L'art de l'aquarelle n°11

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LE MAGAZINE

N ° 11

D’ART DES AQUARELLISTES ALEXANDER CRESWELL LE DÉFI DE L’AQUARELLE GRAND FORMAT

EXTRAIT

TREVOR CHAMBERLAIN 60 ANNÉES DE PEINTURE AUTOUR DU MONDE

20 PAGES TECHNIQUES MARYSE DE MAY Sa méthode pour des portraits en fusion

KEIKO YASUOKA Natures mortes en lumières et matières

LEÇON D’AQUARELLE L’équilibre des couleurs

BEAUTÉ RURALE

BRADLEY HENDERSHOT, L’OBSESSION DU DÉTAIL

JOËLLE THIRION MICHEL BERTRAND ROBERT O’BRIEN JULIAN FALAT LINDA BAKER RICHARD HANSON EMMANUEL LANSYER

DÉCRYPTAGE : DE L’IDÉE AU TABLEAU FINAL, COMMENT BIEN TRAITER SON SUJET

L 19046 - 11 - F: 7,50 € - RD

Et aussi… TRIMESTRIEL - DÉC. 2011/FÉV. 2012 - 7,50 €

l’Art de l’Aquarelle N° 11 BEL : 9 € - CH : 13,50 FS - LUX : 9 €- CAN : 13,50 $ CAN - ESP : 9 € - ITA : 9 €- GR : 9 €- PORT. CONT. : 9 €- TUN : 8,900 DTU - MAR : 62 DH - SPM : 9 €- MAY : 9,50 € - DOM : 7,50 € - TOM : 1 250 CFP - CFA surface : 5 100 CFA - CFA avion : 5 700 CFA

l’Aquarelle L’ A R T D E


Sommaire 6

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6 ACTUALITÉS

34 ROBERT O’BRIEN

Toute l’actualité française et internationale de vos artistes préférés.

13 ACTUALITÉS ENCHÈRES

40 ILLUSTRE INCONNU JULIAN FALAT

14 ON Y ÉTAIT : BELÂBRE Retour sur les 10e Rencontres du Val d’Anglin.

16 COURRIER DES LECTEURS 18 RÉVÉLATIONS Joëlle Thirion (Belgique), Lois Wolford (États-Unis) et Michel Bertrand (France).

20 BRADLEY HENDERSHOT Le peintre de la ruralité américaine.

26 GRAND ENTRETIEN : TREVOR CHAMBERLAIN Chantre de l’aquarelle anglaise, il est connu pour ses paysages capturés aux quatre coins du monde.

l’Aquarelle L’ A R T D E

Édité par DIVERTI Éditions - S.A.R.L. au capital de 15 000 € - 490 317 369 RCS Poitiers - 13, avenue du Cerisier Noir BP 22 – 86530 Naintré, France Gérant : Jean-Paul Cyr

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Sa passion : rendre la texture de véhicules abandonnés qu’il traque en pleine campagne.

Imprimé en France/Printed in France 13, avenue du Cerisier Noir - BP 22 86530 Naintré. Tél. : 05 49 90 37 64. E-mail : redaction@lartdelaquarelle.com Directrice de publication : Édith Cyr RÉDACTION Directeur de la rédaction : J.-Philippe Moine Rédacteur en chef adjoint : L. Benoist Secrétaire générale de la rédaction : É. Blain.

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L’un des plus grands aquarellistes polonais navigua entre réalisme et impressionnisme.

44 LINDA BAKER Ses séries sur les pinces à linge ou les buildings newyorkais explorent toute une gamme de jeux graphiques.

50 PORTFOLIO ALEXANDER CRESWELL Lumière et architecture sur des formats monumentaux.

60 RICHARD HANSON Un style photoréaliste au service d’une vision noire de la réalité sociale aux États-Unis aujourd’hui.

Secrétaire de rédaction : M.-P. Lévêque Directrice artistique : Janine Gallizia Première rédactrice grahiste : Audrey Salé. Rédacteurs graphistes : Nadine Tillet, Hervé Magnin. Scannériste : Franck Sellier Ont collaboré à ce numéro : A. Laguna-Chevillotte, T. Pelletier. Photographes : V. Merle, S. Portal.

PUBLICITÉ - Tél. : 05 49 90 09 19 E-mail : publicite@lartdelaquarelle.com DIFFUSION : Fredérik Favier, 05 49 90 09 19. Messagerie : MLP ADMINISTRATION : Fabien Richard Principaux actionnaires : Megastar Groupe et CAP DÉVELOPPEMENT Imprimerie : ROTOMEGA, 86530 Naintré


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66 LIBRAIRIE

90 CHEF-D’ŒUVRE AU MUSÉE EMMANUEL LANSYER

68 KEIKO YASUOKA Dans ses natures mortes se déploient une précision et une minutie qui subliment le travail des lumières et des valeurs.

