

( 223 )

d u Nord, & situées entre la riviere des A m a z o n e s , & celle de Japoc ou de Vincent Pinson

»

Article 9. « E n consequence de l'Article précédent, Sa Majesté Portugaise pourra faire rebâtir les Forts d'Arguari & de C a m a u , ou M a s s a p a , Aussi-bien que tous les autres qui ont été demolis, en execution du Traité provisionel fait à L i s b o n n e le 4. Mars 1700.... » 2219. Or, le fort D'ARAGUARI, celui dont il est question dans les Traités de 1700 et de 1713, était situé sur la pointe OCCIDENTALE de l'embouchure

d'un affluent du bord

GAUCHE

de la rivière D'ARAGUARI.

Le fait est attesté par le témoignage oculaire de FERROLLES lui-même, c o m m e le prouve le titre 21. 2220. D'après la direction du voyage de FERROLLES, cet affluent septentrional del'Araguarine peut être que l'une de ces deux criques : — ou celle qui autrefois portait à l'Araguari les eaux du lac Maproenne, et qui, obstruée depuis longtemps, n'est plus connue que sous le n o m de RIO T A P A D O , rivière bouchée : — ou celle qui, encore de nos jours, porte à l'Araguari les eaux du lac Onçapoyenne.

2221. Quand bien m ê m e ce fût le R i o T A P A D O , tou­ jours serait-il incontestable que le fort brésilien bâti sur la pointe occidentale de son embouchure, était situé hors des TERRES DU CAP D U N O R D proprement

de la prétendue

dites, et

au-delà

BRANCHE NORD D E L'ARAGUARI.

2222. Mais FERROLLES ajoute que l'affluent de l'Ara­ guari auquel il parvint, sur ses pirogues, de la rivière M A Y A C A R É , s'appelait B A T A B O U T O . Or, clans la carte construite par FROGER en 1697, sur les mémoires de F E R R O L L E S lui-même, c o m m e le prouve le titre 22, le n o m de Batabouto est appliqué à un affluent septentrional de l'Araguari dont la source est attenante à celle de la rivière Mayacaré. Cette indication montre suffisamment que le TITRE 62

Bata-


e

( 224 )

17

LECTURE

§ 2223

était la crique actuelle du lac Onçapoyenne

bouto

;

car

cette crique est la seule qui puisse être regardée c o m m e un prolongement de la rivière

Mayacaré.

Consultons la carte de M . D E S A I N T - Q U A N T I N ,

et nous

y verrons que, pour établir complétement une navigation intérieure entre la rivière Mayacaré du lac Onçapoyenne,

et la crique actuelle

il m a n q u e uniquement une autre

crique entre ce m ê m e lac et la rivière Eh

Manaye.

bien, cette crique septentrionale du lac O n ç a ­

p o y e n n e existait encore vers l'année 1761. C'est u n

fait attesté par l'officier brésilien

JOAQUIM D E ABREU,

MANOEL

dans le journal de son exploration de

1791, publié par l'Institut Historique et Géographique du Brésil dans le tome second de 1848 de sa Revista, collec­ tion précieuse, existant à Paris, Bibliothèque Impériale, département des cartes. Et, pour comble de précision, A B R E U

déclare encore,

que la crique méridionale du lac Onçapoyenne appelé Lago

d'El Rei, et par L E B L O N D Lago

chez les pratiques le n o m de Crique

(par lui Real) portait

M A Y A C A R É .

M A Y A C A R É !

Cela ne veut-il pas dire, avec toute clarté, crique faisant communiquer l'Araguari avec la rivière B A T A B O U T O

M A Y A C A R É ?

était donc, avec toute certitude, la crique

méridionale, la crique actuelle du lac

Onçapoyenne.

2223. Or, sur la grande carte de M. D E S A I N T - Q U A N T I N , publiée dans la Revue Coloniale en août 1858, — la crique du lac O n ç a p o y e n n e , le B A T A B O U T O de F E R R O L L E S , est neuf

minutes

à

l'ouest de

la prétendue

branche

Nord

de

l'Araguari.

Et cette distance est m ê m e de cinq lieues marines 2 0 au degré) dans la « Carte spéciale de

l'Araguary

publiée en 1814 par L E B L O N D dans sa « Description Guyane

(de » de la

», existant au Département des Cartes de la BiblioTITRE 62


e

§ 2225

17

LECTURE

( 225 )

thèque Impériale de Paris, et au Dépôt Général de la Marine et des Colonies. 2224.

Le fort del ' A r a g u a r i ,laissé au Brésil par le

Traité d'Utrecht, était donc situé sur la rive gauche

du

tronc del ' A r a g u a r i ,beaucoup au-dessus de la prétendue bifurcation de cette rivière. Toute

la rive gauche

était donc

du tronc de l'Araguari

comprise dans les terres du Cap

du

laissées provi­

Nord

soirement neutres en 1700 et définitivement adjugées au Brésil en 1713. L ' A R A G U A R I de

n'était donc

pas

la limite

septentrionale

ces terres.

2225.

Mais,

Puisque, de l'aveu de M. le B A R O N

D E B U T E N V A L , la

rivière choisie pour limite à L i s b o n n e et à Utrecht doit être forcément ou l ' A R A G U A R I OU L ' O Y A P O C ; Puisqu'il est impossible « non pas m ê m e de prouver mais d'admettre que ce soit » l ' A R A G U A R I : Il demeure évident que cette rivière est l ' O Y A P O C , est la rivière du C A P

T . ii

D ' O R A N G E .

TITRE.

62


e

( 226 )

17 L E C T U R E

SOIXANTE-TROISIÈME

Document

2226.

§§ 2226-2227

TITRE

Français

en

DU

BRÉSIL

1857.

G o m m e toute force de Dieu, la vérité est in­

coercible. U n grand exemple nous en est offert par l'honorable auteur de la chaleureuse protestation publiée en dans le Bulletin de la Société de Géographie

1834

(§ 963),

de Paris

par l'honorable auteur du savant rapport imprimé dans le m ê m e Bulletin en 1857, et tiré à part sous ce titre : « Considérations Examen

critique

récemment Adolphe

publiée de

Espagne; dans M.

nouvelle

ses séances

D'AVEZAC,

1

er

Berlin

et Africaine

de

Paris,

Orientale,

par

d'Affaires

15 mai

M.

du

Géographiques

et Bombay

François-

Londres,

de 1857,

par

sa

Com-

et de de

et

; des Sociétés New-York;

et d'Espagne

en Paris

Londres,

; des Sociétés Asiatique,

de Londres

d'Angleterre

Brésil

Brésil

et 5 juin

de cette Société

des Sociétés

Égyptienne,

Archéologiques

mai,

vice-président

Francfort,

giques

à Madrid

Chargé

Brésil.

du

fait à la Société de Géographie

des

Centrale,

sur l'Histoire du Histoire générale

en portugais

Varnhagen, rapport

mission

géographiques

d'une

des ; de la

Syro-

EthnoloSociétés Société

etc., etc., etc. Paris, Imprimerie de L. Mar­

tinet, R u e Mignon, 2. 1857. » —

In-8°, 271 pages et

2 cartes. 2227. Bulletin,

Voici ce qu'on lit dans ce travail, page 229 du 141 du tirage à part :

« Ce coup d'œil, tout rapide et superficiel qu'il est, sur l'assiette et les déplacements de la nomenclature géographique des abords de l'Amazone,

permet d'ap­

précier à leur juste valeur les titres des Portugais à TITRE

65


e

§ 2228

17 L E C T U R E

s'arroger, c o m m e

( 227 )

ils le prétendirent pour la première

fois en 1686, le droit de s'avancer jusqu'aux bords de l'Oyapoc actuel. « Le coup était hardi ; mais la longanimité française au sujet de M a r a g n a n autorisait ces audacieuses tenta­ tives. Cependant il y eut cette fois, dans la résistance du gouverneur français de la G u y a n e , le M A R Q U I S

D E FER-

R O L L E , autant de fermeté que dans l'aggression portugaise, et après des discussions vivement soutenues, les forts portugais de la rive gauche de l'Amazone furent démo­ lis; mais la question de délimitation demeura réservée par un Traité provisionnel du 4 mars 1700. » 2228. l'année

L'honorable rapporteur déclare donc, que, dès 1686, tandis que les Français se prétendaient

maîtres de la rive gauche de l'Amazone, les Portugais prétendirent s'avancer jusqu'aux

bords de l'Oyapoc

et que cette question de délimitation demeura le Traité provisionnel

de

ACTUEL;

réservée

par

1700.

