Mon Procès B (1830, Louis de Potter)

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PROCÈSDE DEM.four'sworthAnteDEPOTTER.DÉFENSEURS:MeVANMEENENETMSYLVAINVANDEWEYER,AVOCATSALACOURSUPÉRIEUREDEJUSTICE,ABRUXELLES.BRUXELLES.L'IMPRIMERIEDEJ.J.J.COCHE-MOMMENS , RUE DES 1829GRANDS-CARMES.-. 1

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Avant qu'il soit passé outre , j'ai trois demandes à faire à la Cour.Lapremière qu'elle veuille ordonner , ou du moins permet trequel'examen etles débatsaient lieu en langue française. Cette langue est la seule de celles qui me sont communes avec la Cour,queje comprenne facilement, et dontl'usage me soit assez familier pour que j'y puisse proposer et suivre ma défense.

La seconde , c'est que la Cour me fasse jouir de la garantie de la pleine et entière publicité de l'audience et de l'épreuve du jury , telles qu'elles sont établies par notre code d'instruction criminelle , etmaintenues par l'article 2 additionnel àla loifon damentale.Latroisième, c'est que la Cour ordonnequela partie de l'acte d'accusation qui concerne le Courrier des Pays-Bas , et qui I

M. DE POTTER.DE mm

PROCES1534666

.5525830

DU 19 DÉCEMBRE 1828.

1AUDIENCE

L'audience commencevers neufheures et demie. Le public n'a pas encore obtenu l'entrée de l'audience.M. De Potter, que quatre soldats de la maréchaussée accompagnent , est sur le banc des accusés. Il n'a pas été permis à l'honorable écri vain de se rendre à pied de la prison au palais de justice. On l'a obligé de monter en voiture , quelques protestations qu'il fit contre cette obligation qu'on lui imposait. Le pré sident interroge l'accusé, selon ce que prescrit la loi. M. De Potterprie la courde lui permettre de proposer quelques de mandes préalables à sa défense au fond. Il s'exprime en fran çais.

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PRÉSIDENCE DE M. DE KERSMAEKER.

Je sais que ces demandes ne sont point d'usage ordinaire; mais commeje les crois fondées, et que mesdéfenseurs partagent à cet égard mon opinion , je les fais , non-seulement pour con server un droit , mais pour remplir un devoir.

Ce serait méconnaître et calomnier mes intentions , que dat tribuer ces demandes , soit à quelque défiance envers les mem bres composant la Cour, soit au désir de me singulariser , soit même à l'envie de faire ici montre de courage. Je déclare etpro teste formellement que ma démarche ne m'est dictée que parla conviction où je suis , et où sont aussi mes défenseurs , que les garanties que je réclame me sont dues et appartiennent à tous les Belges , et par le devoir que m'impose une position quin'est pas de mon choix , de ne point donner, par mon silence , une espèce de sanction à des usages que je crois attentatoires ànos droits les plus sacrés.

Je prie mes défenseurs de vouloir appuyer mes demandes des moyens que les lois et la science leur fournissent , et d'en faire l'objet de conclusions formelles et pertinentes.

M. De Dryver, remplissant les fonctions du ministère public, prend la parole pour répondre à ces demandes, et fait observer que l'arrêté royal s'oppose à l'usage de la langue française. M. De Potterd'ailleurs sait le flamand, puisqu'il est né àBruges. Quant àla publicité, M. De Dryver invoque encore l'arrêté sur lamatière. Pource quiregarde lejury , la Cour , dit leministère public , n'est pas législatrice et ne peut rétablir ce qui a été aboli ;l'accuséa sans doute peu de connaissance de la législation qui nous régit, puisqu'il élève de semblables questions.

MeVanMeenen a cependant la parole pourdévelopperce qui fait le fondement desdemandes de l'accusé. M. le président l'ar rête dès le commencement etdit : « Comment peut-on encore venir proposer à laCour des choses si souvent jugées? » Me Van Meenen répond qu'il croit de son devoir de défendre l'accusé , comme lui et l'accusé jugent indispensable de le faire pour la cause ; que d'ailleurs il plaide des moyens qui sont pour lui de conviction , et qu'il tient à se justifier lui-mêmedevant la Cour de les employer.

( 2 ) par conséquent m'est absolument étrangère , ne soit ni lue ni prise enconsidération.

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Ilconserve la paroletoujours avant que l'audience ne fûtren due publique pour développer ses moyensà l'appui des troisde mandes préliminaires faites par l'accusé ; il dit d'abord que les, demandes ont un triple objet. 1º La langue dans laquelle il se rait procédé ; 2º le mode de procédure ; 3° l'objetdu procès.

1º Attendu que l'accusé L. J. A. De Potter n'exerce aucune des fonctions ouprofessions pour lesquelles l'usage de la langue flamande peut être requis ; qu'il a notoirement été élevé et areçu sonéducationen français; qu'il parle, écrit , traite ses affaires enfrançais ; quece serait , en conséquence , le priver personnellement , en tout ou du moins en grande partie, de la -

Ici , MeVan Meenen est de nouveau interrompu par M. le président ; le défenseur lui répond toujours avec calme et di gnité. Enfin, après plusieurs autres interruptions , il est con venuque l'onse bornera à la lecture des conclusions motivées qui suivent ; cette lecture est donnée par Me Van de Weyer.

Sur le premier point , Me Van Meenen s'attache à déve lopper les motifs consignés dans les conclusions suivantes. Il s'attache surtout à montrer que si le gouvernement français a été injuste en rendant l'emploi de la langue française exclu sif, il ne le serait pas moins maintenant d'exclure l'emploi de cette dernière, surtout de la défense et au criminel ; que le re tour au droit commun etantérieur , à l'égard du flamand , në reut emporter l'exclusion du français ; que le supposer, comme on le fait communément , c'est violer l'art. 4. de la loi fonda mentale qui garantit à tout individu qui se trouve sur le ter ritoire du royaume la même protection dans sa personne et ses biens ; l'art. 6 qui ne soumet l'exercice des droits civils qu'à la loi ; l'art. 11 qui déclaré toute personne également admissible aux emplois ; l'art. 164 qui garantit à chaque habitant la pos session et la jouissance de ses propriétés, propriétés parmi les quelles, après lafaculté de penser et les organes des sens, le lan gage est laplus précieuse , comme le moyen sans lequel on ne peut en acquérir ni en conserver d'autres ; qu'en tout cas, une pareille exclusion, si elle était même possible, ne pourraitêtre l' uvre que de la loi (art. 4 , 105 , 163 , L. F.) ; que l'arrêté du 15 septembre 1819 nepouvait avoir légitimé cette exclusion, et qu'au surplus , sainement entendu , ilne l'ordonnait pas.

facultéde se défendre , que d'établir l'examen et les débats en une autre langue que la française ;

2ºVules art. 309, 394 , 399, 400 et suivans , 312 et suivans, 336 et suivans du code d'instruction criminelle et l'art 2 addi tionnelde laloi fondamentale ; "

Vu,quantàl'usage introduitdepuis treizeà quatorze ans dans les Cours d'assises de ces provinces, de procéder sans l'interven tiondujury et en partie à huis clos (1. 2 cod. quæ sit long, con suet; Lois 32, 33dig, De leg. et senat.; Merlin,Rép.3me édit.Vo usage, S. 1 et 2 ; Questions de droit, Vo société§. 1.), et attendu que cetusage n'apoint lescaractères requis pour produire des ef fetsabrogatifs , parce qu'il n'est ni invétéré , ni introduit spon

Que cette langue, d'ailleurs, ayant toujours été usitée encon currence avec laflamande et la latine dans les cours et les tribu naux du pays,avant que l'administration française n'en ait rendu l'emploi exclusif, n'a pu elle-même enêtre exclue, par leretour, ence quiregarde le flamand , au droit antérieur et à lajustice et àl'équitéQu'elle;n'a

Attendu que Messieurs composant la Cour et le parquet pos sèdenttous notoirement l'usage de la langue française ; que d'ail. leursl'écrit incriminéest enfrançais;

"

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Que de tout ce qui précède , il suit qu'aucune raison légale ne s'oppose à ce que l'examen et les débats aient lieu en français tandis que la justice, l'équité et la faveur due à la défense le prescrivent ;

L'accusé conclut à ce qu'il plaise à la Cour ordonner ou per mettre que l'examen et les débats aurontlieu enfrançais.

pul'être surtout au préjudice du droit naturel de laQu'elledéfense;ne

pourrait l'être sans violation des articles 4, 5 , 11, 164 de laloi fondamentale ;

Qu'abstraction même faite de ces dispositions de la loi fonda mentale, elle nepourraitl'êtreencore que par un actedupouvoir législatif. (Art, 105 , 163 , L. F. );

Que l'arrêté du 15 septembre 1819, portépour lafacilité et l'intérêt des habitans , ne peut avoir disposé , et n'a réellement pas disposécontrairement àces principes.

Vu la loi 25 dig. de leg. et senat, cons.;

Que cetarrêté,portéàune époque oùl'exercice de la puissance législative était suspendudans laBelgique par l'état d'occupation ou de conquête du pays , émané d'une autoritéqui, ne puisant alors sesdroits que dans l'occupation ou la conquête , ne pou vait exercer que des actes de haute administration , purement circonstanciels et essentiellementtransitoires ( v. Vattel, dr. d. gens, 1. 3, chap. 13, nº 199, 200, 201 ; Rayneval,instit. du. dr. nat. et des gens, L. 3, ch 6, nos 3, 4, 5, 6,7 ) ; quece caractère devient plus palpable encorequand on sereporte aux conditions de l'acceptation dela souverainetédu pays , du 21 juillet 1814', (recueil de Scholl , t. 8 , p. 318-322 ) , et que l'on considère que l'autorité mêmede qui l acte est émané , ne lui a donnéque le titre et laforme d'un acte d'administration , et n'a pas fait comprendre les actes de ce nom et de cette forme dans l'article. additionnel 2 de la loifondamentale ; Que,lorsmême qu'on attribuerait augouverneur-général du pays au nom des hautespuissances,en 1814, lespouvoirs qu'exer çait , lors de l'occupation, le chef du gouvernement français , on nepourrait néanmoins rattacher l'acte en question, que, soit à l'art. 92 de la constitution du 22 frimaire an 8 , soit à l'art. 55 du sénatus-consulte du 16thermidor an 10 , et que dans l'un et dans l'autre cas , il ne resteraittoujours qu'un acte d'adminis tration oudegouvernement,purementtemporaire et provisoire et mêmesubordonnéà la sanction dupouvoir législatifet en dé pendant;L.J.A.

De Potter conclut à ce qu'il plaise en conséquence à la Cour d'ordonner qu'il sera procédé en conformité du code d'instruction criminelle , et par suite fixer la cause au premier jourauquellejurypourra avoir étéconvoqué et sera assemblé; 3º Attendu que l'accusé n'a été interrogé , ne s'est reconnu et déclaré auteur, n'a été renvoyé devant la Cour, et enfin n'est accusé querelativementaux deux articles insérés dans le Cour rierdesPays-Bas , mentionnés en l'acte d'accusation ; Que tout ce que l'acte d'accusation contient ultérieurement

"

tanément tacito omniumconsensu ( 1. 32. 1 ff. de leg. et senat. etarrrêtédu 6 novembre 1814 ), ni appuyé contradictisjudiciis ( 1. 34. dig , eod. ),

Qu'en effet, cette pratique s'est introduite à la fin de 1814 par un arrêtédu6 novembre ;

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Après cette lecture , et ces premières interpellations de M. le président à l'accusé , Me Van Meenen se lève et demande la parole, mais inutilement il se proposait de réclamer l'ob

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eten particulier contre le Courrierdes Pays-Bas , est étranger àl'accusation et à l'accusé; Vul'art. 241 du code d'instr. crim. ; L. J. A. De Potter conclut à ce qu'il plaise à la Cour d'ordon ner que la partie de l'acte d'accusation à commencer par les mots : Ilet te Brussel uitkomende , et à finir par ceux-ci inclu sivement: onderdeze artikelen , ne serapas lue , ni ne formera l'objet de l'examen ou des débats ; sauf au ministère public d'une part , et à l'accusé de l'autre , à proposer tous leurs moyens.LaCourse retire pourdélibérer, dit M. le président , sur la question desavoirs'ily a lieu à délibérer. La Cour, après une demi-heure de délibération rentre en séance , et l'audience jus ques làsecrète n'est pas rendue publique pour la prononciation "d'un arrêt conçu à peu près en ces termes : Considérant que les conclusions prises ne tendent à rien moins qu'à renverser des lois ou arrêtés existans , la cour dé clare en faisantdroit qu'elle rejette les moyens de l'accusé.

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Leministère public se lève, et dit que si Me Van Meenen re vient encore sur ces questions en en demandant acte ou autre ment , il sera obligéde conclure contre lui, suivant les disposi tions de l'arrêté du 14 décembre 1810 , qui autorisent la Cour àprononcer contreun avocatquise permet,dans les plaidoiries, quelque chose contre l'ordrepublic et les lois de l'État, des pei nes de discipline qui peuvent aller depuis l'admonition pure et simple , jusqu'à la suspension et même l'exclusion du tableau de l'ordre des avocats.

MeVan Meenen veut parler , mais le président lui dit vive ment qu'il ait à se conformer à ce qu'il doit , et ajoute que si le ministère public avait pris des conclusions formelles et perti tinentes, la Cour n'aurait pu s'empêcher de statuer.

Après ce débat , le greffier donne lecture de l'acte d'accusa tion, après quoi le président interroge M. De Potter sur quel quesfaits duprocès savoir entr'autres s'il se reconnaît l'auteur des articles incriminés ; le président demande en outre quelles ont été les intentions de l'écrivain.

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MeVan Meenen veut parler , mais le président lui dit de se aire , et qu'il n'a pas la parole.

Après cette lecture , M. le présidents'adressantà l'accusé, lui dit:: Expliquez ce passage ; Il me vient une idée : opposons des mots àdes mots : jusqu'ici on a traquéles jésuites , bafouons , honnissons,poursuivons lesministériels;quequiconque n'aura pas clairement démontréparses actes qu'iln'est dévouéà aucun ministre , soit mis au ban de la nation , et que l'anathème de l'anti-popularitépèse sur lui avec toutes ses suites. Vous ordon nezpar là à l'homme paisible de venir déclarer qu'il n'est pas ministériel, et même d'en faire acte. Vous n'êtes donc pas libéral? Et quel moyen auriez-vous de faire faire cette déclaration et de connaîtreles ministériels ? S'il n'y en a pas , on ne peut donc par là répandre le trouble. Quisont les.ministériels? Qui al lez-vous bafouer? Personne. Il ne peut donc y avoirde trou ble. N'avez-vous pas chez vous , place St-Michel , dans votre domicile, un registre où l'on devait venir déposer son vote , faireacte de non-ministérialisme? Que pensera l'homme paisible, qui ne s'occupe de rien , et qui ne fera pas cet acte ? Faudra-t-il lui courir sus? M.le président , il me semble qu'il n'y a ici que deux choses à examiner : ai-je commis un fait qui pouvait -

L1e

Vous haïssez le despotisme ? Oh! sans doute. Quels sont vos principes ? vous professez des principes libéraux? Oui.

servation des art. 314 et 315 du code d'instruction , et de représenter que les interpellations de M. le président sem. blaient intervertir l'ordre légal et naturel de la procédure , et placer l'accusation dans labouche même du juge. Me Van Mee nen n'ayant pu obtenir la parole, M. le présidentfait à l'accusé l'interrogatoire suivant:

Legreffier lit le premier article incriminé.

Vous croyez que tout homme peut professer ses opinions?Oui, liberté pour tous.

Cependantd'après lalecture de vos articles , je ne puis dis tinguer si vous êtes terroriste, si vous êtes ami du despo tisme oulibéral; jen'y vois pas les principes que vous professez. Vous allez les entendre.

-

- Aplus forte raison la liberté -

Vous aimez laliberté?-Oui, de pensée?-Sans doute.

après cet interrogatoire , l'audience est rendue publi que; un auditoire nombreux se précipite dans la salle ; il est composé de citoyens distingués , d'un grand nombre d'avocats, et même , chose rare chez nous , de quelques dames.

227 de la loi fondamentale , en consacrant le principe de la liberté de lapresse , a voulu que l'abus de cette libertéfût réprimé.Lorsde la promulgation de cetteloi, les dispositions répres sives , applicables aux abus de la presse étaient les art. 375 , 222 et 367 du Code pénal , pour les injures , les outrages et les ca lomnies, et l'art. 102 du même Code pour les provocations à la révolte.Ledélit moins grave de chercher à susciter la désunion ou

Et puis vous auriez pu aller consulter tous les barreaux, qui tous auraient répondu que l'arrêté d'avril, postérieur à cet ar ticle , devait seul être appliqué. Vous n'avez rien à répondre ? Je m'en réfère à ce que diront mes défenseurs.

La parole est au ministère public, qui s'exprime en ces ter mesL'art(1):.

(1) Leplaidoyerest extrait de la gazette des tribunaux, àlaquelle M. de Dryverl'avait envoyé.

répandre le trouble, et l'ai-je commis dans cette intention? voilà tout. C'est une tyrannie que vous exercez-là. Aussi , les deux tiers et demi de la nation ont considéré tout cela comme une sottise. Quelques-uns ontbiensignésans lire ! Voulez-vous rap peler les horreurs de la révolution, où l'on parcourait les rues en bonnet rouge , où il fallait aussi faire des déclarations , des adhésions. Vous avez de l'esprit , monsieur ; vous voulez la li berté. Eh! bien, ceux qui seraient tentés de vous imiter dé truiraient cette liberté aussi bien que vous. Ceux qui mainte nantvoudraient encore examiner avec mesure un acte du gou vernement, nele ferontplus : ils aurontpeurde secompromettre avec vous et vos semblables. On blâme l'arrêté d'avril 1815. D'abord, il doit être respecté, puisque c'est une loi ; mais cet arrêté vous sert à vous de sauve-garde et de barrière. Aujour d'hui , vous demandez des signatures ; plus tard vous auriez crié aux armes , et l'on vous aurait appliqué l'art. du code pénal.92

Enfin-,

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( 9 ) exciter letrouble parmi les habitans, noncompris dans le Code, était prévu par l'arrêté du 20 avril 1815 ; et les circonstances impérieuses de cette époque en avaientattribuéla connaissance à une Cour spéciale.

En 1818, lorsque les circonstances critiques où l'on s'était trouvé en 1815 avaient cessé, la Cour spéciale fut supprimée, et laconnaissance des délits prévus par l'arrêté du 20 avril , fut laissée à lajuridiction ordinaire.

SonExc.,lors de la proposition de cette loi, s'exprimaitainsi:

C'est ce qui résultait textuellement du discours du ministre de la justice, lors de laproposition de la loi du 6 mars, et des réponses queson Exc. a fournies aux observations des sections. Voir la Gazette générale des Pays-Bas, partie officielle des 14février et 17 mars 1818.

Les dispositions pénales de l'arrêté du 20 avril furent main tenues, parce que l'on sentait qu'un Codepénal,suffisant sous un gouvernement quitenaitla presse enchaînée, etqui avait,comme moyens de répression , la haute police et les prisons d'État , ne l'était plus sous un gouvernement libre et constitutionnel qui ne pouvait et ne voulait punir que d'après la loi.

Toutes cesdispositions furent maintenues par l'art. 2 addition neldela loifondamentale.

2

» La loi du 10 avril 1815 , et l'arrêté royal du 20 du même mois , contiennent des dispositions propres à réprimer , d'une manière prompte et énergique, les troubles et la malveillance ; ces dispositions ont été dictées par la conviction intime que les lois pénales, ainsi que les institutionsjudiciaires jusqu'ici exis tantes, nesontpas suffisantes pour punir promptement et exem plairement les malveillans qui voudraient faire naître la défian ce, le trouble et le désordre.

« Ce Code pénal, ces institutionsjudiciaires également étran gers l'une et l'autreà notrenation,s'accordaient cependantparfai tementavecle système d'un gouvernement... qui trouvait dans sa haute police... un esclave toujours prêt et disposé d'avance àse courber devant ses désirs. »

Vient ensuite le motifpour lequel l'on supprime la Cour spé ciale et l'on maintient les mesures répressives de l'arrêtédu 20 avril.

<«Un gouvernement constitutionnel dédaigne de pareils moyens ; sous un tel gouvernement, la loi seule doit parler..

C'estainsi que le gouvernement répondait aux observations des sections , et la loi fut adoptée par 67 voixcontre 5. (Gazette générale des Pays-Bas du 21 février 1818.)

« Laloidu 10 et l'arrêté du 20 avril ne sont rien moins que des lois temporaires. Leurs dispositions , en tant qu'elles appar tiennent au droit criminel proprement dit , doivent naturelle menttrouver place dans tout Code pénal ; l'absence de pareilles dispositions s'est fait sentir plus particulièrement à l'occasion desévénemens de 1815. En France, on n'a pas eu besoin de pa reillesdispositions,parce qu'on avait dans ce pays-là des ressour ces politiques , comme il constepar le décret du 30 mars 1810, concernant les prisons d'État.

Qu'on ne dise donc plus que la religion des États-générauxa été surprise , que lejour de la passation de cette loi a été une journée de dupes; on voit par le rapport de la section centrale que toutes les objections qu'on a faites depuis contre cet arrêté

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Parle rapportde la section centrale, on voit qu'une des sec tions a cru que comme la loi du 10 avril et l'arrêté du 20 avril 1815 , contiennent des dispositions provoquées par les circon stances , ainsi que l'indiquent les considérants , il est également nécessaire d'exprimer dans le présent projet de loi , que cette loi ne sera obligatoire que jusqu'à la promulgation d'un Code général ou pour un temps déterminé; et que son Exc. y a ré pondu :

<<Ce nesontpar conséquent pas des délits temporairesou poli tiques, maisdes crimes réels qui doivent être assujétis à des pei nes déterminées par les lois ; les peines statuées par le projet, sont lecomplément du Codepénal encore en vigueur, etdoivent subsister aussi long-temps que ce Code aura force de loi , parce que l'intérêtpublic l'exige. >>

Il s'ensuitque l'arrêtédu20 avril 1815, qu'on pouvaitregarder avant 1818 comme une disposition exceptionnelle , est devenu parlaloi du 6 mars , une loi pénale ordinaire , jusqu'à ce qu'il en soit autrement disposé par une nouvelle loi ou par le Code pénalprojeté, qui co-ordonnera et présentera un ensemble de dispositions pénales.

( II )

Nous ne pensons pas que ce système puisse avoir quelquesuc cès , surtout après l'arrêt que la cour vient de prononcer dans une cause semblable .

Dira-t-onencore qu'il n'estpas applicable à la presse? Autant vaudrait dire quel'article 366 du Code pénal ne s'appliquepoint aux calomnies répandues par la presse, puisque laliberté de la presse n'existait point lorsque cet article a été promulgué. A la vérité, l'arrêté-loi n'a pas été fait expressément pour la presse , mais il suffit de jeter les yeux sur la généralité de ses dispositions , pour se convaincre qu'il punit l'action de chercher à exciter le trouble oule désordre , n'importequel soit le moyen qu'on emploie pour commettre cette action , que ce soit à l'aide de la presse ou de toute autre manière , il suffit que l'action existe pour encourir les pénalités établies.

pourquoi revenir sur ces tristes souvenirs , et vous rap peler une époque désastreuse où notre malheureux pays était asservi?Qu'il nous suffise d'établir parles pièces dont nousavons eu l'honneur de vous donner lecture , que de bonne foi on ne peutpassoutenir que l'arrêté-loi n'existe plus.

été élevées dans les sections, et quelegouvernement y aré pondu avec la plus grandefranchise,sans lamoindre équivoque; les États-généraux ontreconnu la justessede ces réponses et ont maintenu l'arrêté devenu loi , comme un complémentnécessaire au Code pénal dans l'état de notre législation actuelle.

Soutenir le contraire, serait vouloir que par ses discours, ce lui qui, dans une réunion publique de quelquespersonnes, cher cheraità susciter la défiance et le troubleparmi les habitans du royaume,seraitpuni, tandis que l'écrivain qui àl'aide delapresse, répandrait le venin de ces mêmes discours, dans toute l'étendue du royaume, resterait impuni: onsentqu'un pareil système mè nerait à l'absurde.

.*Legouvernement impérial , toujours absolu, dédaignait les moyens légaux de répression; on se rappelle encore qu'en 1813, deux citoyens de cette ville furent, pour quelques propos, enlevés etconduitsà l'insu de leur famille, au château de Ham ; et toute laBelgiquese souvient qu'à l'entrée des alliés on trouva plus de 50 prisonniers d'État dans la maison de correction à

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Gand.Mais

Après avoir cherché à faire croire qu'on poursuit arbitraire ment les patriotes, il s'efforce à faire honnir, bafouer,poursuivre, maudirou anathématiser tous ceux qui,par opinion ou dévoue ment,soutiennentleministère, même ceux qui, parleursactes,ne démontrentpoint qu'ils sont opposés àce ministère. C'est comme si l'auteur disait , tous ceux qui ne seront point de notre opi nion et qui ne marcheront pas sous nos bannières, doivent être honnis, bafoués , poursuivis, maudits ou anathématisés par le peuple. Ceci rappelle les époques désastreuses de la révolution française où lafaction forçait, au nom de la liberté, à prendre la cocardeet se coiffer du bonnet rouge.

Sil'auteuravait eu l'arrêté-loi sousles yeux , et avait cherché à encourir les pénalités qui y sont établies, il n'aurait pas mieux réussi.Eneffet , l'arrêté porte: Ceux qui chercheraient à susciter entre leshabitans la défiance, la désunion et les querelles.

Ladésunion. L'auteur excite le peuple à poursuivre sous le

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Dans lepremier de ces articles, l'auteur, après avoir nommé la poursuite exercée contre les rédacteurs , de déplorables procès , et insinué qu'onpoursuitles opinions et non les actions , s'adresse aux passions de la multitude , et s'écrie que laprospé. ritéfuira de plus enplus uneterre où il n'existe aucune garan tie, où la liberté n'est qu'un vain mot, un leurre, une provo cation pour convertir quand il plaît, les dupes en coupables, lespatriotes en séditieux.

La aéfiance. L'auteur cherche à faire croire au public qu'on poursuit arbitrairement , qu'on emprisonne , torture , juge et condamnepourdes opinions, qu'il n'existe aucune garantie,que lalibertéest unvain mot , un leurre pour convertirles dupes en coupables, lespatriotesenséditieux.

La seule question donc qui vous est soumise , est de savoir si l'accusé a cherché, par les écrits incriminés,à susciter la défian ce et la désunionparmi les habitans; si votre consciencerépond affirmativement , vous ne pourrez vous dispenser d'appliquer l'une des peines établies par l'arrêté.

Les articles incriminés sont un article inséré dans la feuille du 8, et unautre danscelle du 22 novembre dernier.

Et , c'est un homme qui se dit éminemment libéral qui avance ces propositions ! Quel autre langage pourrait tenir le fanatisme ou l'intolérance religieuse et politique?

Les querelles. L'auteur veut contraindre chacun àprouver, par ses actes, qu'il n'est dévoué à aucun ministère , sous peine d'êtrehonni , bafoué , poursuivi et maudit.

Pour le2mearticle incriminé qui se trouve dans la feuille du 11 du même mois , l'auteur, tout en cherchant à donner une explication de son premier article, persiste à exciter le peuple à bafouer , honnir et poursuivre ceux qu'il appelle des minis tériels.Cen'est point là lelangage d'un auteur qui n'est inspiré que parle désir d'être utile à ses concitoyens,celui-ci s'exprime avec modération et cherche à soutenir ses opinions par la force du raisonnement , jamais il ne s'adresse aux passions de la multi tude,jamaisilne cherche àaigrir les esprits , il laisse ces moyens. qu'il rougirait d'employer , à la mauvaise foi et à l'esprit des factions.Ondevait

nom de ministériels , tous ceux qui, par leurs opinions , tien nent à un ministère légalement établi.