Situés à Loches, en Touraine, l’ancienne maison de ce peintre du XIXe siècle est devenue musée en 1902 et accueille œuvres et matériel d’artiste.

94 SHOPPING NOËL 78 SAVOIR-FAIRE MARYSE DE MAY

96 AGENDA MONDE

Un portrait lumineux en 6 gestes essentiels.

82 ABONNEMENTS 84 DÉCRYPTAGE JANINE GALLIZIA Le traitement du sujet est souvent un point sur lequel achoppent les peintres. Voici comment vous en sortir.

98 L’AQUARELLE EN IMAGES

88 LEÇON D’AQUARELLE Comment équilibrer ses couleurs.

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Commission paritaire : 0912 K 90149. ISSN : 2103-2653. Dépôt légal à la date de parution. Trimestriel – N° 11 – Décembre 2011Février 2012. Abonnement France (12 nos) : 75 euros. Ce numéro comporte deux encarts brochés p. 66 et p. 82.

L’Art de l’aquarelle is published quarterly, 4 times a year (March, June, September, December) by Diverti Éditions c/o USACAN Media Dist. Srv. Corp at 26 Power Dam Way Suite S1-S3, Plattsburgh, NY 12901. Pending Periodicals Postage paid at Plattsburgh, NY. POSTMASTER: send address changes to L’Art de l’aquarelle c/o Express Mag, P.O box 2769, Plattsburgh, NY 12901-0239.

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AVEC…

RENCONTRE

Bradley

La présence

Light in the Woodshed. 52 x 45,7 cm.

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Hendershot

du passé

BRADLEY HENDERSHOT DÉPEINT AVEC UN BRIN DE NOSTALGIE UNE RURALITÉ QUI SE FAIT RARE DANS L’AMÉRIQUE D’AUJOURD’HUI. RENCONTRE AVEC UN ARTISTE PAS SI TRADITIONNEL QU’IL N’Y PARAÎT…

Morning Prayers. 118,1 x 78,7 cm.

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D E L’ A Q U A R E L L E

HISTOIRE

Julian Falat

Un parcours vers l’impressionnisme ACCLAMÉ DE SON VIVANT COMME LE PLUS GRAND AQUARELLISTE POLONAIS, JULIAN FALAT TÉMOIGNA DANS SA PEINTURE DE L’ÉPOQUE CHARNIÈRE ENTRE LE RÉALISME ET L’IMPRESSIONNISME. FORMÉ AU NATURALISME MUNICHOIS, IL SUIVIT L’AIR DU TEMPS DE LA PEINTURE MODERNE AFIN D’EXPRIMER SON ATTACHEMENT À LA NATURE DU SUD DE LA POLOGNE.

Vergers en fleurs à Bystra. 1915. Aquarelle sur papier, 95 x 134 cm. Musée de Bielsko-Biala – Villa Julian Falat à Bystra. À partir de 1910, Julian Falat revient à la campagne. La région montagneuse qui entoure le village de Bystra devient alors l’inspiration première de ses investigations picturales. Ainsi, cette image traite le retour du printemps sur les coteaux environnants. L’aquarelle est tout à la joie d’une première lumière éveillant les coloris frais et changeants. Librement, généreusement, le peintre fait fusionner de larges taches chromatiques à la faveur de la fluidité du médium.

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DATES CLÉS

Autoportrait au bureau. 1873. Aquarelle sur papier, 28 x 23 cm.

1853 Naissance à Tuliglowy, près de Lviv, dans une famille paysanne. 1869-1871 Études à l’École des beaux-arts de Cracovie. 1873-1880 Études successives à Zurich et Munich (Polytechnique) puis à l’Académie des beaux-arts de Munich. 1881-1886 Nombreux voyages en Italie, Espagne, en Extrême-Orient, Ukraine et Lituanie. 1886-1895 Cycle d’aquarelles illustrant les chasses du prince Radziwill valant à Falat le titre de « peintre à la cour de l’empereur Guillaume II à Berlin ». Ses aquarelles sont primées à maintes reprises en Europe et aux États-Unis. 1895-1910 Directeur de l’école des Beaux-Arts de Cracovie. En 1897, il participe à la fondation de la Société des artistes polonais « Art ». 1910 Installation à Bystra, dans le sud du pays. 1914-1918 Falat est agréé « peintre de l’armée ». 1922-1923 Nommé directeur du département de l’art auprès du Ministère de la Culture. 1929 Il meurt à Bystra.