Voilà, certes, la plus explicite condamnation de ces paroles de M. D E S A I N T - Q U A N T I N , Coloniale

page 348 de la Revue

: « Les Portugais élevèrent pour la première

fois en 1724 la prétention de s'avancer jusqu'à l'Oyapock. » Dans la nature, il n'y a jamais eu qu'un seul O y a p o c , —

celui du G a p d'Orange. Dans certaines imaginations, il y en a eu plusieurs. Mais tous se sont évaporés, à l'exception de celui du

Gap d'Orange. C'est donc au fleuve du Gap d'Orange que l'hono­ rable rapporteur applique l'expression d ' O y a p o c A C T U E L . Il n'y a pas à tergiverser ; l'honorable rapporteur a eu soin de se commenter lui-même en ces termes, page 220 du Bulletin, 132 du tirage à part : « L'Oyapoc à l'Ouest

ACTUEL,

l'Oyapoc

vulgaire, débouchant

du cap que les Anglais avaient appelé cap TITRE

63


e

( 228 )

17

LECTURE

§ 2229

Cécil, et les Français cap de L u ç o n et cap de C o n d é , avant que les Hollandais lui donnassent le n o m de C A P D'ORANGE

qui lui est exclusivement resté. »

C'est donc jusqu'au fleuve du C A P

D ' O R A N G E

que

l'honorable rapporteur reconnaît que les Portugais pré­ tendirent s'avancer dès l'année 1686. C'est donc le fleuve du C A P D ' O R A N G E

que l'honorable

rapporteur reconnaît pour limite septentrionale des terres dont le droit de propriété demeura réservé par le Traité provisionnel de 1700. Mais, c o m m e le déclare de son côté M. le B A R O N

D E

B U T E N V A L , la question réservée par le Traité provisionnel de 1700 a été résolue en faveur du Brésil par le Traité d'Utrecht (§§ 2060-2062). Donc, de l'aveu du docte rapporteur, le fleuve stipulé à Utrecht pour limite définitive de la G u y a n e çaise et du Brésil, sous le double n o m Vincent

2229.

Pinson,

c'est le fleuve du C A P

de Japoc

et

D ' O R A N G E .

U n tel aveu, émis devant la Société de Géo­

graphie de Paris par u n de

ses m e m b r e s français les

plus éminents, et publié dans le Bulletin pectable

Fran­

Société

immédiatement

après

de cette res­ la

conférence

diplomatique tenue à Paris en 1855 et 1856, aurait tou­ jours, par cela seul, u n e très grande importance. Mais dans la bouche de sement

engagé

M. D ' A V E Z A C ,

chaleureu­

dans la question de l'Oyapoc

depuis

vingt-trois ans, ayant à sa libre disposition les archives du

Ministère de

la Marine et des Colonies, et faisant

ex-professo u n travail antibrésilien, où

le savoir et la

sagacité se disputent le pas, l'aveu de 1857 acquiert aux yeux de tout le m o n d e une importance incomparable, et devient pour le Brésil le titre le plus précieux.

TITRE

63


§ 2230

17

2230.

e

LECTURE

( 229 )

Contre cette masse de documents exhibés par

le Brésil, est-il présumable que puissent quelque chose les objections présentées par la France depuis le Cheva­ lier D E

M I L H A U jusqu'à M. D ' A V E Z A C ?

Plusieurs de ces objections n'existent plus. Voyons les autres.

TITRE

65


17

( 230 )

e

§§ 2231-2233

LECTURE

DIX - H U I T I È M E L E C T U R E

Étymologie de J A P O C . §§ 1084, 1088, 1094, 1233, 1749, 1812-1815.

2231.

E n dépit de M . D E M O N T R A V E L , de M. L E S E R R E C ,

de M . D E B U T E N V A L ,

et de M. D ' A V E Z A C , l'étymologie sanc­

tionne pleinement le fait si souvent rappelé dans ces lectures, — Yapoc,

qu'avant le Traité d'Utrecht le m o t

Oyapoc,

Japoc,

n'avait jamais été appliqué à aucune

autre rivière que celle du C a p d'Orange. 2232. Revue est un

M. D E M O N T R A V E L

Coloniale nom

d'août

a dit le premier, dans la

1847 : « Le m o t indien

Japock

générique donné par les i n d i e n s à toute

rivière. »

Mais l'honorable

M. D E M O N T R A V E L

s'est borné

à

émettre son opinion, sans songer à la justifier. 2233.

Beaucoup

chef, M. L E S E R R E C

plus entreprenant que son

ancien

a soutenu devant la Société de Géo-


e

§ 2233

19

LECTURE

( 231 )

graphie de Paris, le 3 septembre de la m ê m e année 1847, que le mot

est proprement le n o m indigène de l'Amazone, en excluant du grand fleuve la branche du Para, qui serait elle seule l'ancien Marañon. Oyapoc

Voici la doctrine de M. L E S E R R E C , pages 26-28 de son travail semi-occulte : « Je veux prouver qu'effectivement la rivière de V. Pinson est la m ê m e que celle d'Oyapoc, que c'est l'Amazone actuel qui avait ce n o m chez les naturels et que PINSON n'a réellement fait qu'ajouter le sien à celui qu'il avait trouvé ; je n'ai besoin pour cela que d'avoir recours à la langue indienne.... Elle m'apprend que le mot Oyapoc, ou mieux (en le portugaisant) 0 Yapoc, est le n o m indien ygapocu, précédé de l'article indicatif por­ tugais 0, le, et très peu modifié par le tems et le passage d'une langue à l'autre. Ce mot indien veut dire grande crue d'eau, inondation (une crue ordinaire se dit igapó, et il n'y a de différence que par l'augmentatif oçu, qui perd sa première lettre par élision en s'ajoutant aux mots qui se terminent par une voyelle), de sorte que la phrase portugaise O rio do ygapoçu signifie La rivière de la grande

crue.

« Il est difficile de désigner plus clairement l'Ama­ zone ; car l'on sait que ce fleuve est soumis c o m m e le Nil aux crues périodiques et elles y sont tellement consi­ dérables que les eaux s'élèvent à 6 ou 7 mètres au-dessus de leur niveau ordinaire et submergent pendant les trois mois principaux d'hivernage toutes les îles du fleuve et les terres des bords jusqu'à dix, quinze et quelquefois trente lieues de distance de son lit; tandis que tout le m o n d e sait aussi que la rivière connue aujourd'hui sous le n o m d'Oyapoc, do Yapoc

(en français, du

Yapoc)

ne

court que quelques lieues en dedans de son embouchure avant de rencontrer le barrage d'une grande cataracte; et il est impossible que ce bout de rivière, d'ailleurs


e

( 232 )

19

LECTURE

§§ 2234-2236

extrêmement évasé, ait jamais montré les grandes crues qui auraient pu lui mériter une qualification spéciale à côté d'un i m m e n s e fleuve si fortement caractérisé par ce phénomène. « Si l'on recherche c o m m e n t le n o m du Y a p o c a été donné injustement à cette petite rivière, on trouve que c'est par l'erreur du géographe hollandais L A Ë T I U S qui, plaçant le cap N o r d au G a p d ' O r a n g e , nommait V. son

ou Yapoc

la rivière qui

Pin-

se trouvait dans l'Ouest.

E n succédant aux Hollandais dans la possession du pays, nous lui avons conservé son dernier n o m , bien que les indigènes le connaissent sous un autre. » 2234.

Mais la doctrine de M . L E S E R R E C a contre elle

trois objections insurmontables.

1° Le mot tion du

n'a rien de portugais. La déclara­

Oyapoc

c o m m a n d a n t du fort d'Araguari, en 1688, le

prouve bien : car il a dit à F E R R O L L E S : « La rivière du Gap

d'Orange,

appelée par

V i n c e n t P i n ç o n , et par ture

les Portugais

les Français

Rivière

de

O y a p o c . » (Lec-

17, titre 21.)

2° Le n o m

d'Oyapoc

n'a paru dans l'Amazone, et

encore appliqué à une île, qu'en 1598

il avait été appliqué

Wiapoco,

1694, tandis que dès

par K E Y M I S ,

SOUS

la

forme

à la rivière d u C a p d ' O r a n g e .

3° Indépendamment

de

la suppression du

g, c'est

heurter toutes les règles étymologiques que de vouloir tirer O y a p o c de Y g a p o ç u . Car la cédille fait du c u n double s, et jamais u n double s ne s'est converti en k. 2235.

Aussi l'opinion de M . L E S E R R E C a-t-elle le mal­

heur d'être restée solitaire. 2236.

M . le B A R O N

D E B U T E N V A L , dans les séances IV,

VII et XI, a donné du relief à l'idée de M . D E M O N T R A V E L . Il reconnaît que Japoc forme de Yapoc

ou

Oyapoc

du Traité d'Utrecht est une ;

mais il regarde c o m m e chose


§§ 2237-2240

e

18

LECTURE

( 233 )

notoire que ce mot a la signification générique de cours

grand

d'eau.

Et, prêtant à l'article 1 D I T E de Vincent

d'Oyapoc

ER

du Traité de 1700 (rivière

Pinson)

l'article 4 (rivière d'Oyapoc

un sens désavoué par

ou Vincent

Pinson),

l'hono­

rable Plénipotentiaire de France qualifie le Carapapori du n o m d'Oyapoc

D EV I N C E N T

PINSON,

et il désigne la

rivière du Cap d'Orange, l'unique O y a p o c , par les déno­ minations d'Oyapoc N O T R E

D U C A P D'ORANGE, G R A N D

Oyapoc,

Oyapoc.

2237.

Mais M. D E B U T E N V A L , pas plus que M. D E M O N -

T R A V E L , ne s'est engagé sur ce point dans aucune discus­ sion. 2238.