1

s'attendre que des écrivains poursuivis pour abus de la presse , se seraient servis de cette même presse , pour dé naturer les faits et faire croire au public , aisé à induire en er reur , que par un abus de pouvoir , on voulait les immoler à la haine et à la vengeance des autorités supérieures. C'est une vieille tactique dont on s'est servi parfois , dans des momens de trouble , avec succès dans un pays voisin. On devait encore s'attendre que ces mêmes écrivains chercheraient à répandre de la défaveur sur leurs juges , à les faire honnir même , s'il était possible, comme desministériels, et tenteraient de les ridiculi ser en dénaturant les considérans de leurs jugemens. On trouve toujours des personnes quine réfléchissentpoint, et croient sans se donner la peine d'examiner; mais qu'une erreur ainsi répan due ait trouvédes appuis dans une assemblée auguste , et qu'un de ses membres, partant d'une fausse base et oubliant le respect dûaux différens pouvoirs , s'écrie que des officiers duparquet requièrentl'application de l'arrêté du 20 avril 1815 , contre des écrivainsqui ontprétenduementinjuriéun ministre, etque

( 13 )

( 14 )

Comme autrefois la loi majestatis àRome, remise en vigueur pour atteindre des paroles ( Tacite, ann. lib. 1 c. 72. ), voici un texte contre les trahisons , les séditions en faveur de l'étranger , invoqué contre des écrits menaçant déjà les paroles, bientôt le silence,et ensuite lespensées. Cetexte, est-ce celui d'une loi(e.rt. 4. 163, L. F. et 4 C. P. ) ? non : il n'existe que sous lenom et la formed'arrêté. Etc'est un actecontre lequel la nation entière n'a qu'unevoix ; que personne n'ôse défendre ; attaqué au sein des Etats-généraux, dans leur dernière session ; dont le roi lui-même, aannoncéle remplacement àl'ouverture de la session actuelle ; que depuis la représentation nationale , la nation , l'étranger même ontflétri comme lahonte ; acte dont la légalité originaire, lanature et l'applicabilitésont enveloppées d'ombres et de ténè bres.Le ministère public , la partie accusatrice serait-elle donc tel lement maîtresse du terrain, qu'elle pût à son gré se poster au

La parole est ensuite àMe Van Meenen.

Quant à vous MM. , habitués à remplir des devoirs souvent pénibles , mais toujours sacrés, incapables de fléchir devant tout cet échafaudage de paroles, élévé par les cris de l'erreur et des passions , et les vociférations de la mauvaise foi , vous examinerez avec le calme et l'impartialité qui accompagnent la justice, les écrits incriminés ; et sans vous arrêter à aucune considération étrangère à la cause , vous donnerez à la ques tion que nous aurons l'honneur de vous soumettre , la réponse que votre conscience dictera.

desjuges sont assez pusillanimes pour déférer à de sembla blesréquisitoires , voilà ce qui nous étonne , voilà ce qui nous afflige , d'autant plus que dans les causes dont il entend parler il ne s'agissait point decet arrêté.

Qu'on pardonne ce qui semble extraordinaire dans lamarche et les moyens, à cequ'ily a réellement de bien plus extraordi naire dans la cause. Il y a huit jours , une des plus belles espé rances , aujourd'hui une des plus honorables illustrations du pays,surle banc des accusés ! --Accusés de quoi? D'avoircherché, dans un journal , à troubler le repos public auquel personne n'est plus intéressé qu'eux.

JaI35

Qu'on cessed'accuserses doctrines de nouveauté : elles ne sont nouvelles , ni pour lui qui les établissait , il y a passé onze ans, dans l'Observateur Belge ( tome 9 ) à l'occasion du procès de M. l'abbéDefoëre; ni pourlatribune nationale,oùles professaient en février 1818, MM. Reyphens,Dotrenge et De Crombrugge,lors de la discussion de la loi du6 mars 1818, et oùdepuis elles ont reçu un appui et un développementtout autrement solennel ; ni pour les cours et lestribunaux, devant lesquels elles ontété soutenues avec autant de courage que de talent en 1817. Si elles n'y ont pas alors été accueillies, qu'on se souvienne que les jugemens et lesarrêts ne sont chosesjugées qu'entre les parties ;qu'il fautjuger non exemplis, maislegibus ; et que, pour constituerce que nous appelons une jurisprudence , il faut rerum perpetuò similiter judicatarum auctoritas. Qu'on songe, au reste , que notre état politique, nos institutions , notre situation , la cause même sont des nouveautés et l'arrêté du 20 avril 1815 même , a-t-il du moins pour lui le mérite d'une antiquité bien vénérable ? "

1.

Le ministère public n'a lu qu'un fragment du discours du ministre lors de la présentation du projet, en la séance du 3 fé

Qu'on cesse donc de s'étonner que ledéfenseurde M. De Potter s'écarte de cette ornière ; qu'on cesse de lui'en faire un reproche, et presque de le lui imputer àcrime. C'estun devoir qu'il rem plit ;et les devoirs ne se plient pas à nos convenances.

( 15 ) sein de cette mystérieuse obscurité, et néanmoins nous parquer dans l'ornière ordinaire ?

Après cet exorde , Me Van Meenen observe que le ministère public s'étant d'abord particulièrement attaché à établir que « l'arrêté du 20 avril 1815, qu'on pouvait, dit-il, regarder avant » 1818 comme une disposition exceptionnelle , est devenu , » parla loi du6 mars 1818 , une loi pénale ordinaire. » Il va combattre cette erreur ; il le fera , en soumettantà la cour l'ensemble des faits et des actes relatifs à la présentation, au rapport, à ladiscussion et à l'adoption du projet; il les puise là où le ministère public a lui-même puisé ses données, la Gazette générale des Pays-Bas, partie officielle ; mais au lieu de se borner à quelques fragmens détachés des actes qui se trouvent dans les nºsdu 24 février et du 17 mars, il embrassera tout dans son ensemble etsans rien détacher.

« Pouratteindre ce dernier but, la loi du 10 avril a établi , pour cette espèce de crime, une autoritéjudiciaire ainsi qu'un mode deprocédure , qui ne pourraient point être considérés comme absolument nouveaux dans les provinces où ils furent introduits par cette loi , ni comme entièrement étrangers aux institutions judiciaires qui y avaient existé peu d'années aupa ravant.»D'une nature en quelque manière différente, étaient, pour d'autres provinces , les dispositions établies à cetégard par l'ar rêté du 20 avril 1815 , qui , tout en prescrivant une semblable formede procédure, attribuait la connaissance et le jugement deces crimesà une cour composée dehuit conseillerspris dans le seinde la cour supérieure de justice à Bruxelles ».

« Les circonstances difficiles et désastreuses dans lesquelles se trouvaitle royaume des Pays-Bas, au printemps de l'an 1815, et qui semblaient favoriser parmi nous la défiance, la désunion / et la discorde, réclamaient des dispositions légales propres à ré primer les crimes qui pourraient enrésulter, et àpunirpromp tementles coupables.

M. VanMeenen fait remarquer ces incidentes sur la légalité originaire etactuelle de la cour spéciale extraordinaire; comme une pétitionde principe par laquelle le ministre se débarrassait des attaques lancées à cette cour en 1817 , et allait au-devant des objections que le projet pourraitsubir.

( 16 ) vrier (gaz. gen. du 24 février ) ; il aurait peut-être dû le lire en entier, encommençant par l'intitulé même du discours que voici :

Cette autoritéetce modede procédure, ainsi légalement éta blis, et qui, d'aprèsle texte de la loiprécitée, devaient exister, jusqu'à ce qu'il y aurait étéstatué par des lois générales pour le royaume, existentdonc encore légalementjusqu'ici.

« Discours du ministre de la justice , chargé par le roi de proposer à la seconde chambre des États-généraux , un pro jet de loipour rapporter celle du 10 avril 1815 et l'arrêté du 20 avril de la même année, en ce qui concerne le mode de procédure particulier établi pour les délits y énoncés. »

11

Le ministre commença par le fragment que le ministère public a extrait , mais il ajouta :

1 1

» 1º... 2º..3º... 4°...surleprojetrelatifà l'abolitiondumode3

« Le président informe ensuite la chambrequela sectioncen trale est prête à faire son rapport sur les projets de loi sui vans :

I

Certes desnouvelles et d'ultérieures réflexions eussent étéuti les, nécessairesmême, silebut du projet eût été,non point sim plement d'abolirlajuridiction et le mode de procédure extraor dinaire , mais , defaire passer del'ordre exceptionnel, dans la loi pénaleordinaire, les dispositions exorbitantes , vagues, am biguës,indéfinies delaloi et de l'arrêté relativement auxdélits et auxpeines. C'eût été le cas de distinguer dans la loi etdans l'ar rêté , les crimes et délits communsqui sont tels par eux-mêmes , entoustemps en tous lieux, dans tous lescodes , d'avecceux qui 1 ne sont tels que par exception, par circonstance ; c'eût été le cas des'expliquer sur la latitude effroyable des peines, et de dire si on entendait ou non l'abandonner à l'arbitraire du juge quel. conque,àquelquedegréet en quelque nombrequ'il pûtjuger.On tint donc, et onadû tenir pourconstantque le but du projetn'é tait que d'abolir la juridiction et la procédure extraordinaires ; aussi lit-on en la séance du 13 février (g. g. du 16 février 1818): $

(( 47 ) ,1 ***

112

» Voilà, N. etP.S., lebut du projet deloi que le roi m'a char géde présenterde sa part àVV. NN. PP... hit Suitle projet, après la lectureduquel le ministre ajoute :} « D'après ce que j'ai eu l'honneur d'exposer à VV, NN. PP. par rapport aubut du projet de loi que je viens de lire dans l'instant, il sera, jepense , inutile d'y ajouter de nouvelles ré flexions pour éclairer davantage la matière.» ..13{ 1 1

Cependant, continue le ministre, l'existencede cettejuridic tion extraordinaire , ainsi que du mode de procédure , peuvent être actuellement considérés comme un objet qui n'intéresse que faiblement l'exercice de la justice ,et cette même considé ration, jointe au désir du roi d'écarter autant qu'il est possible toutce qui peut inquiéter les citoyensmoins éclairés, adéterminé S. M. à abandonner désormais au juge ordinaire la con naissance etlapunition des crimes mentionnés dans la loi et l'arrétéprécités et d'après laforme ordinaire de l'institutioncriminellegarde

214x

( 18 )

« Une autre section a désiré que les termes du considérant dela loi: peuventêtre considérés-peuvent étrelaissés, fussent remplacés par ceux-ci ont actuellement cessé d'exister, et qu'enconséquence la connaissance et lejugement de ces crimes peuventêtredorénavantlaissés aujugeordinaire,etc., etc., etc.

» Le présidentouvreles délibérationssur le projet de loi por tant révocation du mode de procédure extraordinaire établi parla loidu 10avril 1815 etpar l'arrêtédu 20 du même mois.

spéciale deprocédure institué par la loi du 10 avril 1815 et Farrêtédu 20 dù mêmemois; » et, séance du 18février(g. g.21. février 1818) . ... 2.59

»Ilesthorsdedoute que l'un et l'autre subsistant légalement; C'EST LA NOUVELLE LOI qui sert A LES FAIRE CESSER, et il n'y a qu'un acte législatifdecette espèce qui puisse dans ce cas pro noncer l'abrogation.

» RÉPONSE. La rédaction proposéepourrait donner lieu à poser que l'arrêté et la loi du mois d'avril 1815 n'existent plus et ont été tacitement abrogés, ce qui n'estpas sup lecas.

» Le rapport général de la section centrale à ce sujet..., est conçuences ternies » 303

Ce } ** contient bien en réalité l'observation d'une seerapport tion et la réponse du ministre, que le ministère public a jugé à propos derecueillir ; mais elles sont immédiatement suivies de celles-ci qu'il est fâcheux qu'on n'ait pas aperçues, sans doute :1

Laquestion ainsiposée, on passe à la discussion (g. g. du....)

«D'ailleurs , l'abolition de la juridiction et de la procé dure extraordinaires était l'uniquebut duprojetde loi , lequel ne devait pas donner lieu à des discussions sur des objets qui en sont absolumentdistincts. » Cla

»UNESECTION a aussi témoigné le désirer qu'à l'avenir , en présentant de nouveaux projets de loi, on eût soin que les dis positions des lois antérieures que ces projets confirment, y fus sent insérées dans leur entier, ce qui serait plus facile et ren draitla loiplus complète. 148

« RÉPONSE. Cette insertion estàtous égards désirable; mais elle est impraticable dans l'espèce,à cause de la différence desdispó sitions pénales conservées (uit hoofde van de onderscheidene strafbepalingen.) ** 8

M. REYPHINS par les principes qu'ila professés en une autre occasion, n'a pu laisser de doute sur sa conviction intime que tout ce qui avait été créé pour un autre ordre de choses que celui qui existe ence moment, estvenu à cesser par la seule forcede l'introductiond'un systèmenouveau, surtoutlorsqu'on fait succéder un régime constitutionnel au bouleversement causépar de funestes secousses dans presque tous les États de l'Europe. » ruit99 is,bu 491679 20 Lobe in buha ; B

L'orateur}

faitun parallèle entre les circonstances actuelles et celles de1815, qui ont paru à tortpeut-être même alors exi ger les dispositions de l'arrêté Si on a cru nécessaire de tirer de l'oubli ces actes du mois d'avril 1815,bce'n'aurait dû être que pour les abroger d'un trait de plume, et nous faire perdre le souvenir de leurs motifs, de leur objet et de leur date.. 1 Lapropositiondeconserver ici une partie d'uneloi, là unepar 11 tie d'un arrêté, tous les deux émanés d'une autorité quin'existe - plus dans l'ordre actueldes choses, est pour lui unsujet de re - gret. Mais quand àcette irrégularité on ajoute, que l'arrêté du ©20 avril n'a point étépromulgué dans une grandeoparti gdu = royaume, rien ne semble plus pouvoir résister à l'idée de Ba brogation pure et simple deld'un et de l'autre acte, sitantest qu'une abrogationexpresse estjugée nécessairen shaMais, aulieu d'une loi conçue d'une manière aussi simple on nous propose de conserver des lambeaux d'actes divers que letemps et plusencore lapaix avaient rayés de notrecode; onveutcon serverdespeines dont l'application est trop éloignée pour mé riter l'attention du législateur, et ceux quipensent que la Cour spéciale extraordinaire a besoin d'une abrogation ex

3 # 1

( 19 ) 1 2.:

M. GENDEBIEN , dit entreautres qu'il était à LaHaye, mem brede lacommission des vingt-deux , quand le décret du mois d'avril 1815 fut publié dans les provinces méridionales.Ikonieu avait pas acquis la moindre connaissance. Ihnen avaitpasmêm entendu parler alors. Il dirait plus, il ne de connaissait pas , quandil apprit avecsurprise que M. Defoere était distrait du juge de son domicile. Il n'avait pas cessé depuis lors deformer des voeux, afin que ce décret fût rapporté purement et simple ment..... Il aimait àfaire précéder son vote; qui serait pour la loi, de cette manifestation de sa doctrine et de ses sentimens.

5

( 20 )

"

*

DE CROMBRUGGE rappelle les circonstances de 1815 et surtout la conduite des Belges à Waterloo et après cette jour née. Qu'a fait la Cour spéciale extraordinaire pour amener ces beaux résultats ? Elle est restée dans une heureuse inaction pendant le court intervalle de temps pour lequel elle semblait avoir été instituée... Son existence n'était connue dans son ori gine , que des magistrats et des jurisconsultes..... On était porté à croire que cette cour n'avait point survécu aux circon stances auxquelles elle devait son existence...... On avait done totalement perdude vue tantla Cour que l'arrêté du 20 avril.... lorsqu'un procès , indigne , quant au fond de l'affaire, de a trop grande célébrité, vint les fairerevivre vers la fin de 1816.

presse pour perdre son existence , sont placés dans l'alterna tived'accepter une loi qui répugne à leurs principes, ou devoir durerencore une institution réprouvée par le régime constitu tionnel.......La nécessité de l'abrogation expresse de ces loisn'estpas du tout démontrée à l'opinant, etil ne peut que plaindreceux quifermentlesyeux à lalumière pours'opposer à une véritédictée autantpar la délicatesse quepar levéritable amour de l'ordre....... La crainte de nouvelles alarmantes ne peut plus exister, et, comme on annonce que la discussion du nouveau Code pénal est trèsprochaine, la conservation des lois temporaires est d'autant plus inutile. L'orateurlabongnepeutdonc donner sa voix en faveur du projet... *

L'orateur n'entrerait dans aucun détail sur la question.... de savoir sil'existencede la Cour spéciale était, à cette époque légale ou non. La décision dela Courde cassation deBruxelles à cet égard nécessitait l'intervention du pouvoir législatif. Si la suppression de la Cour spéciale extraordinaire était proposée comme une conséquencede celle deslois temporaires et de cir constancedesnoet 20 avril, ouplutôt si la suppressionabsolue de ces deux lois avaitété l'objet de la proposition , l'orateur ne pensait pas que la chose eût souffert de difficulté..... Pourquoi ne pas mettre le sceau àla confiance, en abrogeantdespénalités qui portent avec elles l'empreintedutemps où elles sont nées , et perpétuent ainsi de douloureux souvenirs.. Les petites émeutes occasionnées par la cherté des grains en1817 , ont été punies , non par la Cour spéciale , mais par les tribunaux ordi *.

-kostM.

11

naires.....L'orateur tenait pour une mauvaise mesure législa tiveleprojet soumis à la chambre , et voteraitpour sonrejet.)

L'orateur ne voyait dans le projet que celui d'un billd'abso lution; or, il croyait contraire aux intérêts du roi et à ceux de l'État, comme à la sûreté générale, que des fonctionnaires , et surtout des juges, quiont continué l'exercice de leurs fonctions après le terme légal, fussent, par une telle loi, soustraitsà la sévérité du Code pénal. 1.0 bolqe *0 .

Lemoyende sortird'embarras,relativementà cette Courétait, selon l'orateur , dans l'art. 67 de la loi fondamentale, dans le droit de grâce. jonqel votcobs'b arm secredno svitnanie!

1)7

L'orateur ne parlerait pas de la loi du 10 avril relative aux provinces septentrionales , l'on pouvait avoir besoin d'une loi pourrapporter ce qui était établipar une loiformelle et per manente: maisil en était autrementde la Cour spéciale extraor dinaire de Bruxelles, qui, institutée dans ces provinces, par un arrêtédu 20 avril 1815, n'était plus actuellement,qu'uneinfrac tion,fondée sur un arrêt de compétence émanéde laCour spé ciale elle-même. Dorang col canb solduq finve ossabiolai

M. DOTRENGE craint qu'on netrouve peut-être étrangequ'il re fuse sonassentimentàunprojetquisemblefaire succéderl'ordre constitutionnelàunétatdechoses que la constitutionréprouve'; unrégime stable à des lois et des réglemens temporaires qu'elle autorise, mais dont ellelimite ladurée. Sés motifs sont fortsim ples; Ils consistent en ce que les fonctions de laCour spéciale ex traordinaire........ seraient venues à cesser le 20 avril 1816 il était en conséquence inutile de déclarer par une loi expressela suppression d'un collège temporaire , que les lois, existantes. avaient déterminée depuis long-temps..... 434130024 b 1

( 21 )

L'acte qu'on nous propose, ajoutait-il, sitant est que ce soit réellementune loi, est inutile et dangereux. Sicen'estqu'un dé cret absolutoire sous laforme d'une loi , lamesure estinconsti tutionnelle , en ce qu'elle constitueune violation de la préroga tive royale. A had beeld do509,540 ib ,ul.mg 1

C'est dans les art. 28 et 2gde la loi du 20 avril 1810 sur l'organisationjudiciaire, etl'art.2:additionnel à la loi fondamen tale que M. Dotrenge trouve qu'au 20 avril 1816, la cour spé ciale extraordinaire avait cessé de subsister avec l'arrêté quilui 2

A

( 24 ) ordinaires, lesquels seraient tenus de prononcer d'après les rè gles générales de l'instruction criminelle. ecol 394

BiJeILTea21PQ20Z

LeMINISTREde lajustice prend laparole. (g.g. 22 avril 1818).

Si le but du gouvernement, dit Me Van Meenen est, comme on le prétend aujourd'hui,de convertir l'arrêté du 20 avril 1815 en une loi pénale ordinaire , sans doute le ministre va le décla rer nettement et formellement ; il va rectifier sur ce point les idées de MM. Demoor et Rosier , qui croyent qu'il ne s'agit que de décider si on veut que la Cour spéciale soit supprimée oui ou non ensuite , il va prendre à tâche de justifier l'arrêté du 20 avril 1815 , et quant à sa lé galité originaire , et quant à sa légalité actuelle , et quant à la classification et à la définition des délits , et quant à la détermination des preuves contre les graves objections de MM. Reyphins, De Crombrugge et Dotrenge : voyons donc ce quedira le ministre. t 1 BURUK " "1

I ET 2 DE LALOI DU IOETDE L'arrêté du20avRIL 1815NE SONT POINT SQUMISAUX DÉLIBÉRATIONSDESÉTATS-GÉNÉRAUX. Ainsitoutcequis'est ditlà-dessusdans la discussion, étaitsans objet, et, poursuitl'ora

" 1[1

« Le ministre dit en substance qu'il n'avait rien d'essentiel à ajouter aux excellentes raisons déduites par MM. Demoor et Rosier touchant l'affaire dont il s'agit ; et que ces messieurs avaientdit tout ce qu'il était possible de dire sur cet objet..

» On s'estsubtilement efforcé, continue S. Exc. de fixer l'at tention de la chambre sur d'autres points ; on s'est élevé tant contrela durée et la force obligatoire de la loi et de l'arrêté, que contre la convenance de la qualification de délit donnée aux actes. Les premières ont été consacrées de la manièrela plus lé gale pardes arrêts juridiques à l'occasion de l'affaire de M. De foëre;ladernièren'ade mêmeévidemmentriende communavec lateneurdela loiproposée, parlaquelle LESDISPOSITIONSDESART.

» Il semblaitausurplus àSonExc. que lepointen question con sistait uniquementà décider SI LES DISPOSITIONS RELATIVEs au pouVOIR JUDICIAIRE ETAUMODE DEDEPROCÉDUREINSTITUÉSPAR LA LOI DUIO AVRIL ET L'Arrêtédu 20 avril 1815, devaient être abrogées, oui OUNON. C'était le seul point sur lequel le roi appelait actuelle ment les délibérations des États-géneraux, ET AUQuel ils de VAIENT SE BORNER.

» L'orateur endonne surabondamment un aperçu succinct.

» 1º... 2°... 3º...4°... Cellequisupprime le mode deprocédure extraordinaire établi par la loidu10 avril 1815 et l'arrêté du 20Mesuivant».VanMeenendemande

( 25 ) teur , à parlerfranchement , un artifice qui ne tendait qu'à ob scurcirquelques points de vue. L'orateurne disait pas ceci dans la craintede s'expliquer sur le mérite de ce qui avait été avancé sur ce point, car on pourrait, si cela était nécessaire ou requis , donner des raisons concluantes sur le tout.

fut-ellepromulguée sous le titre de « loi du 6 mars 1818,portant suppressionde lajuridiction extraordinaire introduite par la loidu 10 et l'arrêté du 20 avril 1815 ».

«Enlaséance du7 mars (g.g.du11mars 1818), onreçoitquatre communicationsde la première chambre par lesquelles elle an nonce qu'elle a adopté autant de projets de loi qui ont été · acceptéspar la seconde chambre ; savoir :

» Ce serait surabondamment aussi dit Me Van Meenen ,qu'a près une déclaration si positive, et une objurgation si sévère , lachambre eût pu penser encore que les articles 1 et 2 de la loi du 10 etde l'arrêtédu20 avril 1815, étaient soumis aux délibé rations desÉtats-Généraux pour être convertis en loi pénale ordinaire; ou qu'elle eût à décider autre chose que de savoir : si lesdispositions relatives aupouvoir judiciaire et au mode de procédure institués par la loi du 10 et l'arrêté du 20 avril 1815, devaient étre abrogées, oui ou`non » .

Ladiscussion est doncfermée ; on va aux voix, et le projet est adopté à lamajorité de 67 voix contre 5, etenvoyé à la sanction de lapremière chambre.

si ce n'est pas faire injure au gou vernement que de lui supposer l'intention que le ministère pu blic luisuppose ; il demande si la chambre a dû, aapu mêmela t luisupposer.Aussilaloi

Ce n'est pas tout. La conduite du gouvernement fut consé quente à l'objet et au titre de la loi. L'arrêté du 20 avril 1815 n'avait point été publié dans les provinces d'outre-Meuse , par tie duLimbourg et les cantons contigus à la France , dernière ment réunis. Si cet arrêté est devenu, dès 1818 , comme on le prétend aujourd'hui , une loi pénale ordinaire ; comment le

4 A

Enfin , il ne fut plus question de l'arrêté du 20 avril 1815 , ni comme arrêté, ou comme loi pénale ordinaire , car on nepeut considérer comme des emplois de cette arrêté, ni les actions in tentées dans le nord en vertu de la loi du 10 avril 1815 , ni les tentatives faites dans la province de Luxembourg en 1825. Il ne futdonc plus question de cet arrêté jusqu'au moment où nous venons de le voir revivre comme arme contre la presse , àl'instar de ce que nous avions déjà vu en 1817, lors du procès de M.

ToutDefoere.déposedonc contre les assertions du ministère public sur le caractère légal de l'arrêté emprunté à la loi du 6 mars 1818.MeVan Meenen , fréquemment interrompu , tantôt par M. le président , tantôt par l'officier du ministère public , qui le rap pellent au texte même de la loi du 6 mars , aborde ce genre d'objections.Illuisemble que le mode de discuter et de délibérer , usité dans nos chambres législatives , rend ces objections, puisées dans les termes de la loi, peu concluantes ; il conçoit que, si le projet de mars 1818 eût été discuté, article par article , et amendé par lachambre, on pourraitopposer le texte ainsi discutéetamendé, àla position si formelle de la question, dans le rapport de la sec tion qui a précédé la discussion , et à la détermination plus for melle, plus limitative surtout après la discussion , et immé diatement avant d'aller aux voix , par le ministre ; mais dans le mode de délibération usité par la chambre , le texte d'un projet quelconque disparaît pour ainsi dire dès l'instantoù les sections ont terminé leur travail et l'ont remis à la section centrale.

C'est unfaitque Me Van Meenen n'a point ici à juger , qu'il ne blâme ni ne ioue , mais dont il déduit la légitime conséquence , que le texte de la loi du 6 mars 1818 doit s'expliquer par la sition de la question avant la discussion , et sa détermination plus précise avant la mise aux voix , et non point au contraire l'objet de la loi par sontexte. C'est ici le cas d'appliquer les prin cipes d'éternelle raisonque les auteurs du Code civil ont applipo

( 26 )

gouvernement a-t-il négligé de le faire publier dans le ressort de la Cour de Liége ? Comment a-t-il laissé subsister dans ce ressort la lacune , comme on dit , que cet arrêté remplit?

*

qués aux conventions ( art. 1156 , 1163 , 1175 , 1602 et 2048, C. civil. )

Il remarqueau reste, que si quelque membre de lachambre, un peu plus défiant, un peu plus pointilleux, si on veut, que ses collègues , eût prétendu discuter le texte du projet et eût obtenuaudience à cette fin , le ministre n'eût pas manqué de moyens de le justifier ou du moins de le laver du soupçon de toutearrière pensée.

Une nouvelle difficulté pouvait rester, et c'est celle-ci ; dans l'énoncé des motifs et dans l'art. 1 on dit : « les crimes détermi nés, mentionnés dans les art. 1 et 2 de la loi et de l'arrêté ; » dans l'art. 3, on ajoute : « les juges ... se règleront dans l'applica « tiondes peines auxcrimes dont il s'agit, d'après ce quiest pres «< crit parles art. 1 et 2 de la loi , d'après les dispositionsde l'ar « rêté. » Un pareil texte ne donnerait-il paspeut-être lieude sup poser que l'arrêté est maintenu , et quant à la classification des crimes, et quant à celle despeines? Or , voici ceque le ministre auraitpu répondre.

( 27)

3CS:eeIPNa120Tle

« J'ai déjà répondu à l'une des sections que les dispositions « de la loi et de l'arrêté, en tant qu'elles appartiennent audroit <« criminelproprementdit, doiventnaturellementtrouver place « dans tout Code pénal. ... . La sédition, les émeutes, le soulè « vement du peuple dans les rues et les places publiques , ne « sont pas des délits temporaires ou politiques, mais des crimes « réels qui doivent être assujétis à des peines déterminées par « les lois. » Vous voulez bien sans doute que le jugement de ces crimes soit rendu au juge ordinaire , mais non point qu'ils

D'abord, la question était nettement posée et en termes très précis le titre de la loi y correspond exactement ; il en est de mêmede l'énonciation des motifs quileprécèdent, Les motifs impérieuxquiavaientnécessitél'introduction de nouvellesformes de procédure danslapoursuite des crimes dé terminés les art. 1 et 2 de la loi du 10 avril 1815, et les art. Ipar et 2de l'arrêtédu 20 avril 1815, peuvent être considérés comme n'existant plus ; ainsi la connaissance et lejugement de ces cri mespeuvent ,à l'avenir et sans inconvénient, étre laissés aux ju ges. ordinaires et avoir lieu d'après lesformes accoutumées de laprocédurecriminelle ».