Musée de Bielsko-Biala – Villa Julian Falat à Bystra

Œuvre de jeunesse, cet autoportrait préfigure la future liberté et l’habileté du peintre dans son approche de l’aquarelle. Elle annonce aussi une importante activité de portraitiste qui ponctua toute la carrière de Falat. Il laissa plusieurs autoportraits, portraits de ses proches et aussi de paysans, ses voisins à Bystra. Il a aussi été engagé en tant que portraitiste de l’armée polonaise lors de la Première Guerre mondiale. Falat porte sur ses modèles un regard incisif mais bienveillant, traduit à l’aquarelle par un jeu subtil de nuances fondantes qui concerne particulièrement le visage, traitant souvent la silhouette et le second plan avec des taches de couleur libres et désinvoltes.

L

« Le paysage changeant selon les saisons […] formait ma sensibilité et mon amour de la nature […]. Si je me remémorais les souvenirs de ma plus tendre enfance, revenaient les images qu’aujourd’hui seulement je peux véritablement appréhender. J’étais déjà appelé à être peintre de la nature […] mais je ne pouvais pas le savoir, ni moi ni mes parents. » C’est en ces termes que Julian Falat se rappelle son enfance paysanne, où rien n’aurait put présager de son avenir artistique. Pourtant, seul l’attrait de cette nature des confins orientaux polonais, avec ses forêts profondes, ses étangs et ses prés humides, avec la neige à perte de vue, a suffit à forger son destin de peintre. Né au milieu du XIXe siècle dans une famille paysanne, Falat a la chance d’être aidé par un de ses frères qui le place au collège de Przemysl, dans le sud-est de la Pologne. C’est là que s’éveille son talent de dessinateur. Son professeur de dessin l’oriente en 1869 vers l’École des beaux-arts de Cracovie. Falat choisit d’abord l’aquarelle par défaut, les couleurs à l’huile étant pour lui tout simplement trop chères. L’école cracovienne, à l’enseignement alors relativement limité, formait de futurs professeurs de dessin et préparait à des études académiques à Vienne, Munich ou Paris. Diplômé en 1872, Julian doit pourtant travailler avant de parfaire sa formation de peintre. Il est employé en tant que dessinateur au service d’un archéologue puis d’un architecte, et enfin auprès des chemins de fer suisses. Ses expériences lui permettent de peindre à l’aquarelle et d’affirmer son attirance

pour le paysage et la scène du genre. L’entrée à l’Académie des beaux-arts de Munich, en 1877, ouvre au jeune peintre de nouveaux horizons. Munich est alors le deuxième centre de vie artistique en Europe après Paris et attire de nombreux étudiants étrangers.

P EINTRE DES PETITES GENS ET DE LA NATURE L’Académie et les artistes qui gravitent autour, connus sous le nom d’école de Munich, connaissent alors l’âge d’or d’une peinture marqué par le naturalisme mis au service de l’histoire, du paysage, du portrait, des thèmes de genre et de la nature morte, exemplifié dans l’œuvre de Karl von Piloty, son directeur. Julian s’imprègne de l’art munichois mais, autant pour la technique que pour ses thèmes favoris, il fait montre d’une personnalité bien définie. Même s’il pratique l’huile et y excelle, l’aquarelle reste le médium dans lequel il avoue se sentir véritablement à l’aise. De même, il n’est pas attiré par la spécialité munichoise, les grandes compositions historiques. Fidèle à la sensibilité de ses origines, il se laisse porter par l’univers des petites gens et la nature. Il finit son cursus en 1880, récompensé par une médaille d’argent en dessin de nature. Il prolonge l’apprentissage par une année à Rome. Ses compositions perdent alors toute rigidité académique et, sous l’influence des postulats de l’impressionnisme, Falat s’ouvre à la lumière. Des aquarelles telles que Mercredi des

Même s’il pratique l’huile et y excelle, l’aquarelle reste le médium dans lequel il se sent le plus à l’aise.

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Engine 402. 76 x 58 cm.


End of the line. 38,1 x 55,9 cm.