Convenant, avec M. D E B U T E N V A L , que

n'est autre chose que Yapoc

ou Ogapoc,

Japoc

M. D ' A V E Z A C est

le seul qui ait essayé une démonstration de la signification générique de ce mot. Et le docte critique s'est acquitté de sa tâche avec tant d'habileté, que ses conclusions ont été admises c o m m e article de foi par M. A L E X A N D R E

B O N N E A U , dans la Presse

du 29 juin 1859. 2239.

Voici les conclusions de M. D ' A V E Z A C , page 216

du Bulletin, 128 du tirage à part : « Le n o m de Y a p o c , où se reconnaissent aisément des racines brésiliennes très usuelles, offre en soi une dési­ gnation significative qui a dû en motiver l'application en plus d'un endroit de ces parages, où abondent les terres noyées. » 2240.

Et voici l'argumentation de l'habile écrivain,

note D D : « O n ne fera nulle difficulté, sans doute, de reconnaître en chacun des deux types Yapoc ments formatifs, Ya-poc

et Oyapoc,

deux élé­

pour le premier, Oya-poc

pour

le

second ; et c o m m e l'élémentfinalpoc est le m ê m e dans les


( 234 )

e

18

LECTURE

§ 2240

deux cas, il semble que nous n'ayons à étudier ici, en définitive, que trois éléments formatifs, ya, oya, poc. « C o m m e n ç o n s notre e x a m e n par ce dernier, qui se représente plus fréquemment, à ce qu'il semble, dans la nomenclature géographique de la m ê m e région, où nous pouvons relever en effet successivement, en allant du Nord au Sud, les n o m s de W i n i p o c o ; I w a r i p o c o , W a ripoco, ou W a r i p o g o ; A r r a p o c o , A r a p o c o , Aripoco, ou A r a p e c ú ; S a p e n o p o k o ou S a p a n a p o c k ; Callepoca ou Callepoke ; M a l l e p o c o , M a l l e p o c a , ou M a l a p e c ú ; A n a u r a p u c ú ou A n a r e a p o c k . « Nous pourrons m ê m e , en allant beaucoup plus loin dans le Sud, rattacher à notre liste les n o m s plus connus de Pernambuco...., et P a r a n a p u c ú ou

Paranapicú,

ancienne dénomination de l'île actuelle do

Governador

dans la baie de Rio d e Janeiro. « Ces deux n o m s , dont la décomposition naturelle nous offre u n vocable initial (paraná,

la mer) parfaitement déter­

miné, doivent faciliter notre recherche étymologique « Pucú

figure dans le Tesoro de la lengua

Guarani

du

P. Ruiz (folio 323) avec la signification de largo, qui im­ plique la double acception de longueur dans l'espace et dans le temps ; et nous le retrouvons sous la forme dans le Diccionario

portuguez

e brasiliano

pecú

a n o n y m e , avec

l'une et l'autre signification, de m ê m e que sous la forme ipucú

dans le Vocabulario

do Alto-Amazonas,

de M . D I A S ,

également dans les deux sens.... « Le P. F R A N C I S C O D O S P R A Z E R E S

MARANHÃO,

dans son

recueil d'étymologies brésiliennes, ne trouve rien de mieux que d'expliquer P e r n a m b u c o par Paraná-búca,

bouche

de mer, en confessant qu'il prend ainsi pour naturalisé parmi les sauvages le m o t portugais bóca. « Mais peut-être cette étymologie hétéroclite nous metelle sur la voie de l'explication véritable, en nous indiquant u n sens pour lequel les vocabulaires brésiliens peuvent ne


e

§ 2240

18 L E C T U R E

( 235 ).

pas être absolument muets. En fouillant le Tesoro

Guarani

du P. Ruiz, nous y découvrons en effet (au folio 266 verso) le mot p a c á avec la signification d'abertura, ouverture ; le Diccionario

anonyme, laborieusement compulsé, ne répond

pas, il est vrai, à nos interrogations multipliées ; mais le Vocabulario

de M. D I A S nous procure

do Alto-Amazonas

sans effort la satisfaction la plus complète en nous offrant, en regard du mot portugais furo, ouverture, le mot brési­ lien ipóca, l'une des formes du radical póca, c o m m e il nous avait donné, au mot comprido,

long, la forme ipucú du

radical p u c ú ; et nous arrivons ainsi à l'étymologie régu­ lière Paraná-me-Póca Parnarnpóca

se contractant naturellement en

ou Pernampóco,

ment en portugais par Furo

et se traduisant littérale­ ou Boca

do

Mar.

« Nous voici donc en possession, pour l'explication de l'élément terminal poc, si fréquent au voisinage des bouches de l'Amazone, de deux radicaux distincts, l'un adjectif, pucú,

dans la double acception de long, étendu, et de lent ;

l'autre, substantif, póca,

avec la signification directe d'ou­

verture, d'entrée de la mer dans les terres, ainsi que les Portugais la donnent sur tant de points, en ces m ê m e s parages, à leurs Furos,

si analogues pour le sens et pour

l'application aux Trous

de nos anciens colons de Saint-

Domingue. « Nous pouvons dès à présent, c o m m e vérification immédiate

de

la convenance de

ce dernier vocable,

remarquer précisément au Sud de l'Araouri un autre bras de ce fleuve, visité à plusieurs reprises en 1836 par l'amiral P E N A U D alors lieutenant de vaisseau, et qui a été cité dans des conférences récentes, sous le n o m de Furo guari

de l ' A r a -

: il semble difficile d'y méconnaître l ' A r r a p o c o de

R O B E R T H A R C O U R T , Arapoco

de l'anonyme anglais publié à

la suite, A r a p e c ú de certaines cartes brésiliennes, où il est inscrit précisément c o m m e désignation de ce m ê m e

Furo...

« Passons à l'examen des deux autres éléments for-


e

( 236 )

18

L E C T U R E

§ 2241

matifs des n o m s Y a p o c et O y a p o c . Disons-le tout de suite, ils appartiennent sous deux formes distinctes.... à une seule et m ê m e racine brésilienne signifiant eau. « L'émission orale du m o t radical indigène présente à des oreilles européennes une articulation difficile à ex­ primer avec les ressources ordinaires de notre alphabet, ce qui a causé beaucoup d'embarras et de diversité dans l'or­ thographe adoptée par les grammairiens et les lexico­ graphes.... Le P. Ruiz l'écrit , le dictionnaire a n o n y m e yg, M. D I A Se'.

« Cela posé, ouvrons le Tesoro du P. Ruiz au folio 163 pour y lire son article « , agua, rio », jusqu'au folio 164 verso ;... après quoi nous irons trouver au folio 173 le mot « gá, empapado », accompagné de « o gá » qui en est la forme dite réciproque. « Et maintenant, que l'on rapproche et que l'on c o m ­ pare ces divers termes gá, o gá, d'une part, et de l'autre pecú

et póca,

et l'on aura toute u n e famille de n o m s appel-

latifs nous représentant des terres noyées étendues, des furos ouverts dans des terres noyées. » 2241.

Mais

méfier de

l'honorable M . D ' A V E Z A C est le premier à se

son explication du mot Yapoc,

comme

nom

générique. Car, après avoir soigneusement élevé la construction que nous venons de voir, il déclare, dans les passages sui­ vants, que l'élément

Ya peut provenir de deux autres

sources, qui feraient de Y a p o c , non pas u n n o m géné­ rique, mais le n o m propre de deux différents cours d'eau : « Remarquons, au folio 165 du Tesoro

du P. Ruiz, le

m o t « a, calabaço » ; et nous aurons sous la forme exacte apóca lebasse

une traduction litterale du n o m de cette crique

Ca-

que nous voyons s'ouvrir à l'Ouest de l'île Maracá(*),

(*) Crique Calebasse est u n n o m m o d e r n e , d o n n é par des Fran­ çais au canal do I n f e r n o , dans l'île de M a r a c à .


§§

e

2242-2243

18

LECTURE

( 237 )

justement dans le canal ou baie où L A C O N D A M I N E recon­ naissait la rivière désignée dans le Traité d'Utrecht sous la double appellation de Japoc et de Vincent Pinçon. « Mais ce n'est pas tout : il y a encore un élément onomastique dont nous avons à tenir compte ; c'est le n o m national des Jaos

transmigrés des bords de l'Orénoque

à ceux de l'Amazone, et domiciliés précisément sur notre O y a p o c , qui pourrait bien, à la différence de la crique Calebasse du cap Nord, des terres noyées de M a r a y ó , et de leurs furos, avoir tiré du cantonnement de ce peuple sur ses rives, l'origine d'une dénomination ayant une signification tout autre en dépit de l'homophonie. » Et non content de cela, M. D ' A V E Z A C soupçonne encore u n troisième m o y e n de faire de Y a p o c ou O y a p o c , non pas u n n o m générique, mais un n o m propre. Car il ajoute : « Peut-être aurions-nous m ê m e encore à examiner si le toucan (Aviapoco dans H U M B O L D T ,

Régions

Equinoxiales,

tome VIII, p. 38) n'aurait pas donné son n o m à quelqu'un de tous ces O y a p o c , c o m m e le héron a donné le sien au cap Maguari.