1

Quantaux peines, remarquez que danslesprovinces du nord laloi du 10 avril 1815 est une véritable loi qui n'est point jus qu'ici abrogée , et dont l'abrogation n'est pas proposée. Ceci ex plique la première partie de l'art. 3 concernant les juges duressortde La Haye. Quant àla seconde partie, remarquez d'a bord qu'il y est question des juges du ressort de la Cour de Liége ; et l'arrêté n'ayant pas été promulgué dans ce ressort, il ne peuty avoir jamais été question , l'arrêté ne pouvant s'y publier désormais qu'en vertu d'une loi expresse, il ne pourra jamais y être question d'appliquer les peines de l'arrêté. La difficulté se concentre ainsi , dans le seul ressort de la Courde Bruxelles ; mais elles'évanouit, quand on considère quel'article nedit pas les juges appliqueront les peines portées aux art. 1 et 2 de l'arrêté, mais, au contraire, les juges se règleront , dans l'application des peines, aux crimes dont il s'agit, d'après les dispositions des art. 1 et 2 ; ce qui est tout différent. La différencede positiondes provinces du nord , decelles de deçà et de celle d'au-delà la Meuse, explique assez la nécessité où l'on s'est trouvé d'employer un langage qui se pliât à toutes les exigeances et àtoutes les situations.

( 28 )

Au reste , dit le défenseur , il est constitutionnellement im possible que le pouvoir législatif fasse de l'arrêté dù 20 avril 1815 , je ne dirai pas une loi pénale ordinaire , mais une loi , fût-ce même une loi ou circonstancielle, outemporaire, ou provisoire, ou transitoire , choses que l'on confond par trop , qu'on n'a pas démêlées dans les discussions de la loi de mars 1818 , et quenous n'avons icique le temps d'indiquer.

Ces explications, Me Van Meenen se les approprie ; parelles, le texte de la loi rentre en harmonie avec la commune in tention du gouvernement d'une part, et de la chambre, de l'au tre, lorsque le projet fut discuté et adopté ; (art. 1156, C. civ. ) ; par elles , le gouvernement n'a pas proposé une chose seule , en envoulant plusieurs (art. 1162 C. civ.) ; par elles, la généra lité des termes se détermine aux choses sur lesquelles il paraît quel'on entendait traiter ( art. 1163).

restent impunis : or c'est évidemment de ce genre de crimes , rien que de ce genrede crimes , qu'il s'agit dans le projet ; ma réponse aux sections ne laisse pas de doute là-dessus.

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L'audience d'aujourd'hui , commencée avant neuf heures du matin , en présence d'un public aussi nombreux que la veille, a offert un intérêt qui laisseraun long souvenir. L'hono rable M. de Potter est sur le banc des accusés. On l'a en core amené en voiture , et cette fois avec une escorte de huit gendarmes. Le président avertit les défenseurs que la Cour s'attend à voir aborder sans préambule la díscussion des articles incriminés , et qu'ils pourront , s'il y a lieu , reprendre la dis cussion de leurs divers moyens endroit sur lefait.

La parole està Me Van de Weyer. Voici le résumé de sa plaidoirie et de ses répliques.

Ici, Me Van Meenen fait remarquer que,dès qu'avec le minis, tère public , au lieu de limiter l'arrêté du 20 avril1815 aux circonstances de 1815 , aux défits d'une nature séditieuse , on l'étend à tout ce que la généralité effrayante des termes dans lesquels l'art. i est conçu , peut embrasser , on fait de cet acte un suicide législatif. Les développemens dans lesquels le dé fenseur entre à cet égard , ne peuvent trouver place ici, et sont superflus ; car , il n'est personne , qui en lisant l'arrêté avec at tention, ne puisse se convaincre, qu'entendu dans le sens du mi nistère public , il peut s'appliquer à tous crimes , délits , con traventions , actes les plus innocens, comme lesplus coupables; autantvaudrait dire d'unseul trait de plume:lesjuges applique a rontaux actions qu'ils jugeront à propos , les peines qu'ils ju geront convenir, de l'exposition d'une heure à six , de la dé gradation, de la marque , de l'emprisonnement de deux à dix ans , d'une amende de 100 à 10,000 francs , soitséparément, soit cumulativement.

( 29 )

Vous venez d'entendre mon confrère Me Van Meenen , sur l'inexistence ou l'abrogation de l'arrêté d'avril 1815. C'est maintenant sur un autre terrain que la discussion va se porter. Nous supposerons l'existence de l'arrêté d'avril reconnue , son abrogationà défautde circonstances identiques rejetée , et son application aux délits de la presse établie. Il nous reste à exa miner comment le ministère public a trouvé , nous ne dirons pas des raisons , mais l'ombre du plus léger prétexte , pour ap

AUDIENCE DU 20 DÉCEMBRE 1828.

M. de Potter ne tombe ni dans la première , ni dans la se conde, nidans la quatrième disposition de l'art. 1 de l'arrêté d'avril 1815 : la troisième est la seule qui, suivantle ministère public , lui soit applicable.

les con

Cette véritépeut-êtreblesse encore les oreilles endurcies , de quelques hommes demeurés stationnaires au sein de tous les

Or , quelles sont , aux termes de cette disposition , ditions requises pour qu'ily ait crime ou délit?

T1º Il faut d'abord qu'il y ait un fait , un acte , qui, en soi , par lui-même, soit de nature à pouvoir produire le trouble , la défiance , la désunion. Nous n'avons ici que des écrits. Or , écrire sa pensée , en général , est un acte de l'intelligence , qui , bien loin d'être répréhensible , est, au contraire , le signe le plus éclatant de sa perfection. Écrire sa pensée sur les affaires deson pays , sur les actes du gouvernement , est une action li cite , digne, louable ; c'est un devoir qu'aucune considéra tion particulière , qu'aucun prétexte de prudence ou d'intérêt privé ne peut dispenser de remplir.

Mais , dit l'acte d'accusation , ce sont des écrits où l'on tâche d'inquiéter les habitans sur leur bien-être général, sur leurs garanties légales, existantes, et leurslibertés !

Messieurs , il est de la nature du gouvernement constitution. nel d'entrenir entre les habitans une salutaire inquiétude sur leur bien-être, leurs garanties légales et leurs libertés.

Comment donc cette action , bonne et louable en soi , a-t-elle été viciée ; comment a-t-elle été dénaturée au point depouvoir produire tous les effets dont parle cette partie de l'article? C'est là ce que le ministère public doit d'abord montrer.

Deux conditions sontimpérieusement requises.

( 30 )

pliquer aux écrits de M. de Potter les dispositions du trop fa meuxCertesarrêté.,silerôledu ministère public pouvait sebornerà direà laCour: «Vous avez les écrits sous les yeux; il estévident qu'ils ont le caractère de culpabilité que nous leur supposons » ; un semblable système d'accusation serait d'autant plus facile et plus expéditif, qu'il rejeteraitsur l'accusé toute la charge d'une preuve négative. Nous verrons, par l'analysemêmede l'arrêté, qu'il lui impose des devoirs un peu plus difficiles à remplir.

Permettez-moi, MM., une seule comparaison. Dans toutes les villes fortes , ou dans les camps retranchés , en temps de guerre, onplace de distance en distance des sentinelles, quirassurent contre les approches de l'ennemi ou avertissent de son arrivée. Que diriez-vous d'un auditeur militaire qui, devant un conseil de guerre, prétendrait que les sentinelles, en criant, à des intervalles très-rapprochés, sentinellesprenezgardeà vous, ontcherché à répandre , dans la ville ou le camp, le trouble, l'alarme, la défiance et la désunion ? Eh bien , les écrivains , les publicistes , les journalistes sont des sentinelles vigilantes pla cées pour prévenir ou dénoncer toute infraction , toute brèche faite à la loi fondamentale derrière laquelle nous sommes re tranchés; et ils nous crient tous les jours , dans des brochures et desjournaux , citoyens prénez garde à vous. Que si c'est là un acte qui, parlui-même , tend , d'une manière directe et im médiate , à produire les effets prévus par l'arrêté d'avril 1815 ,

L'écrivain , le publiciste, lejournaliste est le représentant vo lontaire de nos craintes etde nos v ux : c'est lui qui dévoile les fautes , qui relève les erreurs, combat les abus , dénonce les ac tes arbitraires , non pas seulement au gouvernement, mais en core à ceux que la chose intéresse , c'est-à-dire , à tous les ci toyens. Or, ilest impossible de rien faire de semblable , sans ré pandre , dans le système de l'acte d'accusation , le trouble , la défiance et la désunion. Que l'on fassedonc disparaître de notre loi fondamentale les droits d'écrire et de publier sa pensée, d'é lireet de pétitionner , qui sont autant de moyens de scandale , de délits et de crimes , et qui à chaque instant nous donnent occasion detomberdans l'application de l'arrêté d'avril 1815.

( 31 ) progrès ; elle n'en est pas moins universellement reconnue par tous les hommes libres , et par tous les gouvernemens dignes deles administrer. C'estpour la consacrer que la loi fondamen tale nous garantit la liberté de la presse , le droit de pétition , comme les moyens les plus propres à manifester nos craintes et nos alarmes, et le droit d'élection, c'est-à-dire, la faculté de choi sir, pour nos représentans, les hommes que nous jugeons les plus propres, par leur caractère et leurs principes, à assurer nos garanties et nos libertés contre les intentions perfides ou les fau tes dupouvoir, toujours envahisseur de sa nature.

Queprouvent, MM.,lesabsurdesconséquencesauxquelles nous conséquentsoufflebelledraitpunirconduitunesemblableinterprétationdel'arrêtéd'avril1815?C'estqu'ilestappliquéàdesfaitsqu'iln'apourobjetnideprévoirnide;c'estque,établipourprévenirlasédition,c'estàlaséditionseuleouàdesactespropresàlafairenaître,qu'illefauappliquer,etnonàtoutautreactecapablemêmederépandreletrouble,ladéfiance,ladésunion;caralorstoutexercicedelapensée,toutemiseenpratiquedelalibertéd'écrire,dudroitdepétitionetd'électiondeviendraientimpossibles;ilfaudraitdéchirerlaloifondamentale,etlaconsidérercommeunethéoriesurlaquellelapratiquenepourraitjamaisjeterundevie.Répandreletrouble,l'alarmeetladésunionnesuffiraitdoncpaspourêtrejusticiabled'uneCourd'assises,etpassibledel'arrêtéd'avril;ilfaut,deplus,lefaireséditieusement.Ici,MeVandeWeyers'appuyedel'autoritédesconsultationsdeM.Doncker-Curtius,desbarreauxdeLiége.IlestinterrompudeuxfoisparM.leprésident,danslalecturedecesextraits.Auxraisonspéremptoiresdonnéesparcesjurisconsultes,fondéestoutessurl'originedelaloi,sursonbut,sursonpréambule,surlesparolesdeS.M.dansledernierdiscoursdelacouronne,ilenajouted'autrestiréesdelalettremêmedel'arrêté,etilajoute:Or,celuiqui,aujourd'hui,provoqueraitdirectementetpositivementàlaséditionparunarticledejournal,etquiposeraitparunacterevêtuducaractèreexigéparl'arrêté,et te[C(nan0UP(6Dm

( 32 ) que le ministère public l'établisse et le prouve. Il le doit ici d'autant plus rigoureusement , que les expressions trouble, dé fiance,alarme,querelles, sont si vagues etsi larges , que les ac tions les plus indifférentes , les plus innocentes en elles-mêmes, et les plus diverses, pourraient être converties en crimes ou dé lits. Et telle est la généralité des termes de l'arrêté , et l'appli cation plus générale encore qu'on en veut faire, que l'on pour raitdire au ministère public : faites mieux; simplifiez tout d'un coup la législationpénale ; annulez le Code pénal tout entier , et bornez-vousà l'arrêté d'avril 1815 ; car il serait , selon nous, tout aussiraisonnable d'appliquer cet arrêtéà quelques querel les , à des rixes , à des bruits nocturnes , que de l'appliquer aux écritsde M. de Potter. 1

( 33 )

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dans son droit , et que le ministère public en sort en ne four nissant pointde preuvesà l'appui de l'acte d'accusation. Quesi le ministère public se résout à lefaire, ce dont il ne peut s'abste nir , selon nous , sans renoncer à l'accusation , ou sansreconnaî tredu moins implicitement qu'elle est insoutenable , alors nous 5.

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susceptible , parlui-même et en soi , de produire tous les effets quisonténumérés, celui-là mériterait, non d'êtretraduit devant une Cour supérieure, mais devantun conseil de médecins; et si j'étais consulté par sa famille, je lui conseillerais de veillerà l'administrationde sesbiens.

J'attendsdone du ministère public la preuve que j'aideman dée , c'est-à-dire, qu'il établisse le fait qui, en soi, serait de na ture à produire les effets prévus par l'arrêté.

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Et cettepreuve nesuffirait point; il faudraiten outre, et c'est la seconde condition imposée par l'arrêté , la preuve de l'inten tion : ilfaut, aux termes de l'arrêté , que l'on ait cherchéà ré pandre le trouble et la désunion. Que le ministère public nous montrequand et comment M. dePotter a cherchéà commettre ce délit. Il est,à coup sûr, plus commode dedire, comme l'acte d'accusation , que ces articles ont évidemment ce but : il reste encore à prouver que ce but, évident pour le rédacteur de l'acte d'accusation, est bien celui que M. de Potter se proposait d'atteindre ; que c'est bien pour répandre letrouble et exciter à la désunion , et non pouraucuneautre raison, qu'il a pris laplu me. En effet , l'évidence du juge n'est pas celle du simple ci toyen : il faut que le juge sache se rendre compteà soi-mêmeet aux autres de sa conviction. Aussi long-temps que cette preuve n'est pas administrée , aussi long-temps que M. de Potter n'a pas été convaincu d'avoir eu cette intention , et de l'avoir méchamment mise à exécution,dansunelettre adressée àunjour nal, moyen le pluspropre,comme chacun sait, à exciter toute une nation à la sédition ; M. de Potter se renferme , et doit se renfermer dans la déclaration faite au juge d'instruction , que telle n'a point été son intention. Tous deux , il est vrai, le mi nistère public et lui , restent jusques-là dans les termes d'une mutuelle assertion , avec cette différence que M. de Potter est

J opposerons preuves à preuves , et ce sera entre les nôtres et les siennesquela Cour aura à prononcer.

Ne changeons donc point de rôle , et ne croyons pas , parce que nous sommes accusés , qu'il faille à tout prix nous justifier devant un accusateur qui ne daignerait pas même apporter des preuves à l'appui deson accusation.

( 34 )

C'est assez vous dire, MM., que jusqu'à présent nous nous croyons dispensés d'examiner, de soutenir et de défendre les ar ticles incriminés. Qu'est-ce donc , en effet , que nous examine rions? Qu'y a-t-il de répréhensible dans ces articles? Même in certitude denotre partàcetégard. Est-cel'ensembledetel article? sont-ce telles ou telles propositions?

Il ya plus supposons que le ministère public pût étayerson acte d'accusation de faits de sédition nombreux et notoires;sup posons qu'il y ait eu chez nous des querelles, des troubles, des émeutes , et que ces mouvemens insurrectionnels eussent pour cause directe et immédiate les écrits de M. de Potter ; alors même il pourrait àjuste titre se réfugier dans la droiture de ses intentions, etprouver que loin d'avoir cette direction, il lui était impossible de prévoir , et aujourd'hui même de concevoir , les résultats qu'ont eus ses écrits ; et cela seul suffirait à sa justifica tion. Le ministère public est loin de se trouver dans une posi tion aussi avantageuse à l'accusation : la ressource abondante et riche en mouvemens oratoires des tristes et malheureux effets produits par les écrits incriminés , lui est enlevée. Ici , comme dansplusieurs autres actes d'accusation , il est réduit aux plus étranges suppositions d'intentions coupables , puisées dans les écrits, et pour tous faits criminels , à ces mêmes écrits. C'est le cercle vicieux parcouru tant de fois , et tant de fois signalépar nous-mêmes et par d'autres , dans lequel on entre de nouveau avec une égale assurance et un même aplomb. A l'aide de cette tactique, l'homme le, plus innocent , l'écrit le plus pur et le plus louable peut être accusé et condamné : l'évangile eût été un li vre séditieux, etJésus-Christunfauteurde troubleet desédition.

Que le ministère veuille donc, encore une fois, s'expliquer, et nous dire s'il n'entend incriminer que les seuls passages sur les quels il s'est appesanti , car ce serait renverser toutes les règles del'attaque etde la défense que de prétendre que nous devions

( 35 ) expliquer, commenter, justifier chaque période , chaque ligne , chaque phrase, chaque mot de ces écrits. Ici , comme tout à l'heure , nous attendons que l'attaque se développe alors , et alors seulement nous ferons usage de nos armes pour lacom battre que si elle s'abstient de le faire, nous tiendrons , et tout le monde en sera convaincu avec nous , que c'est par impuis sance.J'espère,

Supposons que M. de Potter se soit trompé sur tous les points , et que l'existence des jésuites chez nous, et la frayeur qu'ilsnousinspiraient,ne fussentpointunetactiqueministérielle; que lesjésuites fussent partout , à la Cour, à la ville; que toutes nos provinces en fussent envahies ; qu'en résulterait-il? Que M. de Potter s'est trompé ; et voilà tout. Qu'on le lui dise ', qu'on le lui démontre, c'est ce qu'il demande. Jusques-là , il a le droit de dire : Ces jésuites quevous nous dites si nombreux etsi formidables , je ne les voispoint, je ne les aperçois point ; et cependant, moi, qui ai consacré vingt ans d'études et de tra vaux à l'histoire de l'église , écrite pendant un séjour à Rome de près de dix ans, j'ai quelque droit , ce me semble , de dire queje meconnais enjésuites et enjésuitisme.

MM. , que notre pensée a été bien comprise : ac cusé, le rôle de M. de Potter est passif; accusateur , celui du ministère public est actif, et doit porter sur les points que nous avons indiqués. Toutefois , suivons un instant la marche de l'accusation , et montrons combien on s'est fourvoyé.

Le ministère public parte plusieurs fois du but évident des écrits incriminés, et seul il semble s'être mépris comme à bon plaisir. Le but évident de M. de Potter, personne n'y a été trompé;son intention a été saisie, comprisedetoutes parts ; son but a étédé dire à ses compatriotes : Nous avons jusqu'à pré sent employé et presque épuisé toutes nos forces à combattre les jésuites et le jésuitisme , ombre vaine chez nous, fantasma gorie adroite mise en uvre par leministère, pour distraire notre attention de nos affaires domestiques , et détourner nos efforts et nos coups. Cessonsd'être les dupes de cette tactique , pour ne pas en être les victimes , et tournons sur les ministériels nos armes et nos boucliers.

Si c'estlà une erreur , elle n'est du moins séditieuse ni dans son principc, ni dans ses résultats. Ses effets ont été des plus heureux; elle aguéri beaucoup d'hommes estimables et dis tingués d'une idée fixe qui paralysait leurs forces et annulait leurs talens, pour consacrer les uns et employer les autres à la défense de nos loi et de nos garanties , et faire ainsi acte de bons citoyens. Cela seul mériterait'à M. de Potter la reconnais sance publique. Celuilà, certes , serait un singulier fauteur de troubles et de sédition, qui neprendrait la plume que pour en gager ses compatriotes à s'occuper des intérêts sociaux ; et ce serait un étrange moyen de répandre la défiance et la désunion parmiles habitans, que de leur montrer et de leur faire sentir enfin que tous ont un intérêtcommun, et que,momentanément séparés par de trompeuses apparences , tous doivent se réunir et conspirer pour le bien-être général et pour les libertés de tous. Il faut avoir renoncé aux lumières du sens commun, ou voirquelquechose de bien redoutable dans cet accord unanime de tous les citoyens, pour convertir en crime l'événement le plus heureuxqui pût arriver. Ah ! les séditieux ne sont pas ceux qui prêchent l'union et la concorde, qui demandent à grands cris la liberté en tout et pour tous ; les séditieux seraient ceux qui

Ici Me Vande Weyer est de nouveau interrompu par M. Ie président, qui dit à l'avocat : Il n'est pas ici questionde jésuites ; renfermez-vous dans l'examen des articles incriminés. Me Van de Weyer lui répond qu'il n'en est pas sorti un instant, que, puisque c'est la tendance des écrits de M. de Potter que l'on incrimine, c'est à montrer leur véritable tendance , leur but évident qu'il consacre cette partie de son plaidoyer, et qu'il ne doit pas être entravé dans ses moyens de défense : il reprend lediscours qu'ilprêtaità M. de Potter,et ajoute. Aussi long-temps que, trompé, je les ai cru dangereux, je les ai combattus ; au jourd'hui, je ne vois de dangereux que la continuation de cette mystification; et bien loin derépandre l'alarme et l'inquiétude entre mes concitoyens, je cherche à calmer leurs craintes sur l'existence de cette prétendue puissance formidable occulte , et à enfaire voir le néant , ou du moins l'impuissance, quand le soleil delaliberté luira sur tous. 1

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( 36 )

Après cet exposé de la seule intention , de l'intention véri tablement évidente de M. de Potter, abordons l'examen des passages , qui , d'après la déclaration du ministère public , pa raissentavoir principalementfixéson attention. Acceptons, pour un moment , le champcirconscrit sur lequel le ministère public veut nous placer; et, les passages ainsi isolés, ainsi séparés de ce quiles explique ou les modifie, voyons ce qui a pu leur mériter une sigrave accusation.

C'est donc le, bafouons , honnissons , poursuivons les mi nistériels , que le ministère public a considéré comme portant atteinte à la sûreté , à la tranquillité des habitans ; car il dit , dans l'acte d'accusation, que M. de Potter a tâché de faire poursuivre et repousser une partie de la nation sous le nom de ministériels ,par l'autre partie. Je demanderai d'abord au mi nistère public, où et qui sont les ministériels ici désignés ? Quelle est la partie de la nation que lui-même envisage comme minis térielle? Comme leministère public, pour prouver que M. de Potter avait voulu semer la désunion , n'a pas trouvé d'autre moyen que de partager, de son autorité privée , la nation en

Relevons d'abord une erreur de M. l'avocat-général , qui , dans son acte d'accusation , considère M. de Potter tout à laI fois comme auteur et comme éditeur des articles incriminés.

( 37 ) voudraientconserverun mur d'airain entretels et tel's citoyens, exploiter les libertés à leurprofit, et que toute idée de rappro chement irrite et épouvante !

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M. dePotter n'a point participé à la publication du premier de ces articles. C'était une lettre adressée au Courrier des Pays Bas, que celui-ci était maître d'insérer ou de n'insérer point. Mais M. de Potter , apprenant les nouvelles poursuites dirigées contre ce journal , à raisonde cette lettre, déclina , en honnête homme, en citoyen courageux et indépendant , son nom en toutes lettres.

M. Van de Weyer donne lecture de la lettre ( du 14 novem bre ) dans laquelle M. de Potter prend sur luitoute laresponsa bilitéde sa lettre. Ensuite, reprenant l'examen des articles incri minés , il les lit en entier , et s'arrête sur les passages que le mi nistère public et M. le président , dans son interrogatoire , ont eu principalement en vue.

parties , la ministérielle et la non ministérielle , c'est à Iui àjustifier cette singulière classification ; ànous indiquer les si gnes et les caractères auxquels il a reconnu les premiers , et å nous demander si ce sont ceux-là que l'on veut honnir , bafouer, repousser. Jusques-là , il répugne à M.de Potter de croire que les ministériels soient chez nous aussi nombreux , que se le fi gure ici le ministère public pour la commodité de la cause ; il pas même oséaffirmer, lui, dans aucun de ses articles , qu'il enexistât ; car ce ne sont pas les employés d'un ministère , gens nécessaires , utiles et laborieux, que l'ondésigne d'ordinaire sous le nom de ministériels. Qu'a donc dit , qu'a fait M. de Potter : Opposons des mots à des mots (et il est à remarquer que le mi nistère public a soigneusement omis ces mots , dans les diffé rentes lecturesqu'il a faitesde ce passage. ); on a jusqu'ici traqué lesjésuites, bafouons, honnissons, poursuivons les ministériels »; s'il y en a, bien entendu ; c'est-à-dire , combattons-les , pour suivons-les; de quelle manière? par quels moyens? Par les seuls que nous ayons entre les mains , parles seuls qui soient légitimes dans un gouvernement constitutionnel, par des mots, desécrits, des journaux: Opposons des mots à des mots. Le ministère public prétend qu'ils sont nombreux , les ministériels , qu'ils forment une partie de la nation : c'est là une assertion dont seul il est responsable ; et s'il était possible de tra duire un citoyen pour injure faite à une nation , je doute qu'il pût se Queljustifier.est,enquelques mots , le résumé du second article de M. de Potter? Que souvent un ministère est en opposition ave la nation. Est-ce donc là une chose nouvelle et inuie? Le événemens contemporains n'en offrent-ils pas assez d'exemples Eh bien ! dans cet état de choses, c'est-à-dire , pendant l'exis tence , toujours éphémère , d'un ministère impopulaire , qui conquedéserte la cause sacrée de la nation pour se faire l'ins trumentde ce ministère, quiconque se met à sa solde, est, dit-il justementbafoué, honni , repoussépar tous les honnêtes gens, Nous disons justement , Messieurs , car quel est, dans le sens que nous attachons à ce mot , et que tout le monde y attache avec nous, quel est le devoir,....mais ne profanons point ce mot

( 38 )

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( 39 )

Est-il étonnant que M. de Potter , ayant en vue cette espèce d'hommes que nous avons dépeints, se soit écrié : Qu'ils soient mis au ban de la nation , et que l'anathème de l'anti-popularité pèse sur euxde tout son poids et avec toutes ses suites? Etquelles sont ces suites ? C'est que, partout où cette nation exerce direc tementou indirectement un pouvoir légal, ceshommes soient re jetés et repoussés par elle ; qu'ils n'aient accès ni dans les conseils de nos villes , ni dans les états de nos provinces , ni dans notre Chambre législative. Qu'a donc fait M. de Potter? Il a rappelé ce qui se pratique dans toutes les élections. Là , les titres deseditl'erquseittacem

Sa lettre , adressée au Courrier des Pays-Bas , a été insérée dans le journal de la Belgique.

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¿¡´quel est le rôle d'un ministériel? Le voici : Avoir une pensée , et l'étouffer dans son sein , une conscience , et lui imposer si lence , une volonté , et en briser le ressort ; avoir une patrie , et servir un homme , et se dévouer , non à cet hommelui-mê me, il y auraitencore là quelque chosede moral, mais à la place qu'il occupe;s'animer,cependant, de sa colère et de sespassions, et professer , avec le masque de la conviction , ses opinions et ses doctrines subversives ; avoir des concitoyens , et s'en éloi gner, les répudier , ou ne s'en approcher que pour les dénon cer et les trahir, et mériter ainsi un plus large salaire... Voilà le métier d'un ministériel. C'est la dégradation humaine dans sa plus hideuse difformité ; c'est, pourunêtre intelligent et libre, l'étatd'abjection le plus contraire à la noble destination qu'ilasur cette terre, commehomme et commecitoyen. Etleministère pu blic oserait soutenir, après cela, que les ministérielsforment une partie de la nation ! Repoussons cette idée, et croyons qu'il n'en a pas vu toutes les conséquences. L'épithète de ministériel est si odieuse, que nous avons vu naguère l'auteur d'une brochure où labassesse le dispute à la mauvaise foi, larepousser comme une trop cruelle injure, même pour lui.

Voilà donc les mots , honnissons , bafouons, repoussons les ministériels, non pasjustifiés , ilsn'enavaient pas besoin , mais naturellement expliqués , expliqués comme M. de Potter s'est donné la peine de le faire lui-même, et comme tout le monde les avait entendus , le ministère public excepté.