Robert O’Brien

Lumières et textures ON DIT QUE LA BEAUTÉ EST DANS LES YEUX DE CELUI QUI REGARDE. POUR ROBERT O’BRIEN, ELLE SE NICHE SOUVENT DANS LES DÉTAILS DE LA CAMPAGNE DE LA NOUVELLEANGLETERRE, QU’IL MAGNIFIE DANS DES VUES RAPPROCHÉES. A QUARELLE N°11 / D ÉCEMBRE 2011-F ÉVRIER 2012

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SAVOIR-FAIRE

Maryse De May

UN PORTRAIT LUMINEUX

EN SIX GESTES

ESSENTIELS

ON NE PRÉSENTE PLUS MARYSE DE MAY DONT LES ŒUVRES S’ÉPANOUISSENT SUR LES CIMAISES DES GRANDES EXPOSITIONS D’AQUARELLE EN FRANCE. ELLE NOUS LIVRE ICI SES ASTUCES POUR LA MISE EN COULEURS – ET EN LUMIÈRE ! – D’UN PORTRAIT. LE

SUJET

Tout portrait, outre la ressemblance physique qui est affaire de technique, est avant tout un portrait du caractère du modèle : cette psychologie s’acquiert par l’observation directe ou indirecte, c’est-à-dire par le biais de la photo. Je travaille surtout d’après des clichés que je prends moi-même, ce qui me permet d’obtenir les lumières latérales fortes dont j’aime parer mes modèles.

Il est essentiel d’adopter l’outil au geste – avec les bonnes couleurs au bon moment. Autrement dit, son outil, associé au bon geste, doit être choisi en fonction de ce que l’on veut exprimer sur la feuille.

LE

DESSIN

Le dessin est reporté sur la feuille de papier aquarelle. Pour ce travail d’après photo, les cotes ont été prises à l’aide d’un double décimètre. Ma méthode pour atteindre la ressemblance consiste ainsi à envisager le visage du modèle non pas sous la forme de courbes, mais à en dessiner la structure sous-jacente à partir de lignes droites ou quasiment droites.

MA

PALETTE

Jaune transparent Jaune indien Ocre d’or (que j’utilise en lieu et place de la terre de Sienne) Rose permanent Terre de Sienne brûlée Violet dioxazine Turquoise de phtalo Bleu de manganèse.

Baignée de lumière. 37 x 27 cm.

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G ESTES

CLÉS POUR BIEN RÉUSSIR UN ŒIL Je cerne d’abord l’œil d’orange afin de marquer le volume. La pupille est posée dans l’humide pour qu’elle fuse avec l’iris. La photo me sert de repère : j’ai effectué un agrandissement des yeux. Je donne de la profondeur à l’œil en dessinant d’un trait fin au bleu de manganèse l’ombre portée de la paupière.

1

Je retourne la feuille pour ne pas être influencée par la logique du dessin et raisonner en terme de lumières. Je ne mouille que les parties dans l’ombre : celles en pleine lumière préserveront la blancheur du papier. Afin d’éviter les tensions superficielles et les « cuvettes », j’absorbe l’eau superflue. Il faut savoir parfaitement doser l’humidité de son pinceau.

2

J’entame la mise en couleur du visage avec un lavis à base de terre de Sienne et de rose permanent. Les couleurs sont mélangées aussi bien sur ma palette que sur la feuille. Pour le relief, j’effectue des hachures rouges sur les lèvres et des retraits sur l’arcade sourcilière et l’aile du nez.

A STUCE

3

Je pose les couleurs du premier œil ; le second restant dans l’ombre, il sera suggéré par un contraste de zones sombres et claires (en levant les blancs). Une fois l’œil peint, je m’attaque au nez, puis reviens sur le regard : la ressemblance passe par là.

4

Je donne plus de corps aux lèvres en superposant des lavis de plus en plus foncés. Pour la chevelure, je mouille la partie concernée avant de passer un lavis ocre d’or. À ce stade, je m’inspire plus des croquis préalables que de la photo de référence.

Je travaille parfois avec la feuille à l’envers, afin de donner aux dégradés de couleurs l’orientation que je souhaite ; cela permet aussi, dans une certaine mesure, de ne pas se laisser influencer par le sujet, de manière à se concentrer uniquement sur la peinture proprement dite.

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AU MUSÉE

CHEF-D’ŒUVRE

Visite du musée Lansyer LOCHES, VILLE DU SUD DE LA TOURAINE, EST CONNUE POUR AVOIR ACCUEILLI AGNÈS SOREL, FAVORITE DU ROI CHARLES VII. ELLE ABRITE AUSSI LE MUSÉE DÉDIÉ AU PEINTRE EMMANUEL LANSYER, QUI PRATIQUAIT L’AQUARELLE AVEC UN TALENT CERTAIN. UN LIEU ÉMOUVANT À DÉCOUVRIR SANS TARDER…