2242.

»

M. D ' A V E Z A C a eu raison de sentir l'insuffisance

de la première de ses quatre explications du mot

Yapoc.

C o m m e que l'on écrive le radical indien signifiant —

que ce soit yg, ou i, ou e, —

eau,

les dérivés de ce radical

renfermeront toujours la gutturale g. On dira toujours, par exemple, ygàra, ou igdra, ou egára; M. D ' A V E Z A C d'après M O N T O Y A , rapporte à Pour que le n o m

qui nous occupe eût pour premier

élément la racine indienne signifiant eau, que ce n o m fût,

lui-même,

les formes gá et o gá.

non pas Yapoc,

mais

il faudrait donc Ygapoc.

Or cela n'est point, et n'a jamais été. 2243.

La juxta-position des racines a et póca favori­

serait merveilleusement l'interprétation française du Traité


e

( 238 )

18

LECTURE

§ 2243

d'Utrecht; on recomposerait ainsi de toutes pièces le n o m indien de la Crique

tout près du pré­

Calebasse,

tendu V i n c e n t P i n ç o n d u G a p N o r d . Mais cette facile étymologie n'est pas plus soutenable que la première. 1°. Parce que le m o t indien Iapóca,

ni rien qui lui res­

semble, n'a jamais été attribué à la crique de M a r a c ó par personne que M. D ' A V E Z A C , en 1857. Cette ingénieuse application d u n o m indien prêterait u n solide appui au J a p o c de 1834. Mais il faudrait qu'elle fût moins moderne. 2°. Parce que la dénomination européenne de

Crique

est postérieure, et de plusieurs années, au

Calebasse

Traité d'Utrecht. Avant le Traité d'Utrecht, on ne trouve cette dénomi­ nation nulle part. 3°. Parce que, bien que

a

signifie calebasse, la m ê m e

signification appartient également à maracá, n o m de l'île où existe la Crique

qui est le

Calebasse.

Le dictionnaire galibi, publié en 1763 par D E L A S A L L E , porte à la page 102 ce petit article : « M A R A K A . Calebasse. » Et dans le « Vocabulaire Français et Galibi » joint au publié

en 1797 par Louis

Voyage

à la Guiane

H O M M E ,

on lit également : « Calebasse, peinte

leurs. Maraca. Crique de

PRUD-

de diverses

cou-

» Calebasse

signifie donc simplement

Crique

Maracá.

4°. Parce que le m o t brésilien ayant la signification d u mot portugais furo et d u français percée, n'est point ou ipóca, mais púg, ou púe, altéré en púca Il est bien vrai que le Vocabulario actualmente

fallada

no Alto-Amazonas,

ou da

póca

ipúca. lingua

geral

offert par M . D I A S à

l'Institut Historique et Géographique d u Brésil, et publié dans la Revista de 1854, donne positivement, en regard d u m o t portugais Furo,

le m o t

Ipóca.


e

§§ 2244-2245

18

LECTURE

( 239 )

Mais je dois à l'amitié de M. Dias lui-même la posses­ sion du manuscrit indien-portugais qui a servi à la publi­ cation du vocabulaire portugais-indien de 1854. Le mot portugais qui se trouve dans ce manuscrit en regard du mot Ipéca, ce n'est point Furo, mais Foro, bien nettement marqué. Or, tout c o m m e Foro était un déchiffrement inexact de Furo,

de m ê m e Ipóca

est-il un déchiffrement inexact de

Ipúca.

2244.

Póg ou Póc est bien aussi une racine indienne.

Le dictionnaire anonyme portugais-brésilien, et le diction­ naire de la langue tupi, donné par M. D I A S en 1858, nous l'offrent avec la signification portugaise de estalar,

arrebentar,

c'est-à-dire crever, éclater.

Mais le P. Ruiz D E M O N T O Y A nous fournit des éléments pour conclure que cette racine, caractérisée par le son ouvert de o, exprime spécialement le bruit que fait la chose qui éclate. Car il dit, au folio 312 verso de son Tesoro,

« Pog Estallido », c'est-à-dire bruit éclatant ; et au

folio 311 verso « P O C A . Arcabuz

», c'est-à-dire fusil, l'arme

au bruit éclatant. Et celte nuance distinctive de la racine póc est confir­ m é e par deux mots indiens introduits, c o m m e tant d'au­ tres, dans la langue portugaise du Brésil : Le substantif popóca

ou pipóca, d'usage universel chez

tous les Brésiliens, c o m m e n o m d'une certaine prépara­ tion sèche du maïs, où ce grain éclate en pétillant ; Le verbe espocar, général à M a r a g n a n , d'après le témoignage de deux illustres enfants de cette province, M. O D O R I C O M E N D E S et M. D I A S , et déjà honoré par M. D I A S du titre de noblesse, dans ce vers de son poëme Os Tymbiras

:

« Arrã soprada, que u m menino espoca. »

2245.

La racine indienne signifiant en portugais furar


e

( 240 )

18

LECTURE

§ 2245

et furo, en français percer et percée, sans l'idée accessoire de brait, c'est púg ou púc, bien adapté à cette fin par le son sourd de l'u portugais (ou français). Cette racine vient dans le Tesoro de M O N T O Y A , folio 323, avec la traduction de rebentar,

c'est-à-dire crever. Mais

deux exemples que M O N T O Y A ajoute font bien voir que le sens distinctif de púg

est réellement celui de percer

:

« A M O M B U P U G , agujerear de parte a parte », c'est à-dire perforer de part

en part ; A M O M B Ú G

cuñâ, deflorare virginem. »

La baie de Rio de Janeiro, si riche en merveilles, présente u n magnifique m o n u m e n t de la véritable accep­ tion du radical púg ou púc. C'est, dans l'anse enchanteresse de Jurujuba, entre les plages de Carahi et Frechas, un tunnel naturel, un rocher percé de part en part par la nature, et connu clans le pays sous le n o m indien de Itapúca,

c'est-à-dire en por­

tugais pedra

percée.

furada,

en français pierre

Et le m o t Pernambúco Déjà G A B R I E L S O A R E S

n'a point d'autre origine. a dit en 1587, après un sejour

de dix-sept ans à B a h i a : « Pernambuco. pela lingua do gentio, Mar

furado.

» «

veut dire, dans la langue des sauvages, Mer

..

quer dizer

Pernambuco... percée.

»

Et P I S O N a répété en 1658, après un long séjour à Per­ n a m b u c o m ê m e : « Paranambuco, foratum. » « Paranambuco,

hoc est, mare per-

c'est-à-dire, M e r percée. »

Le b empêche de reconnaître l'étymologie de P e r n a m ­ b u c o aussi distinctement que celle d'Itapuca. Mais c'est que, dans les mots tupis composés, si le pre­ mier élémentfinitpar une voyelle nasale, le p initial du second élément s'adoucit en mb.

Le Tesoro

de

M O N T O Y A

contient u n grand n o m b r e d'exemples de cette règle, et justement à l'article púg pour

le m o t déjà cité, de

amõ-mbúg

amõ-púg.

Le premier élément de P e r n a m b u c o étant paranã, second élément a dû se convertir en mbúc.

le


e

§ 2246 2246.

18 L E C T U R E M. D ' A V E Z A C

( 241 )

voit dans Arrapoco

ou

Arapoco

de R O B E R T H A R C O U R T une preuve décisive du sens portugais de furo attaché à la racine póca ; attendu que dans « cer­ taines cartes brésiliennes » le d ' A r a p o c o , est Furo

mot

Arapecú,

forme

inscrit précisément c o m m e désignation du

de l ' A r a g u a r i .

Mais, d'après la citation faite par M. D ' A V E Z A C lui-même, au bas de la page, ces cartes brésiliennes se réduisent à une seule, qui est la « Carta topographica das provincias do Grão P a r á e Rio N e g r o », —

bien moderne assurément,

puisqu'elle est postérieure à la translation du trône portu­ gais au Brésil, c o m m e l'atteste, dans son titre, le n o m de provincias

au lieu de

capitanias.

Et D E L A E T en 1633 et 1640, L A B A R R E en 1666, enten­ daient par Arrepoco

la grosse pointe de l'Araguari, et

l'île Bailique en face de cette pointe. Et D ' A N V I L L E

en 1748, B E L L I N

en 1763, O L M E D I L L A

en 1775, faisaient de l ' A r a p u c ú une rivière guyanaise dé­ bouchant en face de l'île Caviana, sans aucune c o m m u ­ nication avec l'Araguari. Or l'île Bailique et la grosse pointe de l'Araguari forment l'extrémité septentrionale de la branche occiden­ tale du delta de l'Amazone : l'île Caviana et le continent opposé, forment l'extrémité méridionale de la partie infé­ rieure de cette branche : et c'est dans l'espace intermé­ diaire que débouche le Furo

de l ' A r a g u a r i .