Acoup sûr, il était permis à M. de Potter , comme à toutci toyen, de déplorer ces nombreux procès de presse , de les qua lifier dedéplorables; il y a plus , de les improuver hautement. Les poursuites du ministère public , les arrêts des Cours tom bent dans le domaine public , et , avec le respect dû aux ma· gistrats et à leurs intentions, peuvent devenir l'objet d'un exa men sévèreet d'une censure raisonnée. Le respect pour la chose

( 40 ) candidats sont publiquement examinés ; et dans une élection véritablement nationale , la seule réputation de ministérialisme est un motifde rejet.

Appeler les poursuites dirigées contre le Courrierdes Pays Bas , déplorables procès , c'est insinuer, dit-il , qu'on poursuit chez nous les opinions et non les actions.

Ce ne sont pas seulement des phrases isolées, mais des mots isolés quele ministère public cherche à inculper.

Ici , encore une fois , M. de Potter a droit à notre reconnais sance. Il a représenté , d'une manière vive , pittoresque et ani mée quelles sont les suites naturelles duministérialisme ; et pour lui , comme pour nous , le ministérialisme est à la politique , ce que le jésuitisme est à la religion. N'eût-il arrêté qu'un seul citoyen au bord de cet abyme ; n'eût-il même fait que nousinspirerune justehorreur pour un mal qu'ilcraignaitdevoir s'introduire chez nous par quelques hommes gangrenés ; cela seul seraitune bonne action dont la nation lui tiendra compte.

De quelque côté donc qu'on envisage l'accusation, elle est insoutenable. Et sur ce banc même où M. de Potter est assis, et où , malgré tant de poursuites contre les écrivains , ses conci toyens sont encore surpris de le voir,M. de Potterest etdemeure convaincu qu'il arempli son devoir ; et nous qui parlons , et le public qui nous entend , nous partageons cette conviction. Il attend donc votre arrêt avec confiance et sécurité ; et c'est un arrêt d'acquittement qu'il attend , non pour établir et constater son innocence , mais pour qu'il soit d'accord avec la voix de sa conscience, et celle de l'opinion publique , qui juge en dernier ressort.Jene terminerai point cependant cette partie de la défense de M. de Potter , sans relever quelques expressions et certaines assertions employées dans le cours des débats.

Le ministère public parle de fanatisme , d'intolérance, et dit que les écrits de M. de Potter rappellent la révolution française et ses horreurs , et que si l'accusé n'était pas arrêté dans sa marche , et puni , c'est là qu'on en reviendrait. La révolution française et ses horreurs sontdepuis long-temps un thème usé en France ; je ne vois pas à quel propos le ministère public cherche à le réchauffer , et nous donne ici une copie pâle et effacée des réquisitoires des BellartetdesMarchangy. Au reste, que dirait le ministère public , que dirait la Cour, si je lui tenais ce langage : Il s'est rencontré de nos jours un président qui , avant les dé bats , prenait en quelque sorte l'accusé à partie , jugeant avec passion plutôt qu'interrogeant avec calme; et que j'en con clusse qu'il voulait revenir aux formes révolutionnaires dans Ja procédure ; que répondraitle ministère public? Que je calom nieles intentionsde ce président, sans doute? Appliquons cette comparaisonaux charitables insinuations du ministère public,et elles seront jugées.

En vérité, le ministère public lit avec beaucoup d'inatten tion , et cite avec unegrande légèreté les écrits qu'ilmet tant de chaleuràpoursuivre ! Ces paroles,sont celles desFrançais, inter locuteurs de M. de Potter. Mais ceseraientses propres paroles , comme ce sont bien réellement ses pensées , qu'y aurait-il là de séditieux?Quoi ! ne sera-t-il plus permis à un écrivain de dire àses concitoyens :Sans les garanties auxquelles nous avons droit, plus depaix, plus de prospérité ? C'est sans doute parler aux passions de la multitude , dans ce sens que les passions de la multitude sont heureusement dirigées aujourd'hui vers l'acqui sition de ces précieuses garanties.

(41) jugée consiste, de la part du condamné , à obéir au jugement, et, de la part du public , à ne point mettre obstacle à son exé cution. Mais le condamné , tout en marchant vers sa prison , peut dire et prouver que l'arrêt qui l'y envoye est inique, et le public peut l'absoudre.

M. de Potter, ajoute le ministère public , s'adresse aux pas sionsde lamultitude, en s'écriant que laprospéritéfuirade plus en plus uneterre où il n'existe aucunegarantie, où laliberté n'est qu'un vain mot , un leurre, une provocation, pour convertir, quand il plaît, les dupes en coupables, les patriotes en séditieux.

6

Nousvoyons avec peine , a-t-il ajouté , qu'un homme connu parses écrits sejoigneà desjournalistes.Etnous, nous voyonsavec peine quele ministère public méconnaisse le temps où nous vi vons, et son esprit, au point de chercher àdéverserlemépris sur une classe d'hommes qui rendent tous les jours des services éminens à la civilisation du monde. Le ministère publie igno rerait-il qu'il attaque ici , dans lesjournalistes, les hommes les plusdistingués de tous les pays? En Angleterre , les Sheridan, lesFox , les Brougham , les Walter-Scott, les Canning , etc. , sont des journalistes. En France, les Châteaubriand , les Benja min-Constant , les Fiévée , les Kératry , les Dubois , etc. , sont des journalistes. En Hollande , les Donker-Curtius , les Vollen hoven, lesKinker, etc.,sontdesjournalistes. EnAmérique,Fran klin était journaliste , et c'est à cette école que se sont formés tous les publicistes. En Belgique , les Van Meenen ( je lui de mande pardon de le citer en sa présence , mais, qui a éclairci plus de questions sociales dans notre pays que lui ?') , les Les broussart, les Plasschaert, les Barthélemy , les Rogier, les Van Hulst , sont ou ont été des journalistes. Et si , unjour , j'a vais à rendre compte à mes concitoyens de, l'emploi de mon temps et de mes facultés, dans l'intérêt de mon pays , j dirais avecorgueil : « Mes premières pensées ont été consacrées à nos garanties sociales ; et je suisjournaliste depuis autant d'années. » Oui, messieurs, je tiens à honneur d'être journaliste depuis plusieursannées ; et jamais le ministère public , par des décla mationsusées , ne parviendra à flétrir des hommesqui écrivent en conscience et avec courage, et défendent toutes nos libertés àleurs risques et périls.

( 42 )

Me Van de Weyer reprend la parole , et ajoute quelques ré flexions sur la partie de l'acte d'accusation relative au Courrier desQuePays-Bas.répondrons-nous maintenant , dit-il , à cette partie de l'acte d'accusation , où le Courrierdes Pays-Bas est si violem

(Ici le ministère public interrompt M. Van de Weyer, et rappelle les paroles qu'il a dites , et qui n'avaient point pour objet d'attaquer les journalistes , classe d'écrivains composée, commel'afort bien dit MeVan de Weyer, d'hommes distingués, et qu'il estime autant que personne au monde ).

Le ministère public se lève et répond aux plaidoiries de MeVan deWeyer, qui luiréplique immédiatement. Afin d'évi ter les répétitions, nous fondons ensemble et en quelques mots les deux répliques, ce qui nous sera d'autant plus facile, quele ministère public n'a produit aucun nouveau moyen pour soute nirl'accusation.Jecommencerai maréplique au ministère public,dit Me Van deWeyer, parles derniersmots qui luisont échappés, et qui me blessent personnellement. En montrant à la Cour qu'il y avait, dans l'acte d'accusation, une erreur manifeste, puisqu'il qualifie M. dePotter,nonseulement d'auteur des articles incriminés,mais encored'éditeur, ce qui n'est pas; j'ai, a osédire le ministère pu blic, employé unmoyenbas (laagemiddel). Je suisétonné, je suis scandaliséd'avoir entendu ces paroles, qui blessent, dans ma per sonue, tout l'ordre des avocats. Il n'appartient pas au ministère public , il n'appartient à personne ici , de qualifier de bas les moyens que j'emploie en conscience et avec conviction, dans la défense de M.de Potter. J'ai relevé une erreurpalpable de l'acte d'accusation. Le ministère publicen induitque M. de Potter veut ainsi répudier la responsabilité de ses écrits. C'est une nouvelle erreur commise sciemment. M. de Potter , on le sait , n'ajamais reculé devant cette responsabilité , et maintenant encore , par monorgane,il l'assume toutentière surlui. Je crois, au reste, que la Cour, etmes concitoyens qui m'écoutent, sontconvaincusque les moyens que j'ai employés sont en tout dignes de M. de Pot ter, et en harmonie avec les principes que j'ai toujours haute mentprofessés.

( 43 " ment attaqué ? D'abord , que M. dePotter est étranger à sa ré daction , ainsi qu'il l'a déclaré ; et que , par conséquent, il n'a point àse justifier de sa couleur et de sa tendance ; et en se condlieu que, si le ministèrepublic a tant et de sigrands griefs contre ce journal , qu'il en fasse l'objet de nouvelles poursuites devantun autre tribunal, où le Courrier pourra lesrepousser , et non un thème à déclamations devantla Cour , où ce journal n'est pasreprésenté ni mis en cause. (Interruption duprésident, qui dit quetout cela est étranger aux débats. Me Van de Weyer lui répond quelques mots , et persiste dans les conclusions qu'il a prises. )

( 44 ) :

>>. témoignages, ouétablies par des actes irréfragables , ou mises » au-dessus de tout doute par une réunion d'indices, tous plus » clairs que le jour.

C'est làunede ces lois qu'aucune autre ne peut altérer ni rapporter en partie , ni abroger tout entière ; dontnilesénat ni le peuple ne peut délier ; qui n'a besoin nide promulgation ni d'interprète ; qui n'est pas autre à Rome, au tre à Athènes , autre aujourd'hui, autre demain, etc. etc. etc., ( Cicer. de repub. L. 3, C. 17 ).

Après laréplique de MeVande Weyer, Me Van Meenen deman de laparole pourrésumer la défense, elle lui est accordée. Il débute par la L. ult. Cod. de probat. « Sachent tous les ac » cusateurs, qu'ils ne peuvent déférerà la justice criminelle que » des accusations , ou fondées sur de suffisans et d'irrécusables »

Leministère public se lève,explique les motsqu'ilaemployés, et assure qu'il n'a paseu l'intention de blesserM VandeWeyer. Satisfaitdecetteexplication,l'avocatreprendla parole etsefélicite d'avoir entendu professer des principes libéraux sur la presse, même par le ministère public. C'est, dit-il, une heureuse con séquence du gouvernementconstitutionnel, que ces expressions de respect de toutes les autorités pour les principes généraux. Quant aux actes de non ministérialisme que le ministère public juge impraticables , il rappelle les loyales professions de foi de plusieurs honorables députés , à l'époque des élections. Tous lescandidats, dit-il, font plus ou moins desemblables professions de foi , les uns franchement et publiquement, ainsi qu'il con vient de le faire,les autres confidentiellement et en petit comité, tant il est nécessaire aux candidats de faire connaître leurs principes, et de donner en quelque sorte des gages à leurs con citoyens. Du reste, il démontre que, ni dans les premiers dé veloppemens donnés à l'acte d'accusation , ni dans sapremière et dans sa seconde réplique , le ministère public n'a satisfait aux deux conditions qui lui étaient imposées , et qu'il n'a rencontré aucunde ses raisonnemens. Toute ma défense, ajoute-t-il, est demeurée entière et intacte. Je persiste.

Toutecondamnation doitreposer sur une évidence qui frappe tous les yeux ; ceux du juge quidoit à Dieu, à lui-même, àla so ciété entière de pouvoir rendre raison desaconviction ; ceuxde l'accusé , que lapunition doit amender et réconcilier avec lasa

Il faut se garder , dans les matières pénales, des habitudes. contractées dans le jugement des causes civiles : dans celles-ci, à défautd'évidence,on suitledroitle plus apparent; dans celles-là, ilfaut absoudre.

Pour condamner, ilfaut quelefait soit constant, que l'appli cabilitédela loi soit constante ; et à plus forte raison que la loi 'le soit. Ici , elle est en question : pour en établirl'existence, que faitl'accusation? Elle argumente.

F+i.#18

7&

IL

Mais la Cour a statué, le défenseur respecte son arrêt ; il va donc raisonner dans l'hypothèse où l'on s'estplacé.

Ce n'est pas d'avoir écrit, d'avoirpublié, d'avoir publié dans le Courrierque M. de Potter peut être accusé. De quoi l'est-il donc? D'avoircherché à susciter entreles habitans la défiance, ladésunion etles querelles.

Entre les habitans ! mais entre quels habitans ? Entre les ministérialistes , et ceux qui ne sont pas ministérialistes. Mais quisontlesministéralistes ? On ne sait.

( 45 ) ciétécontre laquelle, sans cela, elle ne feraitquel'aigrir; ceuxdu public, quoiqu'on en ait dit (1), puisque la peine doit lui servir Ed'exemple, et qu'elle ne le peut s'il y a lieu de douter si c'est la passion , la prévention ou le hasard qui l'a infligée.

On a dit avec raison qu'une condamnation ne peut être que laconclusion d'un syllogisme , qui a pour majeure la loi, pour mineure le fait qui l'a violée ; mais la majeure, ici, ne peutêtre que la conclusion d'un syllogisme préalable qui ait pour ma jeurelesprincipes constitutifs et caractéristiques de laloi, etpour mineure la forme intrinsèque et les circonstances extrinsèques de l'acte qu'on prétend être une loi.

MeVanMeenencraint bien que ce ne soit aujourd'huiqu'on a intervertil'ordre naturelet légal de laprocédure. Si l'arrêté du 20 avril 1815,comme ladénomination même l'indique,n'estpas une loi , iln'y a pas d'accusation , iln'ya pas lieuà procès. Comment trouver place àune position dequestion? Sans présupposer que l'arrêté est loi, commentle ministère public pose-t-il la question defait ? comment la cour y répondra-t-elle ? Évidemment la question est complexe et enveloppe , sur l'existence de l'arrêté comme loi, une pétition de principe.

(1) Le ministère publicvenait d'émettre uneopinion contraire.

L'anathème de l'antipopularité! Cela n'est-il donc pasassez clair? A-t-onjamais entendu parler de la popularitéou del'im popularitédel'hommepaisiblequine s'occupe derien, si ce n'est de ses affaires privées , voire même d'un commis , d'un préposé d'accises ou d'octroi , d'un inspecteur , d'un directeur , d'un référendaire ? C'est hors de la sphère de la vie privée et dans une région limitée de la vie publique , que la nation tient son ban, et la popularité sa balance. Ayons , s'il se peut , ( et pour quoi ne se pourrait-il pas ? ), des conseillers de régence , des échevins , des bourgmestres , des membres des états provin ciaux, des députés de ces états , enfin des députés aux États Généraux, bienpopulaires , rien que populaires , tout-à-fait populaires ; et pour nous en assurer , exigeons de tous ceux qui aspireront à le devenir , qu'ils imitent le louable exemple récemment acclimaté parminous par MM. Surletde Chokieret Domalius-Thierry, et dont ces dignes citoyens ont emprunté l'idée aux peuples qui nous ont précédés et quinous devancent de si loin , dans la carrière constitutionnelle. Que quiconque s'y refusera soit mis au ban de la nation dans nos suffrages, etque l'anathèmede l'impopularité avectoutes ses suites , l'exclusion de toute fonction élective , de toute distinction populaire, pèse surlui!

( 48 )

de la nation et que l'anathème de L'Antipopularité pèse sur« lui avec toutes ses suites. »

Le ministère public, n'entend pasdans ce sens là, ni le bande la nation, ni l'anathème de lanti-popularité : Eh bien! qu'il nous apprenne positivement et nettement dans quel sens i les prend , et qu'il nous démontre que c'est le véritable, le seul possible. Car dès qu'il y a possibilité d'une version innocente , l'accusation croule : non liquet. Or, certes la version ci-dessus est possible , elle est admissible , elle est vraisemblable.

Quedis-je? sécrie MeVan Meenen ; cette version est naturelle, vraie, évidente ; la seuleadmissible , la seule possible. Toute la vie, toute l'existence, tous les rapports, la lettre même incrimi née de M. de Potter en déposentunanimement. De nous tous, tant que nous sommes , quel est celui dont la conscience ne re pousse pas comme absurde, l'intention que l'accusation impute à cet honorable et digne citoyen?

En résultat, s'enquiert-on de la loi pénale que M. de Potter aurait enfreinte? Invoque-t-on les art. 1 et 4 du Code pénal et 172 L. F. qui ne permettent de poursuivre et de punir que des infractions à une loipénale ? Le ministère publiccite un arrêté de 1815 et discute pour persuader que cet arrêté était origi nairement une loi , ou qu'il l'est devenu le 6 mars 1818.

Demande-t-on en quoi, du moins, cet arrêté a été enfreint? Il répond que M. de Potter a cherchéà susciter la désunion entre les habitans. Or,iln'ya pas de désunion entre les habitans. Il y en avait eu avant l'écrit de M. de Potter ; depuis , il y a union complète , admirable , pleine d'espérance et d'avenir ; et l'écrit de M. de Potter n'ya pas peu contribué ; cela peut déplaire, mais c'est un fait. C'estdonc l'union que M. de Potter a cherché tout en dépose , jusqu'au résultat, jusqu'à l'écrit incriminé lui-même. Si M. de Potteravait suscité la désunion entre les habitans en les divisant, en les excitant lesuns , sous le nom delibéraux , contre les autres, sous le nom de jésuites oumême de catholiques, le verrions-nous sur ce banc ?

Après le réquisitoire du ministère public pour l'application

Qu'entravaillant à unirles habitans, M. de Potter ait peut être suscité la défiance de ces habitans contre ceux qui auraient pris ouqui pourraient prendre à tâche de les diviser et de leur nuire,contreceux quimettraient en pratique lafameuse maxime divide et impera , cela se conçoit. Mais c'est un effet purement accidentel et indirect que M. de Potter n'a pas cherché, dont il n'a punidû s'occuper; et qui ne peut faire l'objet d'une accu sation.Ainsi, ce n'est qu'en substituant un effet accidentel, indirect et purement possible, à l'effet natureldirect, et réel de l'écrit deM. de Potter ; ce n'est qu'en concentrantexclusivement la vue sur celui-là , et en déguisant, en masquant , en cachant celui-ci, que l'accusation a puse promettre de produire une illusionque la Cour va achever de dissiper.

( 49 )

La Cour se retire, et, après deux heures de délibération, elle déclare les faits constans , et accorde la parole au ministère public, qui , pour l'application de la peine, s'en rapporte à la sagesse de la Cour.

Prenons les fragmensdediscours et de rapport pêchés, comme à la ligne, par leministère public , avec les mentions de laloi et de l'arrêté de 1815 qui se trouvent dans les motifs et les

Toutes les lois demeurent obligatoires(alle thans inwerking zijndewetten behouden kracht), dit l'art. 2 add. L.F..... Reste àsavoirquellesétaientles lois alors obligatoires(toen in werking); on voit combien cela est peu décisif, même pour les actes qui ont nom et forme de loi.

Dansle fait , l'art. 2 add. L. F. n'a maintenu que les lois , et non point les arrétés ; et il y en avait plus d'une raison , beaucoup de décrets et d'arrêtés étaient contraires aux lois5,, et ne pouvaient être maintenus conjointement avecelles ; 2º beau coup étaientinconciliablesavec la loi fondamentale; or, comme disaitM. Dotrenge, on n'entendait probablement pas , alors du moins , accepter et rejeter en même temps la L. F.; 3º beau coup appartenaient au régime de l'occupationet de la conquête, et à l'ordre circonstanciel, provisoire ettransitoire, donton en tendait sortir. En tout cas , il est de principe, surtout en ma tière pénale (et sans cela les lois pénales détruiraient toute sû retéau lieude la garantir), pactionem obscuram velambiguam iisnocere in quorumfuitpotestate legem apertius dicere (1. 39, ff. depactis ; add. L.L. 9 , 20 , 34, 36 , 121 , 168, 172 , 179 , 200 ff. de reg.jur.).

( 50 ) d'une des peines portées par l'arrêtéde 1815, les défenseurs ob tiennent la parole : Me Van de Weyer donne lecture dês con clusions (V. ci-dessus, pag. 3), et Me VanMeenen en développe succinctement les motifs.

10

Il croit avoir irrefragablement démontré hierque l'uniqueob jet de la loi du 6mars 1818 aété de supprimer la juridiction et la procédureextraordinaires, telles que l'arrêtéde 1815 les avaitin troduites.Lesystèmedu ministère public surcette loi et l'arrêté, est un tissu d'incohérences. Il fait maintenir l'arrêté par l'art. 2 add. L. F., pour le faire maintenir de nouveau par la loi du 6 mars 1818, etde cesmaintiens bien inutiles, si l'arrêté eûtété originai rement une loi , il se fait , on ne sait quelle prémisse , pour en conclure que d'exceptionnel , l'arrêté est devenu , par la loi du6mars, une loi pénaleordinaire.

(1) Nous négligeons les fréquentes interruptions', les interpellations , les objections adressées à Me Van Meenen pendant la durée de sa plai doierie, et auxquelles cet avocat répondait de suite avec une assurance calme et décente.

"

( 51 ) articles de la loi du 6 mars 1818, pour la pensée du gouver nement quiproposait, et de la chambre qui adoptait le projet; avec toutes ces concessions gratuites , on ne parviendra tout au plus à faire , de la loi du 6 mars , qu'une dérogation à la loi et àl'arrêté de 1815. Dira-t-on quedéroger en certains points , c'est confirmerdans tous les autres? Eh bien ! soit encore : il restera à chercher quel peut être l'effet d'une pareille confirmation. Or, et les paroles et le silencedu ministre, et ce que contient et ce que ne contient pas la loi , réduisent cette confirmation à celle qu'onappelle informa communi, et qu'on distingue , par cette dénomination,de la confirmationinformâspecialietdispositivá, dont la nature, la forme et les effets sont décrits en l'art. 1338, C. civ: c'estde cette confirmation informâcommuni, qu'il est vraidedire,aveclecommundes docteurs,quiconfirmatnihildut, nikil novijuris confert. Hujusmodi confirmatio dit Dumoulin (adconsuet, Paris. tit. 1 defiefs. §. VIII, gl. in ver. dénom brementn° 87 ), nihil dat nihil novi juris confert, nec invali dum validat; non, enimfitadfinem disponendi, sedsolùm ad finem approbandi confirmabile tale quale est , et in quantum verum validum et efficax, si tale est, et non aliter. On peut consulter en outre Merlin Rre Vo confirmation ; d'Aguesseau , 26meplaidoyer; lenouveauDenisart,Voconfirmation, etc. etc.(1).

Le ministère public a dit qu'on a eu tort de nommer le 18fé vrier 1818 unejournée de dupes; je crois, dit Me Van Meenen, qu'eneffet elle ne l'a point été, mais c'est parce quela foi et l'ar rêté d'avril 1815, s'ils n'ont point achevé d'y périr , n'y ont du moins survécu que taliaqualia erant, etin quantum vera, va lidaet efficacia, si talia erantet non aliter.

Il a donc suffi de rétablir les faits de 1818 en les présentant dans leurentier,etdedébrouiller quelquesidées, pour dissiper le nuage du sein duquel l'accusation lançait à plaisir les foudres forgéesàl'arsenal de 1815; on voit quel'arrêté de 1815 peut être envisagétel qu'il serait aujourd'hui, sans l'intervention de la loi

arop$OPCOU

, outre la guerre extérieure qui menaçait le pays, et l'agitation intérieure qu'il partageait alors avec l'Eu rope entière , et plus qu'aucune autre partiede l'Europe , vusa proximité de la France et les intérêts, les souvenirs, les affec tions que vingtannées d'administration française y'avaient lais sés, il était occupe, à main armée, par les hautes-puissances al liées ; devenu même leur conquéie par le traité de Paris, du 30 mai 1814. Certes , l'exercice du pouvoir législatif y était sus pendu: Interarma silent leges. Il est bien vrai que l'onne con çoit pas de peuple, de nation , de réunion d'hommes en société civile quin'ait ce pouvoir ; mais autre est le pouvoir, autre son exerciceactuel qui dépend des hommes, des temps et des lieux. Lors même que le pouvoir législatifbelgique eût alors eude lé gitimes organes universellement reconnus pour tels ( et il n'en avaitpas), ceux-ci n'eussent pasjoui de la spontanéitéet de l'in dépendance extérieure nécessaire à l'exercice de leurs hautes. fonctions. Leurs actes , dans un pareil état de choses , n'eussent jamais pu êtrequepurement provisionnels, et subordonnés à re vision et à ratification après le retour de la paix et de l'indépen dance.Me.VanMeenen sait bien qu'on n'a pas manqué de se saisir de cette impuissance du peuple conquis ou même simplement oc cupé d'exercer momentanément le pouvoir législatif, pour lui

( 52 ) du 6 mars 1818 ; cette loi n'a rien changé ni à sa légalité ori ginaire, ni à sa nature, ni à son applicabilité.

Que faut-il penser de celles-ci.....? Mais avant de traiter de la légalité originaire de l'arrêté , il fallait examiner jus qu'oùonpourrait en soutenir la légalitéactuelle fondée sur l'u sage.Ici,

s'appliquent, avec de légères modifications, les principes émis par le défenseur pour enlever ce même fondement de l'u sage, à l'arrêté du 6 novembre 1815sur lejury et la publicitédé l'audience. Il développe donc les motifs consignés dans les con clusions 2º de la veille (V. ci-dessus pag. 4).

L'usage , la loi du 6 mars 1818, l'art. 2 add. L. F. comme introductifs de l'arrêté , une fois écartés, il reste, pour en juger la légalité , à remonter à l'époque , à la source , à laforme de sonEnémission.avril1815

( 53 ) enleverle pouvoirmême eteninvestirle conquérantoulapuis sance occupatrice. Ilsaitque cette effroyable doctrine atrouvé des gouvernemens assez aveuglés par de petits intérêts et de pe tites, passions du momentpour tâcher de l'accréditer , des écri vains assezvils ou assez ignorans pourlaprofesser, déstribunaux assez dépendans pour laconsacrer. Il ne cherche ni à le dissimu ler ni à enréveiller le souvenir. Il se borne à citer Vattel,dr. d. gens,l. 3,chap. 13, nos 199,200, 201 ; Rayneval,instit.dr. d. nat. et desgens,liv. 3, chap. 6, nos 1, 2,3,4, 5, 6,7, et les autres publi cistes qu'il a euoccasion , dansletemps, d'invoquersur la même question (Observateur belge, tome 9, pages 267, 275, 369, 385, et passim ), et à en conclure que ni l'occupation ("occupatio bellica), nilaconquête d'un pays, n'en confèrent, ni le pouvoir législatif, nimême aucunpouvoir proprement dit. Nous ne pou vons qu'indiquer ici les points de doctrine , et les sources mar quées parle défenseur.

Me Van Meenen est ici interrompu toutà la fois parl'officier du ministère public qui lui objecte la proclamation du roi , du 16 mars 1815, publiée sous le titre d'arrété, aujournal officiel , tome 5, p. 1-7 , et par l'unde MM. lesjuges , quilui demande s'il prétend que le roi n'a pas eu le droit de porter l'arrêté du 20 avril 1815.;

L'avocat..

répond qu'il aura occasion, dans la suite de son plai doyer, detraiter ce qui a rapport à la proclamation ou arrêté du 16 mars 1815 ; que , pour le moment, il se borne à observer que , soit qu'ons'attache au titre de Roi , pris alors par S. M. , il ne ferapas à S. M. l'injure de penser qu'elle entendît par là s'attribuer ce que d'autres appellent la royauté absolue ( el Re netto );elle ne pouvait avoireuen vue que la monarchie de nos temps modernes et de cette partie de l'Europe ; une mo ar chie analogue à celle dont nous sortions ( régie par les constitu tions del'empire français ) , et à celle dans laquelle il se propo saitets'était même obligé ( conime ille montrerait dans la suite ) de nousfaireentrer ( régie par la loi fondamentale ) ; que cette royauté intermédiaire et transitoire ne pouvait être d'une na tureopposée àcelle qui l'avait précédée et à celle qui devait incessamment la suivre. t MeVanMeenen trouvedonc, qu'en ne donnant aux actes de 18

1

cette époque que le nom et la forme d'arrété, et non de loi (V. Merlin, RreVo arrété; Questionsde droit Vopréfet, §. IV; HenriondePensey,de l'autoritéjudiciaire chap. 18; l'Observa teurbelge, t. 9, p. 7, seqq. p. 280 seqq. etpassim), le Roi avait rendu aux vrais principes et du droit des gens et du droit pu blic,unhommage, que malheureusementd'autres fonctionnaires n'ont pastoujours su apprécier. En prenant le titre deRoi, au lieu deceluide Gouverneur Général aunomdes HH. PP. AA.,le roi nousannonçaitque, désormais il représenteraitcespuissances comme leur ayant droit , et non-plus uniquement commeleur mandataire; et quebientôt une loi fondamentale fixeraitlesbases de notre droit public. C'est donc toujours d'après les droits nés de l'occupation ou de la conquête, et les occurrences des temps, qu'il faut apprécier les actes de cette époque.

