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Un habitat adapté et adaptable

UN HABITAT ADAPTABLE

Aborder l’habitat en se projetant sur l’évolution des modes de vie à long terme, c’est la mission que s’est donnée l’Association Habitat 4 Générations.

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Magaly Mavilia

«Nous vivons dans une société où les personnes voient leur espérance de vie augmenter et où il y a de moins en moins d’enfants, donc forcément de plus en plus de personnes âgées, relaie Laura Mechkat, architecte et membre de l’association AH4G (Association Habitat 4 Générations). Parallèlement, nos modes de vie ont beaucoup changé ces dernières décennies. Les familles se décomposent et se recomposent, tandis que la crise sanitaire nous a imposé de vivre et de travailler autrement.»

UN PROJET INTERDISCIPLINAIRE

Le projet de l’Association Habitat 4 Générations fait partie du programme de projets-modèles 2020-2024 lancé par l’Office fédéral du développement territorial ARE de la Confédération et bénéficie du soutien de trois départements de l’État de Genève. En collaboration avec le Forum Grosselin, des ateliers participatifs ont été lancés sur le terrain d’expérimentation du périmètre du PAV Grosselin (Plan localisé de quartier Praille-Acacias-Vernets) sur la commune de Carouge dans le canton de Genève. À travers la participation, le forum éponyme, créé en 2017, se veut une force de proposition pour la création d’un quartier durable. Les premiers ateliers, dont la restitution a eu lieu le 2 avril, dessinent des chemins possibles. «Ce chantier participatif nous a vraiment révélé quelque chose d’important, se réjouit José Antonio Garcia Carrera, membre du comité du Forum Grosselin. Pour les participants, le logement ce n’est plus «une action par pièce» mais un besoin certain de partager les espaces. Le besoin d’intimité reste très présent. Et on ne peut pas demander à chaque logement de répondre à toutes les nécessités. C’est pourquoi, l’habitat n’est plus seulement un ensemble de pièces, mais s’étend à l’immeuble et à l’extérieur.»

L’habitat en mode participatif: des idées aux grands projets. José Antonio Garcia Carrera, membre du comité du Forum Grosselin et Laura Mechkat, architecte et membre de l’association AH4G.

UNE MAQUETTE GRANDEUR NATURE

La suite du projet sera de matérialiser ces propositions à travers la réalisation d’une maquette d’appartement à l’échelle 1/1 dans un mode à la fois participatif et évolutif. Le but de cette maquette est de permettre aux gens d’expérimenter un habitat résilient et adaptable, à même de répondre au plus grand nombre de besoins car, comme l’ont rappelé les participants aux ateliers, il n’y a pas des personnes «avec un handicap» mais des situations handicapantes (seuils difficiles à franchir, espaces encombrés, difficulté à taper un code avec un déambulateur, etc.).

«Lors du chantier participatif, il a aussi beaucoup été question du lien entre l’intérieur et l’extérieur, entre le logement, l’immeuble et le quartier, précise Laura Mechkat. Certaines personnes se sont dites prêtes à vivre avec moins de surface pour des raisons écologiques mais à condition de pouvoir occuper différemment l’espace public. Cette maquette devra trouver sa place dans un lieu public pour expérimenter cela et offrir la possibilité à tout le monde de prendre conscience des enjeux et d’enrichir la réflexion.»

MUTUALISER LES ESPACES

Pour l’association, il est impératif de penser les projets dès le plan localisé de quartier.

Face à la raréfaction du foncier, le manque annoncé d’énergie et la nécessité de réduire notre consommation, mais aussi pour répondre à un besoin grandissant de solidarité et d’entraide, la mutualisation d’espaces à usages multiples est une piste à explorer. Par exemple, une chambre disponible dans l’immeuble pour y accueillir des amis, de la famille, un aide-soignant ou des enfants qui viennent un week-end sur deux est une proposition qui fait sens.

Le logement de demain devra donc être conçu de façon à offrir une plus-value d’usage pour tous à moindre coût, dans une perspective intergénérationnelle et de vivre-ensemble. Ces mêmes dispositions devront s’étendre aux espaces communs de l’immeuble et à l’aménagement de son périmètre, jusqu’à gagner les espaces communs du quartier.

«Notre travail au sein de l’association AH4G est aussi d’identifier les obstacles légaux qui nous empêchent de composer un autre type de logements, expose Laura Mechkat. À Genève, rien que le fait que le logement soit compté en nombre de pièces, et non en m2, ferme déjà certaines possibilités d’expérimentation.»

José Antonio Garcia Carrera a cité Mme Hiltpold, maire de la Ville de Carouge, qui s’est exprimée lors de la séance de restitution: «La ville de demain c’est peut-être la ville d’hier, ce genre de lieu que l’on retrouve dans le vieux Carouge, avec des places et des cours intérieures qui permettent de compenser des appartements petits.»

L’idée pourrait déboucher sur une plus grande responsabilité donnée non plus seulement aux communes mais aux quartiers. «Si l’entité du quartier pouvait avoir un certain pouvoir de décision, cela pourrait faciliter l’organisation et l’appropriation par les habitants et déboucher sur une plus large occupation de l’espace public», suggère l’architecte.