Ces coïncidences font soupçonner que l ' A r a p o c o de HARCOURT

n'est autre chose que la branche occidentale

de l'Amazone, dans la partie comprise entre les îles Bai­ lique et Caviana. Et le texte de H A R C O U R T

donne à cette conjecture

toute la force de l'évidence. Car H A R C O U R T dit expressément, page 1270 du tome IV de P U R C H A S , publié à L o n d r e s en 1625 : « La branche T. II. 1 6


e

( 242 )

18 L E C T U R E

§§

2247-2250

occidentale de la rivière des A m a z o n e s . . . est appelée Arrapoco.

»

Et il répète deux fois, pages 1271 et 1282 : «

Arrapoco,

branche de l'Amazone. » 2247.

Le second élément de Yapoc

m e n t poco, c o m m e dans Arapóco.

était primitive­

M. D E S A I N T - Q U A N T I N

en

donne des preuves, dans sa liste des variantes orthogra­ phiques du n o m indigène du fleuve du C a p d'Orange. N o u s venons de voir qu'Arapóco se disait aussi Arapucú

et A r a p e c ú .

Et M. D ' A V E Z A C , dans sa liste des n o m s congénères de Y a p o c , en cite encore deux autres, finissant indifférem­ ment, d'une part en póco

ou póc, d'autre part en p u c ú ou

pecú. Or

pucú

est u n adjectif tupi, signifiant long, étendu.

Le

dictionnaire de M O N T O Y A en fait foi. A u lieu de pucú,

le tupi dit également pecu, —

faut pas confondre avec apecú,

est la véritable origine de P a r a n a p e c ú (lingua l'ancien n o m de l'île do

qu'il ne

qui signifie langue,

et qui

do

mar),

Governador.

Mais le pur tupi ne change jamais p u c ú en póco. Il faut donc qu'il existe u n dialecte particulier dans lequel l'adjectif long se dise

póco.

Quel peut-il être? 2248.

C'est l ' o y a m p i .

C'est l'idiome des indiens O y a m p i s , relégués mainte­ nant dans les hauts de l'Oyapoc et dans les hauts des affluents guyanais de l ' A m a z o n e , d'après le témoignage oculaire de M M . A D A M D E B A U Y E , L E P R I E U R et D E L A M O N DERIE.

2249.

MM. A D A M

cet idiome deux

D E B A U V E et L E P R I E U R ont donné de

vocabulaires, malheureusement

trop

courts, mais suffisants néanmoins pour faire voir que c'est u n dialecte du tupi, de la langue générale du Brésil. 2250.

Or, dans le vocabulaire oyampi de M. L E P R I E U R ,


e

§§ 2251-2255 inséré au

tome I

er

18 L E C T U R E

Bulletin

de la Société

( 243 )

de

Géographie

de

Paris,

de 1834, on lit, page 225, ces deux articles :

« Arbre. Iwira. » « Bois.

Ewirapoko.

»

Et dans le dictionnaire tupi de M. D I A S , on lit, parallè­ lement aux indications de M. L E P R I E U R : « Y B Y R A , voyez

Ymyra.

»

« Y M Y R Â O U I M Ý R A , arbre, du bois. » « Y M Y R Â P E C Ú , du bois long. » Le mot

ewirapóko,

ou plutôt

a donc été tra

iwirapóko,

duit par M. L E P R I E U R d'une manière incomplète. L'idée de Póko,

ou

bois

póco,

2251.

est contenue tout entière dans

ajoute à cette idée celle de

Les mots congénères de Yapoc

M. D ' A V E Z A C , —

longueur.

recueillis par

à savoir, A n a r e a p ó c , Arapóco, Calle-

póc, Iwaripóco, Mallepóco, Sapanapóc, —

iwira.

Winipóco,

appartiennent donc au dialecte oyampi, et montrent qu'à e

e

la fin du xvi siècle et au commencement du xvii , c'étaient les O y a m p i s qui habitaient les bords du bassin guyannais de l'Amazone. 2252. MM. A D A M

Aujourd'hui encore, d'après le témoignage de D E B A U V E et L E P R I E U R ,

deux rivières amazo­

niennes occupées par les O y a m p i s portent sur les lieux des n o m s en póco. Ce sont le

TopiPOCO,

P O C O , affluent du haut 2253.

Donc,

le second

affluent du haut Jari, et l'IniParu. élément

de

YAPOC,

Y A P Ó C O , est un adjectif O Y A M P I signifiant

primitivement

LONG.

2254.

Et le premier élément?

2255.

Il semblerait, au premier abord, conformément

à la troisième supposition de M. D ' A V E Z A C , que c'est le n o m national des Indiens Car L A B A R R E ,

Yaos.

l'ancien gouverneur de C a y e u n e ,


e

( 244 )

18 L E C T U R E

§§ 2256-2257

rapproche c o m m e il suit le n o m des Yaos Yapoco

du n o m

du

:

Page 35. « Il ne reste des Y a o s qu'une seule Habita­ tion de trente-cinq à quarante personnes sur la Riuiere d'Yapoco. » Et il avait dit,

à la page 16, que le Yapoco

m e r sous le Cap 2256.

se jette à la

d'Orange.

Mais, tout avantageuse qu'elle soit à l'interpré­

tation brésilienne du Traité d'Utrecht, cette séduisante étymologie ne saurait non plus subsister. La concordance de Yapoco ancienne ; car L A B A R R E

et Yaos

n'est pas assez

écrivait en 1665.

Rien de pareil ne se trouve ni chez K E Y M I S , LEIGH, 1596,

ni chez H A R C O U R T ,

ni chez

qui visitèrent l'Oyapoc

en

en 1604 et en 1608, et qui firent connaître les pre­

miers le n o m indien de cette rivière. KEYMIS LEIGH

dit bien

Iaos.

dit bien Iayos

H A R C O U R T dit bien

et

Yaioas.

Yaios.

Mais aucun d'eux n'indique la rivière du G a p d ' O r a n g e c o m m e la seule qui fût habitée par les Iaos, Iayos ou Yaios. A u contraire, dans sa liste générale des cours d'eau de la G u y a n e , K E Y M I S place les Iaos

sur les rivières Iwari-

poco, C a w o , C u n a n a m a , D e s s e q u e b e , Moruga; —

Pawrooma,

mais point sur la rivière du G a p d ' O r a n g e ,

où il ne signale que les C o o n o r a c k i , les W a c a c o i a et les W a r i s e a c o . Et,

qui plus est, le n o m donné par K E Y M I S , par

et par H A R C O U R T ,

LEIGH

à la rivière du C a p d ' O r a n g e , n'est

point YApoco. C'est

W I A P O C O .

2257. YApoc,

Dans

la recherche du

premier

élément

de

il faut donc prendre pour point de départ W I A .


e

§§ 2258-2261

2258.

18

KEYMIS,

LECTURE

LEIGH

( 245 )

et H A R C O U R T

étaient

Anglais.

Leur orthographe était anglaise. Or les Anglais, avec leur orthographe excentrique, ont défiguré bien des n o m s dans toutes les parties du globe. Et leur influence a introduit partout leurs travestisse­ ments. Les Anglais ont fait dire aux Français pour Arauari,

pour Orinoco,

Orénoque

Arowari

pour

Esséquèbe

Essequibo.

Ils ont fait dire, aux habitants m ê m e de la capitale de la république de l'Uruguay, Montevideo

pour

Monte-

vidio.

Guiana, LEIGH

répandu par les Anglais R A L E G H ,

KEYMIS,

et H A R C O U R T , est une orthographe anglaise, repré­

sentant le son espagnol de G u a y a n a . Car H E R R E R A , 1601, écrivait Guayàna

; c'est Guayana

que

en

les Vénézué-

liens disent encore aujourd'hui; et des Hollandais, et des Français m ê m e , ont écrit ce mot à l'espagnole : — DE

L A E T en 1625, 1630, 1633, 1610; D U V A L en 1654, 1661,

1664,

1677, 1679; F R O G E R en 1698 et 1699;

MALTE-BRUN

en 1817. H A R C O U R T donne à un chef indien des bords du

Wia-

poco le n o m d'ANAKiURY ; et ce m ê m e n o m est écrit par M O C Q U E T et par L A B A R R E , 2259.

senter

Donc

wiApoco,

ANACÏOURY. orthographe

anglaise, doit repré-

WAYApOCO.

2260.

C'est réellement

W A Y A P O C O .

2261.

E n voici la preuve.

Ni les A l l e m a n d s , ni les Hollandais, ni les Fran­ çais ne donnent à l'i la valeur anglaise répondant à la diphthongue espagnole et portugaise ai ou ay.


e

( 246 )

18 L E C T U R E

§§ 2262-2263

E h bien, La carte de la G u y a n e publiée à N u r e m b e r g par dans sa brochure Brevis & admiranda descriptio Regni Gvianæ, existant à la Bibliothèque Impériale de Paris, département des Cartes, C. 5914, — donne au fleuve du G a p d ' O r a n g e le n o m de W A Y A L E V I N U S H U L S I U S en 1599,

pago

;

La carte d u m ê m e pays publiée à A m s t e r d a m en 1687 par V A N K E U L E N , en tête de la quatrième partie du Flambeau de la Mer, existant à la Bibliothèque du Dépôt Géné­ ral de la Marine à Paris, n° 798, — donne au fleuve du G a p d ' O r a n g e le n o m parfaitement correct de W A Y A poco

; er

Et au folio 1 du texte relatif à cette carte, on lit cette phrase : « B. Wayapoco est ici au Nord, ayant sur la pointe orientale une terre haute qu'on appelle le C a p d'Orange. » 2262.