E

Emmanuel Lansyer (1835-1893) fut un peintre considérable. Dans le sens premier du mot, c’est-à-dire tout a fait digne de considération. Chevalier de la Légion d’honneur, récipiendaire de trois médailles du Salon avant d’en devenir membre du jury, Emmanuel Lansyer commit la faute d’avoir été l’exact contemporain des impressionnistes. Bien qu’il les connut sans doute, à défaut de les avoir côtoyés, sa peinture était néanmoins tout autre : de son passage dans l’atelier d’Eugène Violletle-Duc, il garda le goût du dessin, et de celui – de courte durée – dans l’atelier de Courbet, il trouva dans la nature son sujet de toute une vie. C’est au Salon des Refusés de 1863 qu’il fit une entrée remarquée ; on parlerait aujourd’hui de Salon « off » pour désigner cette manifestation destinée à accueillir les artistes non admis au Salon officiel. C’est en tout cas sous le même chapiteau que le Déjeuner sur l’herbe que Lansyer montra un paysage qui, à défaut d’être aussi iconoclaste que celui de Manet, n’en demeurait pas moins d’une honnête et belle facture.

U N MUSÉE AU CŒUR D ’ UNE VILLE ROYALE La carrière d’Emmanuel Lansyer est marquée par de nombreux déplacements en France et aussi, à la fin de sa vie, en Italie ; chaque été durant près de trente ans, il

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planta son chevalet sur les hauteurs surplombant la baie de Douarnenez – et, bien avant Gauguin, il peignit Pont-Aven. En dépit de toutes ses pérégrinations, Paris et Loches, dans l’Indre-et-Loire, restèrent ses deux ports d’attache ; aujourd’hui, sa maison lochoise est devenue un musée, petit mais émouvant. On y accède par les ruelles qui serpentent depuis le centre-ville jusqu’à la citadelle et le logis royal (qui abrita, en son temps, Agnès Sorel, favorite


La Mer à Tréboul. 1884. Aquarelle sur papier, 29,5 x 41 cm.

de Charles VII), avant d’emprunter la judicieusement nommée rue Lansyer. Le bâtiment lui-même est confortable, sans être ostensiblement cossu : c’est une demeure en pierre de tuffeau, pierre calcaire blanche typique de l’architecture ligérienne, avec un toit en double pente coiffant des fenêtres à meneau. Du jardin en terrasse qui jouxte la bâtisse, la vue sur l’ensemble de la ville est dégagée – la même, sans doute, à peu de choses et à quelques enseignes publicitaires près, que celle qui devait s’offrir au peintre il y a plus d’un siècle. Dans le jardin, qui fut reconstitué d’après une aquarelle d’Emmanuel Lansyer, l’on trouve notamment un sophora qui remplace celui qui occupait à l’origine le terrain du vivant du peintre. Du jardin, enfin, on distingue le clocher de la collégiale Saint-Ours qui abrite le tombeau en marbre d’Agnès Sorel.

QUELQUES DATES CLÉS 1835 Naissance d’Emmanuel Lansyer en Vendée. 1857 Il entre dans l’atelier d’Eugène Viollet-le-Duc. 1861 Il s’inscrit aux cours de Gustave Courbet avant

de suivre ceux d’Henri Harpignies. 1863 Il expose au Salon des Refusés. 1865 Il reçoit une médaille d’honneur au Salon pour

Matinée de septembre à Douarnenez et les Bords de l’Ellée au Faouêt. 1869 Il reçoit une médaille d’honneur au Salon pour le Château de Pierrefonds. 1873 Il obtient une médaille du Salon pour deux marines. 1881 Il est élu à la commission du Salon. 1893 Emmanuel Lansyer décède à Paris et lègue à la ville de Loches sa maison ainsi que sa collection.

L ANSYER ,

DU JARDIN EN TERRASSE, LA VUE SUR LA VILLE EST DÉGAGÉE. LA MÊME, À PEU DE CHOSES PRÈS, QUE CELLE QUI A DÛ S’OFFRIR AU PEINTRE…

UN PEINTRE DE PAYSAGE Emmanuel Lansyer est né en Vendée. Sa mère habitait en revanche à Loches et, après sa disparition, les visites régulières du peintre laisseront la place à une installation à demeure. À son décès, en 1895, Emmanuel Lansyer jouit d’une renommée artistique certaine, et il lègue le contenu de son atelier et l’ensemble de ses collections à la ville dans le but de constituer un musée. Ce dernier occupe les deux étages de la maison et a gardé une atmosphère particulière… vivante, presque. « Comme si le peintre était sorti faire un tour au jardin avant de revenir se mettre au travail » plaisante Pascal Dubrisay, adjoint au maire en charge de la Culture. Le fait est que

Portrait de Lansyer. 1875. Photographie.

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