( 54 )

Ce point de vue ramenait à la question notée par l'un de MM. les juges; MeVan Meenen était loin de contester au Roi, à cetteépoque, ledroit de porter l'arrêtédu 20 avril 1815. Aconsi dérer lepays alors, soit comme conquis, soit comme menacé de laguerreextérieure, soitcomme manquantd'organes dupouvoir législatif,il est incontestable que leRoi avait le droit, étaitmême tenu de prendre et de prescrire tout ce qu'il jugeait nécessaire à la sûreté et à la défense de ces contrées. La question n'est donc pas là , mais bien de savoir si des actes commandés parune pareillesituationsontdes lois qui ne puissent être abrogées que pard'autres lois, ou des actes de gouvernement purementtran sitoires, dépendans des circonstancesetde la situation qui leur ont donné naissance , et ne pouvant leur survivre. Or , pour peu qu'on veuille yréfléchir et que l'onse rappelle ce qui a été dit, il ne paraît pas qu'il puisse rester de doute là-dessus...

1On adit avec raison, que ledroit de laguerre est illimité; non quepar là on veuille dire qu'il est absolu , arbitraire, mais bien et uniquement qu'il n'est pas susceptible d'être limité àpriori pardes règles précises. Puisédans un étatde pur fait, il subit toutes les formes et les variétés des faits. Jus belli infinitum est, ditWolf(j. g.part. 1, c. 3, nº 1107 ) , id estjuri belli ingenere præsentibuspræscribinonpossuntlimites,sediidominumexcircumstantiisdeterminandi,etailleurs(j.g.chap.6,nº783)ilajoutejudiciumdenecessitateeorumsinequibusjussuumne

( 55 ) quit ipsi quis bellum gerit, reliquendum. Et il faut en dire au lantdu gouvernement ou de lahaute administration d'un pays dans des circonstances pareilles à cellesoù nous nous trouvions en 1815 ; mais les actes nés d'un pareil état de choses dispa raissent avec lui. « Ce sont des produits d'un étatforcéet contre « nature, qui disparaissent avec leur cause,pour faire place au « rétablissement de l'ordre; ils ont eu une existencedefait ; on « revient dèsqu'il se peut au droit. »

Tel est le texte de la partie des conclusions qui restait à ex poser..Parle

Ici, la Cour, par l'organede M. le président, déclare que ce point est entendu , et enjoint à Me Van Meenen de passer au point suivant , savoir , la nature de l'acte du 20 avril 1815. Le développement des motifs des conclusions prises , présente par là , une lacune que nous remplirons brièvement.

1: " « Ce caractère ( circonstantiel et transitoire de l'arrêté du 20 avril 1815 ) devient plus palpable encore quand on se reporte aux conditions de l'acceptation de la souveraineté du pays , « du 21juillet 1814 (recueil de Schoell, t. 8, p. 318,322); et que « l'on considère que l'autorité même de qui l'acte est émané , « ne lui a donné que le titre et la formé d'un acte d'adminis « tration , et n'a pas fait comprendre les actes de ce nom et « de cette forme dans l'art. 2 additionnel de la loi fondamen tale. >>

De là, conférence,au mois dejuin 1814, entre les ministresdes hautes puissances alliées , réunis àLondres , et dont le proto cole est signépar eux , au sujet de laréunion de la Belgique à la CopieHollande.deceprotocoleestremise au secrétaire d'état pourles af faires étrangères de S. A. R. leprince souverain des Pays-Bas

traité de Paris, du 30 mai 1814 , art. 2 , le royaumede France était rentré dans ses limites, telles qu'elles existaient au 1er janvier 1792. Par l'art. 6 du même traité , il était stipulé quela Hollande « placée sous la souveraineté de la maison d'O <<range, recevrait un accroissement de territoire. »

Le nom et la forme d'arrêtés que portent tous ceux dont il s'agitici , déposent que telles étaient les vues et les intentions du Roi. 1

T

Unis, baronde Nagell , par le comte Clancarty,ambassadeur de S. M. Britanniqueauprès de S. A. R., avec communication « des <« instructions qu'il venait de recevoir de sa cour , de se concer « ter avec le général baron de Vincent , gouverneur-généralde « la Belgique , afin de remettre le gouvernement provisoire « des Provinces-Belgiques à celui qui en serait chargé par S. «A. R. aunom des puissances alliées,jusqu'à leur réunion dé finitive etformelle , pourvu quepréalablement et conjointe « ment avec les ministres ouautres agens diplomatiques de l'AuAL« triche, de la Russie et de la Prusse, actuellement à La Haye, << ledit ambassadeur reçûtde S. A. R. son adhésionformelle aux «< conditions de la réuniondes deuxpays,selon l'invitationfaite « auprince,souverain par ledit protocole. « S. A. R. le prince souverain reconnaît que les conditionsde << la réunion , contenues dans le protocole , sont conformes aux huit articles, dont la teneursuit (1) » : Art. 1er. Cette réunion devra étrei ntime et complète , de fa çonque les deux pays ne formentqu'un seul et méme État, régi parlaconstitution déjà établie en Hollande et qui sera modi fiéed'un commun accord , d'après les nouvelles circonstances.

Art. 4. Tous les habitans des Pays-Basse trouvant ainsi

(1) Ces huit conditions ont été publiées le 18 juillet 1815 par une pro clamation de S. M.qui, néanmoins, ne se trouve pas inseree au Journal officiel; nous avons cru que nos lecteurs nous sauraient gré de les leur donner ici. Un arrêté du 22 avril 1815 , qu'on ne trouve pas non plus au Journal officiel, et que nous empruntons à l'Observateur belge , t. 1 , p. 385, avait révélé l'existence de ces huit conditions , mais sans les rendre publiques.

Les Provinces-Belgiques seront convenablement re présentées à l'assemblée des Etats-Généraux, dont les sessions ordinaires se tiendront , en temps de paix alternativement dans une ville hollandaise , et dans une ville de la Belgi que. "

8

( 56 )

" Art. 2. Il ne sera rien innové aux articles de cette constitution qui assurent à tous les cultes une protection et une faveur éga les, et garantissent l'admission de tous les citoyens , quelle que soit leur croyance religieuse , aux emplois et aux offices publics.Art.3.

( 57 ) constitutionellementassimilés entreeux,les différentesprovinces jouiront également de tous les avantages commerciauxet autres quecomporte leur situation respective, sans qu'aucune entrave ou restriction puisse être imposée àl'une au profit de l'autre.

« Art. 5 Immédiatement après la réunion, les provinces etles villes de la Belgiqueseront admises au commerce et à la naviga tiondes colonies , sur le méme pied que les provinces hollan daises.«Art.6

Les charges devant être communes ainsi que lesbé néfices , les dettes contractées jusqu'à l'époquede la réunion , par les provinces hollandaises d'un côté, et de l'autre par les provinces belgiques, seront à la charge du trésor général des Pays-Bas.«Art.7

« Lesoussigné Anne Willem Carel, baron de Nagell, cham « bellan de S. A. R. le prince souverain des Pays-Bas-Unis , et « son secrétaire des affaires étrangères , est chargé et autorisé , << au nom et de la part de son auguste maître , d'accepter la « souverainetédes Provinces-Belgiques sous les conditions con « tenues dans les huitarticles précédens , etd'en garantir,par « leprésentacte , l'acceptation et l'exécution.

Conformément aux mêmes principes , les dépenses requises pour l'établissement et la conservation des fortifica tions, surla frontière du nouvel État , seront supportées par le trésorgénéral,comme résultantd'un objet qui intéresse lasûreté et l'indépendance de toutes lesprovinces et de la nation entière.

R. ayant accepté ces huit articles comme la base « et les conditions de la réunion de la Belgique à la Hollande , << sous la souveraineté de S. A. R.;

« Art. 8 Les frais d'établissement et d'entretien des digues resteront pour le compte des districts qui sont plus directement intéressés àcette partie du service public , saufl'obligation de l'État,en général,àfournir des secours, en cas dedésastre extraor dinaire , letout ainsi que cela s'est pratiqué jusqu'à présent en Hollande,«EtS.A.

K (L. S.) SignéA. W. C. de Nagell. >> 8

« En foi de quoi , etc., etc., etc.

<< Fait àLa Haye , le 21 juillet 1814.

(3) Ces v ux s'etaient prononcés à Londres dès le 20 juin 1814 , comme on a vu ci-dessus et commeonle verra ci-après dans la proclamation du18 juillet 1815, et dans ce que nous dirons de l'acte du congrès de Vienne.

( 58 )

Le 1eraoût 1814 , proclamation de S. A. R. le prince souve rain des Provinces-Unies des Pays-Bas, où onlit : « appelléau «gouvernement de votrepays , pendant le court intervalle qui « nous sépare encore d'un avenir si long-temps désiré.......C'est « des pluséclairés , des plus considérésd'entre vous, que je veux « être environné dans l'honorable tâche que m'impose la con «fiance des monarques alliés , et dont je m'empresse de venir m'acquitter enpersonne.........Heureux si, en multipliant mes << titres à votre estime, je parviens à préparer et àfaciliterl'u « nion qui doitfixervotre sort , et qui me permettra de vous « confondredans un même amouravec ces peuples quela nature << elle-même semble avoir destinés à former,avec ceuxde la Bel <«gique , unÉtat puissant etprospère (1).

« Les v ux unanimes des puissances assemblées au congrès de Vienne, s'étaient à peineprononcés pour la réunionde tous les Pays-Bas,sous une autorité commune ( 3 ), que les habitans des provinces Belgiques nous témoignèrent à l'envi leur joie...., et leur désir de nous voir étendre sur eux le pouvoir suprême que l'amourdesHollandais nous avaitprécédemment confié.

« Profondément touchés de ces témoignages , nous avions ce pendantrésolu de différer tout changement dans les relations existantesjusqu'à l'époque où les délibérations du congrès eus sent été complètement terminées et où ses décisions auraient pu être exécutées dans leur ensemble. Mais les événemens inatten dus , qui ont eu lieu dans un État voisin , nous engagent à nous départirde cette résolution... C'est au moment où renaît pour tant de peuples, le triste souvenir d'une domination étrangère

(1) Journal officiel , Tome 2, nº 70.

(2)Journal officiel , Tome 5, nº 1.

Le16mars 1815,proclamationsousle titred'arrêté,oùonlit(2):

Le 31 juillet 1814, proclamation de M. le baron de Vincent qui sedéclare « appelé à une autre destination , et arrivé à l'é « poque fixée par les HH. PP. AA. pour la transmission du « gouvernementgénéral entre les mains de S. A. R. Mgr. le "prince souverain des Provinces-Unies des Pays-Bas. »

( 59 ) qui uevient urgent de constituer l'État, dont la politiqué ce l'Europe entière a considéré l'existence comme nécessaire à la tranquillité et à la sûreté générales.... Nous déclarons, par ces présentes, que tous les paysyap « partenant, forment dès-à-présent, le royaume des Pays « Bas......Laloi fondamentale, déjà obligatoire pour ungrand << nombre d'entre vous, subira bientôt les modifications qui << doivent la mettre en harmonie avec les intérêts et les v ux « de tous ».

Le22 avril 1815 , arrêté qui nomme une commission de vingt-deux membres pours'occupersans delai de la revisionde laloifondamentale pour les provinces-unies des Pays-Bas ; et à laquelle S. M. ordonnela remise Ades huitarticlesdes conditions de Londres ; B du protocole du congrès de Vienne , constatant l'étendue et les limites ; C dela loi du22 mars 1815, dont l'objet n'est pas indiqué. Cet arrêté ne se trouve pas au Journal offi ciel;nous le citons d'après l'Observateur Belge, tom. 1er,p. 385.

« Les puissances qui ont signé le traité conclu à Paris , le 3

Le 20 avril 1815 , paraît le trop fameuxarrêté sur les crimes et délits, en matière de sédition.

« S. M. le roi des Pays-Bas , ayant reconnu et sanc tionné, sous la date du 21 juillet 1814 , comme bases de la « reunion des Provinces-Belgiques avec les Provinces-Unies, « leshuit articles renfermés dans la pièce annexée au présent " traité, lesdits articles auront la même force et valeurcomme « s'ils étaient insérés de mot à mot dans la transaction ac « tuelle. >>

Ce traité, du 31 mai 1815, forme la dixième annexe à l'actedu congrès de Vienne du 9juin 1815 ; acte , dont le préambule détermine l'objet et celui du congrès même, d'une manière non équivoque. Ce préambule est ainsi conçu :

Le 31 mai 1815 , à Vienne , traité des limites entre le roi des Pays-Bas et la Prusse , l'Angleterre , l'Autriche et la Rus sie on voit par le préambule qu'il ne restait à régler que des limites sur la rive droite de la Meuse , et l'art. 8 en est ainsi conçu :

« Au nom dela très-sainte et inviolable Trinité.

L'acte du congrèsde Vienne, du gjuin 1815, et avant lui , le traité du 31 mai 1815,n'ont donc fait queconfirmerlaconvention de Londres dejuin 1814 , relativement à la réunion etaux condi tions qui en étaient les bases : cette convention avec ses condi tions,acceptationde lasouveraineté des provincesBelgiques, sous les conditions et sous lagarantie de leur acceptation et exécution, subsistaient donc dès le 21 juillet 1814, absolument , purement, simplement et indépendamment de toutarrangement, de toute

(1) L'art. 32 du traité de Paris, du 30 mai 1814, porte : Dans le délai de deux mois, toutes les puissances qui ont été engagées de part et d'autre dans la présente guerre, enverront des plénipotentiaires à Vienne, pour régler , dans un congrès général , les arrangemens qui doivent compléter les dispositions du présent traité.

Les art. 65 , 66 , 67 , 68 , 69, 70 , 71 , 72 de l'acte du congrès se composent des art. 1 , 2, 3, 4, 5, 6 , 7 du traité du 31 mai 1815 ; et l'art. 73 du premier , est une copie littérale de l'art. 8 du traité , tel qu'on l'avu ci-dessus (2).

(2) Néanmoins , ni l'acte du congrèsde Vienne, ni le traité du 31 mai 1815, ni l'acte du 21 juillet 1814 , ne setrouvent insérés au Journal offi ciel; ilsforment cependant les premières bases de notre droit public gé néral. Les réglemens d'organisation des États-Provinciaux et des admi nistrations locales, dressés en exécution des art. 132, 152, 154 , L. F., et qui constituent les premiers développemens de notre droit provincial et communal , manquent également à tous lesrecueils officiels.

( 60 )

« mai 1814 , s'étant réunies à Vienne, en conformité de l'art.32 « de cet acte (1), avecles princes etÉtats leurs alliés, pour com « pléter les dispositions dudit traité, et pour y ajouter les arran « gemens rendus nécessaires par l'état dans lequel l'Europe était «< restée à la suite de la dernière guerre , désirant maintenant « de comprendre, dans une transaction commune , les différens << résultatsde leurs négociations , afin de la revêtir de leurs rati fications réciproques , ont autorisé leurs plénipotentiaires à « réunir,dans un instrumentgénéral, les dispositions d'un inté « r t majeuret permanent àjoindre à cet acte,et àjoindre àcet « acte comme parties intégrantes des arrangemens du congrès, « les traités, conventions, déclarations,réglemens etautresactes particuliers, tels qu'ils setrouvent citésdans le présenttraité; << et ayant les susdites puissances nommé , etc. , etc. , etc., etc.

Les conséquencesà déduire de cet ensemble de documens au soutien de lathèse de Me Van Meenen sont palpables: ce ne sont plus seulement lesprincipes et du droit des gens,et dudroit pu blic qu'il avaitdroit d'invoquer ; mais aveceux les actes les plus formels, les plus décisifs. 1

Jusqu'au moment où la publication de l'acte du congrès de Vienne en répandit la connaissance, les Belges ignorèrent donc les conditions de la réunion ; la réunionmêmerestait pour plu sieurs un problème encore , quoiqu'il y eût plus d'un an qu'elle avaitété définitivement arrêtée.

(2)Cette remise du gouvernement, comme on l'a vu, est du 1er août 1814; l'acte d'acceptation et d'adhésion étant du 21 juillet 1814.

1 J 2

Enfin , le 18juillet 1815 , paraît une proclamation de S. M. qui dissipe à cet égard toutes les incertitudes et fixe tous les doutes (1).

( 61 ) négociation,de toutactesubséquent. C'est,aureste,cequeconfir melaproclamation du 16mars 1815, où S.M. dit : « nous avions «cependantrésoludedifférer toutchangement dansles relations « existantes.... Mais les événemens nousengageantànousdépar « tirde cetterésolution.......; il devient plus urgent de consti << tuer l'État. "

Considère-t-on les arrêtés émanés depuis le 1er août 1814 , jusqu'à l'introduction du régimeconstitutionnel, comme éma nés dusouverain? Les conditions sous lesquelles la souveraineté avait été offerte et acceptée ne permettaientpas de les considé

Nous avons donné ces conditions plus haut , en les y faisant précéder etsuivre des documens quiparaissentformer avec elles un tout indivisible, et que la proclamation ne renferme pas.

(1) On a déjà vu que cette proclamation et les huit conditions ne se trouvent pas auJournal officiel ni dans la Gazette générale : nous em pruntons la proclamationà l'Observateur belge , t. 2, p. 252.

« Lorsquelegouvernementde la Belgique nousfut remispar « les hautes-puissances alliées,dít S. M. (2),nous avionspréala « blementdonné notre adhésion formelle aux conditions de la réunion de la Belgique et des provinces-unies des Pays-Bas , quiavaient été arrêtées à Londres par les plénipotentiaires << desdites puissances , au mois de juin 1814, et dont la teneur suit, etc., etc. » "

Envisage-t-on ces arrêtés comme émanés du gouverneur-gé néral au nom des HH. PP. AA.? Ce gouvernement, circonstan tiel et transitoire de sa nature, selon les principes généraux, l'é tait à plus forteraison par les stipulations de Londres ; et cette véritéétaitsi palpable qu'on la voit consignée dans le protocole de lordClancartyen ces termes : « Ledit ambassadeur lui ayant << aussi fait part des instructions qu'il venait de recevoir de sa « Cour , de se concerter avecle généralbaron de Vincent, gou verneur-général de la Belgique , afin de remettre le gouver << nementprovisoire des Provinces-Belgiques à celui qui en se « rait chargépar S. A. R. au nomdespuissances alliées, jusqu'à « leur réunion définitive et formelle , pourvu que préalable « ment.... ledit ambassadeur reçût de S. A. R. son adhésion <<formelleaux conditions de la réuniondes deux pays.»>

Après cette digression, nous revenons auplaidoyerde Me.Van Meenen.Lanature de l'acte en discussion est facile à établir: il est né, et ses motifs sont exprès là-dessus , des circonstances du mois. d'avril 1815. Ces circonstances sont, 1° l'état d'occupation oude conquête maintenu dans le pays, commeon vient de le voir, au delà du terme où cet état aurait dû cesser. Ce maintien, on ne

( 62 ) rer comme des lois, puisqu'ils n'eussent pu l'être dans un Etat régi par la constitution déjà établie en Hollande ( art. 1 des conditions de Londres); que les Belgesse trouvaientconstitution nellement assimilés aux Bataves (art. 4), et que n'étant point jusques-là représentés aux États-Généraux (art.3), ils ne pou vaient recevoirdes lois , ni du souverain qui n'avaitpas le pou voir législatif, ni des États-Généraux de Hollande , dans l'as semblée desquels ils n'étaient pas convenablement représentés, sans une infraction manifeste , non des principes du droit pu blic et du droit des gens seulement, mais en outre du texte et de l'esprit entier dela convention de Londres.

Épargnons aux partisans du système des arrétés-lois de 1814 et 1815 , l'imputation d'avoir entrevu combien ce système com promet , nonseulement tous les principes , non seulement les Belges, la génération présente et la postérité , mais les noms les plus respectables et les plus augustes.

Cherche:-t-il l'arrêtédu 20 avril, àsa date, dans latable chro nologique des arrêtés , proclamations ? Il lit , mesures de ré pression contre les alarmistes et distributeurs de bruits et nou velles tendantà troubler la tranquillitépublique. Consulte-t-il la tablealphabétique? Ilylit, aumotrébellion : voyezsédition; etaumot sedition : mesures EXTRAORDINAIRES de répression,nº 10, pag. 147 et suivantes. Certes , les rédacteurs officiels de ces ta bles n'ont pas vu en 1815, ce qu'on voit aujourd'hui ;maisqu'est ce que les simples citoyens ont dûtrouver dansl'arrêté ? Car en définitive c'estpoureux que les lois sont faites ; c'est contre eux oupour eux qu'on a stipulé ; et c'est à ceux quil'ont fait à s'en prendre à eux-mêmes s'ils ne l'ont pas fait expressément d'après leurs intentions : Nam potuerunt, debuerunt legem apertius dicere. Mais peut-on des intentions plus clairement manifes tées ?

Mais , dit-on, le texte hollandais porte beteugeling van onrusten kwaadwilligheid.

« Vu laloidu 10avril présent mois , surla répression des cri « mes et délits , en matière de sédition. »

( 63 ) leblâmeni le loue , c'estun fait; 2º la guerre extérieure dont le pays était menacé; 3° l'agitation quirégnait alors danstoutel'Eu rope, et qui était àcraindre, icisurtout à proximité dela France, après vingtannées d'habitudes , d'intérêts , de relations créées par l'administration française. C'était donc un acte purement circonstanciel. Supposé même, que ces circonstances aient con tinué après la bataille de Waterloo ; qu'elles aient survécu à l'introduction du régime constitutionnel ; allons plus loin, lais sons-en subsister des traces en mars 1818 : noussommes en 1828, qui oserait en conscience dire que l'ombre de ces circonstances subsiste encore?

La Course retire pour prendre quelque repos. A sa rentrée, elle enjoint àMe Van Meenende terminer en une demi-heure.

Ledéfenseurrappelle ici leslumineusesvuesde Me Barbanson dans l'affaire Ducpétiaux ; celles de la consultation de Liége , celles de M. Donker-Curtius à ce sujet. Il ne répétera point ce quidoit être encore présent àtous les esprits .

Me Van Meenen aborde la question de l'applicabilité de l'acte il ne pourra que l'effleurer.

( 64 )

Nouvellelimitation de l'arrêté en ce point, quant à sonobjet; etjusqu'à des lois générales pour le royaume , quantà sa durée. Laréunion était arrêtée, l'organisation du pouvoir,de porter des lois générales pour le royaume , prochaine ; quoide plus clair? Quel art déplorable quecelui qui répand surtout cela les ombres de la duplicité et de la perfidie ?

Voulant pourvoir à ce qui manque en ce point , aux lois et réglemensjusqu'à ce qu'il y auraétéstatué par desloisgénéra les pour notreroyaume. »«

Jusques-là , que voit-on , si ce n'est les troubles tels que les circonstances les faisaient craindre, à prévenir?

En vérité , ne serait-il pas risible de nous tenir ce langage au jourd'hui?Etnel'a-t-il pas étéde tout tempsdese figurer quedes articles de journaux sur, pour ou contre le ministérialisme et le jésuitisme,puissent troublerdefidèles sujetsdans les effortsetc.? Est-ce ainsi qu'on sejoue de la justice , de l'honneur , du sort des hommes ? Cela ferait pitié , si cela ne soulevait pas l'indi gnation.<<Etcomme il nous est démontré que les lois existantes et <<les institutions judiciaires ne sont pas telles qu'il le faudrait « (qu'il le faut, als vereischt wordt), pour punir promptement << et exemplairement les malveillans qui voudraient faire naître « la défiance , le trouble et le désordre. »

Certes , la situation était si neuve , si extraordinaire que l'on pouvait raisonnablement penser qu'il n'y avaitpas étépourvu. Maisqui ne voit que cela limite le sens au lieu de l'étendre ?"

K

Bien! Ce texte présente quelque chose de plus vague , de si vague même , qu'on ne saitplus oùl'on enest. Singulière manière de raisonner en fait d'interprétation des lois , et surtout des lois pénales ! Pour nous , disons sans hésiter : le texte français est plus précis , plus déterminé ; doncc'estlui auquelil faut setenir ; il est favorable à l'accusé, donc on ne peut enadopter d'autre. « Attenduque , dans les circonstances actuelles il est urgent « de surveiller avec un nouveau zèle, tout ce qui pourrait trou bler nos louables , bons et fidèles sujets dans les louables effortsqu'ils mettent en uvre de toutes parts et avec tant de pour le bien de la patrie.« zèle "

« Art. 1er Sans préjudice aux dispositions du er titre « du 3me livre du Code pénal actuel, etpour autant qu'il n'y serapoint dérogé, par les dispositions suivantes. »

On est honteuxdedevoirfaire remarquer ces choses ; et celles cidonc :

« Art. 4Les poursuitesauront lieu sans délai et sans infor « mationpréalable .. Ces arrêts ne seront soumis à aucun ap «pel, nipourvoi en cassation.

Tristecondition,oùl'onse réduitde mentir àsapropreraison, propre conscience !à saNon.

La crainte des troubles , des séditions , etde l'étranger , la vue des circonstances du moment ont seules pu dicter tout ce qu'on vient de lire. Il reste le fameux article premier ; fera-t-il sonthème à part?

Or , le titre 1er du livre 3 du Code pénal concerne les crimes etdélits contre la chose publique, et se divise en trois chapitres ; premier, crimes et délits contre la sûretéde l'État; deuxième,crimes et délits contre la constitutionde l'État ; troi sième, crimes et délits contre la paix publique. 9

« Art. 3Une Cour spéciale extraordinaire, etc., etc., etc., qui « rappellel'art. 28 de la loi du 20 avril 1810: Lorsque la multi-` «" plicité de certains crimes......,exigera des voies de répression plus actives....., etc., etc., etc. »

« Art. 2 Dans le cas que les crimes dont est faitmention dans « l'article précédent, auraient defait troublé le repos public , « ou causé une sédition , les personnes qui s'en seraient ren « dues coupables , etc. , etc. »

Voilà ce qui précède le mystérieux article : avant d'ypénétrer enlui-même , voyons ce qui le suit.

Tout cela pour de petits journaux , de petits écrits , de pe tits propos, et bientôt de petites pensées ! Voilà bien la massue d'Hercule pour tuer des mouches.

1

« Art. 5 Les arrêts seront exécutés dans les 24 heures....... <<Notre procureur-général est chargéde cette exécution; il devra « dansle même délai rendre compte de ce qui aura étéfait ..»

Et celle-ci encore :

( 65 )

1º Tous ceux qui débiteront des bruits , annonces ou nou « velles qui tenderaient à alarmer ou à troubler le public ; » 2º Tous ceux qui se signaleront commepartisans ou instru mensd'unepuissance étrangère , soit par des propos ou des « cris publics ( het zij door hetuitroepen vanoproerkreeten , << hetvoerenvanseditieusegesprekken ) , soit par quelques faits << ou écrits ; of « + 3º Etenfin ceux qui chercheraient à susciter entre les habi « tans , la défiance , la désunion ou les querelles , ou à exci « ter du désordre ou une sédition soiten soulevant le peu2.000 " ple dans les rues ou places publiques , soit partout autre acte « contraire aubon ordre, seront punis. ..d'après la gravité du <<< fait et de ses circonstances , soit séparément , soit cumulative « ment , de l'exposition pendant une heure à six , de la dégra «< dation , de la marque , de l'emprisonnement d'un à dix ans , « ou d'une amende de 100 à 10,000 francs. »

( 66 )

Est-ce que ce texte tout entier ne répond pas exactement à ce qui le précède et à ce qui le suit ? Avec du bon sens et de la bonnefoi , peut-on y apercevoir autre chose que ce qu'y a vu le rédacteur de la table chronologique et alphabétique ?