Donc

le premier

de Y A P O C

élément

est

W A Y A .

2263. C'est u n w anglais et hollandais, et n o n pas allemand. Wayapóco

en français oua

se prononce donc en portugais yapóco,

en faisant de

oua

ua-yapóco,

une seule syllabe.

Les Indiens, grands mangeurs de voyelles, ont abrégé d'abord oua-yapóco en ou-yapoc, qui a été aussi en usage pour désigner la rivière du C a p d'Orange.

(Lec-

ture 4, §§ 306-309.)

Et c o m m e , de m ê m e que les Portugais, ils confondent avec le son de l'ou l'o n o n accentué, ainsi que le prouve la double orthographe espagnole

Orinoco

ont dit indistinctement Ou-yapoc

et

et

Urinoco,

ils

O-yapoc.

Puis, par u n e plus grande abréviation, ils ont dit sim­ plement

Yapoc,

tout c o m m e le lac

Wa-macari

est devenu


e

§§ 2264-2267

18 L E C T U R E

( 247 )

simplement Macarî, ainsi qu'on peut le voir clans la bro­ chure de M. B A E N A , page 45. Puis enfin, les Portugais ont converti Yapoc Japoc,

en

c o m m e ils convertissent en J tout Y espagnol ou in­

dien qui ne fait qu'une seule syllabe avec la voyelle sui­ vante. (§§ 293-306, 2099-2102.) 2264.

Or,

de même

que P Ó C O , W A Y A est un mot

OYAMPI.

2265. Ce mot se trouve dans le vocabulaire de M. L E P R I E U R , page 227, répondant au mot français queue. qui est proprement l'extrémité du corps des animaux, peut s'appliquer aussi, par une figure bien natu­ relle, à toute sorte d'extrémité. Queue,

On ne l'emploie pas en français pour indiquer une pointe

de terre, u n

cap.

Mais la langue portugaise, c o m m e on le voit clans le dictionnaire de M O R A E S , donne à cabo la double acception de cap et

2266.

queue.

Cette double acception appartient aussi au mot

Waya.

2267. Le n o m actuel d'Oyac, près de C a y e n n e , se disait Oya et Ouya, c o m m e O y a p o c et Ouyapoc; et dans K E Y M I S c'est Wia, c'est-à-dire Waya, comme Wiapoco, c'est-à-dire Wayapoco. Or, encore du temps de B E L L I N , on entendait par Oya, non-seulement l ' O y a c de nos jours, mais encore la rivière de M a h u r y . Chez B E L L I N , l'embouchure de l ' O Y A est bornée à l'Ouest par la « P O I N T E et M o n t a g n e de M a h u r y . » Cette P O I N T E , remarquable par sa montagne, c'est ce qui fut appelé W A Y A par les interprètes de K E Y M I S , qui étaient

Oyampis.

Et les m ê m e s interprètes O y a m p i s nommèrent W A Y A w A Y A (Wia-wia), c'est-à-dire P O I N T E - P O I N T E , une rivière


e

( 248 )

18 L E C T U R E

§§ 2268-2273

dont l'embouchure abonde en pointes,

c o m m e on le voit

chez B E L L I N , dans la « Carte de l'entrée de M A R O N Y » . 2268.

Mais, si W A Y A

W A Y A P Ó C O ,

la longue

signifie P O I N T E , il s'ensuit que

pointe,

devrait être proprement le

C a p d ' O r a n g e , qui est en effet la pointe la plus saillante de toute la côte de la G u y a n e . 2269.

E h bien, c'était cela précisément

2270.

E n 1661, dans la seconde édition de l ' A r c a n o

!

de D U D L E Y , la carte 14 de l ' A m é r i q u e présente,

del Mare

à l'embouchure du fleuve du C a p d ' O r a n g e , les n o m s suivants = di

R

: Wyapogo, =

B : di W i a p o g o , =

C :

Wyapogo.

2271.

Encore

en

1834, dans

ses

deux

cartes

l'Amérique, le scrupuleux B R U É disait : « Cap ou

de

d'Orange

Wiapoco.

2272.

Encore en 1843, le docte M .

TERNAUX-COMPANS,

dans la carte de la G u y a n e annexée à son édition de la Notice

Statistique

sur

la Guyane

lement : « C. d'Orange 2273. Ouyapoc,

Mais, puisque Oyapoc,

française,

ou Wiapoko. W A Y A P O C O ,

Yapoc,

Japoc,

disait pareil­

» altéré en

Wiapoco,

est proprement le n o m

du C A P D ' O R A N G E , il y a impossibilité de mettre ailleurs que sous ce cap la rivière, Japoc, poc,

Wiapoco,

Yapoc,

Oyapoc,

Ouya-

W A Y A P O C O .

Et l'étymologie de J A P O C

devient u n titre admirable

en faveur de l'interprétation brésilienne de l'article 8 du Traité d'Utrecht.


§§ 2274-2276

19

e

LECTURE

DIX-NEUVIÈME

( 249 )

LECTURE

Distinction du

V I N C E N T P I N Ç O N d'avec l ' O Y A P O C admise d'Utrecht

2274. en 1836,

par

des Portugais

et par des

après le Traité Brésiliens.

En 1749, en 1792, en 1808, en 1815, en 1833, en 1838,

en 1839,

en 1841,

en 1842, en 1843,

des

Portugais et des Brésiliens, dans trois cartes et dans neuf textes, ont situé la rivière de Vincent

Pinçon

près

du Cap d u Nord, bien loin du Cap d'Orange. (§§1233, 1843-1855.) 2275. CONDAMINE

C'est un effet de la grande influence de L A et de R A Y N A L

au siècle dernier, et de l'in­

fluence plus grande encore d ' A L E X A N D R E

D E HUMBOLDT

dans notre siècle. (§§2142-2154, 1211, 1837-1842). La lecture 24 prouvera que L A C O N D A M I N E , R A Y N A L et H U M B O L D T se sont trompés. Mais voici, dès à présent, une réponse sans réplique. 2276.

Dans aucune de ces trois cartes, dans aucun de

ces neufs textes, on ne donne cumulativement à la rivière


e

( 250 )

19

LECTURE

§ 2277

du C a p d u N o r d le n o m de Vincent d'Oyapoc,

Yapoc,

et celui

Pinçon

Japoc.

Dans aucune de ces trois cartes, dans aucun de ces neuf textes, on ne met la limite du Brésil à la rivière du Cap d u Nord. 2277.

A u contraire,

M. A C C I O L I , page 198 de sa Corografia M. B A E N A , page 201 de son

Paraense,

Compendio,

Le m ê m e M . B A E N A , pages 1, 224, 227 de son

Ensaio

Corografico,

Déclarent que la véritable limite du Brésil, en vertu des traités, c'est la rivière du C a p d'Orange : Le Mémoire du D

r

A L E X A N D R E F E R R E I R A en 1792,

La Note des Plénipotentiaires Portugais en 1815, La protestation du général A N D R É A en 1836, Le Mémoire de M. C O S T A E Sá en 1841, Ont pour but spécial d'établir que la rivière du C a p d'Orange est la véritable limite du Brésil, en vertu des traités : Le travail de M. le V I C O M T E est le complément d'un

D E S. L E O P O L D O en 1843,

mémoire

publié par

l'auteur

en 1839, sous ce titre : « Quaes são os limites naturaes, pacteados, e necessarios do Imperio do Brasil? »; et la seconde partie de ce Mémoire de 1839 est consacrée à l'exposition des droits du Brésil à la rive orientale de l'Oyapoc : Le Mémoire de M . D E D R U M M O N D , dans la m ê m e année 1843, repose tout entier sur ce principe, — que les traités assurent au Brésil, pour limite septentrionale, la rivière du C a p d'Orange. Dans la carte faite en

1808 par ordre du

général

M A G A L H Ã E S , gouverneur du Para, le V i n c e n t P i n ç o n se trouve placé au Sud de l'Oyapoc; mais les deux procla­ mations publiées la m ê m e année par le m ê m e gouverneur, revendiquent pour le Brésil, c o m m e étant sa limite pri-


e

§§ 2278-2279

19 L E C T U R E

( 251 )

mitive, sanctionnée par le Traité d'Utrecht, la rive droite de l'Oyapoc, (§§ 1846, 826-828.) 2278.

Après avoir dit que « la Société de Géographie

de Paris reçut en février 1825 le calque en deux feuilles d'une carte portugaise intitulée : Caria topographica provincias

do

Grão

Para

ajoute : Le C H E V A L I E R

e Rio

Negro

»,

M.

das

D'AVEZAC

D E R O S S E L , à qui elle fut communi­

quée, y a inscrit de sa main l'annotation suivante : = Cette carte, dont la minute sort du bureau de l'ingénieur du Pará, est remarquable en ce qu'elle porte la limite française à Vincent Pinson et non à l'Oyapoc. » Mais l'inspection du calque allégué par M. D ' A V E Z A C montre que le chevalier de R O S S E L est tombé dans une grande méprise. Bien que cette carte place le Vincent Pinçon dans le voisinage immédiat du Cap du Nord, la limite française y est portée nettement à la rivière du Cap d'Orange. Car les deux mots portugais signifiant Guyane çaise

Fran-

y ont chacun la dernière lettre sur le bord droit de

l'Oyapoc,

tout juste.

