Portrait de Bernard Attinger

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JEUDI 20 MARS 2014 LE NOUVELLISTE

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INTERVIEW

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«LA CATASTROPHE POUR LE CANTON SERAIT QUE LA VIGNE PERDE DE LA VALEUR. ON BETONNERAIT LE COTEAU.»

«On aime trop être des Calimeros» Bernard Attinger, ex-architecte cantonal et bouillonnant président d’Altitude 1400, quitte la scène. Un retrait formel puisque, sur le fond, l’homme garde encore un œil acéré sur la gestion du territoire du canton.

PAYSAGE BIO EXPRESS Naissance Bernard Attinger est né à Sion le 2 novembre 1942. Architecte Après sa scolarité obligatoire, il réalise un apprentissage de dessinateurarchitecte à Sion puis obtient le diplôme d’architecture à l’Ecole technique supérieure de Bienne en 1968. Durant les trois années qui suivent, il fréquente parallèlement des cours à l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts et à l’Université de Paris où il obtient un diplôme et un titre en urbanisme. De retour en Valais, il est nommé architecte cantonal en 1979. Fonction qu’il occupera jusqu’à sa retraite, en 2007. Sa plus grande réussite? «Aussi la plus difficile, l’ouverture de la rose de Valère.» Polémiste et politique Connu pour des prises de position franches et un franc-parler explosif, Bernard Attinger se lance, dès sa retraite, comme candidat au Conseil national dans les rangs du Parti chrétien-social en 2007. Il deviendra le porte-parole du PCS puis membre, encore aujourd’hui, du comité directeur. Altitude 1400 En 2009, il devient président de l’association Altitude 1400, fondée en 2007. Il y défend une urbanisation maîtrisée des Alpes valorisant des espaces naturels au service d’un tourisme durable. Depuis maintenant moins d’un mois, il a quitté ses fonctions mais reste encore actif dans bien des associations. JW

Un teigneux. Un vieux singe impertinent. Bernard Attinger et ses répliques qui fusent lui ont valu bien des sobriquets. Architecte cantonal durant vingthuit ans puis président de l’association Altitude 1400, il quitte les feux de la rampe mais ne range pas les armes. A 74 ans, il promet de continuer à veiller jusqu’à la fin de ses jours aux questions de l’urbanisme qui bousculent notre canton. Dans sa maison sédunoise, entre une pile de dossiers et de coupures de presse, cet observateur critique évoque son regard sans concession sur ce Valais secoué qui doit se prendre en main. Deux fois en deux ans, le Valais a subi la loi du peuple suisse sur la gestion de son territoire. Selon vous, le canton a-t-il compris ce message? Heureusement qu’on n’a que deux joues sinon on prendrait une troisième gifle. On aime trop être des Calimeros, il faut qu’un agresseur nous attaque pour qu’on se lève. On doit admettre que le tourisme d’hiver a atteint son apogée. On ne pourra plus croître sans cesse. Il est temps de l’accepter. Vous vous étiez opposé à l’initiative Weber. Aujourd’hui, on vous sent plus partagé. Un jour, on fera une statue à Weber. Les générations futures en seront conscientes. J’ai toujours dit qu’il avait mis le doigt sur un réel problème mais que ce n’était pas la solution. On a arrêté le cancer mais on a libéré les métastases. Que voulez-vous dire? Cette loi, comme celles qui interdisaient la vente aux étrangers, n’est qu’une barrière qui engendre des dérives catastrophiques. Au lieu de continuer à densifier des stations déjà largement pourvues en résidences secondaires, on va construire partout ailleurs. Est-ce que les gens se rendent comptent qu’ils vont massa-

crer le paysage? La situation est tellement exacerbée que si l’on évoque un avis contraire, on est un salaud et un traître. La loi d’application permettrait de rénover le bâti existant. C’est la solution ou c’est déjà trop tard? Il faut préserver ce qui existe et pouvoir le rénover avec des règles qui ne soient pas trop rigides. En revanche, on ne doit pas détruire des vieux hôtels pour en faire des résidences secondaires. Des dérives plus graves attendent la plaine du Rhône, il faut densifier et construire des habitats groupés. Tant mieux s’il y a moins de pelouse à tondre le dimanche. La pire catastrophe serait que les vignes perdent drastiquement de leur valeur.

OSKAR FREYSINGER «J’ai écrit la préface d’un de ses livres. Il ferait parfois mieux de tourner la langue dans sa bouche avant de parler.»

Regardez avec la 3e correction du Rhône et le prix que vous pouvez tirer d’une zone agricole ou d’une zone à bâtir. On hurle contre la zone agricole qu’il faudra sacrifier mais par contre, on oublie de parler de la surface qui disparaît chaque année sous le béton. Surprenant, non? JULIEN WICKY

Pourquoi? Parce qu’on se mettrait à bétonner le coteau de la plaine du Rhône à tout va. On a oublié d’où on vient. Il manque une réflexion globale. On a laissé trop d’autonomie. On troue le territoire aux abords des pistes et le long des bisses, sans réflexion. C’est pas croyable! La semaine dernière, le Parlement s’est montré très réfractaire à l’idée de laisser des compétences d’aménagement du territoire à l’Etat.

SON REGARD SUR...

FRANZ WEBER «Il a fait du très bon travail à certains endroits. Il lui manque cependant la manière pour être apprécié.»

Il faudra des consensus mais c’est avant tout un problème de fric!

Bernard Attinger assure avoir encore bien assez à faire avant de profiter de la retraite. MAMIN/A

IL AIME...

VLADIMIR POUTINE «C’est une très grande crapule mais c’est en même temps un grand homme qui a réussi à relever la Russie.»

Retaper son chalet

Faire du snowboard

Il aimerait avoir le temps de finir de retaper son chalet familial aux Mayens-deSion.

Bernard Attinger est un féru de snowboard. Il tente d’en pratiquer deux semaines complètes par hiver.

Une page blanche sur son agenda La retraite, ce n’est pas de tout repos chez lui. Mais veut-il vraiment une pause?


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