Les lois, dit Montesquieu ( Esprit des lois liv. 29, chap. 16 ), nedoivent point être subtiles. Elles sont faites pour des gens de médiocre entendement ; elles ne sont point un art de logi que, mais la raison simple d'un père de famille .. Il est essen. tiel queles paroles des lois réveillent chez tous les hommes les mêmes idées...... Il faut dans les lois une certaine candeur ; faites pourpunirla méchancetédes hommes, elles doivent avoir elles-mêmes la plus grandeinnocence. »

Or , que fait l'accusation? Elle détache quelques expressions du commencement du paragraphe trois , conçues en termes v agues et généraux , et dit : chercher à susciter la defiance ,la désunion etles querelles entre les habitans , de quelque maniè re , par quelque moyen , et en quelque circonstance que ce soit , est un des délits prévus par l'arrêté. Et la raison.....? C'est que les termes sont généraux. Cette logique absurde dans les matières civiles ( 1176 , 1158 1161 , 1163 , C. civ. ) , est d'une révoltante iniquité en matière

1

( 67 ) pénale ; et plus révoltante encore en matière spéciale , excep tionnelle , extraordinaire.

Donnez à cefragment de l'arrêté le sens vague que comporte la généralité de ses termes, le surplus de l'arrêté devient com plètement inutile; on peut se passer même du Code pénal ; je nesais mêmes'il y a une seule action civile qui ne puisse , d'une manière ou de l'autre , encourir l'imputation de tendre à susci terladéfiance, la désunion et les querelles entre les habitans. re,Me Van Meenen pose l'exemple de la publication d'un mé moire pour M. de Potter : s'il plaît au ministère public de di vul'intérêt que cette cause excite , que la publicationde ce mémoire tend à susciterla défiance ; que lui répondre ? Récla mer son biencontre un tiers qui le détient injustement ; une créance contre un tiers débiteur de mauvaise foi , c'est , si l'on veut, exciterla défiance contre l'injuste détenteur et le débiteur retardataire et ses consorts , la désunion, les querelles. Fau dra-t-il , avant d'intenter une action civile, non seulement con 'sulter pour savoir si elle est recevable et fondée , mais de plus pour s'assurer si le ministère public ne pourra pas y découvrir unetendance à susciter la défiance , la désunion ou les que relles?Maiscela est d'une absurdité trop palpable, dit-on....Proba blement que ceux qui raisonnent ainsi ont découvert le secret de doserl'absurdité, et qu'ils ont l'autorité de lui dire : huc us queprocedes.Qu'on examine où l'on en est déjà venudans le sys tème du ministère public , et que l'on nous apprenne où on s'arrêtera.Ilfautdonc rentrer dans l'arrêté et yreplacer le lambeau que leministère public en détache, pourl'y considérer à sa place ; pourlui donner, au lieu de ce sens général et absolu, qui mène à l'inique et àl'absurde, le sens spécial et relatifque l'ensemble de l'arrêté, que ce qui précède et qui suitimmédiatement lui as

En cesmatières , plus les termes sontgénéraux, au contraire , plusil faut les restreindre à la spécialité qui est l'objet de l'acte : moins le législateur a été précis , plus le juge doit se tenir en garde pour ne point appliquer la loi à des cas pour lesquels elle n'a pas été faite.

AppeléMESSIEURS,àvivresous

( 68 )1 signe; incivile estnisitota legeperspecta,uná aliquâ particulá ejus proposita,judicare vel respondere (L. 24 ff. delegib.et sen.).Laquestion que lejugeen matière pénale a à décider quand ils'agit de l'applicabilitéde la loi,n'est pas de savoir si , à force d'argumentation et de subtilité,on ne pourrait pas étendre son texte aufait incriminé : ellen'est pas même de savoir si , à force et d'artetde conjectures et de suppositions, on ne pourrait pas parvenir à faire présumer que telle a été la volonté de l'auteur de laloi leslois, encore une fois, nesont pasunart de logique, laquestionest donc toute de sens-commun, de bonne foi et de conscience, et de savoirsi le simple sujet , si l'accusé a pu et dû croireque son action serait une infraction àcette même loi. :

ungouvernement constitutionnel repré sentatif, où le pacte social , juré par tous les dépositaires de l'autorité, depuis le dernier deses agens jusqu'au chefde l'État, garantit aux citoyens la jouissance et le maintien de leurs droits , je me suis cru permis deprendre, entouttemps , ladéfensedeces droits; je mesuis cru obligé de les défendre lorsqu'ils me parais. saient attaqués.

Le président demande à l'accusé s'il lui reste quelque chose àajouter à ladéfense des avocats. M. de Potter se lève , et pro nonce lediscours suivant :

Je n'ai pas hésité un instant sur le choix des moyens propres à atteindre monbut.Nos institutionselles-mêmes m'enprésentaient un , légal, efficace et jamais dangereux.

Or, sur cettequestion,Me VanMeenen ne croitpoint queper sonne puisse hésiter à dire avec lui que , supposé gratuitement que l'arrêté du 20 avril 1815 ait jamais pu être considéré comme une loi ; qu'il aitpu survivre àl'introduction du régime constitutionnel légal , et à la réunion consommée ; qu'il ait pu survivre aux circonstances qui lui ont donné naissance ; du moins iln'est point applicable àde simples publications par la voie des journaux; et en tout cas il ne l'est pas aux écrits qui font l'objet del'acte d'accusation. -7

Entre les mains exclusivement du pouvoir et de ses agens , elle est le glaive du despotisme à l'usage de la tyrannie.

n'au

cette liberté est illusoire , si elle n'est entière ; qu'elle est inique , si elle n'est commune à tous, égale pour tous.Privilége d'un parti , d'une caste, d'une secte , elle estl'arme la plus perfide et la plus terrible, puisqu'elle frappe à coup sûr des ennemis désarmés.

La loi qui reconnaît les droits imprescriptibles de l'homme et ducitoyen impose, par cela seul, à tout citoyen , le devoir de ne rien négliger pour transmettre un jour à ses descendans ces mêmes droits intacts , tels qu'il les a reçus de ses pères , ou tels que les a reconquis la génération à laquelle il appar tient.Ce devoir , messieurs, j'ai cherché à leremplir d'après les im pulsions désintéressées de ma conscience.

Ce moyen est la liberté de lapresse , écrite dans notre loi fon damentale.J'aiditque

Si lalibertéde la presseeût été réelle dans le fait en Belgique, comme elle y est proclamée dans le droit , je ne me verrais pas poursuivipouravoirditquedes malveillans travaillaient àgêner cette liberté précieuse , et quedéjà elle se débattait péniblement sous le poids des chaînes dont on voulait l'accabler. Quand la presse estlibre eneffet, avancer qu'ellene l'est pas , est une ab surdité contre laquelle le ministère public ne réclame point , parce qu'elle se réfute assez d'elle-même, sans semer la moindre défiance, ni la plus légère désunion, sans exciter le plus petit trouble.Quesi, au contraire , on avait réellement l'intention d'en chaîner la presse, ou, ce qui est encore pis , d'en usurper lemo nopole, dévoiler cette intention cachée, devrait paraître, je suis loin de le nier, un crime très punissable aux yeux de ceux qui l'auraient conçu ; et la défiance dès-lors existerait, et le trouble pourrait naître. Je vous le demande, messieurs, qui , dans ce faudrait-il en accuser, ou les violateurs de laloi fondamen tale, ou le citoyen qui, pour la garantir de toute atteinte, rait pas craint de signaler cette violation? cas,

( 69 )

Jeveux bien admettre pour un instant la supposition que ce citoyen eût été dans l'erreur ; eh! quel est l'homme qui n'erre pas?......Je veux bien admettre qu'il n'y eût eu , ni attaque des libertés de la patrie , ni désir même de les attaquer, son erreur serait toujours pardonnable ; je dis plus, elle serait louable , en ce qu'elle prouverait l'intérêt actif qu'il prend à la chose publique, le zèle avec lequel il vole à la défense des prin cipes qui constituent la dignité , la prospérité nationales , chaque fois qu'il croit que ces principes courent le moindre dan ger.Ne serait-ce pas , messieurs , rendre impossible l'accomplis sementduplus sacré de tous les devoirs sociaux, celuide veiller au salut public , que de le subordonner àun prétendudevoir de ne jamais se tromper dans les moyens de l'accomplir , de neja mais s'alarmer mal à propos , de ne jamais voir des ennemis là où ils ne sontpas ?

Et cesilence serait l'outrage le plus sanglant fait à ceux qui gouvernent notre patrie , et qui jusqu'à présent ont paru am

Les maux que j'ai signalés, toujours de bonne foi, je les aibien vu ; ceux quej'ai indiqués comme étant les auteurs decesmaux, le sont réellement à mes yeux ; les remèdes que j'ai proposés sont, selon moi, les meilleurs. L'accusation qui en a étélasuite, mon emprisonnement , ma mise en jugement, et la place que j'occupeici devant vous , messieurs , ne prouvent pas queje n'ai point eu raison.

( )

Je n'aiparlé etje ne parle encore que d'après ma conviction intime : elle sera toujours la règle invariable de ma conduite, et je ne cesserai de la manifester hautement , que lorsqu'il m'aura été démontré que le gouvernement auquel j'obéis , est un gouvernement par la grâce de Dieu , tout court , un gou vernementde bon plaisir, qui hait la publicité, parce qu'ilcroit ne rien devoir au public ; qui punit la publicité, parce qu'il ne veut rien faire pour le public. Si jamais j'étais assez malheureux pouracquérir cette triste certitude , tout en conservant mes opinions ensecret, je courberais, sans me plaindre, la tête sous le joug de la nécessité , comme font les sujets muets , attachés au sol de l'Autriche et de l'Espagne.

Oùdomestique.veulent-ilsnous mener, les publicistes serviles qui ne ré pondent à tous nos raisonnemens qu'en comparant bassement la noble et libérale administration d'un roi constitutionnel , à la modestetenue d'un ménage ordinaire ? Qu'y a-t-il , messieurs, decommunentre unpeuple légalement gouverné, etunefamille plus ou moins bien régentée parsonchef? N'est-ce donc plus la loi fondamentale sur laquelle désormais il faudra asseoir notre édifice politique ? Est-ce le sentiment et non pas nos droits que nous devrons invoquer , lorsqu'on enfreindra notre pacte social?Lepère

est placé au-dessus de ses enfans par la nature elle même ; le roi ne l'est que par la loi hors quelques cas rares le père est supérieur àses enfans en vertu, en sagesse, en expé rience ; le roi peut valoir moins que le dernier des citoyens. Aussi , si la loi n'a mis que quelques bornes à l'autorité pater nelle , elle en a mis beaucoup à l'autorité royale. Ces bornes"

( 71) bitionner les honneurs du libéralisme : il tendrait , ce silence , plus que les plus virulentes diatribes , à provoquer la défiance etladiscorde , àpréparer le trouble et la révolte.

"

Cette opposition est, non seulement un droit , mais encore un devoirpour chacun de nous, tant que ce sera sous le gouverne ment constitutionnellement libre des Pays-Bas que nous pour ronsleremplir, et non sous la verge humiliante d'un gouverne ment

Aussi me suis-je bien gardé de m'en rendre coupable. Les opi nions,en Belgique, sont libres, me suis-je dit, j'ai le droit d'avoir et d'émettre la mienne ; dès que je la croisutile , jedois la pu blier. J'ai donc, sans retard , abordé franchement des questions qui, dans les circonstances actuelles me semblaient vitales chez nous ; et, mettantde côté de vieilles disputes de mots, où d'autres et nous-mêmes n'avons que trop perdu un temps pré cieux et usé nos forces, j'ai prêché la doctrine de l'opposition constitutionnelle pure , contre les abus qui arrêtent et empê chent nos progrès dans la carrière de la civilisation , contre les attaques du pouvoir dont nous ou nos enfans sommes me nacés d'être les victimes , et contre ceux de ses agens qui s'en rendent coupables.

( 72 ) sontprécisément ce qui constituela différence entre ungouver nementcommele nôtre , et la paternité , ou la domesticité , ou plutôtl'arbitraire des gouvernemens absolus , où le chef est , non un roi , mais un père , un maître. Or , pour parler avec Paul-Louis Courier, de constitutionnelle mémoire, maître et bon maître etjuste , sont des mots qui ne s'accordent pas mieux que ceux d'honnéte larron , d'équitable brigand.

L'opposition veille constammentà ce que ces bornes nesoient jamais franchies par le pouvoir. Elle veille , c'est-à-dire qu'elle est sans cesse en garde contre les entreprises, les usurpationsde ce pouvoir; qu'elle s'en défie ( je répète ce mot qui a cho quéunehaute susceptibilité, on ne sait pourquoi ; c'est le mot propre on l'a appelé pervers , il n'est que franç ) , qu'elle s'en défie , dis-je , non parce qu'elle hait le pouvoir , mais parce qu'elle craint ses abus , et que le pouvoir étant confié à des hommes , il est toujours à craindrequ'ils n'en abusent. Dé fiance est ici synonyme de prudence , et la prudence est la sa gesse des peuples. ou

Non fondée (j'entends l'opposition ) , le gouvernement , s'il ne la méprise , la combattra sans peine ; elle ne pourra lui nuire fondée , au contraire , elle se fortifiera peu à peu et quoi qu'il en ait, de tout l'appui de l'opinion publique , et le gouvernement lui-même devra, en définitive , l'accueillir ; elle passera, de son bon gré ou malgré lui , dans ses lois: car l'opposition est toujours forte , c'est-à-dire populaire , ou, en d'autres termes ; le peuple est toujours de l'opposition ;

Lesbornes dontj'ai parlé, doivent surtout garantir le peuple contre les maux dont le menace la nullité d'un roi faible , la méchanceté d'un mauvais roi ; elles les garantissent contre les entreprises des ministres auxquelstout roi confie nécessaire ment une partie des soins dont il est chargé , etcontre la solli citude si rarement paternelle avec laquelle ils s'en acquittent. Elles n'empêchent jamais un bon roi , qui n'est qu'un bienfait du hasard , de rendre son peuple libre et heureux , et d'être , mais en roi, le père d'enfans dignes de former une nation , et toujours reconnaissans de devoir , en partie , cet inappréciable avantage au premierdeleurs compatriotes.

( 73 ) celaest etdoit être ainsi. Sous un gouvernement dévot , le peu. plese fait incrédule; il redevient religieux sous un gouverne ment persécuteur. Ne l'avons-nous pas vurepousser jusqu'à la raison et la liberté elle même , pourcela seulqu'elles lui étaient imposées parle pouvoir?

1.

"} :

dans les journaux que j'ai écrit , parce que les jour naux sont les organes lesplus actifs de l'opinion publique qui les inspire, età laquelle , à leur tour , ils servent d'aiguillon. Et c'estle Courrierdes Pays-Bas quej'ai choisi de préférence , parcequetous ses rédacteurs sont Belges , que je m'honore de les avoir pour amis , et que , sur bien despoints, nos opinions politiques sont les mêmes.

Sous ce point de vue , la liberté entière et égale pour tous de la presse, cette arme sacrée del'opposition, est la vérita ble sauve-gardedes gouvernemens. C'est pour préserver le nô trede dangers qui me paraissaient imminens, que j'ai pris la plume.Etc'est

Lesjournalistes sont des écrivains qui , chaque jour, parlent à des milliers de leurs concitoyens : toutes les expressions de

J'ai appelé tous les citoyens à exercer le droit , à remplir le devoir de l'opposition : je crois par làavoirbien mérité et d'eux et du gouvernement. En effet , celui-ci qu'a-t-il à redouter le plus? Ses propres fautes , et l'indifférence ou la perfidie des hommes qui les lui laissent accumuler jusqu'à ce qu'elles lui deviennent fatales.

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L'écrivain est le représentant de la civilisation de sontemps : c'est à ceuxqui l'ont précédé dans la même carrière , que les peuples sont redevables des institutions libérales qui les régis sent ; c'est à lui que les députés des peuples régis par un gou vernement représentatif, doivent la confiance de leurs manda taires. On est étonné d'entendre encore de nos jours des expres sionsde mépris partirde latribune nationale, pour aller frap per une classe d'hommes qui ont si puissamment contribué à érígercettemême tribune , et qui ont aussi laleur, du haut de laquelle députéset mandataires, peupleset magistrats , citoyens, ministreset rois , tous enfin seront jugés en dernier ressort ; et la postérité ne casserapas cejugement.

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Ces garanties sont :

( 74 )

imaginables , de quelque part d'ailleurs qu'elles vien nent, n'empêcheront pas que , dans l'état actuel de la civilisa tion, leur influence n'aille toujours croissant avec les progrès des lumières, auxquels l'inappréciable bienfaitdela presse pé riodique fait aujourd'hui, nous l'apprenons d'un des honora bles membres de la seconde chambre, participer les Iroquois eux-mêmes. the rela

!mépris

2ºLaresponsabilité ministérielle qui , seule , rend l'affranchis sement de la presse utile aux citoyens, et plus encore au gou vernement, toujours intéressé à connaître les actes qui le com promettent , et les imprudens ou les malveillans que la voix pu blique enaccuse; la responsabilité ministérielle qu'un person nagen'arrive pas , nous a-t-il avoué , à comprendre, pas plus qu'il ne comprend legouvernement constitutionnel lui-même , auquel cependant ila juré obéissance ; la responsabilité ministé rielle enfin, franchement acceptée , parce que , sans elle , l'in violabilité royale, fondement de tout gouvernement constitu tionnel-représentatif, estun vain mot vide de sens ;

3º Une organisation définitive du pouvoir judiciaire , défen

Honneur aujournaliste qui a entrepris d'éclairer jusqu'aux Sauvages ! Ils devront à sa plume leur vie morale , la connais sance de leurs droits , et le couragede les défendre.

C'est à ladéfense des nôtres que j'aiconsacré la mienne. Je ne ladéposerai que lorsque nous serons entourés des garanties sur lesquellesje crois que doit s'appuyer notre édifice social, et que, l'on ne saurait trop lerépéter, la libertéde la presse, dépouillée de ses entraves , peut seule prémunir contre tous les coups qui menaceraient de l'ébranler.

1° L'abrogation pure et simple des lois exceptionnelles et des dispositions du code pénal , qui sont en contradiction avec l'es prit et la lettre de la loi fondamentale concernant la liberté de la presse; ainsi que l'abolition de toute censure préalable, re poussée par nos institutions , et nommément de l'absurde cen suredes imprimeurs , au moyen d'une disposition légale, met tant clairement l'imprimeur d'un écrit incriminéhors de cause, lorsque l'auteur ou l'éditeur en est connu ;

6ºLe droit inviolable de soutenir, en la langue qui nous est laplusfamilière, en notre languefrançaise, la langue denotre enfance, devenue notre langue nationale , nosintérêts les plus chers, nos droits les plus incontestables ;

La liberté individuelle , efficacement protégée parlaloi, con tre le pouvoir etses agens, quels qu'ils soient ;

7° La liberté de l'instruction, dont la nature fait un droit pour les parens , et dont notre pacte social confie la surveil lance au chef de l'État , auquel il impose le devoir de faciliter les moyens de propager les lumièresdans toutes lesclasses : c'est ainsi que le Roi doit veiller à ce que personne ne soit troublé dans sondroitd'adorer Dieu selon sa conscience ;

8° L'inviolabilité desdroits politiques , aussi sacrés que les droits civils , etdont aucun citoyen belge ne doit pouvoir être dépouillé, si ce n'est sur une déclaration d'indignité , en vertu d'un jugement légalement prononcépar un tribunal légitime, d'après les lois existantes ;

( 75 ) ; seurnéde tous lesdroits des citoyens , et, avant tout , de celui de signaler les abus du pouvoir et de nommer ceux qu'on en croit coupables : en vertu de cette organisation , l'indépendance laplus absoluedu pouvoir judiciaire devrait être élevée au-des sus de toutsoupçon possible , mise hors detout doute;

4º La conservation du jury , cette institution sublime des sociétés modernes , protectrice à la fois des libertés de chacun etde la libertéde tous; au moyen delaquelle la vie morale pé nètre au sein des sociétés les plus. corrompues, et qui pré serve la civilisation des dangers que lui préparent sans cesse l'égoïsme et la corruption ; :

50 Des codes en harmonie avecles lumièresdu siècle, surtout un code pénal et un code de procédure, compatibles avec les droitsde l'humanité et de la liberté;et, entreautresgaranties, la garantie importantede l'audition publique des témoins ;

En un mot, la loi fondamentale, et rien que la loi fondamen tale, mais aussi toute la loi fondamentale , sans restrictions , ni exceptions, ni interprétations qui la détruisent ou la modifient, etavec , pour me servir ici d'expressions consacrées par le Roi lui-même, avec tous les droits civils qui caractérisent un peu, plevraiment libre, c'est-à-dire :

( 76 )

Le droit d'association etde pétition;

Lalibertédes opinions religieuses, quitoutes peuvent êtresou tenues et défendues par les moyens que la presse met à ladispo sition de tout citoyen;

L'égalité civile de tout Belge , sans distinction ni de rang, ni de naissance , ni d'opinions , ni de culte, nide provinces, ni de langueL'inamovibilité; deses juges;

: Ces ministériels,qui sont-ils, pourqu'onprennesi ardemment etsur-tout siofficiellementleurdéfense ? ou plutôtquesont-ils? Sont-ce les partisans d'un gouvernement quelconque, les sou tiens d'un ministèredéterminé , les amis de tel ou tel autre mi nistre? Non, messieurs, ce sont gens sans système ni opinions, sans caractère ni sentimens. Ce sont les flatteurs, les flagorneurs des puissans du jour , fidèles au budjet, mais au budjet seule ment; les adorateurs detout ce qui tient le portefeuille et pos sède une clefdutrésor; pour lesquels il n'y ahumiliation,honte , bassesse,vileté, turpitude , qui les fassent rougir , iniquité qui les effraie, service qu'ils n'ambitionnent de rendre , n'importe à qui ; les ministériels sont, dans les monarchies constituées mo dernes , ce que sont les courtisans dans les monarchies absolues, ce qu'étaient généralement les courtisans de l'ancien régime, c'est-à-dire les serviteurs, les valets de quiconque commande et

Voilà", messieurs, ma profession de foi politique. C'est pour ne pas m'exposer aux reproches qu'auraient pu me faire mes concitoyens, etque, sans nuldoute, m'auraitfait maconscience, de n'avoir qu'unefoi morte, que j'ai manifesté hautement et publiquement quelques-uns de mes principes dans les articles incriminés, dirigés contre les ministériels.

La liberté de penser et , par conséquent , de manifester sa pensée etdela répandre , c'est-à-dire deparler , d'écrire et d'im primer, saufàrépondre de ses paroles ou de ses écrits devant Tes tribunaux constitués et d'après la lettre des lois écrites ; Ledroit surtout, et dans toute son étendue , d'investigation sur les actes du pouvoir et sur lespersonnes qui l'exercent, sans lequel toute liberté , toute loi , toute garantiesont illusoires , sontpismême, sont dérisoireset provocatrices.

( 77 ) paie; les ministériels enfin , sont les hommes sans conscience qui, dans l'espoir d'avoir leur part aux faveurs que le pouvoir dispense, se vendent , se prostiluent, se dévouentà lui, quand méme. et encourent, et méritent dès-lors tout le mépris du peuple dont ils sacrifient les intérêts , dont ils sacrifieraient 'usqu'à l'existence, auxintérêts de leurambition et de leur cupidité.....

Chosesingulière! parce que j'ai, dit-on, outragé les ministé riels, je suis un artisan de discordes, un fauteur de troubles ; et l'épithète ministériel est partout considérée comme étant, à elle seule, la plus sanglante injure ! et l'on ne trouve personne quiconsente à se laisser entacher de ministérialisme !

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C'est là, messieurs, ce que j'entends par ministériels. Et, d'après cette définition naturelle du ministérialisme, vous ne croyezpas, vous ne pouvezpas, lamainsur la conscience , non , vous ne pouvez pas croire que, par les expressions dont je me suis servi,j'aie voulu, j'aie pu même vouloir opérer une révolu tion dans le royaume.

J'aidivisé , dit-on encore , les habitans du royaume en minis tériels etenanti-ministériels, etj'aipar là excitéles seconds contre les premiers?J'auraispu aussi les diviser en méchans eten bons, en fripons et en dupes , et avertir charitablement les uns de se méfier des autres , de déjouer leurs trames , et de faire en sorte d'être le moins possible leurs victimes. Les fripons et les mé chans , je le conçois sans peine , auraient pris mes avis en très mauvaise part; mais auraient-ils étéreçusà s'en plaindre en jus tice? Non, certes; et je dois croire que les ministériels , quels qu'ils soient , ne réussiront pas mieux devant la Cour d'as sises.Etje le répète,qui sont, après tout, ces ministériels? Je neles ait pointnommés. J'attends, au contraire, qu'ils se nomment ; et je crains seulement qu'ils aient garde de le faire, quoiqu'avec la certitude d'obtenir une réparation d'honneur, qu'ils seraient en droitd'exiger, mais qui pourrait laisser planer sur leur tête un incommodesoupçon.J'aicherché,ilestvrai , à flétrir lesministériels. Mais à Dieu neplaisse que jeflétrisse jamais quique cesoit du nom de minis tériel!

1

( 78 )

110nae

Jevous le demande , messieurs, àvous qui allez me juger;si j'avais poussél'oubli de ce que je vous dois , de ce que je dois à la loi dont vous êtes les organes, jusqu'à vous appeler ministé riels, ne me condamneriez-vous pasàjuste titre pour injures et outrages envers la magistrature ? Ne m'accuseriez-vous pas de tendance àsemer la défiance et la désunion dans le peuple ! Eh bien , donc tous d'accord sur le vrai sensdu motministérialis me, c'est devant vous-mêmes que nos concitoyens s'écrieront avec moi: HoNNISSONS , BAFOUONS LES MINISTÉRIELS ! guerre où verte, guerre à mortà la corruption , aux corrupteurs qui l'or ganisent, aux láches qui se laissent corrompre ! Périssentà jamais les honteux marchés où l'on trafique de l'honneur etdela vertu, et où lapalmedel'infamie est disputée entre les acheteursquilesmarchandent, etles vendeursquileslivrent! Et vous , magistrats belges, vous , tous les premiers , vous vous empresserez de confirmer cet anathème, parce que vous trou verez dignes, àtous égards, d'être mis au bande la nation, les avides speculateurs qui ne veulent que l'exploiter et la trahir. le Uneseule réflexion me reste à faire : elle me paraît importan te. Le retrait de la loi d'avril 1815 , en vertu de laquelle je suis poursuivi,avaitdéjà été annoncé par le Roi aux États-Généraux, avant le commencementdes poursuites. Depuis-lors, la presque totalité des députés de la nation aéloquemmentréprouvé cette loi de circonstance , dans les séances mémorables du 28 etdu29 novembre , des rer , 2 et 3 décembre dernier, où tout cequej'ai écrit de plus fort dans le Courrier a été ditet soutenu avec une toute autre force et bien moins de ménagemens. Vous vousen souvenez, messieurs , je ne vous ferai pas l'injurederappeler des débatsquiresteront àjamaisgravésdansla mémoiredetout Belge patriote. Vous n'avez point oublié surtout ce que l'honorable M. de Stassart a dit des écrivains ministériels, qu'on ne doit se garder de bafouer que lorsqu'ils ne sont pas bafouables : et MM. Van Crombrugghe, Barthélemi et Geelhand, de la loi d'a vril1815; lebourgmestre deGand et notre conseiller derégence, relativementàsoninapplicabilité auxprétendusdélitsdelapresse dont il tuerait, ont-ils ajouté, la liberté ; le vice-président tribu

4115 >

Quelque soit votre arrêt ( je necrains pas de le dire, je me ** dois même de le dire ; etvous , messieurs , ne le trouverez pas inconvenant) , je ne mereprocherai rien, parce que je suis plei nementabsous devant le tribunal de ma conscience.1. "

vaincre.Jeborne donc madéfense à l'exposition franche et sincère de mes opinions et de mes principes. Vous les peserez dans votre sagesse , messieurs , et vous me jugerez dans votre impar tialité.

1

Je ne répéterai pas , messieurs , ce qu'a dit encore l'honora ble M. VanCrombrugghe, dans le discours que je viens de citer, à propos des sentences dictées par une conviction que la na tion nepartage pas , et dont , par cela seul , les coups désolent tous les bons citoyens. Ce n'est point à votre c ur que je pré tends m'adresser ; c'est votre raison seule que je veux con*

( 79 ) nal d'Anvers , concernant l'engagement formel qu'il contractait devant la chambre deneplus l'appliqueràl'avenir àcette espèce de délits. Enfin, messieurs,le jugement quevous prononcerez, sera,il n'est plus permisd'en douter, suivi avant qu'il soit peu, de l'abolition de cette même loi,si unanimement répudiée parla nation, par ses représentans etpar sonchef.