Cette limite française au bord droit de la rivière du C a p d'Orange, sans être, à beaucoup près, aussi contraire à l'interprétation brésilienne du Traité d'Utrecht que la limite au Cap d u Nord, est cependant opposée à cette interprétation. Mais une pareille aberration de l'interprétation brési­ lienne ne peut être imputée ni au Brésil, ni au Portugal. C'est le fait d'un étranger, tellement ignorant de la langue portugaise, qu'il écrit R. de Vicente Goyana

2279.

P E N S A N

et

Francez.

En regard de ces illusions en faveur de la

France, contemplons les réalités que renferme la lecture 17,

et qui prouvent que, pendant tout le règne du Traité

d'Utrecht, c'est-à-dire depuis 1713 jusqu'à la Révolution


§§

e

( 252 )

19 L E C T U R E

2280-2282

de 1789, des Français nombreux et bien compétents dans la question, ont reconnu, de la manière la plus explicite, que la limite du Brésil n'était pas au G a p d u N o r d , mais bien au C a p d'Orange. Et à ces anciens témoignages français, ajoutons main­ tenant des témoignages modernes, constatant que depuis la convention signée à Paris le 28 août 1817, jusqu'à aujourd'hui, la m ê m e limite à la rivière du G a p d'Orange a été proclamée par des Français, également nombreux et également instruits. 2280. Cet accord de tant de Français éclairés, à des époques si diverses, montrera combien M . le B A R O N D E B U T E N V A L a été injuste envers ses compatriotes, quand il a dit, dans la onzième séance, page 130 des Protocoles, que, s'il s'était trouvé en 1842 u n atlas français portant à l'Oyap o c la frontière française, c'est une erreur inexplicable et inexcusable pour qui ne connaît pas les misères d'une spéculation de librairie. »

2281.

par

En

1817

: « Précis de la Géographie

Universelle,

M A L T E - B R U N , tome cinquième, Paris. » In-8°.

Page 720. « G u y a n e Française. Ses limites sont l ' O y a p o c k à l'Est, et le M a r o n i à l'Ouest. » 2282. Guyane

En 1822 : « Des Colonies; particulièrement

Française,

Secrétaire particulier

de la Guyane.

en

1821.

Par

r

le baron

de M

P. CIT.

de la

D E SAINT-AMANT,

de Laussat,

Gouverneur

Paris. » In-8°.

Pages 11 12. « La G u y a n e Française avait autrefois plus de cent cinquante lieues de côtes. Ses limites à l'Est, étaient la rivière d'Aragouary. Après une longue contes­ tation entre les cours de F r a n c e et du Brésil, celle-ci nous a fait renoncer à la portion de la Guyane comprise entre l ' A r a g o u a r y et l ' O Y A P O C K . »


§§ 2283-2285

2283.

e

19 LECTURE

E n 1823 : « Biographie

tome X X X I V ; article Pinzon

( 253 )

Universelle » de MICHAUD,

signé EYRIÈS,

(Vincent Yanez),

principal rédacteur des « Nouvelles

Annales

des Voyages

»

depuis 1819, et u n des fondateurs de la Société de Géogra­ phie de Paris, dont il fut longtemps le président. « L ' O y a p o k a son embouchure sous le cap d'Orange, par 4° 15', et le Rio Pinzon,

par 3° 55' de latitudeNord.Mais,

c o m m e à l'époque des conférences tenues à Paris, en 1817, pour

régler ces m ê m e s

limites, on allégua u n

passage de L A E T , qui dit expressément que l'Oyapock, ou Wiapock, a son embouchure sous le cap d'Orange, appelé souvent cap du Nord, la France

a perdu

tout le

terrain situé entre les deux fleuves.

2284.

E n 1824 : « Mémoire

par J. A. A. NOYER, Chevalier d'honneur,

ancien Ingénieur

sur la Guyane

Française,

de l'ordre royal de la Légion

géographe, habitant

et député de cette Colonie, en France.

Adressé

propriétaire en 1819, à

M. de Laussat, alors Commandant

et Administrateur

Roi.

de M. le Baron

Publié

Mars

sous le Gouvernement

1824. A Cayenne,

de l'Imprimerie

pour le

Milius, en

du Roi. » In-4°.

Page 76. « Autrefois nous avions aussi une mission et un poste à Macary, bien au delà de l ' O y a p o c k . Nous devons regretter la perte de cette partie de la Colonie. »

2285. rique

E n 1825 : « Atlas géographique,

et chronologique

des deux

statistique, histo-

Amériques

par j. A.

BUCHON. Dédié à S. A. R. le Duc d'Orléans. Paris,

Carez. »

In-folio. Texte. « Par la convention faite à Paris en date du 28 août 1817, les limites entre la G u y a n e Française et la G u y a n e Portugaise au Sud-Est SONT à la rivière d ' O Y A P O C K située entre les 4° et les 5° de latitude Nord. » N°61. « Carte géographique, statistique et historique


e

( 254 )

19 L E C T U R E

du Brésil. » — sous le C. 2286.

§§ 2286-2288

Limite septentrionale à la R.

Oyapok,

d'Orange.

Dans la m ê m e année 1825 : « Atlas historique,

généalogique,

chronologique

et géographique

de A.

LESAGE

[ C O M T E D I E U D O N N É D E L A S C A S E S ] Paris. » In-folio. Feuille intitulée « A m é r i q u e historique, physique et politique en 1825. » —

Limite de la G u y a n e Française

et du Brésil à la R. Oyapoc, 2287.

sous le C.

d'Orange.

E n 1826 : Atlas Universel de Géographie

politique, ancienne

&

moderne,

physique,

contenant les cartes géné­

rales & particulières de toutes les parties du

monde;

Rédigé conformément aux progrès de la science pour ser­ vir à l'intelligence de l'Histoire, de la Géographie et des Voyages. Dédié à l'Académie Royale

des Sciences

de

l'Institut de F r a n c e , approuvé et recommandé par le Conseil Général de l'Instruction Publique, et adopté par l'Ecole Royale Polytechnique, pour l'instruction des élèves. Seconde édition, composée de soixante-cinq feuilles : par A . B R U É , Géographe du Roi, M e m b r e de la Société Philomatique, de la Commission centrale de la Société de Géo­ a

graphie, & . Paris, 1830. » In-folio. N° 62. « Carte générale de l'Amérique Méridionale et des îles qui en dépendent.... Paris, 1826. » N° 63. « Carte générale de Colombie, de la G u y a n e Française, Hollandaise et Anglaise.... Paris, 1826. » N° 65. « Carte du Brésil et d'une partie des pays adjacents.... Paris, 1826. » Dans

chacune

de ces trois cartes, la limite de la

G u y a n e Française et du Brésil c o m m e n c e à la R. pok,

sous le C. 2288.

et moderne,

Oya-

d'Orange.

En 1829 : « Atlas Universel de Géographie

ancienne

précédé d'un Abrégé de Géographie Physique


e

§ 2289

19 L E C T U R E

( 255 )

et Historique; par M. L A P I E , Premier

Géographe

du

Roi,

ancien Directeur du Cabinet Topographique de Sa Majesté, Officier au Corps Supérieur Royal et Militaire des Ingé­ nieurs-Géographes, Chef de la Section Ministère

de la Guerre,

Topographique

du

Chevalier des Ordres Royaux et

Militaires de Saint-Louis et de la Légion d'Honneur; et M. L A P I Efils,Géographe de S. A. R. Monseigneur le Dau­ phin, Lieutenant au Corps Royal et Militaire des IngénieursGéographes, Professeur à l'Ecole Royale de Saint-Cyr, ancien élève de l'École Polytechnique. Dédié au Roi. Paris, Eymery, ie

Fruger et C , Libraire Editeur, Rue Mazarine, N. 30. » In-folio. Texte, page 96. « E M P I R E

D U B R É S I L . Ce vaste empire,

compris entre 37° 10' et 74° 12' de longitude occidentale, et entre 4° 15' [quatre degrés quinze minutes] de latitude boréale, et 33° 45' de latitude australe, est borné par.... » N°

46. « Carte générale de l'Amérique

Méridio­

nale. » N° 48. « Carte du Brésil. » Dans chacune de ces deux cartes, la limite maritime de la G u y a n e Française et du Brésil est marquée à la R. Oyapoc,

sous le C.

d'Orange.

Dans leur dédicace, M M . L A P I E adressent au Roi ces paroles : « Scrutateurs I M P A R T I A U X , nous avons comparé attentivement tout ce qui est connu en géographie. » 2289. sel....

E n 1830 : « Dictionnaire

Géographique

Univer-

T o m e septième... Chez... Ch. P I C Q U E T . »

Page 613. « O Y A P O K , fleuve de la G u y a n e . Il prend sa source dans la serra T u m u c u m a q u e , dans le Sud de la G u y a n e française, et, coulant vers le N.-E., trace une partie de la limite entre la G u y a n e française et la G u y a n e brésilienne. Il se jette dans l'Atlantique par un large estuaire, à l'E. duquel s'avance le cap O r a n g e , par 4° 8' de lat. N. »


( 256 )

19

2290.

e

§§ 2290-2292

L E C T U R E

E n 1833 : « Abrégé de Géographie,

rédigé sur u n

nouveau plan d'après les derniers traités de paix et les découvertes les plus récentes, par A D R I E N B A L B I . Paris. » In-8°. Page 1117. « L'Oyapoc;

son cours est peu considérable,

mais il est important par le volume de ses eaux et plus encore parce qu'il sépare la G u y a n e

Française de la

G u y a n e qui appartient à l'Empire du Brésil. » 2291.

dionale

En

1834 : « Nouvelle

Carte de l'Amérique

et des Iles qui en dépendent.

Méri-

Dédiée à l'Académie

Royale des Sciences de l'Institut par A . H . B B U É , Géographe du Roi, de la Commission Centrale de la Société de Géo­ graphie... Œ u v r e posthume. » E n 4 feuilles. Carte avec le m ê m e titre, en une feuille. Sur chacune de ces deux cartes, la limite maritime de la G u y a n e Française et du Brésil est marquée à la sous le C.

R. Oyapock,

d'Orange.

Et entre le C a p d'Orange et la M o n t a g n e e

on y lit : B .

Oyapock

ou

d'Argent

Pinçon.

Ce sont ces deux cartes qui ont occasionné la protesta­ tion de M. D ' A V E Z A C au sein de la Commission Centrale de la Société de Géographie de Paris, le 4 juillet 1834. (§§ 962-963.) 2292.

Dans la m ê m e année 1834 : « Le Globe, Atlas

classique universel de Géographie ancienne et moderne, pour servir à l'étude de la Géographie et de l'Histoire. Dressé par M . A . h. D U F O U R ,

et revu par M.

JOMARD,

m e m b r e de l'Institut. » Paris, in-4°. Troisième livraison, publiée le 15 août 1834 : Planche 31, « A m é r i q u e d u Sud. » Quatrième livraison, publiée le 15 septembre 1834 : Planche 32, « Empire du Brésil. » Sur chacune de ces deux cartes, la limite maritime de


e

§§ 2293-2295

19

LECTURE

( 257 )

la G u y a n e Française et du Brésil est tracée par la rivière du Cap d'Orange. Et leur réviseur, le vénérable M. J O M A R D , Conservateur des Cartes et Collections Géographiques à la Bibliothèque Impériale de Paris, venait de présider, le 4 juillet 1834,

la

séance de la Commission Centrale de la Société de Géogra­ phie où M. D ' A V E Z A C , Secrétaire Général de la m ê m e Com­ mission

Centrale, avait protesté hautement contre la

limite du Brésil à la rivière du Cap d'Orange. 2293. Histoire

En 1837 : Dans le volume intitulé : « cl Description

de

tous

les peuples.

L'Univers.

Brésil,

par

M. F E R D I N A N D D E N I S . C o l o m b i e et G u y a n e , par M. C. F A M I N , Paris, Firmin Didot. » In-8°. « Brésil, Par Th. D U V O T E N A Y , géographe. » « C o l o m b i e et G u y a n e . Par Th. D U V O T E N A Y ,

géo­

graphe. » Chacune de ces deux cartes porte la limite maritime de la G u y a n e Française et du Brésil à la R. sous le

C.

2294.

Oyapoc,

d'Orange.

En 1842 : Nouvelle édition de l'Atlas de M M . L A -

PIE.

N° 46. « Carte générale de l'Amérique Méridio­ nale. » N° 47. « Carte de C o l o m b i e . » N° 48. « Carte du Brésil. » C o m m e en 1829,

limite maritime de la G u y a n e Fran­

çaise et du Brésil, à la R.

Oyapoc,

sous le

C.

d'Orange.

2295. En 1851 : Autre édition de l'Atlas de M M . L A P I E . C o m m e en 1842. Cartes de l'Amérique Méridionale, de C o l o m b i e , du Brésil, traçant la limite maritime de la G u y a n e Française et du Brésil par le fleuve du Cap d'Orange.

T.

II

17


( 258 )

19

2296.

e

§§ 2296-2299

L E C T U R E

En 1852 : « Cours

comprenant la

de Géographie

Description physique et politique et la Géographie histo­ rique des diverses contrées du globe, par E .

CORTAMBERT.

Paris. » In-12. Page 573. « G u i a n e Française. Elle s'étend depuis le M a r o n i , qui la sépare de la G u i a n e hollandaise, jus­ qu'à l ' O y a p o k .

L'honorable M. C O R T A M B E R T , M e m b r e et ancien Secré­ taire Général de la Commission Centrale de la Société de Géographie de Paris, est Attaché au Département Géogra­ phique de la Bibliothèque Impériale, à ce m ê m e Départe­ ment si dignement dirigé par M . J O M A R D . La cause brésilienne a donc la gloire de compter parmi ses défenseurs les deux premiers fonctionnaires du prin­ cipal établissement géographique de F r a n c e .

2297.

Dans la m ê m e année 1852.

G u y a n e s et de la partie N.-E.

« Carte de la Côte des

du Brésil

Par R O B I Q U E T ,

Hydrographe. Paris. » Les mots G U Y A N E entre Maroni

2298.

Fl.

F R A N Ç A I S E

et Oyapoc

s'y trouvent inscrits

sous le C.

R.

d'Orange.

En 1856. « A m é r i q u e d u S u d par A . H . D U F O U R

Paris. » In-folio. Limite maritime de la G u y a n e Française et du Bré­ sil,

c o m m e dans l'Atlas de 1834,

rivière du Cap

revu par M. J O M A R D , à la

d'Orange.

Ce témoignage est d'une grande valeur. Car,

en 1841, M. D U F O U R

était revenu de ses idées

de 1834, malgré leur sanction par M. J O M A R D , marqué la limite à la rivière du Cap du

2299.

E n septembre 1857,

après

et avait

Nord.

la conférence

de

Paris,


e

§§ 2300-2301 entre

M. le B A R O N

19 L E C T U R E

( 259 )

D E BUTENVAL

et M. le V I C O M T E D E

L'URUGUAY : «Dictionnaire

Général

MM. C H . D E Z O B R Y ,

de Géographie

Auteur de Rome

et d'Histoire

au siècle

Par

d'Auguste.

T H . B A C H E L E T , Agrégé d'histoire, Professeur au lycée Im­ périal de R o u e n , et une Société de littérateurs, de pro­ fesseurs et de savants. Paris, Dezobry, E. Magdeleine ie

et C , Éditeurs, rue du Cloître-Saint-Benoît, 10. 1857. » 2 forts vol. in-8°, ayant ensemble 2880 pages. er

T o m e 1 , page 1261.

« G U Y A N E

F R A N Ç A I S E , au N.-E.

de la G u y a n e brésilienne, le long de l'Atlantique, entre l ' O y a p o c k au S.-E. et le M a r o n i au N.-O. » d

T o m e 2 , page 1995. « O Y A P O K ,

riv. de l'Amérique

d u Sud, a sa course dans la G u y a n e Française, qu'elle sépare

du

Brésil,

et, après un cours de 300 kil. vers le

N.-E., se jette dans l'Atlantique près du cap Orange. 2300.

E n juillet 1858, après la publication

coles de Paris

et du premier

des

»

Proto-

travail de M. D ' A V E Z A C :

« L'Empire du Brésil. Souvenirs de voyage par N. X. Recueillis et publiés par J . - J . - E . R O Y . Tours, A

d

MAME

et

ie

C . » In-8°. Page 48. « L e Brésil est le plus vaste empire du globe, après la Russie et la Chine, et c'est la contrée la plus favorisée de la nature parmi toutes celles du

nouveau

monde. Elle comprend les deux cinquièmes de l'Amérique d u Sud, et s'étend depuis l'embouchure de l ' O y a p o c o , par 4° 17' Nord, jusqu'au lac M e r i m , sous le 3 3

me

degré de

latitude Sud. » 2301.

E n janvier 1860, après la publication

coles de Paris,

des deux

travaux

des Proto-

de M. D ' A V E Z A C , du

de M. D E S A I N T - Q U A N T I N , et des deux

premières

travail

des présentes

lectures dans le Bulletin de la Société de Géographie

de

Paris:

« Dictionnaire Universel d'Histoire et de Géographie....


e

( 260 )

19 L E C T U R E

§ 2301

Par M.-N. BOUILLET, Conseiller honoraire de l'Université, Inspecteur de l'Académie de Paris...., Membre de la Société de Géographie de Paris... Seizième édition. Paris, Librairie de L. Hachette et C , Rue Pierre-Sarrazin, N° 14. » In-8°, 2064 pages. ie

Page 1328. « O Y A P O K , riv. de la G u y a n e , naît par 54° 40' long. O., 2° 30' lat. N., coule au N.-E., sépare la Guyane

française

d'avec le Brésil.

»


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