Et, avecelle,disparaîtront,commes'ils n'avaientjamais existé, les crimes auxquels elle avait donné naissance. Car , c'est bien ici, ou jamais, lecas de dire avec l'évangile, que la loi seule a fait le péché. !200

PIÈCES

De prokureur-generaal bij het hoog Geregts-Hof, te Brussel, geeftte kennen, dat het Hof bij arrest van den3 december 1828 in staat van beschuldiging heeft gesteld , en naar het Hof van assises der provincie Zuid-Brabant, verwezen heeft den navol gendenpersoon alste weten Lodewijk-Joseph-Antoonde Potter, oud42 jaren, eigenaar geboren te Brugge,enwonende te Brussel, aangeklaagd, gezocht te hebbenonder ingezetene wantrouwen, tweespalt , twist ofverdeeldheid te veroorzaken , misdaad voor zien bij hetbesluit van 20 april 1815 ende wet van6 maart 1818. Verklarende de prokureur-generaal alverder, datuit de stukken, en instructie van die zaak , de volgende daad zaken zijn geble ken : het te Brussel uitkomende dagblad, le Courrier des Pays Bas, om eenige strafbare schriften door het openbaar ministerie wettelijk vervolgd zijnde, nam dagelijks in hevigheid tegen de bestaande wetten , en hooge overheden toe. Bij verscheidene onbetamelijke artikelen werd er in het bedoeld dagblad door deszelfs opstellennietgetrachtde verdedidingtegendevervolging voorden bevoegden regter , maar wel de daadzaken onder een valsch daglicht in de gemoederen der in dwaling gebragte inge zetenen tezetten,en te verbitteren!!! daar hethun niet straffe loos toegelaten werd 's rijks overheden op eene schuldige wijze te beledigen, beweerden zij datde vrijheid derdrukpers verplet. terd werd , als ofbij deze vrijheid hetschandelijk misbruik der zelve ongestraft moest blijven !!! Daar het hun niet zonder regterlijkevervolgingtoegelaten werd deingezetene metde groot ste ontrouwdoor verkeerde opgaven te ontrusten , en degemoe deren te verbitteren, riepen zij dat de grondwet verscheurd, en de vrijheid uit haar klasskhe land gebannen werd. En alof de

( 80 )

AKTEJUSTIFICATIVES.VANBESCHULDIGING.

Mogelijk dachten zij in hunnedwaasheid bij al dit getier en geschreuw de regters te doen wankelen en van hunne hijlige pligten, dedoor henbezworen,toepassingderbestaande wettene afteOnderwijken.deze artikelen komen als hoog strafbaar voor ,

1º. Een artikel geplaast inhetblad vanden8november 1828, No 312, bladzijde 3 , kolon 2 , onderhetopschrift : auxrédac teursduCourrierdes Pays-Bas, beginnende metdeze woorden, detoutesles soltises, en eindigendemetdeze,avec toutes sessui tes, agréez, onderteekend met een oméga, waar in men OP EENE HEVIGE WIJZE ONDER ANDER DE INGEZETENEN OVERHET GEMEEN WEL VARENHUNNE BESTAANDEREGTSVERZEKERINGEN, EN VRIJHEDENTRACHT TE VERONTRUSTEN EN TEVENS OOK EEN DEEL DER NAtie onder den NAAM VAN MINISTÉRIELEN, DOOR HET OVERING ZOECHT TE DOEN VER VOLGEN, EN VERSTOOTEN. 2° Een artikel geplaast in het blad van den 22 november 1828, V. 326 blad 3, kolon 1 , onderhet op schrift le ministérialisme beginnende met deze woorden dans toutétatconstitutionnel,en eindigende met deze,avec toutes ses suites , en weer met een oméga ondergeteekend , waar in de POGINGEN AAN HET VOORGAANDE ARTIKEL HERHAALD WORDEN DAAR DEZE ARTIKELEN KLAARBLIJKELIJK TREKKEN TOT HET ONTRUSTEN DER INGEZETENEN HET TUSSCHEN HEN VERRORZAAKEN VAN VERTROUWEN, TWIST-PAALD , TWIST , OF VERDEELIHED , hoe het openbadre ministerie de zelve zonder zijne pligten ten onder te blij ven, met geene lafhertige stilzwijgenheid voor bijgaan.9

( 81 ) grondwet vande vrijheidimmertoelaten konnenverwarring en wanordeop tewekken !!! Detegen hem wettelijkingerichtever vol gingen werden als eene uitvoeringder wraakzucht,enhard nekkigheid derhooge overheden opgegeven. De onpartijdigheid derregters werd mistrouwd , hun geweten verdachtgehouden, de beweegreden hunner uitsprekenverminkt, enhunnenamen spotswijze kenbaar gemaakt.

De beschuldigde Lodewijk Joseph Antoon De Potter beleide voor den heer regter ter instructie shrijver van beide deze arti kelentewezen,echter beweerde hij bij het schrijven,en uitgeven derzelve hetinzicht nietgehad te hebben het welk hem opgelegd

. 1 II

( 82 ) werd , en zeijde niet als schrijver of opsteller aan het gedacht blad verbonden te zijn.

DedrukkerJan-Joseph Coché-Mommens werd door de kamer van beschuldiging buiten zaak gesteld aangezien hij zich reeds in hecktenis bevond , wanneer deze artikelen uitgekomen zyn.

Bij gevolg van het voorgaande word de gezegde Lodewijk Joseph-Antoon de Potter beschuldigd gezocht te hebben onder de ingezetenen wantrouwen , tweespalt , twist of verdeeldheid te veroorzaken, bij het'shrijven en in hette Brussel uitkomende dagblad le Courrierdes Pays Bas tedoen plaatsenvan twee ar tikelen te weten het een in het dagblad van den 8 november 1828.No 311 bl. 3. k. 2. onder hetopschriftaux rédacteurs du CourrierdesPays-Basbeginnendemetdezewoordens : de toutes les sottises , en eindigende met deze avec toutes ses suites. Agréez etc. het ander in het blad van den 22 november 1828. N° : 326 bl. 3.k. 1. ouder het opschrift le ministérialisme be ginnende met deze woorden ; dans tout état constitutionnel, en eindigende:avectoutes ses suites ; beide meteen omega ondertee kend zijnde , waar op het Hof van assises derprovincie Zuid Braband zal hebben regt te spreken. Aldus gedaan in het par. ket van het hoog Geregts-Hof te Brussel den 6 december 1828. De eerste advokaat-generaalfungerende als Geteekendprokureur-generaal.DESTOOP.

ACTETRADUCTIOND'ACCUSATION.LITTÉRALE.

Le procureur-général près la Cour supérieure de justice de Bruxelles expose que la Cour, par arrêt en date du 3 décembre 1828 , a mis en état d'accusation et renvoyé devant la Cour d'as sises du Brabant méridional Louis-Joseph-Antoine de Potter , âgé de 42 ans , propriétaire , né à Bruges , et domicilié à Bruxel les, accuséd'avoir cherchéà occasionner la défiance , et la dé sunion , les querelles ou la sédition parmi les habitans , crime prévu par l'arrêté du 20 avril 1815 et la loi du 6 mars 1818.

Le Courrierdes Pays-Bas , poursuivi en justice par le mi nistère public, pour quelques articles punissables,devint dejour en jour plus violent dans ses attaques contre les lois existantes et les autorités supérieures.

Par plusieurs articles inconvenans , les rédacteurs de cette feuille n'ont pas tâché de se défendre contre des poursuites de vant le juge compétent, mais bien d'envenimer les faits et de les présenter sous unfauxjour à l'espritdes habitans induits en erreur. Etcomme il ne leur était pas impunément permis d'in jurier d'une manière coupable les autorités du royaume , ils soutinrentque laliberté de la presse étaitécrasée(verpletterd), comme si,parcette liberté, son abus scandaleux devaitresterim-puni !!! Comme il ne leur était pas permis, sans essuyerdes poursuites judiciaires , de troubler les habitans avec la plus mauvaise foi, par des données erronées, et d'aigrir les esprits , ils s'écrièrent que la loi fondamentale était déchirée(verscheurd) , et que la liberté était bannie de sa terre classique. Et comme si la loi fondamentale pouvait jamais permettre de provoquer au trouble et au désordre par laliberté!!! les poursuites légalement intentées contre eux furent présentées comme un effet de laven. geance et de l'acharnement des autorités supérieures,L'impar tialité des juges fut mise en doute , leur conscience tehue pour suspecte , les motifs de leurs jugemens mutilés et leurs noms publiés comme un sujet de moquerie.

Ils s'imaginaient peut-être dans leur folie d'ébranlerlesjuges par cebruit et ces cris, et de les détourner de leurs devoirs sa crésd'appliquer, ainsi qu'ils l'ont juré , leslois existantes.

Déclarant enoutre, le proeureur-général, que des pièces et de l'instruction de cette causeilrésulte les faits suivans:

Parmi ces articles se présentent comme éminemment punis sables,1°Un article inséré dans lafeuille du 8 novembre 1828, nº 313 , pag. 3, col. 2, sousle titre , aux rédacteurs du Courrier des Pays-Bas, commençant par ces mots,de touteslessottises, etfinissantparceux-ci; avec toutes ses suites, agréez, etc., signé d'un oméga, dans lequel l'on tâche violemment, entre autres, d'inquiéterles habitans surlebien-être général , sur leurs garan

( 84 )

L'imprimeur, Jean-Joseph Coché-Mommens; futmis hors de cause par la chambre des mises en accusation , vu qu'il était déjà en état d'arrestation lors de la publication de ces articles. Enconséquence , etc.

L'accuséLouis-Joseph-Antoine de Potter reconnut devant le juge d'instruction êtrel'auteurde ces deux articles,soutenant ce; pendant qu'en les écrivant et publiant, il n'avait pas eul'inten tion lui imputée, et ajouta ne pas être attaché comme écrivain ou rédacteur aujournal dont il s'agit.

SignéDESTOOP.

PREMIER ARTICLE INCRIMINÉ.

( 84 )

Aux rédacteurs du Courrier des Pays-Bas · Messieurs ,

?

Le personnage donc, causant des affaires dujour, voulut con vaincre ceux auxquels il parlait , du danger que courait l'État, depuis la régénération du Courrier, et cela...., devinez MM.,je1

De toutes les sottises que j'ai entendues, sur les déplorables procès qui vous sont suscités , la plus drôle , sans contredit , est celle qui est attribuée à unpersonnage : elle prouve lavéritédu bon mot, qu'iln'y a riende petit chez les grands.

ties légales existantes et leurs libertés , et en même temps de faire poursuivre etrepousserunepartiede lanation,sousle nom de ministériels, par l'autre partie; 2º un article inséré dans la feuille du 22 novembre 1828,nº 326, pag. 3, col. ¡re, sousle ti tre le ministérialisme;commençant par ces mots,dans toutÉtat constitutionnel,et finissantparceux-ci,avec toutes ses suites,éga lementsigné d'un oméga ; dans lequel les tentatives du précé dent article sont répétées ; comme ces articles ont pour but évi dent de troubler les habitans et d'occasionner parmi eux la dé fiance , la désunion , les querelles ou lasédition , le ministère public ne pouvait pas, sans manquer à ses devoirs , les passer sous un lâche silence.

Eh! nous criaient les Français , ces jésuites si redoutés , qui lessoutenait chez nous ? Un mauvais ministère. ·

Comment, demanderais-je volontiersà nos voisins , comment pouvons-nous noustirerdelà? Dèsque nous voulons être mieux soutenus , mieux défendus , mieux jugés , mieux gouvernés , le

Et c'est toujours sous prétexte de la peur qu'ils inspirent , qu'onvous refuse les garanties auxquelles vous avez droit , la li berté dont vous avez besoin, la prospéritéqui fuirade plus en plus une terre où toutes les garanties sont illusoires , où la li berté est un vain mot , un leurre, une provocation pourconver tir , quandil plaît, les dupes en coupables , les patriotes en sé ditieux.Cesdiscours m'irritaient d'abord ; ils m'affligèrentensuite:ils finiront parme décourager.

D'abord, pour nous défendre contre eux, on nousa, commele cheval de la Fable , sellés , bridés et montés ; et maintenant que nous n'avons plus rien à en craindre , nous restons la sangle sous le ventre , le licol sous le menton, et Nos Seigneurs sur le àdos.11

( 85 )

Et puis, c'était si commode , de pouvoir répondre aux Fran çaisqui, après quinzejours de séjour àBruxelles, nous disaient : Quoi ! pasde jury ? Non , mais aussipas de jésuites. Quoi ! pas de liberté de la presse? Non, mais aussi pas de jésuites.

vous ledonne enmille..... Cela, parce que le Courrier s'est fait jésuite.Maudits

Quoi !pasderesponsabilitéministérielle ?pasd'indépendance dupouvoirjudiciaire ? et un système d'impositions accablant et anti-populaire ? et une administrationboiteuse ? Il est vrai ; mais point de jésuites.-

jésuites, ils nous ont fait biendu mal de leur vivant ; et, quoiqu'enterrés en France , leur ombre continue encore à nousinquiéter !

Iln'afait que passer; ils n'étaient déjà plus.

auraitpresque mieux valu queles bons pères continuassent gouverner Paris ;nous aurions sudu moins pourquoi on nous étrillait , fouettait , aiguillonnait.

( 86 ) tout à meilleur compte , ce qui nous paraît ,à nous qui payons pour que cela soit ainsi , la chose du monde la plus facile , en un mot, dès que nous nous mêlons de nos affaires , oncrie aux jésuites , et nous voilà hors du droit commun!

Par laquelle il se déclare l'auteur de l'article incriminé.

L'articleMM.intitulé,

Encore des poursuites, et inséré dansvotre numéro d'hier, m'afait soupçonner ( etles informations que je mesuis empressé de prendreà votre bureau , ont confirmé mes soupçons) , que la lettre nouvellement incriminée est précisé mentcelle que je vous ai écrite, ily apeu dejours, concernantle jésuitisme. Cette lettreportait pour signature ce qu'au parquet on a si plaisamment désigné comme un petit fer à cheval

AMM. les rédacteurs du Courrier des BruxellesPays-Bas,14novembre.

Il me vient une idée : opposons des mots àdes mots.Jusqu'ici l'on a traqué les jésuites ; bafouons , honnissons , poursuivons les ministériels; que quiconque n'aura pas clairement démontré par ses actes qu'il n'est dévoué à aucun ministre , soit mis au ban de lanation , etque l'anathèmede l'anti-popularitépèsesur lui avec toutes ses suites.

Il me semble qu'il faudrait d'abord prouver le jésuitisme , et ensuite la culpabilité du jésuite , à moins qu'on ne voulût , ce qui serait plus raisonnable , se contenter d'établir les faits incri minés sans égard aux opinions du prévenu.

Agréez , etc., etc. .

LETTRE DE M. DE POTTER

Dites-moi , messieurs , de ce qu'onappelle unhommejésuite , s'ensuit-ildelà qu'ilfaut l'emprisonner , le torturer , le juger et le condamner ? Toutesses actions deviennent-elles des crimes , et sesparoles desabsurdités ?

Si, cependant, on exigeait que vous prouvassiez que vous n'êtes point jésuites , vous seriez ,je crois , messieurs , bien em barrassés. On ne prouve pas qu'on n'est point un tison d'enfer.

( 87 ) renversé, et que nous, qui avons dans le temps appris à épeler legrec , nommons un Oméga.

Il n'estdéjà que trop lourd le poids des iniquités sous lequel on vous accable ; jamais, MM.,je ne permettrai que vous portiez la charge qu'on me destine.Imprudence ,faute , délit ou crime, je me hâte donc de prendre tout sur moi , puisque , s'ily a un coupable, c'est évidemment moi et moi seul qui le suis ; etque , quelle que soit l'incivilité avec laquelle on nous traite d'or dinaire en pareille circonstance, jevous dois , je me doissurtout àmoi-même de déclinerici mon nom en toutes lettres.

Agréez, MM., s'il vousplait, mes félicitations sincères pour la fermetéavec laquelle vousdéfendeznos droits; mes excusespour les tracasseries que je vous ai bien involontairement suscitées , et l'expression cordiale de toute ma considération.DEPOTTER.

Au reste , je me consolerai aisément, ou , pour mieux dire, je me glorifierai de ma mésaventure , si elle contribue à débar rasser plus tôt la presse belge des entraves qui la gênent. Car , si la manifestation de la pensée n'est entièrementlibre, elleest , non restreinte , mais esclave ; non limitée , mais nulle. Cette question est vitale chez nous. Sans l'affranchissement réel de la presse , tout peuple est un sot et servile troupeau , tout gouver nement unearbitraire et rapace agenced'exploitation ; la liberté des opinionsetdes cultesn'est plus qu'une dérision;l'esprit natio nal , l'opinion publiquesont desmots vides desens ; l'amour de la patrie est une duperie , et la terre hospitalière et classique devient la plus niaise dessottises.

Je nepuistoutefois m'empêcherd'en rire. Ce sera tout pour le moins drôle de me voir poursuivi, et peut-être incarcéré et puni comme véhémentement soupçonnéde loïolisme , suspect d'intelligenceavec le pape, cru fauteur et adhérent des aposto liques d'Espagne et de Portugal.

TRIOMPHE DU JESUITISME.

( 88 )

Tout àlafin on s'est aperçu que c'étaient des moulins à vent que l'on nous avait fait prendre pour des chevaliers armés de toutes pièces. Portant nos regards en arrière sur ceux qui nous excitaient à cette puérile et risible entreprise , nous avons re connu le piége, etrougi jusqu'au blanc des yeux denous y être laissés prendre. Le péril présent et urgent nous rappelant tous à nous-mêmes, nous nous sommes réunis: et, jésuitesdenom,jé suites defait, et ex-anti-jésuites, nous avons clairement vu qu'il n'y avait, avant toute autre chose, qu'unennemi unique à com battre.Cetennemi, c'est l'arbitraire, qu'accompagne toujours le se cret. On l'attaque avec avantage aumoyen d'une loyale et cou rageuse opposition , soutenue par la publicité la plus franche et la plus entière. L'opposition à l'arbitraire est le plus saint

S'ila fallu , depuis plusieurs années, courre lesjésuites, afin d'avoir sa part des faveurs ministérielles , nous , chasseurs ar dens comme tant d'autres, nous nous permettrons de rechercher si la haine seule du jésuitisme animait ceux qui nous ont fait jusqu'ici négliger toute autre chose. Non , sans doute; car ils escobardaient, eux, à leur manière , manière bien plus subtile à la fois et plus large que celle des pères proscrits. Mais ils re doutaient la concurrence ; et, en vrais jésuites , ils voulaient ré gnerseuls. Or, pour y parvenir , ils résolurent de se créer des obstacles faciles à renverser, espérant se faire oublier eux-mêmes dans l'ivresse de la victoire. Ce n'était pas là un rare effort d'i maginative. Cependant, avouons-le à notre honte, on fut leur dupe, et beaucoup le furent complètement.

ARTICLE NON INCRIMINE.

Nous marchons à pas précipités vers le dénouement d'une farce , aussi gauchement jouée par les principaux acteurs, que déplorablement dénouée pour le public. Sera-t-il donc vrai que, pournotre argent, on ne nous aura régalé qued'une lourde mystification , et que , malgré cet argent , il nous aura encore été défendu de siffler?

( 89 )

1níinistère,2 12

des devoirs qui l'exerce, fait acte decitoyen ; ses efforts neten dent qu'à assurer la liberté, et partant la prospérité et la di gnitéde la patrie. Il veut dissiper les ténèbres dont s'environ nent ceux-là seulement dont les intentions ne sont pas pures , et qui défendent d'écrire, en attendant qu'ils puissent défendre de parler et de penser.

Il serait, certes , plus qu'arbitraire de vouloir pénétrer dans la conscience d'un individu qui se conforme aux lois, pour y lires'il estou n'est pasjésuite. Chez nous, où, dit-on, les opinions sont libres, il ne faut point d'arrêt de purification constatant qu'on ne fait partie d'aucune congrégation quelconque, comme il en faut en Italie ou dans la Péninsule , déclarant qu'on n'est ni franc-maçon ni carbonaro.

Cette réflexion un peu tardive, peut-être , a convaincu qui conque sentait en lui le besoin de sa propre estime, que, quels d'ailleurs que fussent ses principes personnels, il devaits'abste nirde renouveler , du moins pour le moment, d'anciens dé bats, sur des questions intellectuelles et morales qui , résolues même erronément, ne constituaient jamais à elles seules un crime politique.

Si donc les jésuites triomphent en quelque sorte dans ce royaume, ils le doivent entièrement à l'acharnement maladroit de leurs soi-disans adversaires. Eux seuls pouvaient les faire triompher, et ilsy ont réussi. Ils ont persécuté ; ils ont fait des prosélytes. Les esprits indépendans ont résisté à l'impulsion hostile; les esprits généreux s'y sont opposés. Enfin , les anti-jé suites ont tant fait que , dans les circonstances actuelles , ce serait une lâcheté que de profiter du lopin de liberté de la pressequenousjette le ministère, pour accabler ceux qui, avec nous la réclament aujourd'hui tout entière ; ce serait une lâcheté d'attaquer lejésuitisme, qui est devenu chez nous le synonyme d'opposition ; que , dût )dût le mot d'ordre être Saint Ignace, dussent les drapeaux porter le fameux monogramme et un sacré-c ur, dussent enfin les instructions partir du Vati can,le devoir de tout vrai patriote était dorénavantde combat tre dans les rangs de cette opposition , toujours libérale en ce qu'elle empêche les empiétemens, les usurpations du

Les ministres exercentle pouvoir s'ils étaient des anges, il faudraits'abandonner à eux sans défiance comme sans crainte; et chartes et lois,tout serait inutile.Mais ce sont des hommes,etsou ventdes hommesfortordinaires.Or, il est dans lanaturehumaine desonger d'abord à soi avant de s'occuper des autres, et mêmede en se ressouvenir des autres qu'à cause de soi ,et pour des motifs purement peronnels et rien moins que désintéressés.

( 90 > seules et véritables causes des malheurs d'un peuple et desdan gers d'un gouvernement.

DEUXIÈME ARTICLE INCRIMI NÉ.

Après la victoire , c'est-à-dire, la liberté une fois conquise au profit de tous également , il sera loisible à chacun d'émettre sa profession de foi , de la défendre et de la soutenir par tous les raisonnemens qui peuvent militer en sa faveur. Alors , et seu lement alors, la raison finira par triompher à son tour, et son triomphe seraréel et durable. .

LE MINISTÉRIALISME.

Dans toutÉtat constitutionnel , c'est-à-dire où une loi fonda mentale est au-dessus du pouvoir , doit être plus forte que lepouvoir, et, par conséquent,êtreefficacementgarantie contre ses attaques etsesusurpations , il est presqu'impossible , par la nature même des choses , qu'il n'existe point deux partis , tou jours en garde l'un contre l'autre , toujours armés successive. ment , l'un pour étendre et augmenter ce pouvoir dont il est le dépositaire, l'autre pour se défendre contre les entreprises qui le menacentdans ses intérêts et dans son existence. Ces partis sont, le ministère gouvernant , et le peuple gouverné représenté par l'opposition.Ilestfâcheux , il est honteux même de devoir encore revenir à cet A B C de tout gouvernement libre. Mais , comme il est de l'essence dupouvoir de les contester sans cesse , il faut bien quenous nous soumettions à l'ennui de lui rappeler detemps en tempscesprincipes élémentaires.

*

Le ministèredonc estpresquetoujourssupposéenguerreavecla nation;etles ministériels, surtout dansun moment de crise, sont, nousl'avons déjà dit et nous le répétons ici, justement bafoués , honnis etpoursuivispar les amis des libertés publiques, qui les mettent au ban de la nation , pour préserver celle-ci de leurs piéges, laprémunir contre leurs empiétemens, la défendre con tre leurs attaques : sentinelles sanscesse vigilantes pour conser ver àl'abri de toute atteinte lepalladium des droits nationaux , ils invoquent alors contre quiconques'est mis à la solde de leurs adversaires , l'anathème qu'ilaparcela seul encouru, de l'anti popularité; et cetanathème pèse sur lui avec toutes ses sui tes.

( 91 )

*

1

En un mot , pour tout membre d'une véritable opposition , le bien lui-même venant du gouvernement doit être suspect , tant qu'il n'est pas réalisé d'une manière immuable. Le soupçon ne peut disparaître pourfaire place à lasécurité , que lorsqu'une longue série d'actes, tous nationaux, a autorisé la nation à sere poser,jamais encore à s'endormir, sur la foi de ceux qui lagou vernent.

.

De là, la défiance qui est inhérente à tous ceux qui sontdomi nés , régis , gouvernés par des hommes comme eux. C'est le ur seule sauve-garde. Et,dût-on leur enseignermêmeles mathéma tiques par ordre supérieur , dès-lors il y aurait pour eux une raison suffisante de douter si deuxetdeuxfonttoujours quatre, ou du moins d'examiner s'il n'y apas eu quelque motif secret pour proclamer de nouveau cette vérité; si , venant de la main qui se charge de la répandre , ellene renfermepas un piége , ne cachepasun danger.

Je vous prie de vouloir accorder une place dans votre plus prochain numéro à la lettre ci-jointe. Comme , pour cela seul que les jésuites n'y sont, ni dénoncés , ni même nommés , elle pourrait vous faire accuser de jésuitisme , j'ai pris le parti de la signer en toutes lettres.

Messieurs,

(1 ) Il est question de cette lettre dans l'interrogatoire de M. le prési dent. 3

Des Petits-Carmes, le 20 novembre 1828.

1{1((

Nous voulons, j'en appelle à tous mes concitoyens , l'exécu tion franchede la loi fondamentale, dont lalettre et l'esprit nous assurent le droit de réclamer par tous les moyens légaux ànotre disposition:1ºLalibertéentière et égale pour tous , de la pressé ;

( 92 ).

Messieurs ,

Agréez, etc.

Auxrédacteurs de tous lesjournaux indépendans et patriotes du royaume des Pays-Bas.

Laquestion débattue plus vivement que de coutume , depuis quelques semaines , entre les Belges et leur gouvernement , me semblepouvoir être résumée en peu de mots.

2º L'acceptation sincère , avec toutes ses conséquences , du principe vital de tout gouvernement libre, celui de la respon sabilitédes dépositaires del'autorité, et avanttout, desministres;

Auxrédacteurs du Courrierdes Pays-Bas (1).

3º La prompte et définitive organisation du pouvoir judi ciaire.Sans la liberté de la presse, la loi fondamentale , avec toutes les libertés qu'elle nous garantit , celle des opinions , celle du culte , et la liberté individuelle elle-même , est un vain nom sans aucune réalité. Et la presse ne sera libre que lorsque l'ar rêté du 20 avril 1815 , qui l'enchaîne , sera révoqué ; que lorsque les articles du code pénal sans cesse invoqués par la jurisprudence contre les écrivains qui , de leurcôté, invoquent

du pouvoir judiciaire,miseau-dessusde tout soupçon, hors de tout doute , est le seulgarant qui puisse être offert à la nation , de l'inviolabilité de ses droits. Alors, et alors seulement , de même qu'au Roi est imposé le devoir de trans mettre sa couronne intacte àses héritiers, de même nous pour rons remplir le nôtre, qui est de conserver les libertés auxquel les nous avons droit comme hommes , et dont , comme Bel ges, la loi fondamentale nous assure la jouissance et le main tien.Ilserait à désirer que , dans la crise où , nous ne pouvons nous ledissimuler , nous nous trouvons en ce moment , les amis des libertés publiques se réunissent de toutes les parties du royaume, s'entendissent , et , par des adresses respectueuses et loyales au chefde l'État etaux représentans de la nation , par la déclarationpositive et expresse de leurs opinions, manifestassent unanimement et clairement aux yeux de tous , les v ux d'un peuple honorable , qui s'est toujours montré aussi soumis aux lois , aussi fidèle à ses princes , que constant et ferme dans son amour pour laliberté.

( 93 ) la loi fondamentale , seront déclarés contradictoires à l'art. 227 de cette loi , et par conséquent nuls depuis sa promulga tion. respon

Il n'ya point de liberté réelle de la presse , là oùil n'yapoint de responsabilité ministérielle. A quoi servirait-elle , si elle ne signalait les abus , ne dévoilait les actes arbitraires, ne dénonçait les usurpateurs des droits nationaux?Que serait la loifondamen tale elle-même , s'il n'était pas permis de dire , d'écrire , d'im primer qu'on la viole , et qui la viole? Quand même la sabilité ministérielle ne serait pas écrite dans notre loi fonda mentale, la seule existence de celle-ci la supposerait : car il n'est point de charte constitutionnelle possible , si le pouvoir qu'elle établit n'est responsable de ses actes, si les agens de ce pouvoir ne sont soumis auxinvestigations de tousles citoyens. C'est leur confiance dans l'incontestabilité de cette vérité, qui fait encore affronter par les écrivains belges les coups qui les menacent de toute part ; c'est l'obstination à la nier , qui porte la jurisprudence à frapper ces coups funestes àtoutes nos libertés..L'indépendance

DesPetits Carmes, le 3 décembre 1828.

Aux Rédacteurs du Courrier desPays-Bas.

Les orateurs qui me donnent cette importance ont, pour me servir des expressions d'un éloquent et spirituel député des pro vinces méridionales , étudiéle code de la politesse et de la civi lité envers le pouvoir , plus que le code des lois réclamées par lesiècle; il paraît qu'ils ignorent même l'existence du code de l'humanité. S'il leur était jamais tombé sous la main, y au raientvu qu'il y a peu de générositéà attaquer l'homme auquel on cherche en mêmetemps àenlever les moyens de se défendre , à dénoncer sur nouveaux frais celui qu'une dénonciation prive déjàde sa liberté , à appeler la vengeance des lois sur la tête de l'accuséqui est menacéde toute leurrigueur. ils

( 94 )

Les mots honnissons , bafouons paraissent avoir profondé mentblessé les amours-propres. Ehbien ! il n'y avait qu'à prou verqu'ils sont intempestifs , inconvenans, impertinens même; etle public , jugesouverain de ces espèces de disputes , m'aurait condamné pour les avoir employés mal à propos, sans , pour cela, que le ministère public s'en fût mêléle moins du monde.

Sur qui tombaient-ils ces mots? Sur les ministériels. Mais personne ne veut être ministériel ; mais les brochuriers eux mêmesrepoussent avec indignation la réputation de ministéria

DE POTTER.`

Je vous prie instamment , messieurs , d'insérer cette lettre dans vosjournaux : j'espère qu'elle sera promptement suiviedes témoignages de l'adhésion de mes concitoyens. Il est des circon stances ou la prudence intéressée doit se taire , et où le manque d'énergie serait de la pusillanimité. Agréez , etc.,

C'est avec surprise que , du fond de ma retraite, je m'entends si souvent citer à latribune nationale : je ne croyais pas que les paroles d'un pauvre journaliste, du nombre de ceux qui , comme on l'a dit , consacrent leur temps et leur plumeà per vertir jusqu'aux Iroquois , méritassent d'être répétées par de nobles et puissans représentans d'unpeuple calmeet loyal.

Vousle savez, je n'ai eu ni pu avoird'autrebut dans les écrits qui ont été les motifs de la condamnation dont je subis en par tie lapeine , que celui de défendre vos droits que je croyais atta qués.M'étais-je trompé ? Cen'est point là la question. Erreurn'est pas crime.

" Ce n'est que parce que la liberté de la presse me parut entra vée,queje laréclamaitout entière. Ce n'est que parce que lares ponsabilitéministérielle était formellement niée parun ministre, que je cherchai à prouver sa constitutionnalité. Ce n'est que parce que la fréquente application d'une loi exceptionnelle fai sait gémir tous les bons citoyens , que je dus , avec la nåtion ses représentans et son chef, en demander l'abrogation. Ce n'est que parce que j'ai frémi à la seule idée que l'indépendance du"

( 95 ) lisme.Qui donc ai-je offensé ? Je n'ai point nommé. J'ai jeté le gant , ilestvrai ; mais personne ne le ramasse.

Toutce qu'il y ade réel jusqu'à présent dans cette affaire , c'estmon emprisonnement et celui de mon imprimeur qui , hé las ! n'enpeutmais , si ses presses ont multiplié le fatal honnis sons, bafouons. Comment concilier le méprisqu'on affecté d'une part pour les journalistes, et le bruit qu'on fait de l'autre de leurs moindres phrases , et la réfutation par procureurs-géné raux, procureurs du roi , geoliers et maréchaussées dont on les jugedignes?Ilmesemble à moi que si lesjournaux ne sont les organes que de quelquesjeunes écervelés, de quelques fous , on fait bien de les mépriser ; mais alors il est fort inutile d'invoquer , de dé ployer contre eux la force publique. Si , aucontraire, ils expri ment l'opinion, les voeux du peuple, il serait plus sage encore de les écouter , qu'il n'est imprudent de vouloir leur mettrele bâillon.Agréez , etc. DE POTTER.

A MES CONCITOYENS.

De la prison des Petits-Carmes , le 21 décembre 1828." Mes chers et honorables concitoyens,

( 96 ) pouvoirjudiciairepûtencore êtremis en doute, que je sollicitai, au nom de la patrie alarmée , une prompte et définitive orga nisationde ce pouvoir , et son affranchissement incontestabledes deux autres pouvoirs constitués. Ce n'est enfin que parce queje crus l'attention générale détournée des affaires publiques parla vaine frayeurdu jésuitisme , contre lequel chez nous le pouvoir est assezfort pour sedéfendresans notre aide, que j'appelai cette attention sur des choses plus importantes , sur nos institutions àfonder, nos droits à maintenir , nos libertés à consolider.

Et cela, parce que je voulais révolutionner la Belgique !

Quels étaientmes moyens? Laloifondamentalequej'invoquai; car je n'ai jamais invoqué qu'elle ; je n'ai demandé que son exécution franche et à l'abri de toute interprétation.

Jene meplaindrai point, je n'accuserai personne. En paixavec moi-même, je ne troublerai pas par des sentimens haineux le calme dont jejouis, etque, certes, ne goûteraient pas ceux qui seraient l'objet de mes plaintes et de mes accusations.

Vous savez aussi quel a été le résultat de mes efforts. Par un arrêt , dix-huit mois ont été retranchés de ma vie.

J'écrivis, mes chers concitoyens , j'en avais le droit; ma con science m'en faisait un devoir.

La loi fondamentale est donc un écritrévolutionnaire ! Notre pactesocial, un acte d'anarchie!

Je neformequ'un seul désir , c'est que ce qui arrive aujour d'hui ne soit pas perdu pour vous ; c'est que l'épreuve à la quelle je suis soumis, contribue du moins à améliorer votre sort. Dûtle mien être centfois moins supportable, il me serait doux, avec la certitude que j'ai servi la cause de la patrie et de la liberté.Belges, et vous surtout habitans de Bruxelles, qui prenez un intérêt si marquéà ma situation , il me reste à remplir envers vous un devoir bien cher, celui de la reconnaissance. Je le fais ici, autant qu'il est enmoi, par le témoignage public que je me plais à rendre àvotre patriotisme et à votre humanité. Agréez

Unerévolution, granddieu! opérée par deux articles de ga zette! Trop de réflexions se présentent ici pour qu'on se per mette de les émettre .....

L'accusérépond se nommerLouis-Joseph-Antoine de Potter, âgé de 42 ans , propriétaire, né à Bruges , domicilié à Bruxelles.

1. 13

Extraitdesminutes déposées augreffe de la Cour supérieure dejustice, séantà Bruxelles.

M. le Président demande àl'accusé sesnom , prénoms , âge , profession , domicile et lieu de naissance.

M. le président ordonne à l'huissier de service de fermer les portes , et déclare la séance ouverte , elle se tient à huis-clos.

Cejourd'hui 19 décembre 1828, à 9 heures etdemiedu matin, MM. deKersmaker , Orts , Putseys , Greindl, Cannaert, con seillers à la Cour supérieure de justice de Bruxelles , lepremier nommé président , et les autres, assesseurs composant la Cour d'assises de la province du Brabant-Méridional , se trouvent réunis au Palais de Justice à Bruxelles , en présence de M. de Dryver, substitut de M. le procureur-général près ladite Cour supérieure de justice , et assistés de M. C. D. A. Van Gelder greffier de la même Cour.

( Traduction littérale. )

La Cour prendséance,M. le présidentfait introduirel'accusé ; il estlibre, accompagnéseulement d'une garde , pour empêcher sa fuite , et de Mes van Meenen et Van de Weyer, ses avocats.

COUR D'ASSISES.

( 97 ) les actions de grâce queje vous offre du fond de monc ur. Ja maisje n'oublierai les marques que vous m'avez données d'une estime que, jesuis fierdeledire, j'ai toujours ambitionnée; d'une estime dont, je le dis sans hésiter, je n'ai pas cessé d'être digne. Elles me rendront, si un jour je suis assez heureux pour n'être pas un citoyeninutile, capable des plus grands sacrifices. Liberté et patrIE sont ma devise. Toujours fidèles à l'une et à l'autre, mes chers compatriotes, serrons-nous la main. Jamais défiance nepeut être semée entre les citoyens , jamais citoyens ne sont rebelles à la loi , quand c'est sur l'autel de la patrie et au nom de la liberté qu'ils ont juré de demeurer unis. DE POTTER.

M. le président déclare que la Cour se retire en chambre du conseil, pour voir ce qu'il y a à décider sur des demandes de la nature de celles faites parl'accusé et ses défenseurs.

( 98 )

Signé, DEDRYVER, subs.

M. le substitut de M. le procureur-général fait observer que lorsque les débats seront ouverts, et que la parole sera aux avo cats, ils pourront faire valoir alors tous moyens dedroit,par con séquent qu'on ne doit avoir aucun égard à la proposition faite par les défenseurs pour l'accusé, et il demande la continuation de l'affaire.

Ouïle ministère public dans ses conclusions, la Cour déclare l'accusé non recevable dans ses conclusions, ordonne qu'il sera immédiatement passé outre à l'examen de l'affaire.

L'accusé fait observer à la Cour qu'avant qu'il soitpassé ou tre , il a à proposerquelques questions , qui seront développées parses avocats et dont il communiquelui-même, au préalable;la substance à la Cour.

La Cour seretire en chambre de conseil, et étant rentrée dans la salle d'audience, elle prononce, par l'organedeM.le président, l'arrêtConsidérantsuivant.que les différentes demandes contenues dans les conclusions de l'accusé, tendentdirectement à faire méconnaître par la Cour, les lois existantes et les arrêtés, età leur ravir leur force réelle etobligatoire, ou bien, comme c'est le cas dans la der nière de ces demandes, àprovoquer un arrêt sur un point placé hors du domaine des attributions légales de la Cour, d'où il suit que les dites demandes ne sont nullement admissibles.

·Signé, J.J. DEKERSMAKER, L.J. ORTS,PUTSEYS,J.GREINDL, CAN NAERT, Ch.VAN GELDER, greffier.

MeVande Weyer donnelecture des conclusions ci-jointes,com mençant par ces mots : « Conclusions pour L. J. A. de Potter, accusé, » et finissant par ceux-ci : « Sans préjudice de tous les moyens des parties, signé de Potter, Van Meenen et Van de Weyer ».

Ces conclusions sont de lateneur suivante (Voy. p.3 et suiv.): Me Van Meenen voulant passér au développement des motifs desesconclusions, est interrompu parM. le président quiluidit que c'est assez de la simple lecture de ces conclusions.

M. le président fait subir un interrogatoire à l'accusé.

M. le président ordonneàl'huissier, quis'empresse de lefaire, d'ouvrirlesportesde la salle, et déclare l'audience publique.

( 99 )

Après la lecture de cet arrêt, Me Van Meenen demandant la parole, M. le substitut du procureur-général la demande aussi, etl'ayantobtenue,ildéclareque si,pendantles débats de lacause, les avocats de l'accusé reviennent encore sur des questions dela nature de celles que la Cour a rejetées comme inadmissibles, il requerracontreeux, en vertu des devoirs de son ministère , l'ap plication des art. 39 et 25 du décret du 14 décembre 1810, dont il donne lecture.

Laséance, quijusqu'ici a été tenueà huis-clos, a lieu mainte nant à portes ouvertes.

M. le président dit que si le ministère public avait formé un pareilréquisitoire avant le prononcé de l'arrêt dela Cour, celleci aurait fait droit sur ce point.

M. le substitut de M. le procureur-général est entendu dans ses moyensàl'appui de l'accusation, et après lecture il remetses conclusions.MeVanMeenen est entendu dans les moyens de défense de l'accusé.

M.le substitutde M. le procureur-généralse conforme, pour l'exposé du sujet de l'accusation, àl'acte qui en a été dressé.

M. le président prévientMes Van Meenen et Van de Weyer qu'ils ne peuvent rien dire qui soit contraire à leur conscience et aurespectdûaux lois, et qu'ils doivent s'exprimer avec décence et M.modération.leprésident exhorte l'accuséà êtreattentifà ce qu'il vaen tendre; ilfait donner lecture par le greffier de l'arrêt de la Cour supérieurede justice à Bruxelles, rendu le trois de ce mois; arrêt quirenvoyel'accusédevant cette Cour d'assises; legreffier donne aussi, par ordre du président, lecture de l'acte d'accusation. dressé parM. le procureur près la Cour supérieure de justice mentionnée.Lecturede ces deux pièces faite par le greffier, à haute voix, M. le président présente le contenu de l'acte d'accusation à l'ac cusé et luidit: Voilà de quoi vous êtes accusé, maintenant vous allez entendre cequi est allégué àvotre charge.

Le 20 décembre 1828, à neuf heures et demie du matin, les membres de la Cour, le ministère public et le greffier mention nés entête du précédent procès-verbal, étantrentrés dans la salle d'audience, etayant pris place, l'accusé etses défenseurss'y trou vantaussi, le présidentdéclare la séance reprise,et ouverte.

Par ordre de M. le président, le greffier donne lecture de la réponse de la Cour , à la question proposée par le ministère pu blic.

Adeuxheures et demie de l'après dîner, M. le présidentremet la séance à demain, 9 heures du matin.

De tout quoi, a été dressé le présent procès-verbal qui a été signéparM. le président et le greffier.

>

Signé, DE DRYVER, subs.

Signé, J.J. DE KERSMAKER, Ch. VAN GELDER.

1

I

M. le substitut du procureur-général fait son réquisitoire contre l'accusé ; il conclut à l'application des art. 1 de l'arrêté du 20 avril 1815 , 52 du Code pénal , 1 et 3 de la loi du6 mars 1818, et 368 du Code d'instruction criminelle.

( 100 )

La séancea lieuà portes ouvertes.

MeVan de Weyer développe les moyens de défense de l'ac cusé.M. lesubstitut du procureur-général est entendu dans sa ré plique.MesVanMeenen etVande Weyerreprennent alternativement la L'accuséparole. ayant demandé et obtenu la parole pourse défendre lui-même, le fait au moyend'un mémoire écrit dont il donne lecture. "

M. le président déclare les débats clos , et dit, que la Cour se retire en chambre de conseilpour délibérer sur la question proposée.LaCourétant rentrée dans la salle d'audience où se trouvait l'accusé, le président prévient le public que si l'on donnait en core des signes d'approbation ou d'improbation , il ferait exécu ter le dispositif de l'art. 504 ducode d'instruction criminelle; il donne lecture de cet article.

Ni l'accusé ni ses défenseurs ne font de remarques sur la question proposée ; l'accusé a le dernier la parole.

Signé,AUDOOR.

( 101 )

Me Van de Weyer donne lecture des conclusions ci-dessous, contenant, 1° quel'arrêté du 20 avril 1815n'est pas une loi etne saurait être appliqué comme telle ; 2º subsidiairement qu'il a été abrogé par l'introduction du régime légal et constitutionnel; 30 que dans les circonstances actuelles il n'est point obligatoire et ne saurait être exécuté ; 4º subsidiairement qu'il n'est point applicable à des publications par la voie des journaux ; 5º dans tous les cas, qu'il n'est point applicable aux écrits qui font l'ob jet de l'acte d'accusation.

L'accusé et ses défenseurs déclarent n'avoir plus rien à dire, sinon de persister dans leurs conclusions prises.

LaCourse retire en chambre du conseil pour délibérer.

Signé, DE DRYVER, subst.

Après ce prononcé, M. le président rappelle au condamné le contenu de l'arrêt , et le prévient que la loi lui accorde trois jours pour se pourvoir en cassation , s'il se croit fondé à le faire.M.

le président ordonne à la garde de ramener le condamné en prison , et déclare la séance levée. Il est six heures du soir. De tout quoi, a été dressé le présent procès-verbal qui a été signé par M. le président et le greffier.Signé, DE KERSMAKER, CH. VAN GELDER.

Me Van Meenen développe les moyens à l'appui de ces con clusions.M.lesubstitut du procureur-général déclare persister dans son réquisitoire.

Cesconclusions sont conçues ainsi qu'ilsuit(Voy. pag. 103) :

Rentréedans la salle d'audience , la Cour prononce, par l'or gane de M. le président qui , au préalable, donne lecture des art. I de l'arrêté du 20 avril 1815, 52 du code pénal , et 3 de la loi du 6 mars 1818 , 368 du code d'instruction criminelle ; son arrêt qui condamne L. J. A. de Potter à 18 mois d'em prisonnement, 1,000 florins d'amende , et aux frais du procès.

Pour copie conforme , Le greffieren chef de la Cour supérieure de justice séant à Bruxelles.

( 102 )

Ouï le réquisitoire dusubstitutsus-nommé , tendant à l'appli cation de la loi ;

Vu la réponse de la Cour sur la question ci-dessus mention née, faiteparle ministère public , dontle contenu suit : Oui , il est constant que l'accusé L. J. A. de Potter est cou pable d'avoircommis le fait avec toutes les circonstances com. prises dans la question »;'

Ouïl'accusé et ses défenseurs contre cette application , dans 1

ARRÊT DE LA COUR.

(Traductionlittérale. )

La Cour d'assises de laProvince du Brabant-Méridional, séant à Bruxelles , a rendu l'arrêt suivant : Vu l'arrêt de la Cour supérieure à Bruxelles , chambre des mises enaccusation, du 3 décembre 1828, par lequelL. J. A.de Potter ( suivent la profession , l'âge et le signalement) .. a été mis en état d'accusation , et renvoyédevant cette Cour ; Vul'acte d'accusation rédigé enconséquence parle Procureur général près ladite Cour , contenant à la fin ( suit la partie de l'acte d'accusation qui indique les articles incriminés..........) Desquelles pièces il a été donné lecture par le greffier ; Ouïle sieurde Dryver, substitut du procureur-général , pour et au nom de celui-ci , dans ses moyens pour soutenir l'accusationEntendu; et vu la question posée par lui , conçue comme il suitEst:-il constantque l'accusé, ici présent, L. J. A. de Potter est coupable d'avoir cherché à occasionner parmi les habitans du `royaume , ladéfiance , le trouble , les querelles ou la division , en écrivant et en faisant imprimer et publier dans le journal in titulé, le Courrierdes Pays-Bas , un article inséréle 8 novem bre, etc., etc. et un article inséré le 22 du même mois , etc. etc. Cesdeux articles signésd'un Oméga; " 2

Ouï l'accusé dans tous ses moyens de défense , tant parlui même que par ses avocats , Mes Van Meenen et Van de Weyer ;

* les conclusions par lui prises, et conçues ainsi qu'il suit (1) :

« Attendu, quant à la légalité originaire de cet acte et de son prétendu maintien par l'art. 2 additionnel de la loi fondamen tale , que les motifs employés par l'accusé contre l'arrêté du 6 novembre 1814 , reçoivent icileur pleine application et s'y ré férant;Attendu,

«Qu'ainsi laquestion de la légalité, de la nature et de l'appli cabilitéde cet acte , reste entière;

(1) Ce sont les conclusions aufond, prises et développées à l'audience du 20 , par Me Van Meenen. Elles auraient dû être placées à lapage 50, où parerreur, l'on renvoie àla page 3, c'est-à-dire, aux conclusionspréalables. Cette omission est ainsiheureusement réparée.

( 103 )

quant à lanature de l'acte,qu'il est né des circons tances du mois d'avril 1815 , savoir : 1°l'état d'occupation ou de conquête maintenu dans le pays ; 2º la guerre extérieure; 3º l'agitation qui régnait alors dans toute l'Europe et surtout ici , à proximité de la France ; circonstances dont , supposé même qu'ilait encore subsisté des traces en 1818 , la cessation est complète depuis nombre d'années ; « sesAttendu, quantà l'applicabilité de l'acte, que sa nature, motifs , ses dispositions ,son texte , le titre que lui a récem ment donnéS. M. elle-même , le limitent àdes crimes ou délits

« Attendu que laloi du 6mars 1818, comme il résulte de son titre, desesmotifs, de ses termes, des réponsesdugouvernement auxobservations des sections,et dudiscoursduministreàla séance du 18février 1818, n'a eu pour objet que la suppression de la juridiction et de la procédure extraordinaire, introduites par la loi du 10 et l'arrêtédu 20 avril 1815, et le retour au droit com mun en matière et pourles circonconstances analogues àla loi et l'arrêté; et nullement d'imprimer ni de reconnaître le caractère d'une loi ; ce qu'au surplus le gouvernement a reconnu et con firmé,en ne publiant pas plus cet acte danslepays d'outre-Meuse, depuis le6 mars 1818, qu'il ne l'avait fait auparavant;

" Qu'au surplus, enconfirmant cet acte , la loidu 6 mars 18181 l'eût laissétel qu'il était , c'est-à-dire , circonstanciel et transi toire ;

" Attendu, au surplus , que le ministèrepublic n'établit pas, n'essaie pasmêmed'établir queles écritsincriminéssont denature àproduireou aient produitdirectement etprincipalementles ef fets qu'ilimputeàl'accusé d'avoir cherché, etqu'ilprouve encore bien moins que ces effets aient été dans l'intention de l'accusé.

«Attenduquesicet acte pouvaitavoirété applicable à des écrits de cette nature, il eût été abrogé par l'art. 227 de la loifonda mentale, et serait d'ailleurs inconciliable avec l'exercice dudroit garanti à tout Belge d'examiner , de critiquer et de censurer le gouvernement, les lois, et tous actes del'autorité;

<<Attendu quetoute lavie, toute l'existence, touslesrapports de l'accusé repoussent lasupposition mêmed'une pareille inten tion, comme absurde;

« 30 Subsidiairement , qu'il n'a point d'existence obligatoire ni exécutoire dans les circonstances actuelles;

« 4º Subsidiairement, qu'il n'est pas applicable à des publi cations par la voie des journaux

« L. J. A. de Potter conclut àce qu'il plaise à la Cour déclarer pourdroit;«1ºQue l'arrêté du 20 avril 1815 n'est pas une loi, ni nepeut être appliquécommc telle ;

Attendu que les quatre premiers points des conclusions de l'accusé ont rapport à l'existence actuelle ou à l'inexistence de l'arrêté du 20 avril 1815, comme loi obligatoire, et que le cin quième point des mêmes conclusions touche également la question de savoir si les dispositions pénales dudit arrêté sont applicablesaux écrits qui font l'objet de l'accusation ;

«En conséquence , décharger l'accusé de toute poursuite ; demandant l'accusé expressément droit aux diverses conclu sions précédentes ».

«2° Subsidiairement , qu'il a été abrogé par l'établissement du régimeconstitutionnel et légal ;

( 104 ) quine peuvent ni se commettre , ni être provoqués par la voie des journaux.

<<5°Qu'en tout cas,ilest inapplicable aux écrits qui font l'objet de l'acte d'accusation ;

Attendu, en ce quiregarde le dernier point , qu'il a déjà été

*

( 105 ) prononcépar la Cour, à cet égard, surla réponsedonnée par elle à la questionposée par le ministère public ;

I Attendu queles mots Soit de troubler le bon ordre de toute autre manière, se présentent dans un sens indéterminé, et sans aucune distinction, dans ledit art. 1 de l'arrêté du 20 avril 1815, et sont par conséquent applicables aux délits qui auraient été commis, aussi bien par lemoyendela presse, et par conséquent desjournaux, que detoute autre manière, pour autant que ces délits renfermeraient les caractères déterminés par ledit arti clePar1.

14

ces motifs, La Courdéclaré qu'il a été fait droit aux cinq points descon clusions, parla réponse relative à la culpabilité de l'accusé ; et, en ce qui concerne les premier, deuxième , troisième et qua trième points desdites conclusions, déclare l'accusé non fondé. En conséquence, vu les art. 1 de l'arrêté du 20 avril 1815 52 du Code pénal , 1 et 3 de la loi du 6 mars 1818 , et 368 du Coded'instruction criminelle , dont il est donné lecture par M. le président, et qui sont ainsi conçus : ( Suivent les articles cités.)

En ce qui concerne les autres points , attendu que l'arrêté du20avril 1815, porté par S. M. le Roi, qui alors exerçait seul le pouvoir législatifcomme souverain, renferme tous les carac tères d'une loi; que cet arrêté, loin d'avoir été abrogé ipsofacto par la publication de la loi fondamentale , a, au contraire, été maintenupar l'art. 2 additionnel de cette loi ; que ledit arrêté, existant donc encore à l'époque de la publication de la loi du 6 mars 1818, a été maintenu par elle en termes exprès, par l'art. 1, etsurtout pour cette partie qui a rapport aux crimes ou aux délits mêmes, et aux peines y applicables , prévus par l'art. 1 de l'arrêté du 26 avril 1815, la loi de 1818 ayant eu pour but deremplir une lacune existant dans le Code pénal , relative ment à cesfaits, prévus par l'art. 1 du dit arrêté, et de n'abolir seulement que la juridictionextraord inaire de la Cour spéciale, ainsi qu'il conste ultérieurement des dispositions expresses de l'art. 2 de ladite loi du 6 mars 1818, et de l'ensemble des dis cours qui ont eu lieu , à l'occasion de la discussion de ladite loi, dans l'assemblée des Etats-Généraux ;

ib. ligne 28. Divers moyens en droit sur le fait; lisez divers moyens endroit, après l'arrêt sur lefait.

Présens MM. les conseillers :

C'est contre cet arrêt, rendu après trois heures de délibéra tions, que M. de Potter s'est pourvu en cassation.

Charge le procureur-général de l'exécution du présent ar rêt.Ainsi

DEKERSMAKER, président, ORTS, PUTSEYS, GREINDL ,Cannaert, conseillers DE DRYVER, substitut du procureur général , VAN GELDER, greffier, etc. , etc.

36. Sedii dominum, lisez : sed iidemum.

jugé et prononcé dans l'audience publique de la Cour d'assises, à Bruxelles, le 20 décembre 1828.

Fe--

+ ( 106 )

38. Aprèsjus suum, ajoutez :obtineri.

ib54.

ERRATA.

Page 29. A la findu 1eralinéa, après lesmots,soit cumulativement; ajou tez à deux heures et demie, l'audience est levée etremise aulendemain. :

La Cour, faisant droit, au nom de S. M. le Roi , condamne Louis-Joseph-Antoine dePotter, àla peine de dix-huit mois de prison , mille florins d'amende, et aux frais du procès, taxés à la somme de onze florins seize cents ; lesdites amendes et frais payables même par corps.

" wwwwww TABLE---

Deuxième article incriminé. Lettre aux rédacteurs du Courrier, sur les questions débattues entre les Belges et leur gouvernement.P. 103.. Ibid.4468804*888$48692949597102

PlaidoyerAudiencePiècesjustificatives.Acted'accusation.du20décembre.deMeVandeWeyer.RésumédeladéfenseparMeVan

1 (1)Voy. pour cesconclusions,

Premierarticle incriminé. Lettrede M. de Potter, par laquelle ils'en déclare l'auteur. Article nonincriminé, Lettre aux mêmes, sur lacritique des mots bafouons, honnissons. Lettrede remerciement de M. de Potter à ses concitoyens. Extrait des procès-verbaux d'audience. Arrêt de la Cour.

Meenen, etdéveloppement des con clusions surl'applicabilitédel'arrêtéd'avril 1815et laloide 1818(1). Discours de M.dePotter.

Audience du 19 décembre 1828. Conclusions surla langue. le mode de procédure. - l'objet du procès. Interrogatoire de M. de Potter. Plaidoyer du ministère public.4 de Me Van Meenen.

DES MATIÈRES.

Pages.I34.5

Ibid148729.

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STAPLEDEMCO-SETBINGrayPressbo

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